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Du changement dans la continuité…
26 avril 2017
par
- eauxglacees.comLe CGEDD en démineur, escalade la face Nord de la continuité (écologique) pour prôner le « changement », avec davantage de concertation, afin de concilier ladite « continuité » avec les enjeux patrimoniaux et énergétiques.
Dans le rapport rendu public au début du mois d’avril, le Conseil formule pas moins de 15 « recommandations » pour assouplir la politique de restauration de la continuité écologique en prenant mieux en compte les autres usages en particulier la valeur patrimoniale des moulins.
« La situation actuelle, qui a justifié cette troisième mission du CGEDD, se caractérise par sa tournure conflictuelle, du niveau local jusqu’au niveau national. », soulignent d’emblée les auteurs.
C’est de fait la troisième fois qu’ils vont au charbon depuis 2011...
La première mission évaluait le plan d’actions pour la restauration de la continuité écologique en 2011-2012. La seconde était une mission d’assistance pour la réalisation d’une charte « Moulins à eau et continuité écologique », qui n’a jamais pu aboutir tant les tensions étaient fortes entre nos amis des moulins et les services de l’Etat..
Pour le Conseil, le plan d’actions lancé en 2009, quoique légitime présente « des objectifs ambitieux mais des coûts élevés avec des délais peu réalistes ». Ca sent déjà le sapin.
Il souligne ensuite, « en même temps » comme dirait l’autre, histoire de ne pas désespérer les DREAL, que « le manque d’association des propriétaires de moulins qui se considèrent victimes de cette politique, alors qu’ils reçoivent des aides financières importantes et devraient au contraire se sentir bénéficiaires des actions entreprises par ce programme sur leurs ouvrages ».
Et rappelle que le plan concerne 5800 moulins sur plus de 20 000 obstacles recensés, ce qui représente un peu moins du tiers des moulins présents sur les cours d’eau en France.
Il souligne aussi l’existence d’une large palette de solutions pour répondre aux objectifs de la restauration de la continuité : effacement des ouvrages bien sûr mais aussi l’abaissement du niveau d’eau, le contournement, l’installation de passes à poissons ou encore l’ouverture de vannes, qui peuvent aussi être envisagés selon les situations.
Reste que les pratiques sont variables d’un bassin à l’autre. Ainsi, selon les données des agences de l’eau, en Adour-Garonne, l’effacement a été la solution retenue pour 14 % des opérations aidées alors qu’en Seine-Normandie, cela concerne 75 % des projets aidés.
De la concertation par temps d’orage
Pour sortir de la nasse, et éviter la propagation des conflits locaux, le Conseil va nous sortir à ce stade des kilotonnes de langue de bois, qui donneront naissance à la multiplication des réunions et de powerpoints associés autour de la « concertation »…
Et de prôner dans l’idiome « techno » de rigueur une « mise à plat des enjeux et un partage des objectifs à une échelle territoriale cohérente ».
Et de souhaiter conséquemment la mise en place de diagnostics territoriaux prenant « en même temps » en compte des enjeux environnementaux, patrimoniaux, énergétiques et ceux liés aux autres usages.
« Si l’objectif de continuité est incontournable, il peut être assuré avec des solutions moins radicales, quitte à ce que celles-ci soient moins efficaces en termes de gain écologique lorsque la valeur patrimoniale du moulin le justifie », précise-t-il.
(Autrement dit on va faire semblant et tout le monde sera content).
Les auteurs recommandent dès lors de mettre en place une méthodologie de reconnaissance d’un « moulin patrimonial » à remettre aux préfets.
(On devrait même organiser des cérémonies pour la délivrance de la médaille : en marche tous ensemble vers la continuité apaisée…)
Pour ces moulins, il faudra dès lors étudier en priorité des interventions « douces » comme des manœuvres régulières du système de vannage ou leur automatisation.
(Sans doute en recommandant aux soutiens d’En Marche qui n’auront pas réussi à piquer leur place aux vieux croutons du monde ancien de créer des startoupes idoines, qui seront financées par la Banque européenne d’investissement, et participeront à la revitalisation des territoires ruraux, avec comme bénéfice annexe l’éradication des légions frontistes qui prospèrent au long des chemins de halage, territoires perdus de la République ?)
Les auteurs proposent aussi qu’au sein de chaque bassin, une « instance » soit chargée du pilotage et de l’évaluation des programmes de restauration des cours d’eau et qu’elle associe des représentants de propriétaires de moulins et la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) pour l’aspect patrimonial. Et suggèrent dès lors tout à fait logiquement que les associations de valorisation des moulins intègrent les comités de bassin des agences de l’eau au sein du collège des usagers…
Mobiliser la science
C’est pas tout, il faudra aussi mieux valoriser les retours d’expérience et renforcer les suivis et les évaluations.
Nous y sommes, en avant pour de nouveaux villages Potemkine, ce qui est toute la philosophie de l’opération.
« Malgré l’existence d’opérations réussies, la forte médiatisation autour de certains blocages, ainsi que le caractère non immédiat de toutes les améliorations écologiques attendues, laissent place aux discours de ceux qui parlent d’échec de la politique de restauration de la continuité écologique. », regrettent ainsi les auteurs qui recommandent que chaque agence de l’eau mette en place un programme pluriannuel de suivi des milieux concernés par ces opérations.
Ils rappellent enfin que l’interprétation des travaux scientifiques sur l’écologie et l’hydromorphologie est « une question délicate qui nécessite indépendance et crédibilité ».
(On s’en serait douté…)
Ils préconisent dès lors que la nouvelle Agence française pour la biodiversité (AFB) se charge de réaliser cette veille scientifique. Les conseils scientifiques des agences et de l’AFB devraient aussi être mis à contribution pour évaluer et orienter la stratégie. Seul le bassin Rhône-Méditerranée est cité en exemple pour la démarche entreprise qui débouchera cette année sur des préconisations.
(L’AFB vous dis-je ! Voyons déjà les suites du baston sanglant entre la bande à Bonne eau et la bande à biodiv…)
Des sous !
Les auteurs proposent de profiter de l’élaboration du onzième programme pour tendre vers une redéfinition et une harmonisation des aides entre les différentes agences de l’eau. Ca c’est pas gagné au vu du triste état des Agences qui se soucient surtout de sauver leur peau dans la période qui vient…
Ils souhaitent aussi que des cofinancements se mettent en place que cela soit avec des collectivités territoriales, des fonds destinés au patrimoine ou même du « crowdfunding ».
(Ils ont oublié l’organisation chaque année d’un « Moulinton » sur BFMTV.)
Les propriétaires de moulins pourraient aussi bénéficier d’incitations fiscales.
(Ca dépendra de leur degré d’infiltration des marcheurs, mais faudrait pas non plus trop rêver…)
Par ailleurs, le rapport préconise de réformer la redevance « obstacle » pour la rendre plus incitative dans la réalisation de travaux.
(Oubliant au passage que c’est l’existence même de redevances qui est aujourd’hui sur le tapis…)
Les auteurs proposent enfin de réformer les droits fondés en titre, délivrés avant la Révolution française et qui permet sans limite de temps l’exploitation d’un ouvrage. Les jugeant anachroniques, le CGEDD propose notamment une procédure de déchéance des droits qui ne seraient pas utilisés à compter d’un certain délai.
(Après la déchéance de nationalité, celle des droits fondés en titre ! Mais nous avons là de véritables séditieux qui vont plomber le chemin de roses d’Emmanuel ! Les partageux ne passeront pas !)
Si la loi biodiversité a reporté de cinq ans les travaux à réaliser sur les cours d’eau en liste 2, le rapport préconise de préciser rapidement les modalités d’applications aux services concernés mais aussi la manière dont seront réalisés les contrôles.
(Les contrôles ? Quels contrôles ? Dans la France réconciliée qui nous tend les bras, y aura plus de contrôle, puisque selon Saint Emmanuel
le droit à l’erreur va être introduit dans le Code de l’environnement. Vite une remise à jour côté CGEDD, vous n’y êtes plus du tout, là…)Enfin, le rapport souhaite que les futurs Sdage et Sage prennent plus en compte la dimension patrimoniale et énergétique en lien avec l’eau.
On aura compris qu’il ne va dès lors plus rien se passer, les services de l’Etat invités à lever le pied vont se calmer, ayant d’ailleurs autre chose à faire, et d’abord de sauver leur peau, ce qui n’est pas gagné dans la brillante période qui s’ouvre.
Lire aussi :
Le barrage et le lac des Pises, par l’ADHCA :
http://www.adhca.com/A_savoir/Le-barrage-des-Pises.htm
Un exemple achevé d’incohérence dans la gestion des milieux naturels...
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