Le Syndicat des eaux d’Ile-de-France a annoncé le 21 juillet 2009 qu’il venait d’admettre à concourir quatre candidats pour le plus grand service public de l’eau potable en France, pour l’instant délégué à Veolia Eau. Ce dernier ainsi que Suez Environnement, le groupe Saur et le groupement constitué par le spécialiste français des déchets Derichebourg et l’’entreprise allemande Remondis devront remettre leur offre avant le 4 décembre 2009.
C’est la plus grande délégation de service public de l’eau potable en
France et l’une des premières d’Europe, avec 144 communes franciliennes et
4 millions d’usagers. Un contrat de plus de 350 millions d’euros annuels,
détenu par Veolia Eau sous sa forme actuelle depuis 1962, et par la Générale depuis 1923, qui arrive à terme à fin 2010.
Le Sedif vient donc d’admettre à concourir quatre candidats sur cinq. Un intrus, Chimie Plus, ayant été renvoyé à ses études. En voilà au moins un qui se sera épargné des frais inutiles…
La surprise aurait été que Veolia, numéro un mondial des services de l’eau, avec 12,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2008 n’ait pas été retenu… Raté !
Aucune surprise non plus de voir son principal challenger, Suez Environnement (12,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires
dans l’eau et les déchets), lui aussi choisi pour participer à l’appel d’offres. La filiale environnement de GDF-Suez avait fait savoir dès la fin 2008 dans un courrier aux maires concernés qu’elle serait candidate, et demandait à cette occasion un « allotissement géographique » du contrat devant permettre selon elle « d’intensifier la concurrence ». Ce que le Sedif avait refusé avec indignation.
Pour ce qui est de la présence des deux autres compétiteurs, elle aura surtout le mérite, aux yeux de Veolia et de M. André Santini d’éviter un « choc frontal » entre les deux leaders, désormais en guerre ouverte sur ce contrat…
Ce qui gommera, espèrent-ils, le choc qu’aurait pu susciter l’annonce par Suez d’un rabais « historique », qui n’aurait pas manqué de plonger les délégués dans l’embarras.
La ficelle est grosse. La finesse n’est pas l’argument préféré de nos amis.
Car qui croira une seconde que Saur, troisième acteur de la gestion déléguée de l’eau en France, qui a réalisé 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires en 2008 (dont 79% dans les services de l’eau), et dessert dans l’Hexagone 5,5 millions d’habitants pour l’eau potable et l’assainissement, s’engagerait à son tour dans une guerre de tranchées avec Veolia, puisque les deux groupes ont par ailleurs le même actionnaire majoritaire, en l’espèce la Caisse des dépôts et consignations…
Car si le groupe, désormais propriété de Séché environnement, détient par
exemple Nîmes ou Dinard, il est absent de toutes les grandes villes
françaises. A l’étranger, parmi ses plus importants contrats figurent les
services d’assainissement et de l’eau potable à Gdansk, pour 800 000
usagers. Dès lors rien ne dit que M. Séché, qui n’a pas vraiment la réputation de jeter l’argent par les fenètres, va mobiliser ses équipes tout l’été afin d’emporter le morceau…
Et pour ce qui est du 4ème larron, on hésite entre l’accablement et la franche rigolade.
C’est un groupement « ad hoc » constitué du groupe Derichebourg (4,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires 2008), spécialisé notamment dans le recyclage et la collecte des déchets et de l’allemand Remondis (5,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires) via sa filiale Remondis Aqua.
« L’idée est de se diversifier dans les contrats qui ont un lien avec l’environnement », explique Mme Pascale Perez, PDG de Derichebourg Environnement-Polyurbaine, qui n’a pas pour l’instant d’activité dans l’eau.
« Notre partenaire a l’expertise dans l’eau, mais veut s’appuyer sur un groupe français et partager les investissements comme le risque. Nous, nous avons l’expertise dans les ressources humaines, le code des marchés publics et le fonctionnement des collectivités locales », justifie la dirigeante dont les propos ont pieusement été repris par les medias.
A ce stade la prochaine fois ce sera Leclerc ou Ryanair ☺
Au Sedif, on indique que la commission de la délégation de service public « jugeait de la compétence, et non à ce stade-là de la taille des candidats ».
Précision superfétatoire.
Lesdits candidats ont donc reçu le cahier des charges, pour lequel le
délégataire actuel aurait, « selon un proche du dossier », d’après les Echos, transmis toutes les pièces nécessaires pour élaborer un document précis.
Même si, ajoute-t-il,« s’agissant des installations elles-mêmes, la connaissance de Veolia est bien meilleure que celle du Sedif ».
Là on s’étonne que cette perle n’ait pas valu aux Echos un nouveau droit de réponse du Sedif, enfin de son président qui en est coutumier.
De nombreux observateurs, toujours selon les Echos, parient sur le maintien de Veolia Eau.
« Il est rassurant de voir quatre candidats mais c’est aussi un moyen pour les
entreprises de faire parler d’elles au stade des candidatures. Or,
lorsqu’on décide de ne pas faire d’allotissement sur un tel contrat, les
dés sont quasiment joués d’avance. Faire une offre sérieuse sur un tel
périmètre coûte entre 2 à 5 millions d’euros. Saur pourra-t-il le faire ?
Suez apparaît comme la seule alternative crédible, théoriquement »,analyse
M. Loïc Mahévas, directeur général de Service Public 2000, cabinet de conseil
aux collectivités.
Les résultats sont attendus fin mars 2010 avec le choix du délégataire.
Faites vos jeux…
Juste une remarque concernant Saur, Il ne se contente pas d’avoir un actionnariat commun avec Veolia ; il se trouve que l’exécutif mis en place suite à l’arrivée de Séché, est lui même issu de l’entité Véolia, plus précisément de sa branche Transport (pour être plus complet : secteur Nord Américain), dés lors une guerre à part entière semble en effet peu envisageable...à une réserve près, Saur peut venir jouer les troubles faites à l’image de ce qui s’est passé l’an dernier sur le dossier St Cassien (construction STEP de Cannes) est imposer une baisse plus importante sur les marges... L’analyse de SP2000 apparaît sur ce point muette, ce d’autant plus qu’elle ne voit pas Saur jouer le jeu pour la remise d’une offre cohérente (pour des raisons liés à l’investissement que cela générerait), c’est une erreur. Apparaître compétitif pour Saur sur une dossier de cette envergure est tout bénéfice, pas pour espérer l’emporter, juste pour prouver sa capacité à répondre à de gros dossier et ce dans l’objectif d’autres gros enjeux à venir (dans le Sud notamment)...sans compter Paris, qui même dans le cas improbable d’un retour en régie, passera des marchés sur lesquels Saur Répondra...!