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Canicule et vandalisation des poteaux d’incendie
19 juin 2017
par
- eauxglacees.comA l’occasion d’un récent pic de température, des centaines de poteaux d’incendie ont été vandalisés en région parisienne, offrant le spectacle de milliers de jeunes se rafraichissant "comme en Amérique". Outre l’effet délétère de l’addiction aux séries télé et aux "réseaux sociaux", laissant augurer de l’amplification certaine du phénomène, se pose aussi une autre question : qui est responsable ?
En matière de responsabilité, une réponse récente du ministre de l’Intérieur à une question parlementaire (n° 25604 JO Sénat du 11-5-2017), offre une première piste de réflexion, s’agissant, non des poteaux à incendie, mais des bouches à clé.
"Le rattachement des bouches à clé au domaine public routier doit être apprécié au regard des dispositions de l’article L. 2111-2 du code général de la propriété des personnes publiques, selon lesquelles les éléments constituant un accessoire indissociable d’un bien appartenant au domaine public sont également rattachés à ce dernier.
La jurisprudence administrative récente attribue explicitement la responsabilité des dommages causés par des bouches à clé à la personne publique compétente en matière de gestion de la voirie (CAA de Douai, 7 février 2017, n° 15DA00633 et CAA de Marseille, 16 mars 2017, n° 15MA01220).
Par conséquent, dans la mesure où les bouches à clé, en tant qu’éléments permettant l’accès à la manœuvre d’un robinet de branchement ou d’une vanne, présentent un lien de dépendance fonctionnelle avec la voie, elles relèvent de la propriété et de la responsabilité de la collectivité ou de l’établissement public compétent en matière de voirie."
La gestion cahotique des poteaux d’incendie
S’agissant des poteaux d’incendie c’est une autre histoire, qui vient donc d’entrer dans la chronique des faits divers, et pire encore est en passe de devenir un "fait culturel", sous l’appellation de street pooling :
" (...) Aucune statistique nationale n’existe sur les ouvertures intempestives des bouches à incendie. Mais pour la seule journée de mercredi 21 juin, le Syndicat des eaux d’Ile-de-France (Sedif), qui assure l’alimentation en eau potable de cent cinquante communes autour de la capitale, en a relevé plus de cinq cents, essentiellement en Seine-Saint-Denis, selon des chiffres communiqués au Monde. «
Cela correspond à 150 000 m3 d’eau perdue, soit l’équivalent de soixante piscines olympiques, ou la consommation journalière de cent mille personnes », précise-t-il, écrivait Le Monde le 22 juin...
Courcouronnes, Essonne, 21 juin 2017.
Ils sont propriété de la collectivité sur le territoire desquelles ils sont obligatoirement implantés, au titre des pouvoirs de police administrative du maire pour permettre aux pompiers d’intervenir en cas d’incendie.
Et doivent être conformes à des normes dont les SDIS ont la charge de vérifier la conformité.
Le problème étant, qu’hormis le cas où le service est en régie, la gestion des poteaux est confiée à Veolia, Suez ou Saur, quand la collectivité leur a délégué la gestion de l’eau potable et/ou de l’assainissement.
Mais la gestion des poteaux n’est pas incluse dans la DSP eau ou assainissement, elle fait l’objet de marchés de prestations distincts, des milliers en Ile-de-France pour Veolia et Suez.
Compte tenu de l’organisation interne des grands groupes, ce sont toutefois bien évidemment leurs personnels affectés aux contrats de DSP eau et-ou assainissement, qui gèrent aussi les prestations de l’entretien des poteaux d’incendie.
Or ces dernières années, Veolia et Suez, d’une part ont perdu ou gagné de nombreuses DSP, d’autre part ont restructurés à la hache leur organisation interne (*).
Confidence d’un responsable syndical : "Quand on perd un gros contrat de DSP, les personnels qui y étaient attachés, soit passent chez le concurrent qui a remporté le contrat, soit en régie, soit sont redispatchés sur une autre implantation locale à 30 ou 50 kilomètres de là. Mais l’ancienne agence locale, soit n’a plus assez de personnel, soit disparaît purement et simplement. Dès lors on n’arrive plus à affecter les personnels nécessaires, qui travaillaient pour l’essentiel sur la ou les DSP qui ont disparu, à l’entretien des poteaux d’incendie, qu’ils effectuaient auparavant, quand cela représentait une part marginale de l’activité de l’agence. Avec les restructurations incessantes que nous avons connu ces dernières années, ça devient un vrai souci auquel on n’arrive plus à faire face."
D’où la difficulté qu’éprouvent désormais les collectivités qui font face à la vandalisation croissante des poteaux d’incendie, devenue une vraie mode, et qui appellent désespérément Veolia ou Suez, qui ne parviennent plus à réagir en temps et en heure, pour les raisons évoquées ci-dessus...
Et l’on ne vous parle même pas du cas de figure où la construction d’un poteau a été confiée à un propriétaire privé ou à un aménageur :
http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-70985QE.htm
Noter enfin que les problèmes ne font que commencer, attisés par les postures aussi avantageuses que démagogiques des thuriféraires intéressés de "l’eau en ville", des baignades n’importe où n’importe comment, et de tout le baratin qui va avec...
A suivre.
(*) Lors du Comité central d’entreprise de Veolia Eau du 20 juin 2017, annonce d’un 4ème Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) en 3 ans, soit 570 suppressions d’emploi et 1 000 mobilités géographiques et fonctionnelles, avec, pour la première fois, des licenciements secs.
Les Centres clients de Rennes, Toulouse, Cergy, Saint-Denis et Metz fermeront en octobre 2018, avant ceux de Nantes, Nice et Rouen en octobre 2019, remplacés par une "capsule" externalisée, Payboost, héritage de l’ère Franchi, rendue tristement célèbre par le scandale Olkipay...
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