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Assainissement non collectif (46) : abus de Spanc

26 septembre 2008

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Où en est la planète ANC à trois semaines de la grand-messe de Lons-le-Saulnier, lors de laquelle sera présenté en grande pompe le nouvel arrêté ? Confrontons deux approches. La réponse du ministère à la question d’une parlementaire sur la mise en œuvre des réhabilitations, et le témoignage accablant d’un usager, qui donne son titre à cette énième chronique de notre saga. Le nombre effarant de questions adressées par des parlementaires au ministère sur l’ANC en dit long sur les « difficultés de mise en œuvre » de la réforme. Quant aux témoignages d’usagers indignés, l’institution aurait tort de les balayer d’un revers de main. L’ANC traduit une rupture dans la relation de l’usager avec le service public. Cette relation s’individualise, et souvent dans une forme conflictuelle. Comme cette relation singulière concerne près de 5 millions et demi de foyers français, nous sommes face à une véritable « question de société » que la puissance publique et les collectivités ne semblent pas en mesure de réguler correctement. A l’heure où la « gouvernance » nous est imposée comme l’alpha et l’omega d’une société démocratique avancée, ses ratés cinglants dans le domaine qui nous occupe en disent long sur la santé démocratique de « l’entreprise France », appelée, on nous l’a assez rabâché, à « travailler plus », dans la joie et la bonne humeur tant que nous y sommes...
D’ailleurs, même le camarade rédacteur en chef d’Hydroplus s’en inquiète dans son tout dernier éditorial, c’est dire...



Le Journal officiel du 16 septembre 2008 (n° 23670, page 7993), a publié la réponse du ministère à la question écrite que lui avait posé Mme Catherine Quéré, qui portait sur la mise en œuvre, et le financement des opérations de réhabilitation. Une réponse qui fait clairement apparaître que ces réhabilitations ne s’effectuent que... sous condition. Mais surtout une réponse qui ne contribue pas vraiment à éclaircir notre dossier :

« Il y a lieu de rappeler tout d’abord que la mise en conformité des installations d’assainissement non collectif ne répond pas à une exigence communautaire mais à une exigence légale ancienne, inscrite dans le code de la santé publique pour protéger la ressource en eau nationale et concernant environ 5 millions de logements situés, pour l’essentiel, en zone rurale. En cas de non-conformité à la réglementation de son installation d’assainissement non collectif, le propriétaire devra procéder aux travaux prescrits par le document remis par le service public d’assainissement non collectif à l’issue du contrôle, dans un délai de quatre ans. (...) 


Afin d’alléger le coût pour le propriétaire, il a été donné instruction aux agences de l’eau d’apporter le soutien financier le plus adapté possible aux collectivités concernées. Il convient de préciser, en outre, que la mise en conformité a d’abord pour objet de remédier à des pollutions pouvant avoir des conséquences réellement dommageables pour le voisinage ou la collectivité.

Les travaux demandés doivent donc rester proportionnés à l’importance de ces conséquences, en tenant compte notamment du respect de la réglementation existante à la date de mise en place des installations, pour les installations plus anciennes.

En particulier, la priorité d’action des services devra être orientée vers la mise en œuvre des aménagements permettant de supprimer les dommages pour l’environnement et les nuisances pour le voisinage pouvant être constatés par le syndicat public d’assainissement non collectif (Spanc) lors du contrôle de l’installation. »

Voilà qui va, à n’en pas douter, susciter quelques nouvelles divergences d’appréciation...

Abus de Spanc : un témoignage

Entre des dizaines de témoignages reçus récemment cet aperçu « terrain » qui fait froid dans le dos :

« Mon Spanc a confié les tâches obligatoires de contrôle a un bureau
d’études. Le B E a les coordonnées des usagers, et peut maintenant
leur proposer directement ses services pour l’étude de sol,
prévoir les futurs travaux (on m’a rapporté qu’il n’hésitait pas
à appeler pour faire pression, dénigrer ses concurrents). Bizarre : je
connais deux cas où le bureau d’études choisi par le client n’était
pas ce bureau d’études, Le dossier a été refusé par le Spanc et l’usager a du payer une contre-expertise...

Je ne suis pas bien certaine que tout cela soit bien légal…

Je ne peux pas vérifier par rapport au règlement du Spanc
car… ici les usagers n’ont pas pris connaissance du règlement….

J’ai demandé à deux mairies : le règlement n’existe pas…

Ici tout se passe dans la confiance… « Aie confiance » sale serpent du
Livre de la Jungle, C’est la jungle ici ou... pas ?

Le dernier courrier reçu du Spanc était entaché d’illégalité : je l’ai reçu le 29 avril dernier, et il me demandait de répondre avant le 5 mai
(rappelez-vous c’était le pont du 1er mai).

Je devais choisir :

 j’adhère à la convention de vidange, ou je choisis un autre prestataire
à qui je ferai appel en cas d’urgence.

Problème, ce courrier ne donnait pas les prix du service (il ne serait connu que 3 mois plus tard) et surtout il « oubliait » de mentionner que ce service étant un service facultatif du Spanc, il ferait l’objet d’une redevance particulière.

Des usagers se sont quand même étonnés auprès de la mairie, mais la
réponse était : « Ne vous inquiétez pas, ce n’est qu’une enquête.
Répondez et surtout n’oubliez pas de signer. »

Le prestataire choisi, lui, s’il est destinataire des coupons-réponse,
pourra dire que l’usager s’est engagé.

A priori c’est le bureau d’études qui a préparé les dossiers, organisé le
choix du vidangeur, et, aux dernières nouvelles, ce serait même ce B E qui
aurait été choisi par le Spanc pour faire les vidanges…

Alors tout va bien. Les coupons réponse sont sur son bureau ! Va y avoir d‘la
pression dans les tuyaux !

J‘oubliais. Mon mari, artisan terrassier, avait fait pas mal de chantiers
A N C dans le canton, mais depuis l‘avènement du Spanc, plus
grand chose. Pourtant les clients sont satisfaits, puisqu’une majorité de
dossiers sont classés conformes.

C’est bizarre. Parmi les élus du coin, on compte comme adjoint au chef lieu de canton un Monsieur qui porte le même nom de famille que le directeur du bureau d’études.

Autre bizarrerie : un des élus qui participe au Spanc est salarié (peut-être même dirigeant) d’une entreprise (homonyme) qui installe des ANC.

Ma commune est représentée au Spanc par le maire et le premier adjoint, contre lesquels j’ai du me battre pendant trois ans, et faire intervenir le préfet à trois reprise pour pouvoir installer l’assainissement de mon hangar !

Plus tard le bureau d’études pourrait même proposer au Spanc d’organiser des
chantiers regroupés pour faire les travaux de remise aux normes...

Notre canton compte 850 habitations concernées, réparties sur 10
communes rurales, oubliées de tous et d’internet... »

Lire :

Assainissement non collectif : le dossier d’Eaux glacées

Marc Laimé - eauxglacees.com