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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
REMOUS
Tarification « progressive » de l’eau : le gouvernement dans l’impasse
par Marc Laimé, 5 septembre 2012

Le Conseil des ministres examine le mercredi 5 septembre une proposition de loi émanant du groupe socialiste de l’Assemblée nationale visant à instaurer, conformément à une inconséquente promesse du candidat François Hollande, une « tarification progressive » de l’électricité, du gaz et de l’eau, visant à lutter contre la précarité énergétique qui affecte plus de 8 millions de Français. Contrairement aux premiers effets d’annonce et couacs de communication qui ne vont pas manquer de se multiplier sur cette question sensible, le gouvernement ne parviendra pas à instaurer une « tarification progressive » de l’eau, qui serait inconstitutionnelle, inéquitable, et donc contraire aux objectifs ouvertement affichés. Les travaux conduits en 2010-2011 par un groupe de travail du laboratoire des idées du PS sur la tarification de l’eau l’avaient établi sans équivoque aucune.

Les députés et le gouvernement semblent enfin prendre conscience de l’impasse dans laquelle ils s’apprêtaient à s’engouffrer, à la veille de l’examen en conseil des Ministres du projet de loi élaboré par le groupe socialiste de l’Assemblée nationale, présenté par le député (PS) de l’Isère, François Brottes, puisque la question de l’instauration d’un « tarif progressif de l’eau » n’apparaît plus « qu’en filigrane » dans le projet de loi,
selon la ministre de l’Ecologie, et que l’on renvoie déjà à l’an prochain, (autrement dires aux calendes),
la généralisation d’une « tarification progressive de l’eau », par "approfondissement du cadre réglementaire", démarche qui se heurte tout à la fois :

 au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales. Ce sont les collectivités qui fixent le tarif de l’eau, qu’elles soient en gestion publique et privée, puisqu’elles exercent les compétences de distribution d’eau potable. Toute tentative d’encadrement autoritaire provoquera donc immédiatement, par voie de QPC, la saisine du Conseil constitutionnel qui censurera cette pratique ;

 à l’existence de plusieurs dispositions réglementaires et législatives qui visent déjà à lutter contre la précarité et prévoient donc différentes modalités d’intervention des collectivités locales, précisées notamment par la loi « Cambon » qui a conforté un dispositif curatif, qui revient à faire prendre en charge le poids des charges d’eau des plus démunis par les usagers qui acquittent une facture ;

 au refus prévisible de nombre de collectivités locales d’instaurer une « tarification progressive » de l’eau, qui revient en fait à créer une nouvelle rente de situation fantastique pour Suez-Lyonnaise (propagandiste forcené et bien en cour de la « tarification progressive »), Veolia et Saur…

 et sur le fond au constat, malheureusement irréfutable, que la véritable hubris affectant la large galaxie d’huluberlus qui se gobergent avec le « droit à l’eau », les tarifications progressive, par tranches, solidaire, sociale, écologique, environnementale, illustre que nous avons affaire, selon les cas : à des idéologues patentés niant obstinément le réel, des neuneus bêtifiants annonant un « catéchisme social » parfaitement inepte, et enfin des complices, actifs ou objectifs, des menées parfaitement claires des Suez-Lyonnaise, Veolia et Saur, qui, par ailleurs dans une panade totale - et dans l’attente fébrile de leur très prochaine condamnation pour entente illégale par la Direction de la concurrence de Bruxelles (l’addition - colossale, les attendus - catastrophiques, et surtout la "perte d’image" - calamiteuse) -, font flèche de tout bois en prétendant réinventer, comme à Libourne, le paradis sur terre…

Ce qui, dans ce cas d’espèce est un mensonge éhonté, qui voit un élu faire ouvertement, et effrontément, de la propagande mensongère pour Suez-Lyonnaise.

Ici un drame. A gauche, brandir les mantras de la tarification progressive, par tranches, sociale, solidaire, environnementale, écologique, et autres bêtises effroyables, vaut brevet de citoyenneté et d’humanisme. On brandit en fait ce brevet de citoyenneté dans l’espoir de faire oublier qu’on a tout bradé à Suez, Veolia, Saur, Bouygues, Vinci, Sodexho, et on en passe. Pathétique. Car du coup on réfute catégoriquement, en affichant ostensiblement son brevet de citoyenneté tout débat objectif sur des questions techniques un rien plus compliquées que l’invocation ostentatoire de « grands principes » sans fondement aucun.

Ce spectacle affligeant, et qui ne va donc déboucher sur rien, s’il permet à
un gouvernement qui semble déjà aux abois d’en rajouter des louches dans le « social », renvoie à un autre procès qu’il illustre à merveille.

On a vu se multiplier depuis plusieurs années un certain nombre de concepts qui voudraient remplacer la notion de service public.

Ainsi la notion de Service d’intérêt général (SIG), promu par la Commission européenne.

Rappelons une distinction essentielle.

Le service public répond à un besoin collectif, chacun bénéficiant de plein droit du service mis en commun. Mis à disposition des plus pauvres, puisqu’une importante partie du coût final est pris en charge par la collectivité, à des conditions compatibles avec leurs moyens, il a un effet de redistribution et de correction des inégalités en toute indépendance par rapport au marché. Le service d’intérêt général, quant à lui, n’échappe que par dérogation aux lois du marché, quitte à perdre de vue sa mission de redistribution.

Lorsqu’on adjoint à des firmes privées une mission de service universel, grande est la tentation de pratiquer des tarifs « sociaux » pour des clients non solvables ou indigents. On glisse ainsi du service public aux usagers au service « light » pour les indigents, (ce à quoi sont précisément destinés les "Télé-relèves", « compteurs intelligents » et autres « smart grids » que l’on prétend nous fourguer à tour de bras dans la période pour « maîtriser nos consommations »).

Réseaux et compteurs intelligents

C’est logique : un acteur privé visant à la maximisation de son profit aura clairement tendance à ne pas s’encombrer de la partie non solvable de la population.

Dès lors la « tarification progressive » va permettre tout à la fois d’afficher, faussement, un objectif social, en instaurant une péréquation qui verra les usagers solvables (par l’effet des « tranches »), prendre en charge financièrement les plus démunis, et surtout permettre à l’opérateur privé de pouvoir continuer à fixer des prix de marchés abusifs, qu’acquitteront les consommateurs solvables, puisque la question de la précarité a prétendument été réglée… par la « tarification progressive »

Quand Veolia instaure la "tarification progressive" à Cergy-Pontoise...

Les usagers... boivent la tasse, comme l’a établi sans coup férir l’association d’usagers L’Agleau...

L’Echo d’Agleau n° 1
L’Echo d’Agleau n° 2

Reste que tout ce fatras de ruses dérisoires et petites habiletés de saison semble donc bien parti pour un crash monumental, et comme nous l’avons prédit de longue date, nous n’allons donc pas nous en désespérer.

Pour se convaincre si besoin était que tout ce qui précède à quelques fondements, voir le quatrième chapitre consacré à la Tarification de l’eau du rapport « L’Eau bien public, bien commun », publié en juin 2011 par le Laboratoire des idées du Parti Socialiste.

Lire aussi :

- "Tarification progressive, mystification autour d’une proposition vertueuse mais insuffisante",

Communiqué de la Fondation Nicolas Hulot, 5 septembre 2012.

- Pour une tarification progressive de l’eau il faut supprimer les parts fixes

Gérard Borvon, S-Eau-S, 31 août 2012.

- Le gouvernement va remettre à plat les tarifs du gaz et de l’électricité

Véronique Le Billon, Les Echos, 5 septembre 2012.

- Un dispositif qui s’annonce complexe

Véronique Le Billon, Les Echos, 5 septembre 2012.

- Au niveau local plusieurs acteurs expérimentent déjà la tarification progressive de l’eau

Joël Cossardeaux, Les Echos, 5 septembre 2012.

- La tarification progressive, première pierre de la transition énergétique

Localtis, 5 septembre 2012.

- Energie, les détails de la proposition de loi sur la tarification progressive

Localtis, 7 septembre 2012.

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commentaires

1 Tarification « progressive » de l’eau : le gouvernement dans l’impasse

En juillet dernier, le Premier Ministre se référant notamment à l’eau potable a déclaré : « Nous mettrons en place une tarification progressive avec un double objectif social et écologique » .

La loi actuelle permet déjà d’introduire un tarif progressif de l’eau mais elle ne permet pas aux collectivités locales de satisfaire des objectifs sociaux avec ce tarif. Le Ministère de l’Ecologie est formel sur ce sujet puisqu’il déclare en mars 2012 que le tarif social de l’eau n’est pas autorisé en France. Même si cette affirmation est juridiquement contestable, il est un fait que la France à ce jour n’a aucun tarif social de l’eau en place. Les critiques du Groupe de travail du Laboratoire des idées du PS sur la tarification de l’eau visant la tarification progressive ne sont pas sans fondements.

Le Gouvernement pourrait pourtant promouvoir la tarification progressive de l’eau avec un objectif social s’il libérait les collectivités de contraintes totalement inutiles. Il suffirait d’inscrire dans la loi :

Le tarif progressif pour les usagers domestiques peut dépendre du nombre de personnes à charge dans le ménage de l’usager et de son appartenance à une catégorie d’usagers en situation de précarité.

Ce simple texte qui n’empiète pas sur les droits des collectivités permettrait aux collectivités qui le souhaitent d’attribuer, par exemple, un volume d’eau à prix réduit à tous les allocataires de minima sociaux. Une telle disposition est mise en oeuvre de longue date dans des pays ou des régions comme le Portugal, l’Espagne ou la Flandre (Belgique). Le progrès, c’est maintenant.

Henri Smets, Membre de l’Académie de l’Eau

poste par Marc Laimé - 2012-09-8@13:49 - repondre message
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