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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
REMOUS
Scandale à l’ONEMA (2) : lettre ouverte à Delphine Batho
par Marc Laimé, 28 novembre 2012

L’ampleur et les conséquences prévisibles du scandale de l’ONEMA nous conduisent à interpeller Mme la ministre de l’Ecologie.

« Madame la ministre,

Vous avez pris connaissance d’un rapport « accablant » de la Cour des Comptes qui éclaire d’un jour cru la véritable mise en coupe réglée de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA), Office créé en 2007 qui avait, notamment, pour mission de coordonner l’ensemble des activités de recherche sur l’eau en France.

Le Directeur général de l’ONEMA, M. Patrick Lavarde, (Igref) a été démis de ses fonctions le 23 octobre dernier et remplacé par Mme Elisabeth Dupont-Kerlan (Ponts), qui devait réaliser un audit sommaire de la situation avant la mi-novembre 2012.

La publication du rapport de la Cour des Comptes en février 2013 et la révélation publique des dévoiements faisant l’objet d’une saisine de la justice au pénal auront à l’évidence des répercussions sur le fonctionnement de l’ensemble des instances de gestion de l’eau, et notamment leur tutelle (la Direction de l’eau du ministère de l’Ecologie), les Agences de l’eau et l’ensemble des instituts de recherche concernés par les missions imparties à l’Office.

Par ailleurs, le financement de l’Office repose sur une dotation annuelle de 108 millions d’euros, prélevée dans la trésorerie des 6 Agences de l’eau, elle-même alimentée par les redevances perçues, à hauteur de 85 %, et pour un montant annuel de 2 milliards d’euros, sur les usagers domestiques du service public de l’eau potable, via leur facture d’eau. Si les graves dévoiements identifiés étaient confirmés, des associations d’usagers et de défense de l’environnement seront fondées à introduire des recours par devant différentes juridictions.

Vous êtes confrontée à la difficulté d’identifier l’état précis de l’ensemble du dispositif de production de données publiques du domaine de l’eau, enjeu stratégique majeur (respect des directives européennes et possibles sanctions financières), avant même que de pouvoir en reprendre la maîtrise.

Russia 1912

Les dysfonctionnements mis à jour sont tels, les dévoiements si graves, que cette crise sans précédent ne peut se résoudre selon le schéma traditionnel d’un changement de direction et d’un superficiel audit sommaire, et ne sera pas résolue sur le fond en s’en remettant aux seules puissances tutélaires de l’eau, sous la forme des grands corps et des lobbies qui l’incarnent.

Les très fortes pressions qui s’exercent pour « enterrer » cette affaire (IGREF et Ponts, CGEDD, DEB, (CGT ? modifié le 29 novembre 2012), (SNAPE ? modifié le 30 novembre 2012),… doivent impérativement être surmontées, sauf à encourir le risque de voir à moyen terme l’actuel gouvernement porter la responsabilité des conséquences d’une crise qu’il n’aura pas su affronter.

(Voir le billet en date du 29 novembre 2012 : "Scandale à l’Onema : réponse à une mise au point de la CGT", relatif à la mention faite de cette organisation syndicale ci-dessus.)

(Voir le billet en date du 30 novembre 2012 : "Scandale à l’Onema : réponse à un Droit de réponse du SNAPE ONEMA SOLIDAIRES", relatif à la mention faite de cette organisation syndicale ci-dessus.)

Seules de radicales mesures correctrices permettront de reprendre le contrôle d’une gouvernance des politiques publiques de l’eau, aujourd’hui inféodée aux grands corps et aux lobbies du secteur, avec les dévoiements qui en ont résulté, dont la nature et l’ampleur viennent seulement d’être mis à jour par la Cour des Comptes, témoignant de la véritable faillite de la tutelle de l’ONEMA : le ministère de l’Ecologie et sa Direction de l’eau et de la biodiversité (DEB), dont vous venez également de renouveler la direction, témoignage s’il en est de la gravité de cette crise.

Or cette crise peut être l’occasion de déployer des modalités de résolution nouvelles qui permettraient tout à la fois :

 de réaliser un état des lieux et un diagnostic approfondi de l’ensemble du dispositif français de production de données publiques sur l’eau, au-delà de ce qui aura été identifié par la Cour si besoin est, en mobilisant les compétences scientifiques ad hoc : hydrologie, statistiques, informatique, sciences sociales…

 d’établir un lien précis entre cet inventaire et les risques de non atteinte des engagements communautaires de la France dans le domaine de l’eau ;

 de préciser si le fonctionnement actuel de l’Office et de sa tutelle contrevient aux dispositions nationales et communautaires qui prévoient une large information et participation des citoyens en matière d’information environnementale (Convention d’Aahrrus, Charte de l’Environnement, etc.), en lien avec le récent projet de loi renforçant la participation du public en matière de choix environnementaux.

Vous avez le pouvoir de constituer un groupe de travail ad hoc qui intégrerait toutes les compétences nécessaires, et pourrait se fixer comme objectif l’organisation d’une conférence de consensus qui se tiendrait à l’occasion de la seconde Conférence environnementale de septembre 2013, qui permettrait d’élaborer des propositions correctrices.

Cette nouvelle modalité de gestion de crise innovante, ouverte sur la société civile, vous permettrait d’afficher un positionnement pro actif vis-à-vis des autorités communautaires, ce qui permettra de se positionner favorablement pour prévenir d’éventuels contentieux, hélas prévisibles au vu du scandale de l’ONEMA.

Ce scénario de sortie de crise suppose la mobilisation d’acteurs qui aideront à repositionner des missions stratégiques, acteurs jusqu’ici écartés du dossier : CNRS, INSEE, AITECH, syndicats, ONGs…

Il faudrait y ajouter une dimension santé publique (INSERM plutôt qu’ANSES) et mobilisatrice au niveau de l’opinion en ce moment, donc incitatrice pour le gouvernement.

Le calendrier oblige à une action sur des pas de temps différenciés : court, moyen et long terme ; les actions évoquées ne pouvant se déployer au même rythme (agendas disjoints bien que connectés).

Les experts scientifiques ont aussi leurs agendas et obligations propres : leur disponibilité peut être négociée si une réquisition supérieure advenait.

Peut-on raisonnablement penser à des scientifiques étrangers européens malgré la sensibilité de l’affaire ?

Les susceptibilités sont fortes dans ce milieu fermé des sciences de l’eau (dominées par les hydrologues, qui ont influencé l’agenda mondial avec la GIRE, et les "épurateurs" qui ont abondé les PPP). De plus, le milieu est aussi troublé par des échecs à répétition : laboratoires d’excellence, pôles de compétitivité, plan Campus et unification des universités, etc.

Une ouverture résolue au monde de la recherche pour résoudre la crise apparaît donc essentielle.

A partir du scandale de l’ONEMA, qui trouve son fondement dans dix années de gestion des politiques publiques de l’eau par la droite, la recherche d’un nouveau consensus politique sur les orientations stratégiques des politiques publiques de gestion de l’eau est possible, et constituerait un préalable positif à l’examen de la question de l’eau lors de la seconde Conférence environnementale programmée à la rentrée 2013.

Nous connaissons votre attachement à la cause écologique.

Ne doutons pas de votre détermination.

Vous pouvez enfin civiliser la gestion de l’eau en France.

Des milliers de défenseurs de la question de l’eau soutiendront ces inflexions avec enthousiasme.

Nous vous prions, Madame la ministre, de croire en l’assurance de notre respectueuse considération."

Lire aussi :

- Qualité de l’eau (1) : un mensonge d’état ?

Les eaux glacées du calcul égoïste, 22 juillet 2011.

- Qualité de l’eau (2) : le témoignage choc d’Anne Spiteri

Les eaux glacées du calcul égoïste, 23 juillet 2011.

- Qualité de l’eau (3) Nage en eaux troubles

Les eaux glacées du calcul égoïste, 25 juillet 2011.

- Politique de l’eau : le changement c’est maintenant

Les eaux glacées du calcul égoïste, 23 novembre 2012.

Scandale à l’ONEMA (1) : comment éviter la privatisation des données publiques ?

Les eaux glacées du calcul égoïste, 28 novembre 2012.

Scandale à l’ONEMA (2) : lettre ouverte à Delphine Batho

Les eaux glacées du calcul égoïste, 28 novembre 2012.

Scandale à l’ONEMA (3) : réponse à une mise au point de la CGT

Les eaux glacées du calcul égoïste, 29 novembre 2012.

Scandale à l’ONEMA (4) : déni et pitoyable opération de désinformation

Les eaux glacées du calcul égoïste, 30 novembre 2012.

Scandale à l’ONEMA (5) : réponse à un Droit de réponse du SNAPE ONEMA SOLIDAIRES

Les eaux glacées du calcul égoïste, 30 novembre 2012.

Scandale à l’ONEMA (6) : l’OPA de Suez-Lyonnaise des eaux sur la recherche et l’argent publics

Les eaux glacées du calcul égoïste, 4 décembre 2012.

Scandale à l’ONEMA (7) : the fatal french water open data collapse

Les eaux glacées du calcul égoïste, 8 décembre 2012.

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commentaires

1 Scandale à l’ONEMA : lettre ouverte à Delphine Batho

Bravo ! à relayer partout !

poste par Sueolia - 2012-11-29@13:10 - repondre message
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