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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
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Pour un droit à l’eau effectif
par Marc Laimé, 29 mars 2007

Henri Smets, ancien fonctionnaire de l’OCDE de 1960 à 1998, membre de l’Académie de l’eau et du Conseil européen du droit de l’environnement, est la figure française du droit à l’eau. Nos opinions divergent sur d’autres sujets, comme le brulant débat “public-privé”, mais Henri Smets est littéralement habité par l’obsession de promouvoir le droit à l’eau pour les plus pauvres, en France comme à l’étranger. Il y apporte une telle conviction qu’Eaux glacées publie avec plaisir l’intervention qu’il a effectuée le 22 mars dernier, Journée mondiale de l’eau au ministère de l’Ecologie et du développement durable.

“L’inscription du droit à l’eau en tête de la loi sur l’eau constitue une avancée juridique incontestable qui doit beaucoup à votre action, Madame la Ministre, ainsi qu’à celle du Sénateur Le Grand. Ce n’était pas si évident puisque l’Assemblée nationale avait rejeté en mai ce que le Sénat a accepté à l’unanimité en septembre dernier.

“L’Académie de l’eau que j’ai l’honneur de représenter ici a milité sans cesse depuis 7 ans pour que ce droit fondamental soit officiellement inscrit dans le droit français. Elle a adopté en assemblée générale à l’unanimité plusieurs résolutions en faveur du droit à l’eau et de la mise en œuvre effective de la solidarité pour l’eau. Elle a constamment bénéficié du soutien des grandes entreprises du secteur de l’eau et des ONG de l’eau.

Ses membres ont collaboré à la rédaction de nombreux ouvrages et d’avis sur le droit à l’eau. Ils poursuivent leur réflexion sur le sujet afin que le droit à l’eau soit reconnu comme un droit fondamental, suivant les orientations données dès 2003 par le Président de la République.

Le droit à l’eau ne se limite pas à l’énoncé d’un principe généreux, il appelle une mise en œuvre effective : il faut apporter de l’eau potable à qui n’en a pas ou qui ne peut la payer. Selon vos propres déclarations, Madame la Ministre, “Le droit effectif à l’eau va de pair avec les devoirs pour les pouvoirs publics comme pour les usagers”.

La loi adoptée qui constitue un grand progrès, est néanmoins incomplète.

En effet, elle ne précise pas les devoirs des pouvoirs publics en matière de droit à l’eau et elle ne désigne pas les pouvoirs publics qui auront des devoirs à remplir.

Pour un droit à l’eau opposable

Comme pour le logement jusqu’à ces dernières semaines, la loi reconnaît un droit mais ce droit reconnu par le Conseil constitutionnel depuis 1995 n’était pas opposable.

Il faudra donc aussi une nouvelle loi pour que le droit à l’eau devienne lui aussi un droit opposable.

La loi sur l’eau a introduit la notion tout à fait essentielle que l’eau doit être d’un prix abordable, question importante à une époque où le prix de l’eau ne cesse d’augmenter.

Il nous faut désormais déterminer dans quels cas l’eau peut être considérée comme étant d’un prix inabordable et surtout comment agir dans ces cas.

La question s’est posée de la même manière il y a quelques années pour l’électricité.

Nous disposons désormais d’un niveau de revenu en dessous duquel les ménages bénéficient d’un tarif réduit de l’électricité et d’un niveau de revenus pour lequel ils sont aidés à payer leurs dettes. Nous disposons aussi grâce à la solidarité de moyens financiers pour aider les plus démunis à conserver l’accès à l’électricité. L’ensemble des aides distribuées aux ménages démunis pour l’électricité représente environ 2 € par an et par habitant.

Nous pourrions faire un effort moitié moins grand pour l’eau puisque les factures d’eau sont la moitié des factures d’électricité.

Une telle proposition serait très certainement soutenue par l’opinion publique qui considère comme essentiel d’aider les ménages démunis pour l’eau et qui serait prête à prendre en charge 1 € par an et par habitant pour une telle action, soit au moins six fois plus qu’aujourd’hui.

Une telle proposition n’est pas révolutionnaire puisqu’elle est pratiquement mise en oeuvre à Vannes.

Si ce programme était accepté, le prix de l’eau augmentera d’un demi pour cent, ce qui est dérisoire par rapport aux augmentations programmées qui dépasseront 20 pour cent en termes réels.

Comme l’a justement fait remarquer M. Marc Reneaume, directeur général adjoint de Veolia Eau, il nous faut inventer des solutions adéquates “pour les 5% de gens qui rencontrent des difficultés à régler leur facture d’eau” (Hydroplus, décembre 2006).

Un nouveau droit à l’eau pour 5% des ménages

La solution d’un tel problème implique de revoir fondamentalement les mécanismes de solidarité en place dont bénéficient à peine 2 ménages sur mille.

Il faut désormais s’intéresser à l’eau de 5% de la population, pas seulement à l’eau des quelques ménages les plus démunis qui seraient identifiés parmi ces 5%.

L’égalité républicaine exige que le “droit à une aide” pour l’eau inscrit dans la loi depuis 1998 soit mis en œuvre de façon plus effective et plus uniforme.

Il est incohérent que les habitants de plus de la moitié des départements français reçoivent une aide pour l’eau qui est six à dix fois plus faible que celle reçue par les habitants des Landes ou du Gers, qui ne sont pourtant pas des départements particulièrement pauvres.

Il est de bonne politique de proposer que des aides ciblées soient données aux ménages démunis pour payer leur eau, mais à condition qu’elles soient données avec assez de générosité et sans introduire des inégalités trop flagrantes. Ce n’est pas le cas aujourd’hui.

Si nous sommes tous en faveur de l’eau pour tous, nous devons agir pour que le principe de solidarité devienne progressivement une réalité pour la France qui souffre, pour toute la France qui souffre et pas seulement pour une petite partie des ménages très démunis. Il reste encore des efforts à faire pour que le droit à l’eau soit pleinement effectif."

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