Annoncé à grand son de trompe, la Cinquième a diffusé le dimanche 26 septembre dernier à 20h55 un documentaire de 52 mn intitulé « Au Front. Guerre de l’eau en France », réalisé par la nouvelle jeune icône écolo-bobo, un certain Hugo Clément, le fils caché de Nicolas Hulot (époque Ushuaïa) et Mike Horn, dont la propagande télévisuelle nous assène que, frappé par la Grâce, il aurait décidé de dédier sa vie à « sauver la planète ». Au cas d’espèce, ledit documentaire s’avère être un invraisemblable tissu d’âneries sans queue ni tête, truffé d’approximations douteuses, d’omissions significatives, comme de contre-vérités manifestes. Un naufrage.
Déjà le titre pute à clics façon pubard eighties Séguéla-Beigbeider, sur le so call "service public" de la radio-télédiffusion française...
La forme ensuite. Un enchainement de vignettes « signifiantes », axé sur un ou une personne, surtout une, ici on est bien sur woke à donf, qui égrène une anecdote supposée significative, sans que jamais la problématique évoquée, l’histoire du territoire, les stratégies d’acteurs…, ne soient explicitées, contextualisées. Bref, l’eau a coulé sous les ponts depuis les théoriciens de la Nouvelle vague, ici c’est la mécanique du télé-achat qui s’impose : un produit, un plan séquence, et on enchaîne, sur n’importe quoi, puis on recommence, à l’infini. Dieu, comprendre le sponsor, reconnaîtra les siens.
Dans le panégyrique tissé par la Cinquième à notre inénarrable bouffon, ça donne :
"Des caméras de qualité cinématographique sont utilisées à terre et sous l’eau, une large place est accordée aux images aériennes de drones via notamment des plans zénithaux (la caméra se trouve à la verticale juste au dessus de l’action en train de se dérouler). Dans sa manière d’incarner ces documentaires, Hugo Clément reprend des codes du numérique : il partage son ressenti, souligne des éléments clefs de l’enquête en se filmant sur le mode selfie. De leur côté, les combattant(e)s s’expriment parfois face caméra, droit dans les yeux, comme ils pourraient le faire face à un smartphone."
Présentation générale de "Sur le front" - france.tv :
https://www.france.tv/france-5/sur-le-front/
Hogo by himself : "Nous voulons à tout prix éviter le catastrophisme"...
Encore un petit effort et la chaîne publique se hissera à la hauteur de sa consoeur, la télévision d’état russe dédiée aux exploits sportifs du Tsar Poutine.
L’affaire débute avec une séquence d’anthologie dans laquelle notre bon Hugo nous présente une « grande hydrologue », Emma Haziza, avec qui il explore le lit asséché d’une toute petite rivière de l’Aude. Notre Hugo fait le malin : « mais on a eu un été pourri, il a plu tout le temps, comment ça se fait que ce soit sec ? » S’ensuivent des explications vasouillardes de la Ziza, auxquelles ont n’entrave que pouic. « Coupez ! ».
Sans transition on se retrouve aux Sables d’Olonne et sa plage où il n’y a plus de douche, pour « économiser l’eau ». « Coupez ! ».
Sans transition une grosse station d’épuration (STEP), qui brasse des eaux usées malodorantes. Un gus présenté comme le responsable de « Vendée eau » (Kézako ?), va nous faire l’article pendant cinq minutes sur la grande première française qui se prépare : une innovation « de rupture » comme dirait la bande à Macron, transformer les eaux usées de la STEP en eau potable ! On poursuit le baratin en haut d’un phare, ce qui a du faire plaisir au syndicat d’initiative, sans que jamais le gus, et bien sur pas davantage notre bon Hugo ne casse le morceau.
C’est Veolia, concessionnaire du syndicat départemental Vendée eau, qui prépare son gros coup depuis des années, en assurant la promotion forcenée du « Re-use » dans toutes les enceintes possibles…
Ici bien évidemment pas un mot sur le débat scientifique qui continue à faire rage sur le bien fondé du Re-use, pas même pour fabriquer de l’eau potable (portnawak !), mais pour son usage en agriculture…
Car selon Actu-environnement de ce jour : " Les eaux usées traitées présentent des avantages agronomiques car elles contiennent encore des nutriments, au contraire de l’eau claire. Du coup, l’agriculteur va réduire ses apports d’engrais. Mais il y a aussi tout un ensemble d’autres éléments à contrôler, comme la présence de pathogènes ou de polluants émergents tels les résidus médicamenteux (…). Notons qu’en France, à ce jour, il est interdit, hors expérimentation scientifique, d’irriguer une production maraichère avec des eaux usées traitées. »
Ensuite on enchaîne avec une transition maousse : notre inneffable Hugo se propulse jusqu’en Namibie (bonjour le bilan carbone !), dont la capitale a créé il y a cinquante ans une unité de transformation des eaux usées en eau potable. On nous montre donc une brave dame qui s’en va chercher de l’eau avec son jerrican à un point d’eau collectif, avant de frémir en voyant notre héros boire un verre d’eau potable au-dessus de la fosse d’eaux usées malodorantes. « Elle est bonne ! », confie notre intrépide reporter, avant de préciser en deux mots que c’est une entreprise française qui gère la nanofiltration.
Et çà serait pas Veolia qui aurait payé le billet d’avion des fois ?
Sans transition notre héros nous propulse ensuite en Picardie où deux vieux schnocks gravement allumés ont fourgué à un prospère agriculteur des canons anti-grêle qui balancent à tout va dans l’atmosphère des obus remplis de chlorure de sodium pour sauver les salades du gentleman agriculteur, en butte aux râleries de ses petits copains du village. Là c’est plus Tintin, c’est le professeur Tournesol ! Et l’on enchaîne avec des séquences aux Emirats arabes unis, en Malaisie, et jusqu’aux Etats Unis où « l’on vient d’avoir le droit de modifier la météo ! »
Центральное управление народно-хозяйственного учёта (ЦУНХУ) Госплана СССР
Département central de la comptabilité économique nationale (TSUNKHU) du Comité de planification de l’État de l’URSS.
Sans transition la séquence « Guerre de l’eau », bassines contre agriculteurs productivistes en Poitou-Charentes. Là ça devient du grand art, aucune contextualisation de l’affaire, des bouts de séquence coupés à la va-vite, ici un défilé d’opposants sur une route, là une ancienne institutrice qui tient le mégaphone, puis une accommodante interview d’un irrigant qui nous refile sa propagande à côté de sa bassine, sans que jamais Saint Hugo ne lui rentre dedans, tout occupé à préparer sa séquence choc : le survol de la campagne et des bassines, en hélicoptère, avec une gentille maraichère (bio !) à ses côtés. Le fils caché de Hulot et Mike Horn, vous dis-je !
Nouvelle transition maousse avec les dégâts de l’irrigation à Almeria en Espagne, des kilomètres de tomates sous serre à côté des canyons où ont été tournés les westerns spaghettis de Sergio Leone, merci l’Office du tourisme, on espère qu’ils ont payé le billet d’avion, le bilan carbone s’alourdit encore…
Sans transition le retour de la Ziza et son baragouin calamiteux, à l’occasion de la plongée au fond d’une grotte, qui abrite une "nappe" (là c’est quasiment le capitaine Nemo), la Ziza qualifiée cette fois par Saint-Hugo de « lanceuse d’alerte ».
Là on se roule de rire par terre.
La Ziza, que l’on voit beaucoup sur les plateaux télé ces dernières années, est le prototype des arrivistes aux dents longues qui font florès sous le règne du seigneur Macron. La recette est simple, on travaille dans le public, on fait mousser son carnet d’adresses et ses compétences, réelles ou supposées, avant de créer sa startoupe et de vendre des « prestations » à un secteur public dévasté par la même bande à Macron, genre le "fils de", le Denormandie qui vend le domaine de Grignon à un promoteur immobilier.
Dans le genre, la Ziza c’est une pro. En quelques années elle en a créé 6 des startoupes, et l’argent coule à flot, comme en témoignent deux récentes augmentations de capital des SAS à 400 000 euros de capital social, qui ont succédé à de gentilles « associations » de la « lanceuse d’alerte ».
Comme ça va très vite, le melon explose et les contrôleurs de Wikipedia n’ont pas manqué de tacler la page hagiographique de la Ziza :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Emma_Haziza
Faut dire qu’à Montpellier c’est des pros, voir cette autre start-up, ça doit être des potes de la Ziza, qui transforme les toilettes en "WC japonais". C’est en effet ce que propose la toute jeune pousse Hulmo avec son kit à installer facilement entre l’abattant et la cuvette. Le tout relié à l’arrivée d’eau permet de se faire nettoyer les parties intimes avec un jet d’eau.
La start-up lancée en janvier dernier par Aimeric Mir et Gianni Nardone, et accompagnée par l’IMT Mines Alès et le BIC de Montpellier, compte bien révolutionner nos pratiques.
"Évidemment, il y a le gain d’hygiène, et aussi une grosse problématique écologique liée au papier toilette, explique Gianni Nardone. 27 000 arbres sont abattus chaque jour dans le monde (soit 38 stades de foot !) pour produire quelque chose qu’on va jeter".
Pile-poil dans l’air du temps, c’est sur, c’est sur que c’est des potes à la Ziza, on les verra dans le prochain épisode...
(A la réflexion faut peut-être pas trop en parler, si le Zorglub entend çà, on va se payer du "Jihad des toilettes" pendant des plombes...)
Revenons à l’oeuvre de Saint Hugo.
On continue, sans transition toujours, "sur le Front" avec de nouvelles stations météo chez les pompiers du Var, puis les maisons construites sur de l’argile qui se fissurent en Vendée, et enfin, fort heureusement une nouvelle cartographie par hélicoptère des nappes d’eau souterraines profondes, « qui vient juste de commencer il y a trois semaines… »
Un naufrage. Clichés simplistes, messianisme technologique, propagande institutionnelle cachée…
Pour le prochain épisode de « Sur le front » on ne saurait trop conseiller à Saint Hugo de se rapprocher d’Antoine Frérot et de lui proposer de filmer la colonne de camions citernes remplis d’eaux usées qui traverseront la France pour « compenser » les externalités négatives de Vendée eau, en alimentant l’oued désséché de la Ziza dans l’Aude, le tout sous le « haut patronage » de Julien Denormandie et de Barbara Pompili, ou de leurs successeurs et successeuses…
REPLAY (bon, on n’est pas obligé non plus) :
https://www.france.tv/france-5/sur-le-front/2772441-la-guerre-de-l-eau-en-france.html
commentaires
Je suis affligée en lisant cet article ... Je ne sens que de la véhémence alors que, visiblement au vu des livres que vous avez écrit Monsieur, vous et Hugo présentez le même objectif. Vous reprochez à Hugo de ne pas présenter d’arguments scientifiques mais, pardonnez-moi, vous n’en présentez pas plus. Vous auriez pu faire un article de fact-cheking mais vous avez préféré y vomir votre haine manifeste contre ce journaliste. Ça ne fait pas avancer le débat. J’étudie, et travaillerai bientôt dans le secteur de l’hydrogéologie et de la qualité et du traitement de l’eau, et je trouve vos commentaires affreux. Être un peu plus humble ne vous ferait pas de mal.
Idem.. jusqu’ici je trouvais vos articles très pertinents, plein de bon sens, mais là ça manque clairement d’objectivité, on ne ressent que la jalousie et la haine.
Si les choses avaient été posées plus posément, sans agressivité, on aurait pu sentir un regard critique sur cette émission qui aurait pu amener à un débat plus constructif sur le sujet (car peut-être qu’il y a affectivement des choses à redire sur ce qui est raconté). Déçu..
Il montre seulement l’incohérence de ces personnes prétendument écologistes que la TV met en avant pour chapeauter la réaction.
Il n’y a pas plus opposé à l’environnement que certaines personnes dites écologistes qui en réalité ne font que calquer leur imaginaire sur la nature (utiliser les eaux usées comme eau potable alors qu’on devrait déjà pouvoir s’en servir pour l’arrosage en agriculture, limiter l’usage du papier toilette par un système en plastique (sans commentaire),...).
Il s’agit de se soumettre à la nature et non de vouloir encore la transformer selon de nouvelles "bonnes" idées...
Changez de chaîne, mon amie !
https://tvmag.lefigaro.fr/programme-tv/programme/envoye-special-f158677571
Un docu = une problématique = des faits et des chiffres = une analyse = des conclusions et des orientations.propositions...
... et bien sûr des petits "tuyaux"
pas du goulbi boulga Hugo-Ziza !
Monsieur Laimé,
je partage votre indignation après avoir vu ce docu à la TV. J’ai même honte d’avoir commis ma famille à ce spectacle. Le ton employé n’est donc pas de trop. En effet, ce documentaire n’en est pas un. Pire, il dessert la "cause écologiste" qu’il prétend défendre. C’est grave.
Les erreurs factuelles ou analytiques (il n’y a aucune analyse d’ailleurs) sont nombreuses et je suis surpris qu’une hydrologue-conseil, scientifique ?, comme la dame en question, commette autant d’approximations sur des questions si connues et débattues depuis des années.
Exemples qui m’ont surpris :
Il n’y a pas de "nappe" à la grotte de Clamouse, c’est un karst pur sucre sur lequel, non loin, à la source des Cent Fonts, les autorités se sont cassés les dents dilapidant 50M€ à la recherche de l’or bleu inexistant (pas de nappe, on vous dit). Elles avaient pourtant été averties.
La vallée des Corbières (massif calcaire) est une vallée sèche, avec un écoulement souterrain, sauf lors des crues, normal qu’elle soit sèche le reste du temps.
La Vendée n’a pas de ressources en eau en raison de son socle granitique (ce qui a motivé bien des barrages), sauf sur la nappe littorale qui ne doit pas être surexploitée en raison du biseau salé, particulièrement aux Sables d’Olonne.
Il y a toute une histoire de Vendée-Eau et ce département rural dense et très touristique a été le lieu de fondation de la SAUR. Il fallait l’expliquer et pourquoi tant de fantasmes sur la REUT/Reuse alors que l’agriculture y est aussi grosse consommatrice avec guère de régulation en raison du pouvoir local fort.
La Namibie n’est pas un pays soumis à la sécheresse, c’est un pays hyper-aride (désert du Namib), ce qui n’est pas la même chose. Pas surprenant que les écoulements soient si rares. Là où il y a (avait) des ressources souterraines, elles ont été pompées par les ranchers ou par les miniers de l’apartheid namibien pre-SWAPO. Et même depuis. Refoulant les "natives" dans les zones reculées plus sèches.
On ne comprend rien à l’Espagne irriguée (et asséchée) d’aujourd’hui sans évoquer le projet hydraulique franquiste pour "résoudre la question agraire", face aux projet républicain vaincu, et qui perdure, avec son insertion entre USA (qui acheta la neutralité de Franco) et l’Europe qui l’intègre ensuite.
Et pourquoi/comment des "bassines" en Poitou-Charentes, on ne le saura jamais.
Etc, etc...
L’histoire de l’eau, bon sang ! L’eau raconte la société. Alors ?
Vous avez visé juste sur le ton. Il n’y a pas de contre-démonstration scientifique à faire sur le fond. Oublions vite ce jeune documentariste egocentrique et traitons les questions de fond avec d’autres supports ou moyens.
Et, cette fois, avec de bons conseillers, techniquement compétents et au regard pluridisciplinaire maîtrisé.
Bien à vous.
Je me suis quelque peu renseigné sur "La Ziza"...
Je dois dire que ce n’est pas brillant. Je plains les collectivités, opérateurs publics ou privés, qui font appel aux services de Mayane Inc. Pas étonnant que les Languedociens soient si souvent le c... dans l’eau.
Même des associations de protection de l’environnement locales (34) se sont faites pomper leur matériel pédagogique revendu plein pot par "La Ziza" à un syndicat mixte de bassin. Est-ce que la notion de plagiat s’applique en l’espèce ?
C’est dire...
ce qui est certain, C’est que plus on s’étripe...plus il y a des positions dogmatiques et plus c’est la fête pour la gestion par ordonnance .....
Le mérite de ce documentaire est d’avoir posé un large panel des problématiques touchant l’eau, pour un public non spécialisé dans le domaine. Travaillant dans ce domaine depuis longtemps je l’ai trouvé très interressant.
A force de prendre tintin pour un con faut pas s’étonner que ça chie dans la colle.
Juste pour dire que le ton de ce texte est parfaitement justifié : l’omnipotence quasi-absolue du libéralisme, sans complexes dans la sphère publique, nécessite et légitime des retours de flamme ; à la hauteur de l’injure faite à l’écologie et à l’humain, des bénéfices engrangés en parallèle aux émissions soft et mesurées, aux lanceurs d’alertes périmées bien casés, qui ignorent au maximum et taisent le social radical lié à l’écologie. L’écologie c’est pas une soirée pizza, c’est la lutte impertinente et méchante contre le capitalisme.
excellent !