Retour au format normal


Assainissement non collectif (4) : le grand bazar

10 juillet 2007

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Un lecteur d’Eaux glacées, professionnel de l’assainissement non collectif, nous alerte sur la confusion réglementaire qui va croissant en la matière. La constitutionnalité des textes officiels lui apparaît sujette à caution, et il insiste à juste titre sur la toute puissance des normes "techniques" européennes qui régissent insidieusement les évolutions du secteur. Un nouveau pavé dans la mare de l’ANC, dont la remise aux normes concerne aujourd’hui plus de 5 millions de particuliers…



« Je me permets de vous faire part de mes observations en matière d’assainissement non collectif car une grande confusion réglementaire existe, soutenue par toutes les administrations qui nous racontent depuis 1996 exactement l’envers de la loi. C’est un véritable scandale.

L’assainissement n’est pas régi par l’arrêté du 6 mai 1996, mais par la loi sur l’eau de 1992. Depuis la loi sur l’eau de 1992, retranscription de la directive 91/291 CE, on peut faire de l’assainissement collectif ou du non-collectif. Le collectif ne devant pas être plus cher que le non-collectif, et le non-collectif ne devant pas être plus polluant que le collectif.

Le maire a été chargé de la police de la pollution, et le corollaire de toute fonction de police c’est une limite qu’il ne faut pas dépasser. Nous sommes depuis 1992, indiscutablement, en obligation de résultat.

Face à cette obligation de résultat, l’arrêté du 6 mai 1996 a inventé les filières homologuées (les fameux épandages et filtres en tout genre, réalisés par des terrassiers). Je vous invite donc à demander aux terrassiers des garanties sur le traitement de la pollution...

L’arrêté du 6 mai 1996, revu le 24 décembre 2003 à minuit, pour faire entrer dans les textes le filtre Eparco, permet de faire des assainissements en obligation de moyens et non de résultats. Il est indiscutablement dérogatoire de la loi sur l’eau de 1992.

Comment voulez-vous que des ministres et énarques signent un arrêté dans
lequel est écrit qu’une station d’épuration est une filière de prétraitement sans qu’il y ait une raison autre que technique ?

Il fallait donc chercher la raison.

Un terrassier qui pose une station d’épuration en maison individuelle ne couvre pas de sa responsabilité civile professionnelle le risque de pollution, donc c’est considéré comme étant une filière de prétraitement.

Mais un texte dérogatoire doit se lire à l’envers pour connaître la loi (un pompier qui grille un feu rouge en urgence, c’est dérogatoire du Code de la route. La loi c’est le feu vert).

Aussi une station d’épuration, filière de prétraitement dans le cadre de l’arrêté, c’est une filière de traitement au titre de la loi sur l’eau...

Donc les administrations et les SPANCs sont prescripteurs d’installations, et tous les jours en défaut de conseil. Ils se défendent bien d’ailleurs d’être prescripteur. On comprend pourquoi.

Les vrais textes de référence technique en matière d’assainissement sont les normes.

Là encore, il y a des normes européennes NF EN 12566-3, et des DTU 64-1 qui sont les documents techniques d’application de l’arrêté du 6 Mai 1996.

On nous dit bien entendu que ce sont les DTU qui sont d’application, et que les normes ne sont pas des textes réglementaires.

Elles ne sont "que" l’application technique des directives européennes, et sont opposables à la constitution nationale, comme tous les accords internationaux.

Qui plus est, la norme NF EN 12566-3 est bien homologuée en droit français et possède une annexe ZA la liant à deux directives européennes : 91/271 CE et 89/106 CE.

Les DTU doivent se mettre en cohérence avec les normes.

Un point d’ailleurs fondamental, c’est la Charte de l’environnement. Loi constitutionnelle française, fleuron national. Je vous invite à en prendre lecture. L’arrêté du 6 mai 1996 est anti- constitutionnel.

En résumé : il ne faut en aucun cas écouter les administrations qui disent de faire des filtres à sable et des épandages, l’obligation c’est de faire une station d’épuration individuelle.

Au titre de la loi sur l’eau, les stations d’épuration de moins de 200 équivalent-habitants ne sont soumises ni à déclaration ni à autorisation.

Elles sont en plein droit, sous réserve de faire appel à un professionnel qui garantisse le respect des normes NF EN 12566-3, et couvre de sa responsabilité civile professionnelle assurée le risque de pollution par l’intermédiaire d’un contrat d’exploitation.

Par définition, une filière homologuée est une filière hors norme.

Je tiens à faire un commentaire sur l’assainissement collectif des petites communes de campagne. La norme NF EN 12566-3 est d’application pour toutes les installations de moins de 50 habitants.

Pour les installations de plus de 50 habitants, nous avons aussi une norme NF EN 12255 homologuée en France depuis 2002.

Trois parties décrivent les filières de traitement : 12255 partie 5 les lagunes, partie 6 les stations d’épuration à boue activées et la partie 7, les réacteurs biologiques à cultures fixées.

En France, on finance sur fonds européens des filtres à sable et des lits plantés de roseaux.

Si vous les trouvez dans la norme, je changerai de métier. Ces techniques sont hors normes.

J’imagine que nos voisins européens nous rappelleront à l’ordre en nous disant de recommencer, mais je serai très surpris qu’ils payent deux fois et c’est là que le scandale de l’argent public mal dépensé commence. »

Bernard Briet

Société Aquitaine Bioteste

ZA du pays de Podensac

33720 Illats

Tel : 05 57 98 15 75

Mel : bio.teste@wanadoo.fr

Le dossier de l’ANC

Assainissement non collectif (1) : les usagers vont trinquer, 4 mai 2007 :

Assainissement non collectif (2) : les difficultés commencent, 4 juin 2007 :

Assainissement non collectif (3) : Point de vue du Syndicat de l’ANC des Vosges, 12 juin 2007 :

Assainissement non collectif (4) : le grand bazar, 10 juillet 2007 :

Assainissement non collectif (5) : les arrêtés d’application de la LEMA, 26 septembre 2007

Assainissement non collectif (6) : les micro-stations d’épuration, 23 octobre 2007

Assainissement non collectif (7) : pourquoi les lits de riseaux plantés sont-ils interdits aux particuliers ?, 6 novembre 2007

Pour en savoir plus

1. Carteleau, le Centre d’appui et de ressources télématiques des élus locaux.

Et notamment son guide des services publics, avec une section Assainissement, qui court malheureusement toujours après une actualité, certes foisonnante.

Voir aussi une page spéciale dédiée aux FAQ à propos de l’ANC, mise ligne le 28 août 2007.

2. Le « Réseau eau » du Réseau Ideal :

Actualités de l’ANC :

 Le Conseil général des Pyrénées-Atlantiques a réalisé sur la période 2005-2006 une étude sur la qualité des rejets issus d’installations individuelles d’assainissement (filières drainées avec rejet dans le milieu hydraulique superficiel).

 Les 4èmes Assises de l’Assainissement Non Collectif
ont eu lieu les 24 et 25 octobre 2007 à Cahors.

3. Comundi, Division Formation de Reed Business Information, organisera les 20 et 21 novembre 2007 à Paris une conférence dédiée aux enjeux et opportunités de le LEMA pour les Collectivités Territoriales, au cours de laquelle, entre autres sujets, seront abordées les nouvelles problématiques de l’ANC.

Marc Laimé - eauxglacees.com