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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
REMOUS
Montpellier : les Verts s’insurgent contre la « connexion » Frèche-Veolia
par Marc Laimé, 22 janvier 2009

Les conseils municipaux de la capitale de la « Septimanie » sont régulièrement agités depuis plusieurs mois par l’ire que manifestent les élus Verts, qui dénoncent, vertement, les projets de M. Frèche, qui leur semblent faire la part belle au géant français de l’eau. Outre une tarification excessive, le récent projet de transférer la compétence de la ville à la communauté d’agglomération vient de faire subitement monter la tension. Une situation que l’on retrouve ailleurs en France, sur fond de contestation croissante de l’opacité des structures intercommunales, qui permet trop souvent de pérenniser la rente de situation des majors de l’eau.

Dès le jeudi 25 juillet 2008, comme le relatait le quotidien local Le Midi Libre, dans son édition du samedi 28 juillet 2008, les élus contestaient le prix de l’eau.

A l’occasion du « compte rendu annuel d’activité de Veolia au conseil municipal » - une délibération qui ne suscite généralement pas d’intervention - l’élue verte Nathalie Medeiros remettait en effet vivement en cause « un rapport plus que synthétique qui ne permet pas une analyse réelle » de l’équilibre économique du contrat détenu depuis 1989 par l’entreprise pour une durée de vingt-cinq ans.

Une présentation « tronquée » qui aurait pour but, selon l’élue, de dissimuler les véritables marges de l’exploitant. « Comment, dans ces conditions, peut-on mener une politique équitable de l’eau ? », lançait-elle.

Auparavant, l’élu du groupe d’opposition UMP, M. Stéphane Mella, ex-PS et ex-syndicaliste FO au CHU, s’était déjà interrogé sur l’opportunité d’engager « une renégociation du contrat d’affermage ».

« Lyon ou Paris travaillent sur cette piste. C’est très difficile de s’y retrouver, mais avec un audit on arriverait à faire baisser le prix de l’eau », estimait l’ancien syndicaliste FO, rejoint par M. Jacques Domergue, élu UMP.

« A Montpellier, selon une enquête de Que choisir, les marges sont de 40 % sur le prix de l’eau, seulement de 10 à 15 % à Clermont-Ferrand ou Chambéry. Une régie permettrait de pratiquer un prix plus juste », reprenait l’élue écologiste, soutenue, un peu plus tard, par M. Francis Viguié (LCR) : « Le bon sens voudrait que cela soit un service public. »

Autant d’interventions qui laissaient de marbre Mme Hélène Mandroux, maire PS de Montpellier, et son adjoint, M. Serge Fleurence.

« L’enquête de Que choisir était un tissu de fausses informations. Il existe une commission de consultation des services publics, pour avoir les renseignements. Quant à la qualité de l’eau servie, elle est très performante », lançait-il.

« Aujourd’hui, ce n’est pas le rapport (à l’ordre du jour). Il y en a un sur la qualité et le prix en fin d’année », reprenait Mme Hélène Mandroux.

Selon le rapport présenté au conseil municipal, le service des eaux comptait 34 930 abonnés en 2007, et 30,8 millions de m3 ont été mis en distribution au cours de la même période, une baisse de 2,2 % par rapport à 2006.

Le résultat d’exploitation (avant impôt) s’est arrêté à 997 000 euros, soit un recul de 44 % par rapport à l’année précédente (1,8 million d’euros).

« Le résultat avant impôt sur les sociétés connaît une baisse substantielle due au fait que la baisse des produits est plus importante que celle des charges », concluait benoîtement la délibération.

Janvier 2009 : l’embrouille de l’agglo...

L’affaire vient de rebondir, moins de 6 mois plus tard. Les Verts s’élèvent cette fois avec force contre une manœuvre qui vise à l’évidence à pérenniser la rente de situation de Veolia, sous couvert de « rationalisation » et de transfert de la compétence eau de la ville à la communauté d’agglomération, qui était à l’ordre du jour du conseil de l’agglo du 16 janvier...

Leur chef de file, M. Jean-Louis Roumégas confiait ainsi à la presse le 15 janvier 2009, avant un conseil agité, que « la préparation au retour en régie municipale faisait partie du contrat avec Georges Frêche pour le second tour des municipales de 2001 ».

Or aujourd’hui, entendant le même évoquer l’éventualité d’un retour en régie au terme des présents contrats en cours dans l’Agglo (soit en 2021 pour le plus éloigné), il n’y croit guère.

"Frèche n’a aucune intention de faire repasser l’eau en régie publique à l’horizon 2021. En prenant la compétence à l’agglo, il veut au contraire tout uniformiser au privé".

"Il s’agit de faire avaler le transfert de compétences aux petites communes. On n’est pas contre le principe même que l’Agglo ait la compétence de l’eau, mais contre le contexte. Si c’est pour continuer à faire des cadeaux au privé au détriment des usagers, on dit non. Il enfume les gens pour faire accepter le transfert de compétence de l’eau à l’Agglo. Les Verts y sont opposés pour des raisons circonstancielles car l’Agglo a déjà suffisamment dépossédé la Ville. »

Et de dénoncer « un écran de fumée avec une fausse intention de la part de Frêche de remunicipaliser la distribution de l’eau. Il veut obtenir un pouvoir supplémentaire ».

Dans l’agglo, certaines communes gèrent la distribution de l’eau en régie municipale avec un tarif de 0,6 à 0,9 euros le m3. Pour d’autres la délégation de service public est assurée, comme à Montpellier, par Veolia ou Suez, avec un prix de 1 euro à 1,8 euro.

Estimant que « le retour à la régie municipale profiterait à l’usager ». les Verts dénoncent donc « une manœuvre politique pour privatiser la distribution et négocier avec Veolia.

« Si Frêche voulait remunicipaliser, il n’attendrait pas 2021, alors que des contrats se terminent avant, à Montpellier c’est en 2014 ».

Dans la gestion de l’eau par le privé, M. Roumégas pointe « une absence de transparence ». A Montpellier, « la mairie va accepter sans même avoir évalué le système. C’est libre action à Veolia ».

Opacité

Mme Nathalie Meideros a épluché le dossier. « J’attends la réponse de Serge Fleurence, premier adjoint, aux questions posées lors du dernier conseil municipal. Malgré une relance écrite, je n’ai toujours rien à ce jour. »

Puis elle pointe du doigt l’abonnement qui augmente (la part qui revient à Veolia aurait grimpé de 21 % en sept ans, pour se chiffrer aujourd’hui à 18 euros), le prix de l’eau au mètre cube qui suit le même chemin (+ 16 %, soit aujourd’hui 1,66 euros du m3), des frais de personnel « que l’on ne comprend pas ».

Elle relève en effet un montant de près de 4 millions d’euros, selon le rapport annuel du délégataire 2007, alors que le nombre d’agents a été divisé par deux, de 112 en 1989 à 60 en 2008.

Par ailleurs le rendement affiché par Veolia reste en deçà d’un "bon rendement" : 80% soit 6 millions de m3 de fuites par an.

Mais ce qui chiffonne le plus les Verts, c’est l’absence de suivi.

« Le contrôle effectué par la municipalité se résume au strict minimum. L’annexe du budget de l’eau, c’est le rapport de Veolia. On a l’impression qu’il n’y a aucune vérification contradictoire sur ce que l’on paye. »

Les Verts l’assurent, les villes qui sont revenues en régie municipale ont permis de baisser les factures des usagers. « A Grenoble, le prix de l’eau est stable depuis trois ans. »

Outre un grand débat contradictoire, ils ont l’intention de demander la création d’une mission d’information qui serait chargée de procéder à l’évaluation du service de l’eau. Il faudra pour cela réunir a minima un sixième du conseil municipal.

Lire aussi :

Une mine d’informations sur l’eau dans le Languedoc-Roussillon, dont notamment :

 Le Congrès mondial de l’eau de Montpellier


 Le projet « Aquadomitia »


Deux textes saisissants de Thierry Ruf sur le site des verts à Jacou

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