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Le pluvial ! Monsieur Hulot
6 juin 2017
par
- eauxglacees.comLa très calamiteuse (non) gestion des eaux pluviales et de ruissellement, bricolée depuis un demi-siècle dans les plus grands désordre et opacité, et dans un flou réglementaire qui entrave tout progrès réel, est l’une des bombes à retardement dissimulée dans les recoins poussiéreux de l’Hotel de Roquemaure. Une machine infernale d’un coût de deux milliards d’euros par an, que nul ne sait comment désamorcer, comme en témoigne l’enterrement du rapport établi par le CGEDD enfoui depuis des mois dans les catacombes du ministère (dit) de l’environnement.
Disons le tout net. L’activisme propagandiste des tenants intéressés des « techniques alternatives », qui occupent le devant de la scène depuis une dizaine d’années en multipliant colloques, publications et autres communiqués triomphalistes pour pérenniser leur business (vendre leurs solutions « douces » aux neuneux évangélisés par une armée de gourous zélés) relève du foutage de gueule absolu.
Il dissimule et tente de faire écran à une situation calamiteuse, aussi inepte qu’illégale.
Pour faire simple les collectivités locales ont trop souvent fait littéralement n’importe quoi en la matière depuis un demi-siècle (imperméabiliser tout ce qui peut l’être et construire n’importe quoi, n’importe où, n’importe comment, de préférence en zone inondable, tant qu’à faire, et ça continue bien évidemment à donf chaque jour que Dieu fait), l’encadrement réglementaire de la gestion des EP est un foutoir indescriptible, et leur financement très largement illégal.
A force ça finissait par faire désordre. Le CGEDD a donc fini par s’emparer du bouzin, et établi un rapport piloté par Pierre-Alain Roche, spécialiste des missions rock and roll (Sivens, la Guadeloupe, et on en passe), dont il dévoilait les grandes lignes lors du colloque « Gestion des eaux pluviales et développement urbain » organisé par le conseil départemental des Hauts-de-Seine le 28 mars dernier.
D’abord savoir qui fait quoi, et pourquoi ?
Comment identifier l’objet "pluvial", qui interfère aujourd’hui avec le risque inondation (Gemapi, sors de ce corps), la police des eaux et les priorités des agences de l’eau ?
Qui décide de quoi, de la commune à l’EPCI, des syndicats de rivières aux services de l’Etat, des Epage aux EPTB ? En réalité nul ne le sait vraiment, on fait comme si…
Du coup c’est le bordel intégral et permanent dans chaque collectivité entre services (assainissement, espaces verts et voirie), et en externe avec les usagers, notamment sur les prescriptions en matière d’urbanisme.
Avec des bureaux d’étude spécialisés qui tirent les marrons du feu en intervenant à chaque étape de la filière…
Pour comprendre dans quel monde on vit, le ministère (dit) de l’Environnement (ce qu’il en reste) vient de mettre en ligne un questionnaire, AKA collectivités, c’est-y comment que vous magouillez avec Gemapi et la loi NOTRe... (On rêve...).
Quant au financement du pluvial, le trou noir ! Alors que la gestion des EP constitue (en principe) un service public administratif (SPA) et devrait être financée par le budget général de la collectivité, et donc par une fiscalité locale s’appliquant aux usagers, mais surtout aux aménageurs de tout poil, publics comme privés, il est en réalité largement subsidié, dans des conditions largement illégales en droit, par le budget annexe du SPIC de l’assainissement, compétence financée, via leur facture d’eau, par les usagers domestiques.
Et on ne vous raconte pas le cauchemar quand le pluvial est délégué à Veolia, Suez ou Saur !
Rien d’étonnant dès lors qu’il n’existe aucune comptabilité fiable en la matière, comme le confesse le CGEDD !
Alors qu’on a des armées d’huluberlus giga-diplômés qui vont nous modéliser sur 400 pages la compensation du transfert de deux gypaêtes barbus et de trois grenouilles de NDDL au Grau du Roi, pour le pluvial, nib, que dalle, on sait pas…
« Nous estimons que le coût de la gestion des eaux pluviales et de ruissellement représente environ 2 milliards d’euros à plus ou moins 500 millions, soit de l’ordre de 25 à 50 euros par habitant hors personnel », expliquait lors du colloque précité, Pierre-Alain Roche, le coordonnateur du rapport .
Le CGEDD prône dès lors de promouvoir une nouvelle approche en développant un programme à dix ans, en privilégiant la prévention à la source et en améliorant la résilience urbaine aux événements extrêmes.
Il propose ainsi d’expérimenter une réforme de la police de l’eau.
« Les collectivités volontaires pourraient sur la base d’un schéma directeur de maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement, approuvé par le préfet, disposer d’une autorisation globale de rejets. Elles assumeraient aussi la responsabilité de prescrire et contrôler les dispositifs de rejets des tiers au milieu naturel », expliquait encore Pierre-Alain Roche.
Le rapport a aussi élaboré quatre scénarios de clarification des compétences sur les eaux usées, les eaux pluviales, les eaux de ruissellement et la Gemapi.
Avec une préférence affichée pour une compétence globale eaux usées, eaux pluviales et eaux de ruissellement attribuée à une autorité organisatrice du service qui construirait un schéma directeur unique.
« Ce service public industriel et commercial serait financé par un budget annexe alimenté par une contribution des usagers via leur facture d’eau, une compensation des charges de service public assurée par le budget général de la collectivité et une taxe imperméabilisation affectée », concluait Pierre-Alain Roche.
C’est là que ça bloque. Personne n’est d’accord sur le financement.
Surtout pas les collectivités, et encore moins les aménageurs de tout poil, qui ne veulent pas raquer un radis et militent ardemment pour taxer le crétin d’usager domestique, as usual.
Ca craint et ça urge. Au boulot Monsieur Hulot !
Lire aussi :
– Le casse-tête de la gestion des eaux pluviales
http://www.eauxglacees.com/Le-casse-tete-de-la-gestion-des
Les eaux glacées du calcul égoïste, 10 septembre 2008
- eauxglacees.com