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Forum mondial de l’eau : chronique d’un désastre annoncé
29 février 2012
par
- eauxglacees.comUne faillite française. Une fable. Un tournant. Pour comprendre la fin d’un monde, convoquons la géographie, l’histoire. L’histoire d’une ville et d’un pays. Quatre moments dessinent l’impossible uchronie qui va s’achever en farce grotesque. Le moment Gaudin, le moment Sarkozy, le moment bureaucratique et le moment Mestrallet vont accoucher d’un « momentum » inédit. Nicolas Sarkozy au Forum mondial de l’eau le 12 mars prochain, ce serait dès lors Tintin en Syldavie.
Tout commence et tout s’achèvera au parc Chanot. Vous prenez le bus 83 sur le Vieux-Port. Une montée interminable au flanc d’un Marseille préservé, la préfecture, puis l’avenue du Prado, Noailles, et, enfin, au rond-point du Prado, c’est-à-dire nulle part, le parc Chanot.
Le rond-point qui le jouxte est un no mand’s land foutraque, défoncé de travaux. Des immeubles de béton jetés dans tous les sens, déjà usés, décatis, aux couleurs passées. Nous sommes en 1970 en Espagne, ici le temps s’est arrêté il y a très longtemps.
En 1932 Marseille célébrait le temps béni des colonies en organisant une fastueuse exposition coloniale au parc Chanot, édifié pour la circonstance. Il en demeure quelques vestiges, à la gauche du parc après la barrière métallique singeant un péage d’autoroute qui en défend l’entrée. Un essai néo-mauresque au crépi jaune, endormi, fané.
Ceint d’une barrière métallique verdâtre d’à peine deux mètres de haut, qui ne résisterait pas aux élans de la première horde d’altermondialistes venue, même retraités, le Chanot d’aujourd’hui, jouxtant le Stade vélodrome et l’improbable tour jaunasse de FR3 Provence Côte d’Azur, est tout droit sorti d’un cauchemar à la Houellebecq.
Sur l’étendue chichiteuse de trois à quatre terrains de football sont posés à la hussarde sept à huit hangars sans grâce, s’adornant d’emblèmes mensongers : « Palais de la Méditerranée » et autres enseignes de carton-pâte qui seraient rejetées avec horreur par les producteurs de « La Vérité si je mens 12 », dont on pressent qu’il sera à coup sur tourné en 2020 au parc Chanot.
C’est petit. C’est moche. C’est sinistre.
En nous y promenant longuement l’après-midi du 18 janvier dernier, nous devisâmes avec quelques individus qui sortaient par grappes du « Palais des Congrès » qui fait face à droite à l’entrée du parc, là où, à peine un mois plus tard, l’actuel président de la République allait tenir son premier grand meeting de campagne, après l’annonce de sa candidature à la prochaine élection présidentielle.
Les « congressistes » du 18 janvier c’étaient quelques centaines de vendeurs de voitures du réseau Renault du Sud-est qui venaient y essayer, badge autour du cou, la nouvelle Clio.
C’est cela Chanot : Sarkozy et un troupeau de vendeurs de voitures à moitié ivres qui divaguent sur le parking de l’ancienne exposition coloniale au long d’une indolente après-midi. L’image achevée de la catastrophe à venir.
L’instantané fidèle du « moment Gaudin » qui ouvre la séquence de notre uchronie impossible. Et déjà le mensonge déconcertant qui est au cœur de notre affaire. Il suffit pour s’en convaincre de cliquer sur le site internet du parc Chanot, qui déguise en Las Vegas méditerranéen cet improbable paysage de zone industrielle déglinguée, dont la concession est accessoirement assurée par… Veolia, heureux concessionnaire du parc Chanot.Le moment Gaudin
Peut-on s’endormir pendant quarante ans ? Peut-on mentir en dormant ? Marseille ou Naples ? Marseille ou Alexandrie ? Faut-il relire Durrell pour comprendre la folie-Marseille ?
Il ne l’avouera jamais, mais peut être y songe-t-il en égrenant le chapelet enfoui dans la poche de ses immuables costumes croisés.
Il le sait, il le sait bien, Monsieur Gaudin.
La cosa mentale de Marseille c’est ce long sommeil qui a débuté, lointain contrecoup de la fin de la guerre d’Algérie, avant l’ouverture de Fos, au moment ou « Popeye » Hackmann cascadait sur l’écran de « French connection ».
Soudain la fatigue, soudain la lassitude.
The Big sleep. La ville dort. La ville dort depuis quarante ans.
Ses édiles, à droite, à gauche, se sont perdus dans une faille spatio-temporelle.
La compagnie des spectres est retournée à l’enfance.
Pour eux, dans les rues de Marseille il y a des Quatre chevaux, des Tractions, les toutes premières DS.
Encore adolescent, Alain Delon hante le Méditerranée des Guérini, les vrais.
Les marins US de la 6ème Flotte s’égaient entre l’Opéra et la rue Thubaneau.
Nous sommes à Naples, à Alexandrie.
La compagnie des spectres somnole. L’avenir c’est le passé. Le passé c’est l’avenir.
La ville dort.
Mais à vrai dire il n’existe pas, on n’y pensera pas.
Dans cette lointaine province phocéenne, des édiles momifiés se sont endormis dans la nostalgie poussiéreuse des années 1950 à 1970.
Mais ce sont eux qui allaient devoir en 2012 devenir les chevilles ouvrières d’un événement planétaire, le 6ème Forum mondial de l’eau.
M. Fauchon, deux ex-machina de notre tragédie burlesque, s’est donc mépris, n’augurant pas une seconde que l’uchronie fatale allait lui exploser au visage.
Le « moment Gaudin » ? De la thanatopraxie.
Le moment Sarkozy
De 1950 aux années 2000. Un bond prodigieux. Que dire du « moment Sarkozy » ?
Qu’un homme qui mobilise des escadrons de CRS pour aller déguster des pâtes aux truffes à l’hôtel Bristol, à quelques centaines de mètres de l’Elysée, mérite bien de figurer au rang des lointains descendants des « robber barons » américains du XIXème siècle.
On cherchera en vain une quelconque marque d’intérêt de l’actuel président de la République pour la question de l’eau.
Quant à Marseille, on notera, pour mesurer l’abîme qui sépare déjà le « moment Sarkozy » du « moment Gaudin », que l’approche privilégiée de la cité phocéenne des très proches de l’actuel président, à l’égal de Stéphane Richard, oligarque à Bercy, s’incarnera par la participation personnelle de l’actuel P-DG de France Telecom… à la vente à la découpe de l’avenue de la République au profit d’un fonds vautour américain, affaire qui a défrayé la chronique et dont la justice a eu à connaître…
Dès lors, quand il appert que Marseille accueillera, à quelques encablures de la présidentielle de 2012 un « événement planétaire », la machine élyséenne va commencer à monter en régime.
Dès l’annonce de l’affaire à Madrid, le story telling s’en empare.
Noter, ce qui avec le recul ne manque pas de sel, que c’est à la demande expresse de l’Elysée, que la tenue du 6ème Forum sera avancée d’une semaine pour cause d’élection présidentielle, afin de permettre à l’actuel président de la République de "faire sa dernière grande intervention à l’international". On sait ce qu’il en adviendra...
On lira ainsi à l’époque sous la plume d’Hervé Vaudoit, "Journaliste grand reporter" du quotidien régional « La Provence » l’ode en forme de légende urbaine qui va inscrire « Marseille 2012 » au calendrier politico-culturel de la décennie.
On a perdu l’habitude, surtout quand on ne lit pas le coréen dans le texte, de parcourir pareil panégyrique qui rappellera aux connaisseurs l’émoi qu’ont pu susciter la lecture énamourée de la Pravda ou de Barricada à la grande époque.
Pourquoi s’infliger pareille épreuve ?
Et d’une pour l’édification des générations futures, et de deux pour s’épargner la lecture des gazettes dans quinze jours qui vont incontinent aligner des kilomètres de niaiseries du même tonneau.
« Le Conseil mondial de l’eau confie à la France et à la ville de Marseille l’organisation du 6e Forum mondial de l’eau en 2012. C’est fait ! Réunis ce week-end à Madrid (Espagne), les gouverneurs du Conseil mondial de l’eau ont choisi la France et sa ville candidate, Marseille, comme capitale mondiale de l’eau pour les trois prochaines années. Un choix qui implique une responsabilité considérable pour la cité phocéenne : préparer et accueillir le prochain Forum mondial de l’eau, qui se déroulera sur une semaine en mars 2012.
Organisée tous les trois ans depuis 1997, cette manifestation est devenue au fil du temps le premier espace de dialogue et de décision pour les politiques de l’eau à travers le monde.
La 5e édition, organisée en mars dernier à Istanbul (Turquie), avait rassemblé plus de 20 000 participants venus de 182 pays, dont 90 ministres en exercice.
C’est dire le challenge que Marseille devra relever dans trois ans, neuf mois avant le 1er janvier 2013, qui marquera le début de son règne comme capitale européenne de la culture.
Dans cette compétition, la France n’avait plus qu’un seul concurrent, l’Afrique du Sud, qui proposait Durban comme ville hôte du Forum mondial. Le Canada et Vancouver avaient en effet renoncé quelques semaines avant l’ouverture du forum d’Istanbul.
Rien n’était pour autant joué d’avance, en dépit des atouts considérables dont semblait disposer Marseille face à sa concurrente.
Le fait que le Conseil mondial de l’eau ait son siège à Marseille depuis l’origine, que son actuel président, Loïc Fauchon -élu à ce poste en janvier 2005- soit également P.-d.g. de la Société des eaux de Marseille et que la France - et singulièrement la Provence- ait une expertise mondialement reconnue dans le domaine de l’eau, pouvait en effet plaider en faveur de cette candidature, mais aussi constituer un handicap à l’heure du choix final.
Selon nos informations, c’est d’ailleurs la solidité et le sérieux du projet franco-marseillais, plus que les faits évoqués plus haut, qui ont pesé le plus lourd dans la décision, de même que la prestation de Chantal Jouanno, secrétaire d’État à l’Écologie, le 18 mai dernier à Genève, lors de la dernière audition des candidats, trois semaines après la remise du dossier final de candidature au jury du conseil mondial de l’eau.
Dans un communiqué commun du ministère de l’Écologie et de la ville de Marseille, Jean-Louis Borloo, Chantal Jouanno et Jean-Claude Gaudin se disent "fiers d’accueillir" le prochain Forum mondial et "déterminés à donner le meilleur d’eux mêmes pour faire avancer la cause de l’eau."
Selon ce communiqué, cette victoire "concrétise l’originalité d’une candidature qui met l’accent sur une nouvelle gouvernance autour du modèle du Grenelle de l’environnement, ainsi que sur la thématique du droit d’accès à l’eau et à l’assainissement", chère à Loïc Fauchon.
Attribué successivement à Marrakech (en 1997), La Haye (en 2000), Kyoto (en 2003), Mexico (en 2006), puis Istanbul cette année, le Forum mondial de l’eau nécessite un énorme travail de préparation qui va faire de Marseille l’épicentre de la planète eau pendant trois ans.
Un rôle d’autant plus important que l’eau est devenu un enjeu géopolitique et géostratégique majeur au cours des 20 dernières années, avec l’accroissement considérable de la population mondiale, la multiplication des pollutions irréversibles, le réchauffement climatique et l’assèchement de la ressource dans de nombreux pays en développement, où seules les nappes fossiles sont capables d’abreuver les populations.
Avec cette décision, il incombe aujourd’hui à la France et à Marseille de fixer le cap pour le reste du monde d’ici au prochain Forum. Beau défi en perspective. »
Le « moment Sarkozy » va donc s’incarner par la captation autoritaire de l’événement à venir par un appareil d’état aux ordres, manœuvre qui va culminer avec la désignation du directeur de cabinet du président de la République, ancien préfet de la région PACA, M. Christian Frémont, qui va imposer ses desideratas à l’aéropage d’acteurs rassemblés de force au sein d’un GIP qui va très vite se transformer en Radeau de la Méduse.
Sur la Canebière on pense d’abord, on pense surtout, en frémissant, à la relève des caïmans qui barbotent autour du Vieux-Port, uniment décidés à continuer à s’y ébattre jusqu’à ce que mort s’en suive.
Quand le sommeil de la raison (qui engendre des monstres), s’y poursuit, comme nous l’avons vu, depuis les années 70, on imagine bien que le réveil sera terrible.
Mais c’est déjà la génération suivante de condottieres qui s’y prépare, concoctant, entre autres, un urbanisme de destruction massive.
On commence peut-être dès lors à pouvoir se faire une vague idée du tsunami qui s’annonce, dans la perspective de notre événement planétaire, si l’on songe aux échanges qui se nouent entre la mairie, le paquebot, le Conseil régional - pour Marseille -, et l’avenue de Ségur, le Quai, l’Elysée, la rue d’Astorg et l’avenue Kléber, pour Paris…
Un remake sidérant de la rencontre du parapluie et de la machine à coudre sur la table de dissection.
A Marseille on a la larme à l’œil en se remémorant l’arrivée de l’eau de la Durance au palais de Longchamp, au terme de 11 ans de travaux, le 29 novembre 1849. Gloire à Maximilien Consolat qui décida en 1834 de construire le canal, après la terrible épidémie de choléra qui fit des milliers de victimes !
A Paris on se dispute (au couteau) les bonnes grâces du fonds souverain du Qatar.
Comme le disent les minots, ça n’allait pas le faire, et de fait çà l’a pas fait.
Surtout qu’à ce stade surgit notre troisième moment, l’armée des scribes de Pharaon qui moulinent du powerpoint aux quatre coins de la planète.
Le moment bureaucratique
Le monde de l’eau c’est un univers, une galaxie, une myriade de planètes.
Tu pourrais passer ta vie à pleurer ou t’extasier, mais il y a les scribes de Pharaon.
Le Vieux-port, l’Elysée et les scribes de Pharaon : collapsus assuré.
Aujourd’hui des millions de personnes parlent de l’eau de par le monde, de la ressource, de sa gestion, des problèmes sanitaires, de la sécurité alimentaire, des dimensions économiques, environnementales, de la question de l’eau, de la crise de l’eau.
De plus en plus nombreux dans un secteur de l’eau très transversal, ils y multiplient les initiatives, projets, débats, forums, publications…
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Mais la question de l’eau n’avance pas vraiment.En tous cas pas à la mesure du problème lui-même, qui grandit à mesure que la population et l’économie mondiale croissent, augmentant d’autant la demande pour une ressource limitée en quantité, et de plus en plus en qualité.
Si on rajoute à ça les prémices d’un changement climatique, qui devrait rendre la ressource de plus en plus imprévisible, on n’est effectivement pas prêts de les atteindre, ces fameux (foireux) "Objectifs du millénaire"…
La pénurie de professionnels est réelle (ingénieurs, environnementalistes, mais aussi sociologues, anthropologues, économistes, politologues de l’eau), essentiellement dans les pays du sud, mais aussi mondialement.
Parallèlement de nombreux projets ne semblent pas bien ficelés, et sentent l’échec avant mettre d’avoir été lancés.
Le manque d’innovation efficace est bien réel, non pas en termes de technologies, mais en termes d’approches du développement.
Le problème est d’abord institutionnel :
– l’eau et sa gestion au sens large sont des domaines éminemment politiques, et relativement locaux, dont la responsabilité première revient aux états et à leurs autorités décentralisées. Ceux-ci, au niveau national, régional ou local manquent souvent cruellement de moyens (humains, financiers, techniques, etc), mais aussi de volonté politique de régler les problèmes ;
– du coup le secteur de l’eau est de facto "privatisé », terme très ambigu, qui recouvre pêle-mêle les entreprises privées, mais aussi les ONGs, les bailleurs, etc., qui, faute d’action politique claire de la part des autorités publiques, prennent en main une partie, souvent choisie assez arbitrairement, du secteur de l’eau dans une zone donnée, et pour un temps limité.
La fameuse "durabilité", fer de lance de tout projet qui se respecte, se heurte bien souvent au caractère éphémère de ces interventions, qui ne sont pas reprises localement sur le long terme par les responsables locaux.
Encore une fois, faute de moyens souvent, mais aussi de volonté politique.– tous ces acteurs de l’eau agissent sans réelle concertation/coordination, sans normes (techniques, mais pas seulement), sans "régulation", encore un terme ambigu pour le secteur du développement, mais on peut imaginer des états sachant gérer leur développement, acceptant l’aide extérieure, mais ne laissant pas faire n’importe quoi, souvent sans résultats durables.
Ils ont pourtant besoin de fonds pour continuer leur boulot, et il en résulte ce bruit de débats, forums, etc... qui à défaut de résoudre le problème, fait au moins parler de lui…
Incroyable dès lors le nombre d’agences UN, d’ONG, de projets qui font dans le WASH (Water-Sanitation-Hygiène) de par le monde, alors qu’il y a pénurie structurelle mondiale de cadres intermédiaires en la matière, cadres intermédiaires au sens de praticiens, gestionnaires et concepteurs, et, paradoxalement, prolifération de technologies disponibles qui ont un mal fou à se diffuser même pour les plus simples techniquement ou les moins coûteuses.
Alors que les échéances des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD-MDG) arrivent à grands pas : 2015 (qui a fixé des objectifs pareils non tenables ?).
Et que les médias nous narrent l’échec complet de l’urgence-réhabilitation de la catastrophe en Haïti, deux ans après le séisme, certaines des ONGs internationales, et non des moindres, CICR compris, s’interrogent sur leurs capacités à juguler la crise humanitaire avec les récurrences de choléra et autres maladies hydriques.
Voilà quinze ans que l’agenda international de l’eau est au plus haut avec les Forums mondiaux de l’eau, et que le prochain se profile à Marseille, réputé être le "Forum des solutions"…
Le secteur de l’eau (au sens large) est en fait sinistré, faute de kaléidoscope des modèles d’intervention (prise en compte des réalités sociales et culturelles locales) et de catalogue de formules institutionnelles adaptées.
Il nous manque au sud des filières de formation appropriées pour former une génération "task force" en matière de WASH…
Dès lors les scribes de Pharaon moulinent du powerpoint, ce qui nous donne un forum dégoulinant de plénières, side-event, sessions toutes plus capitales les unes que les autres.
Des milliards de mots et de signes littéralement incompréhensibles pour le commun des mortels, alors pour ce qui est du Vieux Port et de l’Elysée, on imagine sans peine comment on y accommode les plans sur la comète des scribes de Pharaon :
« Faites-moi une note d’une page, et voyez avec Publicis et TF1 comment on organise la couverture du déplacement du Président… »
Et c’est ainsi que notre « moment bureaucratique » acheva de couler définitivement notre fameux Forum, construction éminemment baroque qui, une fois partie à la dérive, n’avait plus aucune chance d’arriver à bon port... au Vieux-Port.
Imaginez notre Forum avec tous ces boulets au pied : nos amis de la Canebière rêvant d’une promenade aux Catalans en 203 décapotable, les tycoons de l’Elysée se demandant s’ils vont réussir à fourguer Notre Dame à leurs amis du Quatar, et les scribes de Pharaon se battant comme des chiens pour installer l’écran à powerpoint dans l’espace d’une demi-boutique à kebab au parc Chanot. Avec ça, même Depardieu planqué dans le linceul de l’Abbé Faria n’arriverait pas à remonter de l’abîme au large de Monte Cristo !
Le moment Mestrallet
Pour tout arranger, Proglio is dead, et Mestrallet sacré roi du monde.
Les Deux sœurs ennemies concluent près d’un siècle et demi d’affrontement feutré par une guerre de tranchées dont les dégâts collatéraux sont déjà considérables.
Des décennies de savants calculs, arrangements subtils, conflits de l’ombre ont volé en éclat.
La guerre est totale.
En embarquant il y a quelques mois des journalistes en Chine, Gérard Mestrallet ironisait gentiment. Il est vrai que désormais la Chine c’est Suez, avec l’investissement de 3 milliards de dollars d’un fond souverain chinois dans une joint-venture gazière avec Suez.
La Chine c’est Suez, la France c’est Suez, on ne va pas tarder à s’en apercevoir.
A cette aune, les « dessous de l’affaire Veolia » font figure de plaisanterie.
Tintin en Syldavie
De moment en moment, l’heure de vérité approche.
Un « momentum » inédit.
Le 6ème Forum mondial de l’eau a déjà fait faillite.
L’actuel président de la république français, M. Nicolas Sarkozy est attendu en ouverture de l’événement.
A gauche on hésite... On le comprend.
On y annonce la présence d’une intrigante constellation de chefs d’État et de gouvernement : Albert II de Monaco, Mohammed VI roi du Maroc, le président tchadien Idriss Deby, celui du Tadjikistan Emomali Rahmon et celui du Niger Mahamadou Issoufou.
Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, est également annoncé, ainsi que Jose Manuel Barroso, président de la Commission européenne, le prince héritier du Japon Naruhito, le Premier ministre de Corée du Sud Kim Hwang-Sik et l’ancien président de l’URSS Mikhaïl Gorbatchev.
Révérence gardée à ces excellences, la dernière manifestation internationale à laquelle va participer l’actuel hôte de l’Elysée nous rappelle furieusement nos lectures d’enfance.
Marseille 2012 : Tintin en Syldavie.
"Tu n’as rien vu au parc Chanot…"
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