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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
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L’association des usagers aux politiques de l’eau (9) : concertation-alibi ou co-production des politiques publiques ?
par Marc Laimé, 16 janvier 2007

La synthèse des très nombreuses dispositions arrêtées depuis une vingtaine d’années dans le champ de la concertation autour des politiques publiques, et notamment de leurs composantes environnementales, témoigne bien que les instruments et dispositifs ne font pas défaut. Ils sont même pléthore. Mais la question de leur pertinence et de leur efficacité demeure ouverte.

Car on assiste bien davantage à un foisonnement d’initiatives dispersées, hétérogènes, extrêmement difficiles à relier, analyser, comparer, évaluer - d’autant plus que nombre d’entre elles n’ont qu’une durée de vie éphémère, et qu’un dispositif succède parfois à un autre sans solution de continuité -, qu’à l’émergence d’une nouvelle culture de la participation de nature à modifier sensiblement les fondamentaux de l’action publique.

Dès lors un grand nombre de questionnements se font jour, à raison même de l’inadéquation comme du peu d’intérêt que semblent susciter nombre de ces démarches :

Quelle capacité d’expertise pour l’usager-citoyen : comment va-t-il se former, avec quels moyens techniques et financiers ?

Comment déterminer un échelon territorial pertinent pour la mise en oeuvre de procédures d’information-consultation-participation, à raison notamment de l’existence de différents maillages administratifs et politiques qui se chevauchent :

 ceux de l’organisation administrative et de la vie politique "traditionnelles",

 ceux de la gestion de l’eau,

 ceux du périmètre optimal d’expression des structures de représentation de la société civile, qui ne recoupent pas, de surcroit, une représentation des usagers du service public de l’eau et de l’assainissement, qui n’existe pas encore "per se"...

 ceux enfin des dispositifs "para-légaux", du type observatoires, baromètres, forums, qui fleurissent dans la période. Etant le plus souvent strictement dédiés à l’eau, leur action ne résulte pourtant que d’une démarche "volontariste" des collectivités, qui prennent soin de les "déconnecter" de toute contrainte formelle que leur impose par ailleurs nombre des autres dispositifs, français et communautaires, que nous avons passé en revue...

Cet enchevêtrement des dispositifs, des procédures, des niveaux d’application, avec des effets légaux qui ne sont pas identiques, ne contribue donc pas, ni à une meilleure lisibilité d’un dispositif déjà très complexe, ni à leur appropriation par l’usager et le citoyen.

Une tension apparaît dès lors entre les notions de démocratie représentative et de démocratie participative, avec le reproche récurrent adressé aux institutions de "confisquer" le débat, ou de le circonscrire dans un but manipulatoire.

Dans le même temps la concertation est aussi appropriée par les techniciens du management comme nouvelle approche des risques. Avec le "Risk-Management", la concertation devient une composante de la sphère marchande. Phénomène qui reconduit l’existence d’une asymétrie entre l’acteur économique et/ou l’entreprise, professionnalisés, et l’usager du service public.

On peut de même s’interroger sur la propension des initiateurs de procédures de concertation à privilégier systématiquement le recours aux nouvelles technologies, à l’image des outils de l’Internet, figure qui ranime le spectre d’une fracture qui ne serait pas en l’espèce que numérique, mais sociale.

Nombre d’usagers impliqués dans des actions publiques de concertation déplorent par ailleurs le caractère par trop limité des restitutions qui en sont faites par leurs promoteurs, et/ou témoignent du dépit parfois éprouvé à ne rien retrouver de leurs desiderata dans les décisions finalement arrêtées par les instances qui les ont mobilisés à des fins de concertation.

Dans le champ spécifique des politiques environnementales, et plus particulièrement celui des politiques de l’eau et de l’assainissement, surgit enfin un paradoxe majeur.

A ce jour c’est très fréquemment le contentieux qui apparaît comme le véritable moteur de la co-production des politiques publiques.

Ce paradoxe n’est qu’apparent et dessine en creux les limites et insuffisances de l’information-consultation-participation, telles qu’elles ont été mises en oeuvre jusqu’à présent.

Il appelle à tout le moins un véritable saut qualitatif afin de conférer en ces domaines aux promesses dont semble porteuse la démocratie participative leur véritable dimension.

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commentaires

1 L’association des usagers aux politiques de l’eau (9) : concertation-alibi ou co-production des politiques publiques ?

Je souscris à une grande partie de tes conclusions. Mais pour que les associations puissent s’emparer de ces dispositifs de "démocratie participative" à bon escient et le plus possible à leur avantage ("y aller ou pas ?"), il me semble important de distinguer les dispositifs dits participatifs, des instances multiples de concertation-négociation. Les enjeux pour les assos ne sont pas les mêmes :
  Là où il y a "participation", il s’agit de mobiliser, de créer des alliances (nécessaires dans un contexte de rapports de forces très défavorables), de se créer une expertise, d’(in)former les citoyens pour dépasser des réactions individualistes ou nimbystes (danger que tu as très bien souligné à propos des CCSPL), de se créer des argumentaires de luttes (construction de l’"intérêt général"), se faire (re)connaître par les institutions et les médias. Cela se fait par l’organisation de réunions, débats, manifestations… par les assos ou par réaction à des débats, forums, consultations plus ou moins bidons… proposés par les institutions (souvent avec l’espoir de faire passer la pillule).
  Là où on se rapproche de la décision, il y a négociation. Les règles de négociation fixées par les décideurs institutionnels figent les rapports de forces tels qu’ils se vivent sur les terrains des luttes (sociales et environnementales) dans un sens très favorable au pouvoir politique institué et à l’argent (cf représentation des assos dans les comités de bassin, les CLE…). On est là dans des problèmes de démocratie représentative : poids des représentants par rapport à ce qu’ils représentent (légitimité de ces représentants : quel poids donner aux "représentants" des écosystèmes ?), lien représentés / représentants (élus politiques ou associatifs), rôle de l’expertise.
Je ne développe pas plus mais il y aurait à dire…

poste par Olivier Marcant - 2007-01-18@11:58 - repondre message
2 L’association des usagers aux politiques de l’eau (9) : concertation-alibi ou co-production des politiques publiques ?

Nous en sommes d’accord et je te rejoins totalement sur l’importance de découpler dans l’approche, à l’ère de l’assomption de la démocratie participative, les enjeux et pratiques ressortissant des deux sphères. Ce qui a l’avantage de ne pas occulter les indispensables ajustements à opérer eu égard à l’essoufflement (litote) du modèle représentatif... Ce qui nous renvoie à la construction d’un rapport de force plus que jamais indispensable, si toujours aussi malaisé à construire. Bien cordialement.

poste par Marc Laimé - 2007-01-18@12:42 - repondre message
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