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Nouvelle guerre de l’eau en Bretagne

27 février 2007

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Plusieurs locaux de l’association Eau et rivières de Bretagne viennent d’être saccagés par des commandos d’agriculteurs qui ont également proféré des menaces de mort à l’encontre de Gérard Borvon, président de l’association S-Eau-S, responsable « Eau » des Verts, et membre du Comité national de l’eau. Les casseurs veulent faire obstacle à la mobilisation massive des associations de pêcheurs et d’écologistes bretons, qui s’insurgent contre la décision annoncée le 12 février dernier par le préfet de la Région Bretagne de fermer en catastrophe plusieurs captages d’eau pollués par les nitrates. Les pouvoirs publics tentent par ce biais de soustraire la France à une lourde condamnation par la Cour de justice des communautés européennes. L’amende pourrait se chiffrer à 10,9 millions d’euros, assortie d’astreintes financières d’un montant de 100 000 euros par jour. Au total la facture pourrait atteindre les 100 millions d’euros. Ecologistes et pêcheurs dénoncent la duplicité de l’Etat qui va faire payer la note de la pollution par les nitrates aux usagers du service public de l’eau.



Le samedi 24 février 2007 les animateurs de l’antenne de l’association Eau et rivières de Bretagne de Guingamp découvrent le bris de la vitrine de leurs locaux.

Le lendemain, le village de La Roche Maurice, près de Landerneau dans le Nord-Finistère, est littéralement investi par les gendarmes.

Une centaine de pêcheurs, dont certains accompagnés par leurs enfants, eux-mêmes pêcheurs, doivent y tenir une assemblée générale de l’Association de pêche et de protection du mileu aquatique (AAPPMA) de l’Elorn.

L’Elorn est l’une des rivières à saumon les plus réputées de France.

La rivière est sous la garde attentive de l’AAPPMA de l’Elorn, association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique.

L’ association est particulièrement attentive à sa fonction de "protection" du milieu aquatique.

Elle participe, à ce titre, à l’animation de la "Maison de la Rivière" à Sizun, un écomusée qui mérite d’être visité et entretient, pour le bien public, des kilomètres de rives sur la rivière.

Son assemblée générale, prévue de longue date, était donc convoquée pour le dimanche 25 février à La Roche-Maurice, superbe village surmonté des ruines du château médiéval où était supposé avoir résidé le seigneur Elorn, un parmi les Chevaliers de la "Table Ronde".

Les participants ressemblent comme deux gouttes d’eau aux agriculteurs du coin, et certains sont pêcheurs et agriculteurs.

Mais d’autres agriculteurs ont menacé de venir tout casser.

Plusieurs dizaines de personnes parviennent à pénétrer dans la salle. Les organisateurs leur donnent la parole, le ton monte, mais les leaders du groupe doivent en rabattre face aux arguments que leur renvoient pêcheurs et écologistes.

Dépités, les agriculteurs refluent en bon ordre, non sans inviter pêcheurs et écologistes à venir les rencontrer devant leurs troupes et dans leur fief, à Plouvorn, le jeudi 29 février 2007.

Saccage et menaces

Dans la nuit du lundi 26 au mardi 27 février 2000, les locaux brestois de l’association Eau et rivières de Bretagne sont saccagés.

Vitre cassée, photocopieuse renversée, livres et tracts éparpillés autour d’étagères renversées, tags plus qu’explicites : « On aura ta peau Borvon »...

Après Guingamp dans la nuit de vendredi à samedi, c’est donc au tour du local brestois d’Eau et Rivières d’être pris pour cible.

« Déplorable », commentait, le 27 février, dans le Télégramme, l’association, qui tout comme l’ancien porte-parole des Verts Bretagne, Gérard Borvon, a déposé plainte, soupçonnant des agriculteurs d’avoir commis ces dégradations.

Elle regrette que les leaders syndicaux agricoles « aient attisé un peu les haines dans leurs interventions médiatiques. Ces lobbys ont tellement bloqué le processus de l’État qu’ils se retrouvent au pied du mur et laissent des gens désorientés se tourner vers le lampiste du coin ».

Lundi, entre 22 h 15 et 23 h 45, heure de leur dispersion « dans le calme », rapportent les gendarmes de la compagnie de Landerneau, cités par le Télégramme du mercredi 28 février, une cinquantaine d’agriculteurs a manifesté aux giratoires de Mescoden, à Ploudaniel, et Saint-Eloi en Plouédern, sur l’axe Landerneau-Lesneven.

Les paysans ont tagué panneaux de signalisation ou d’information et peint de nombreux slogans sur la chaussée. Signé « BV », comme bassin-versant, ce « bombage » était dirigé, notamment, contre les associations de défense de l’environnement. Elles ont, en effet, pris position dans le débat qui fait rage sur la menace de fermeture des captages d’eau sur l’Horn ou l’Aber-Wrac’h.

La FDSEA des Côtes-du-Nord annonce dans la foulée des manifestations devant les sous-préfectures, à Dinan le mardi 27 février 2007 et à Lannion, le jeudi 29 février 2007.

Grosse colère des éleveurs, particulièrement des plus petits, pris en tenaille entre leurs emprunts faramineux et les objectifs environnementaux, poursuit le Télégramme dans son édition du 28 février. Beaucoup attribuent leurs malheurs à Eau et Rivières.

« Ce sont des gens que l’on a instrumentalisés. La profession agricole se trompe de cible. Eau et Rivières n’est pas le décideur », commentait, la veille, l’association, qui concède que les directives de l’État « sont brutales ». Alors que la FDSEA vient de l’inviter à une réunion publique, à Plouvorn, Eau et Rivières veut préalablement une condamnation, par les leaders syndicaux, de « ces actes d’intimidation ».

Elle appelle, également, l’État à « reprendre sa place et à inviter toutes les composantes agricoles, associatives et les élus locaux autour de la table ».

De leur côté, les Verts du Pays de Brest dénonçaient un « lamentable nouvel épisode.

L’impasse dans laquelle se trouvent aujourd’hui nombre d’agriculteurs n’est pas le fait des écologistes qui n’ont cessé de crier, depuis des années, que le modèle agricole breton les emmenait dans le mur ».

Le président de la FRSEA de Bretagne, Joseph Menard, affirmait, le mardi 27 février, « ne pas être au courant de ces faits », mais soulignait que « les plaintes d’Eau et Rivières de Bretagne commencent à exaspérer le monde des agriculteurs », ajoutant que « la qualité de l’eau en Bretagne s’est beaucoup améliorée, notamment grâce aux efforts des agriculteurs ».

« On ne s’attendait pas à avoir autant de monde. Je vous remercie d’être aussi nombreux. Nous allons continuer à mettre la pression. Grâce à votre mobilisation, les discussions avec le gouvernement sont à nouveau ouvertes. ».

Jean-Luc Dupas, secrétaire général de la FDSEA félicitait ainsi, le mardi 27 février en fin de soirée, les quelque 350 agriculteurs venus manifester dans le calme, devant les grilles de la sous-préfecture de Dinan.

« Les agriculteurs ont du mal à accepter la décision du gouvernement, qui, menacé par Bruxelles d’une forte amende, a demandé aux exploitants de limiter, à partir de 2008, leurs apports d’engrais chimiques (ou déjection animale), à 140 kg par hectare, contre 210 aujourd’hui, précise Ouest-France dans son édition locale du mercredi 28 février.

« En outre, dans la région de Dinan, deux ruisseaux et leurs bassins versants sont dans le collimateur de l’Europe, notamment à cause des taux de nitrates trop élevés : l’Arguenon et le Gouessant.

« Nous avons fait de gros efforts pour faire baisser les taux de nitrates. Avec cette décision, le gouvernement nous a mis un coup de poignard dans le dos. Avec les taux qu’ils veulent nous imposer, on ne pourra même plus cultiver du colza et du blé. »

Quinze ans de renoncement

L’affaire date de 1992 quand l’association Eau et rivières de Bretagne portait plainte contre la France pour non respect d’une directive européenne qui interdit de dépasser les 50 milligrammes par litre de nitrates dans tous les cours d’eau ou les lacs où l’on pompe l’eau du robinet.

Quinze ans plus tard le bilan est aussi catastrophique que scandaleux.

Depuis 1975, année d’adoption de la directive européenne sur la qualité des eaux de surface utilisées pour la production d’eau potable, en dépit des dispositions contenues dans la loi sur l’eau de 1992, du Plan de maîtrise des pollutions d’origine agricole (PMPOA), signé en 1993 (il a englouti en pure perte plus de 3 milliards d’euros et a violemment été dénoncé par la Cour des comptes), de trois programmes successifs « Bretagne Eau Pure » depuis 1990, du Plan d’action de 2002 pour l’agriculture pérenne et la reconquête de l’eau, rien n’y a fait.

Pour Eau et rivières de Bretagne, l’association dont l’action, un comble, est saluée depuis plusieurs années par les ministres successifs de l’Ecologie, Mme Bachelot, M. Lepeltier, Mme Olin, la situation a même empiré…

« Condamnés dès mars 2001 par la Cour de justice des communautés européenne, les gouvernements successifs n’ont pas voulu prendre à temps les mesures indispensables pour défendre les captages de production d’eau potable.

"Pire, depuis trois ans, les discours anesthésiants se sont succédés (« tout va bien »), et les remises en cause de la législation environnementale se sont multipliées : réduction des distances d’épandage du lisier, relèvement des seuils d’autorisation des élevages, extensions des porcheries facilitées dans les zones déjà excédentaires. »

Messieurs Raffarin et Dominique Bussereau ont signé le décret autorisant le relèvement des seuils d’autorisation des élevages la veille du départ de l’ex-Premier ministre de Matignon…

Dans son édition du mercredi 28 février 2007, le Canard Enchaîné relate les propos tenus par M. Marc Le Fur, député UMP des Côtes d’Armor, et membre du « Club des amis du cochon » à l’Assemblée nationale, dans une interview publiée le 1er janvier 2007 par « Porc Magazine ».

Les propriétaires de porcheries devaient déjà au « député du cochon », comme il ne rechigne pas à se faire appeler, une dérogation, votée en octobre 2005, sur la base d’un amendement qu’il avait déposé, qui permet de déroger sous certaines conditions, à la distance de 100 mètres à respecter entre des bâtiments d’élevage et des maisons d’habitation.

Notre homme a de la suite dans les idées.

Il suggère cette fois « d’alléger les contraintes » dans les zones d’excédent structurel (ZES), en passant de 12 500 à 15 000 unités d’azote de référence. Ce qui autoriserait à pouvoir produire à l’hectare 2500 unités d’azote supplémentaires, soit l’équivalent de 500 m3 de lisier, dans des zones déjà saturées, puisque 104 cantons bretons sont classés en ZES.

Or, les timides dispositions adoptées en 1997, qui limitaient à 12 500 unités d’azote de référence à l’hectare l’apport autorisé n’ont permis d’éliminer que 40% des surplus d’azote.

Qu’à cela ne tienne, Marc Le Fur conclut ainsi son interview à « Porc Magazine » : « Les producteurs de porc sont de véritables chevaux de course entravés dans leur envie d’entreprendre et leur volonté d’être compétitifs »…

Chronique d’un désastre annoncé

Gérard Borvon tient minutieusement la chronique du désastre, ce qui lui vaut l’ire des représentants les plus actifs du lobby.

« Depuis plus de trente ans, nitrates d’origine minérale ou lisiers des élevages hors sol sont massivement répandus sur les sols bretons. Représentant 6% de la surface agricole française, la Bretagne cumule 60% de la production porcine nationale, 40% de celle des poules pondeuses et 20% de la production bovine. Ces millions d’animaux produisent une pollution organique, par les nitrates et les phosphates, équivalente à celle de 60 millions d’habitants. Sans compter les pesticides, antibiotiques, oestrogènes et produits divers…

« Résultat : une montée régulière du taux de nitrates dans les rivières à un rythme proche des 2mg/l par an et une augmentation encore plus rapide de ce taux dans les forages.

« Le 15 Juillet 1980 le Conseil des communautés européennes publiait la directive relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine. Un « nombre guide » de 25 mg/l de nitrates était défini, nombre correspondant au seuil à partir duquel une eau pouvait être considérée comme polluée et donc nécessiter des attentions particulières des pouvoirs publics.

« Dans un environnement sain, l’eau des captages ne devrait pas en contenir plus de 1 mg/l, et l’eau de surface plus de 5 ou 6 mg/l.

« A côté de ce nombre guide, une « concentration maximale admissible, (C.M.A) » était arrêtée. Son taux était de 50 mg/l, limite impérative à ne pas dépasser. Une circulaire du 10 juillet 1981 fixait les étapes suivantes :

« A partir du mois d’Août 1985, toutes les eaux destinées à la consommation humaine devaient avoir une teneur inférieure à 50 mg/l. 

« Durant la période transitoire de 4 ans séparant les années 1981 et 1985, l’eau dont la teneur en nitrates serait supérieure à 100 mg/l ne devrait plus être consommée. 

« Il serait interdit de prélever de l’eau pour la traiter dans des rivières où le taux de nitrates dépasserait la norme de 50mg/l.

« Une tolérance serait maintenue entre 50 et 100 mg pour les captages déjà existants, à l’exception des femmes enceintes et des nourrissons.

« Au seuil de l’année 1985 le constat était fait qu’aucun effort sérieux de récupération de la qualité à la source n’avait été entrepris en France et que l’application stricte de la circulaire priverait d’eau de nombreuses régions.

« Le ministère français de la Santé mettait donc en place, le 29 avril 1985, une procédure de dérogation à la norme de la Comission Un délai de cinq années supplémentaires était accordé aux maires pour atteindre les objectifs fixés en 1981.

« Cette dérogation ne pouvait être accordée qu’à titre exceptionnel, à condition qu’un programme énergique de récupération de la qualité soit engagé, et que les consommateurs soient informés de la situation.

« Dans la pratique, ces dérogations qui devaient être limitées à quelques situations locales, se sont étendues à des régions entières et se sont prolongées au delà de la date de 1990 initialement prévue comme ultime limite.

Un déficit en forte croissance

« Ce scandaleux refus d’agir de la part des pouvoirs publics s’accompagnait fatalement d’une inexorable montée de la pollution.

« Les teneurs en nitrates ont en moyenne augmenté de 1 à 2 mg par an. Un rapport de la Direction régionale bretonne de l’environnement indiquait qu’en 1999 en Bretagne, seulement 2% des eaux de surface n’ont pas dépassé à un moment donné le nombre guide européen de 25 mg, et que 49% on atteint des maxima supérieurs à 50 mg, dont 9% au dessus de 75 mg.

« On peut estimer qu’à très court terme 75% des captages en rivière seront dans le rouge. Quant aux forages la plupart ont été abandonnés depuis longtemps.

« Aujourd’hui les captages d’eau du Nord de la Bretagne affichent des taux dépassant largement la norme de 50mg/l et devraient donc être fermés, ce qui, par exemple priverait d’eau la totalité de la population du Nord Finistère.

« Le Nord Finistère est un cas d’école. Zone légumière et élevages porcins se partagent le privilège d’épandre nitrates et pesticides. Résultat : les captages communaux ont été abandonnés l’un après l’autre.

« Sur deux des principales rivières côtières, l’Aber Wrac’h et l’Horn, il a fallu installer des usines de dénitratation de l’eau, et tendre des tuyaux vers les zones voisines. Mais, autre problème, l’Aber Wrac’h dépasse largement les 50mg/l de nitrates et l’Horn voisine les 100mg/l. L’eau ne devrait donc plus y être prélevée pour traitement. »

Il faut sauver la loi sur l’eau

Naturellement les associations écologistes ont réclamé depuis des années la seule mesure apte à réduire la pollution : la réduction des cheptels animaux à des niveaux compatibles avec le pouvoir d’absorption des sols. Mais pour les chambres d’agriculture où règne le FNSEA et pour nombre d’élus bretons, il n’existe qu’un mot d’ordre : pas un cochon, pas une vache, pas un poulet de moins !

Dès novembre 2006, la FDSEA du Finistère, où se retrouvent tous les chantres de l’élevage intensif, anticipant la décision préfectorale qui tombera en février 2007, avait dans un communiqué, exigé « la fermeture des prises d’eau, plutôt que d’infliger de nouvelles contraintes supplémentaires à l’agriculture. »

Reste que la plainte d’Eau et rivières a prospéré dans le même temps dans les arcanes communautaires.

Se sont ainsi succédé deux mises en demeure de la Commission en 1993 puis 1997, une condamnation en 2001 par la Cour de justice des communautés européennes, puis trois nouvelles mises en demeure, en 2001, 2003 puis 2005, cette fois parce que la France ne tenait pas compte de l’arrêt de la Cour.

Après s’être déplacée en Bretagne pour constater que 15 des 29 rivières visées par la plainte d’Eau et rivières accusent un taux de nitrates supérieur à 50mg/l, la Commission, excédée d’être menée en bateau, s’apprêtait dès lors à demander en décembre 2006 à la Cour de justice d’infliger une amende et des astreintes financières à la France. Dans les couloirs, à Bruxelles, on évoquait une amende de 10,9 millions d’euros, assortie d’une astreinte de 100 000 euros par jour.

L’ordre du jour de la Commission européenne présidée par M. José Barroso qui se réunissait le 12 décembre 2006 à Bruxelles prévoyait donc d’engager de nouvelles poursuites contre la France.

En plein examen du très controversé projet de loi sur l’eau et les milieux aquatiques, débattu à l’Assemblée nationale en seconde lecture du lundi 11 au mercredi 13 décembre 2006, avant une ultime Commission mixte paritaire fixée au 20 décembre , le camouflet aurait été cinglant.

Du coup la France déclenchait un véritable blitzkrieg diplomatique et obtenait, très provisoirement, gain de cause puisque l’affaire était, in extremis, retirée de l’ordre du jour de la Commission. Les représentants français ayant excipé des « efforts considérables » accomplis ces dernières années en Bretagne pour améliorer la qualité de l’eau…

Partie remise ? M. Stavros Dimas, commissaire à l’Environnement, promettait de relancer l’examen du dossier nitrates dès janvier 2007…

Pour autant la France devait s’engager sur des mesures qui risquent de ne pas être très populaires.

Elle avait jusqu’au 20 février 2007 pour présenter à la Commission les « mesures renforcées » qu’elle comptait mettre en œuvre.

Neuf captages bretons en situation critique étaient encore concernés.

Quatre seront fermés et parmi eux celui de l’Horn qui alimente Morlaix.

Les autres le seront peut-être en 2008 si rien ne s’améliore. Et on parle enfin d’y réduire les effectifs animaux.

Du coup les usines d’eau potable implantées sur les bassins versants concernés devront elles aussi fermer. Mais surtout de nouvelles interconnexions vont devoir être réalisées.

Les associations écologistes, que l’on traitait de "Cassandre" quand elles prédisaient l’arrêt des usines de traitement, constatent, hélas que leurs prévisions risquent d’être vérifiées. Et elles commençaient donc à se mobiliser dès décembre dernier, pour demander à Bruxelles de refuser ces fausses mesures palliatives.

Cachez cette pollution que nous ne saurions voir

« Cachez cette pollution que nous ne saurions voir », s’indignait Gérard Borvon, président de l’association S-Eau-S.

« En fermant les captages les plus pollués, en réalisant des interconnexions vers les sources moins touchées, en installant des usines de dénitratation sur les rivières indispensables à l’alimentation de villes comme Morlaix ou de secteurs comme celui du Nord Finistère, il a été possible de réaliser des mélanges d’eau fortement nitratée et d’eau dénitratée afin de rester en dessous du seuil de 50mg/l.

« Pour compléter, on a tiré des tuyaux, vers l’Aber Wrac’h, puis vers l’Horn, à partir de la petite rivière Elorn qui alimente déjà toute la région brestoise. Sous couvert de "sécurité en cas d’accident" a-t-on dit aux associations. Mais personne n’était dupe : ces interconnexions serviraient un jour quand il ne serait plus possible de reculer devant la menace de sanction.

« A partir de l’usine de traitement de l’eau de "Pont ar Bled" en amont de Landerneau, et de celle de "Goasmoal" au dessus de Landivisiau, c’est l’ensemble de la population du Nord Finistère, soit 350 000 habitants, qui pourrait être alimentée.

« Or la rivière Elorn est fragile. Le taux de nitrates y atteint déjà la moyenne de 35mg/l. D’autre part elle est bordée par une voie ferrée d’un côté et une route fréquentée de l’autre. Un accident y est toujours possible. »

Consternant, quand on sait ce qui a suivi, le préfet de la région Bretagne n’en déclarait pas moins, « droit dans ses bottes », le 18 décembre 2006 que la Bretagne devait « persévérer vigoureusement dans ses efforts » pour améliorer la qualité de l’eau ! Bel effort…

Il précisait, au passage, que si les rivières bretonnes s’étaient un peu plus chargées en nitrates l’année dernière (31mg/l en moyenne sur 2005-2006 contre 28,3 mg/l en 2004-2005), c’était la faute aux « facteurs climatiques » et non à l’épandage de lisier…

Moratoire électoral

Le commissaire européen responsable de l’environnement, M. Stavros Dimas, acceptait le 6 février 2007 de prolonger les tractations avant de saisir la Cour européenne de justice.

« La proximité des élections n’est pas un argument direct mis en avant par les représentants français, mais la Commission est assez grande pour savoir d’elle même qu’une initiative trop forte peut enflammer la campagne », confiait un diplomate au quotidien Le Monde, en espérant que le dossier « nitrates », ou un autre, ne sorte pas des tiroirs bruxellois au mauvais moment.

Dès le 12 février 2007, le préfet de la région Bretagne, M. Jean Daubigny, annonçait dès lors à l’occasion d’une réunion avec les élus, les collectivités territoriales, la chambre d’agriculture et des syndicats professionnels que plusieurs actions avaient été décidées.

La France venait d’adresser à Bruxelles une série de « mesures supplémentaires et renforcées »

En Bretagne neuf captages sur cent dix sont encore concernés par le contentieux relatif aux nitrates.

« Grâce à des mesures spécifiques pour cinq d’entre eux, limitant à 140 kilos par hectare le seuil maximum d’apports azotés, un retour à la norme est attendu en 2008-2009. Des indemnisations d’un montant oscillant entre 130 et 600 euros par hectare sont prévues.

« Pour les quatre bassins versants les plus dégradés (Echelles en Ille-et-Vilaine ; Horn dans le Finistère, ainsi que Ic et Bizien dans les Côtes d’Armor), l’Etat propose la réduction progressive du cheptel, sur la base du volontariat, la limitation des apports azotés, et la suspension temporaire des prises d’eau non conformes, en interconnexion avec les autres ressources en eau.

Concrètement, les captages de Plouénan, dans le Finistère, et dans trois communes des Côtes d’Armor, à Binic, Montours et Pleudaniel seront donc fermés.

« Le coût global n’est pas encore chiffré. Il sera, de toute manière, inférieur au montant des sanctions européennes, indiquait-t-on à la préfecture. »

"Un coup de poignard", réagissait le monde agricole…

« L’Union européenne nous demande d’obtenir des résultats dans les deux à trois années à venir maximum. Nous ne pouvons donc pas attendre, et en plus sur 4 des bassins versants concernées nous sommes sur des résultats qui depuis quatre à cinq ans ne marquent pas de progression sur la charge de l’eau en nitrate […] il nous faut donc des mesures supplémentaires sur ces endroits là », rétorquait le préfet de région en justifiant ces mesures.

Sur la trentaine de bassins versants concernés en 2001, 9 posent donc toujours problème ; leur captation d’eau serait purement et simplement arrêtée.

C’est le cas de celui des Echelles, près de Fougères, dans un tissu de petites exploitations dont les sols, bien que d’excellente qualité agricole, reculent déjà devant le développement urbain. Et si la réduction prévue de 30% du cheptel était appliquée, une baisse de revenus serait inévitable, avec des répercussions économiques sur toute la région.

« Si une fermeture provisoire des captages d’eau pour les agriculteurs est prononcée, ça veut dire une baisse significative de l’élevage dans ces bassins versants et donc la fermeture de certaines exploitations donc une atteinte a l’économie locale dans ces bassins concernés » affirmait Joseph Ménard, le président de la chambre d’agriculture d’Ille-et-vilaine.

Le monde agricole estime en fait que ces mesures françaises sont avant tout un affichage de bonne volonté adressé à Bruxelles, et soutient qu’en poursuivant plus en douceur l’effort engagé depuis 2001 la barre fatidique des 50 mg de nitrates par litre d’eau aurait été atteinte dans les 5 ans…

Eau et rivières appelle à l’action

Conjointement, dès l’annonce du Préfet de région, Eau et rivières sonnait la mobilisation :

« Le projet de « suspendre » quatre nouveaux captages représente une gabegie financière considérable : des dizaines de millions d’euros ont été investis par les collectivités, pour pomper dans les rivières, traiter l’eau, mettre en place des périmètres de protection, développer des programmes bassins versants…

« Casser le thermomètre n’a jamais fait baisser la fièvre : la suspension des captages ne règlera rien au problème des nitrates. Comme la dénitratation des eaux de l’Ic et de l’Horn - ainsi que les associations l’avaient dénoncé à l’époque - n’a en rien changé la courbe des nitrates, bien au contraire…

« Même sans captages, les nitrates continueraient de se déverser en mer et de provoquer les marées vertes, et la France devrait appliquer la Directive cadre sur l’eau qui impose le « bon état écologique » en 2015 ! Il n’est d’ailleurs pas certain du tout, que cette mesure suffise à écarter le risque de sanctions européennes.

(Faut-il y lire ironiquement un aveu ? Depuis le 31 janvier dernier le site du Medd affiche une page annonçant la mise en oeuvre des 9èmes programmes des Agences de l’eau pour la période 2007-20012... Sur qu’à ce régime en 20012 on y sera encore ! Et en dépit de messages courtois de votre serviteur le bug perdure...)

« Eau et rivières de Bretagne refuse qu’une nouvelle fois, les consommateurs d’eau soient les lampistes. »

L’association demande dans la foulée aux collectivités locales concernées de réunir leur comité syndical et de prendre position sur les mesures de fermeture projetées par l’Etat.

« Il faut que chaque citoyen sache précisément quels sont les élus qui s’opposent à cette mesure et ceux qui cautionneraient cet abandon. »

Et annonçait qu’elle rassemblerait le samedi 17 février toutes les associations d’usagers concernées, pour étudier les actions à mener : manifestation régionale, grève des factures d’eau, recours juridiques, interpellation des candidats aux prochaines élections, « afin de s’opposer à cette capitulation ».

Les consommateurs bretons vont trinquer

Tous ces tuyaux il faudra bien les payer.

Tout porte à croire que les consommateurs seront à nouveau mis à contribution, alors que ces secteurs de forte pollution sont déjà ceux où l’eau est la plus chère.

Comme tous les consommateurs de l’hexagone, ils verront également leur redevance pollution (celle qu’ils paient parce que d’autres les ont pollué), augmenter de 50%.

La ministre n’avait demandé que 30% d’augmentation mais pour répondre à la menace européenne, les députés ont réclamé 50%. Au premier rang de ceux-ci la députée de Morlaix, Mme Marylise Lebranchu.

Pollués, rackettés, bientôt privés d’eau… les consommateurs bretons trouvent le breuvage amer.

Mais peut-être échapperont-ils au pire, si l’on en croit l’édition du 28 février 2007 du Canard enchaîné, depuis longtemps attentif au désastre environnemental breton.

Une société bretonne spécialisée, comme par hasard, dans la nutrition animale, l’entreprise Olmix, avait mis au point une « machine à laver les algues », et assurait, grâce à elle, pouvoir débarrasser les côtes bretonnes des 300 000 tonnes d’algues vertes qui échouent chaque année sur le littoral.

Notre « machine à laver », testée l’été dernier sur une plage des Côtes d’Armor, et qui engloutissait gaillardement 12 tonnes de limonaires à la journée, les lavait donc pour pouvoir fabriquer, après les avoir égouttées, une mixture assaisonnée d’argile destinée… à nourrir les cochons !

Bouclant ainsi la boucle, et évitant d’affronter le problème à sa source : celui de la surpopulation porcine en Bretagne.

Plusieurs associations s’en étaient émues et, au vu des évènements récents, on doute que les collectivités alléchées s’aventurent désormais à subventionner la dizaine de machines à laver dont Olmix assurait qu’elles digéreraient sans problème aucun 100 000 tonnes d’algues par an.

Encore des aigris qui vont fulminer contre les écolos…

Continuer à se parler ?

Jeudi 1er mars le conflit et les débordements auxquels il a donné lieu depuis quelques jours ne semblait pas devoir rapidement trouver les voies de l’apaisement.

Mardi 27 février Radio France Bleu Breiz Izel avait notamment invité à le commenter à la médiathèque de Lannion, dans les Côtes d’Armor, le préfet Philippe Rey, Camille Rigaud, président d’Eau et rivières et Gaby Le Troadec de la Confédération paysanne, qui ont parlé de l’eau sur fond du renforcement des mesures imposées par Bruxelles.

« Beaucoup a été fait, mais les nitrates subsistent sur neuf captages en Bretagne, dont six dans notre département. On ne peut échapper à ce contentieux européen. Si on attend jusqu’au bout, les pénalités seront insupportables pour la France », résumait le préfet des Côtes-d’Armor.

Deux captages sont donc suspendus, celui du Bizien (La Roche-Derrien) et de l’Ic (région de Binic).

Dans les zones concernées, l’apport d’azote à l’hectare sera limité à 140 kilos, contre 210 kilos actuellement, d’où une diminution à venir du cheptel.

Ce qui fait bondir Jean-Pierre Le Bihan, de la FDSEA : « Nous n’avons pas été associés à ces nouvelles mesures. Nous sommes écoeurés. Cela fait quinze ans que nous avons engagé des actions. S’il demeure des problèmes, la qualité de l’eau alimentaire est bonne en Bretagne. »

Pour Gaby Le Troadec de la Confédération paysanne : « Sans argent, nous avons fait de gros efforts, mais on a l’impression de revenir à la case départ. La profession a traîné des pieds, on se retrouve le nez dans l’eau. »

Face à ces mesures draconiennes : « On veut nous faire passer pour des boucs émissaires. Nous ne sommes pas à l’origine de ce contentieux, ce sont les nitrates », rappelle Camille Rigaud, le président d’Eau et rivières.

Pour avancer, il faudra « continuer à se parler », préconise pour sa part René Régnault, vice-président du comité de bassin Loire-Bretagne.

Forte mobilisation en faveur d’Eaux et rivières

Toujours le mardi 27 février, lors d’une conférence de presse à Brest, Eau et rivières recevait le soutien d’une douzaine d’associations militant pour la qualité de l’eau en Bretagne.

Bretagne Vivante, l’UFC-Que Choisir, la CLCV, le collectif Eau pure Cornouaille, des associations agréées de pêche, entre autres, affichaient leur solidarité après le saccage, dans la nuit du lundi 26 au mardi 27 février, de l’antenne brestoise de l’association.

Les responsables d’ERB attribuaient cette action aux agriculteurs, qui lui reprochent d’avoir attiré l’attention de la Commission européenne sur les taux excessifs de nitrates dans les cours d’eau bretons.

« Les associations n’ont jamais demandé que la France soit condamnée. Si des mesures n’ont pas été prises pour restaurer la qualité des eaux ces quinze dernières années, c’est bien parce que le syndicat agricole majoritaire s’y est opposé, soulignait Jean-Marie Béghin, d’Eau et rivières, visant directement la FNSEA. Rejeter la faute sur les associations constitue une escroquerie intellectuelle ».

Les associations soulignaient « l’impréparation totale » de l’État. Et s’interrogeaient sur l’impact des actions violentes menées ces derniers jours : « On va voir si l’État va une fois de plus capituler ou tenir bon. »

La fédération PS du Finistère « dénonçait fermement » les dégradations commises. « Leurs auteurs doivent être identifiés et jugés. »

Les conseillers régionaux Verts « condamnent la violence de ces actes inacceptables dans une société démocratique : effraction, saccage, menaces de mort... »

Les élus verts demandaient à l’État de sanctionner rapidement les responsables de ces actes « inadmissibles ».

Dominique Voynet, candidate des Verts à la présidentielle, estimant que « pris au dépourvu, le monde agricole cède à la panique, et se trompe d’ennemi ».

La Confédération paysanne « condamne sans réserve » et dénonce « ces méthodes d’un autre âge, qui consistent à employer la force et l’intimidation... »

Elle prévient que « vouloir tenter l’épreuve de force avec le monde associatif, c’est aussi prendre le risque de se mettre l’ensemble des consommateurs à dos ! »

Le Groupement des agriculteurs bio du Finistère soutient lui aussi Eau et rivières. « Ceux qui voient en Eau et rivières leur ennemi sont en train de s’attaquer à la société civile et creusent encore plus profondément la fracture entre le monde agricole et les citoyens. »

Pour Cohérence, qui fédère 120 associations bretonnes engagées dans le développement durable et solidaire, ces actes « en disent long sur les dérives d’un modèle agricole productiviste qui élimine un nombre croissant de paysans par le jeu des concentrations et amène certains de ses adeptes à recourir à la violence ».

Nouvelles manifestations d’agriculteurs

Mais dans la soirée du mercredi 28 février, après l’opération dinnanaise de mardi, quatre cents agriculteurs manifestaient à nouveau à Guingamp.

Dans le calme et sous la pluie, mais en colère et visages tendus, ils se réunissaient à 20 h 30 devant les grilles de la sous-préfecture pour dénoncer la limitation annoncée des apports d’engrais chimiques à 140 kilos par hectare.

« Depuis 15 jours, on a vu nos élus, on a manifesté à plus de 1 100 à Saint-Brieuc, on a été reçu à Matignon », rappelait Jean-Jacques René, de la FDSEA.

A 22 h 00, un grand feu était allumé pendant qu’une délégation était reçue par le sous-préfet. Qui leur annonçait la réalisation d’expertises sur l’applicabilité des mesures.

Vers 22 h 30, les manifestants mettaient en place un barrage filtrant sur la RN 12, dans les sens Brest - Saint-Brieuc.

Ils ralentissaient une centaine de véhicules à la hauteur de la sortie de Ploumagoar et distribuaient des tracts sous une pluie battante. A 23 h 00, le barrage était levé, avec engagement de se retrouver dans la soirée du jeudi 1er mars à Lannion.

« Si rien ne bouge, nous lâcherons les chiens »

Lannion, jeudi 1er mars à 21 h 30. Le périmètre de la sous-préfecture est bouclé par les forces de l’ordre, décrit Ouest-France dans son édition du vendredi 2 mars 2007.

Près de 250 agriculteurs affluent. L’ambiance est calme mais la profession reste déterminée. Après Saint-Brieuc, Dinan et Guingamp, les paysans terminent leur tour des sous-préfectures des Côtes-d’Armor. Ils protestent contre le renforcement « radical », par l’État, des mesures de protection de l’eau. Notamment la réduction des apports de nitrates à l’hectare. Au total, neuf captages d’eau sont concernés.

Selon la FDSEA, 1300 exploitations seraient concernées dans le département, dont 23 communes dans le Trégor (Camlez, Pluzunet, Cavan, Quemperven, Langoat...).

Pour les agriculteurs, la situation est alarmante : « Si la mesure passe, c’est 25 à 30 % du cheptel qui disparaîtrait. C’est bien simple, c’est comme si on nous disait de partir. »

Les paysans ne cachent pas leur amertume : « On ne comprend pas, ce n’est pas un sujet que l’on découvre. Ça fait 10 ans qu’on y travaille et, depuis 3 ans, on mesure les efforts. Globalement, on tend vers la stabilité ou la baisse. »

Jean-Jacques René, de la FDSEA, enfonce le clou : « Nous avons beaucoup investi sur nos fonds propres et, aujourd’hui, on nous montre du doigt. Je ne connais pas une seule profession qui a autant mis de sa poche pour se mettre aux normes. »

Vers 22 h00, une délégation a été reçue par le sous-préfet Thierry Suquet.

Puis, après avoir envisagé une action coup de poing, les manifestants se sont finalement quittés dans le calme.

Ils ont toutefois promis de muscler leurs actions si la limitation de 140 kg unité azote par hectare n’était pas revue. « Nous lâcherons les chiens », ont-ils prévenu.

La Région « condamne » mais « comprend » les agriculteurs…

Cette fois c’est dans l’édition brestoise d’Ouest-France du vendredi 2 mars que l’on découvre de nouvelles réactions suscitées par le saccage des locaux brestois d’Eau et rivières.

Au premier rang desquelles celle de la Région Bretagne, qui « condamne » mais « comprend » l’indignation des agriculteurs…

Les militants associatifs s’étonnaient du « silence radio » des élus après le saccage des locaux brestois d’Eau et rivières de Bretagne dans la nuit de lundi à mardi, souligne le quotidien. La Région Bretagne a pris le temps de la réflexion. Hier, en fin d’après-midi, elle a réagi dans un communiqué aux mots soigneusement pesés.

« La Région Bretagne condamne les attaques contre les locaux d’Eau et rivières et dénonce les menaces proférées à l’encontre de militants politiques et de leur famille. La Région Bretagne exprime son soutien à l’émotion suscitée par tant de violence. La Région comprend l’indignation ressentie par les agriculteurs à la suite de la fermeture des captages en Bretagne nord. Cependant, aucun désaccord, réel ou perçu, ne justifie des actes de violence.

« La Région Bretagne maintient que la réponse de l’État, très globalisante, est injuste et qu’il est indispensable de reconnaître les efforts de nombreux agriculteurs. Le droit pour un agriculteur à cultiver ses terres et à mener son élevage fait partie de nos valeurs et de nos traditions. La Région Bretagne a engagé un dialogue avec les différentes parties prenantes. Elle soutient que la compréhension mutuelle ne peut être atteinte que sur les bases d’un dialogue retrouvé. Elle demande à l’État d’utiliser toute son influence afin de rétablir un climat constructif comparable à celui mis en place avec la charte pérenne. »

On mesure à quel point le personnel politique breton est « piégé » par le soutien qu’il a apporté depuis des décennies à la profession agricole !

Pour sa part l’Union démocratique bretonne (UDB) « condamne à la fois ces méthodes violentes trop souvent impunies et l’attitude de l’État. Celui-ci, passant brutalement du non-respect laxiste des directives européennes aux mesures drastiques, se montre incapable de jouer son rôle de régulateur et d’agent de concertation. »

Pour Frankiz Breizh. :« Après plus de 30 ans de luttes, de réflexions, de travaux au service de la population bretonne, les défenseurs d’une nature saine, d’une eau potable, d’une eau pure en Bretagne sont frappés lâchement par les tenants du « droit à polluer ». [...] L’État français déjà condamné au niveau européen et ne voulant plus payer d’amende est dans une impasse faute d’avoir pris les décisions qui s’imposaient. Nous ne devons pas en faire les frais. »

Descente à Paris

Plus de 450 personnes participaient, dans le calme, souligne le Télégramme du 2 mars, à l’invitation de la FDSEA, à la réunion organisée à la salle polyvalente de Plouvorn, jeudi 1er mars en soirée, pour évoquer la situation « inacceptable » que les dernières mesures annoncées par l’Etat pour protéger les captages d’eau potable risqueraient de générer, sur l’activité agricole du bassin-versant de l’Horn notamment.

Invités la semaine précédente, les représentants de l’association Eau et Rivières ont, comme prévu, décliné, compte tenu des violences intervenues depuis lors.

« Nous refusons tout bonnement ces mesures, car c’est un désastre humain », a martelé Jacques Jaouen, président de la chambre d’agriculture du Finistère.

Et, à destination des associations de défense de l’environnement : « Leur objectif est tout bonnement de casser de la production, de casser du paysan ».

Pour Thierry Merret, il est « hors de question d’accepter quoi que ce soit dans cette affaire, car au-delà de nos quatre bassins-versants, c’est l’agriculture bretonne dans son ensemble qui est menacée ».

Le président départemental de la FDSEA en a profité pour annoncer « une descente en masse » au Salon de l’agriculture, qui s’ouvre demain à Paris, histoire d’en discuter de vive voix avec les ministres concernés...

A suivre...

Marc Laimé - eauxglacees.com