Une redevance doit correspondre à un service rendu, et les usagers sont égaux devant le service public. Mais on peut déroger dans certaines conditions à ce principe d’égalité des usagers face au service public, et instaurer une différenciation tarifaire sur le périmètre d’un même service, et pour une qualité de service équivalente. C’est le sens d’une réponse du ministère à un parlementaire, qui éclaire l’une des étrangetés de la réglementation en la matière…
La question écrite n° 17076 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI),
publiée dans le JO Sénat du 10/02/2011 - page 290.
« M. Jean Louis Masson attire l’attention de Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement sur le cas d’un syndicat intercommunal à vocations multiples (SIVOM) qui a compétence en matière d’assainissement.
Les communes membres se répartissent dans deux vallées. Dans l’une, les travaux d’assainissement sont peu coûteux ; par contre, en raison du relief, ils sont très importants dans l’autre vallée.
Il lui demande si le SIVOM peut instaurer un taux de redevance d’assainissement différent entre ces deux vallées afin que les usagers participent en fonction de l’investissement nécessaire.
À défaut, il souhaite savoir si le SIVOM peut demander aux communes appartenant à la vallée où l’investissement est le plus coûteux d’apporter une subvention ou une quote-part financière correspondant au différentiel d’investissement pour la réalisation de l’assainissement. »
La réponse du Ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, publiée dans le JO Sénat du 31/03/2011 - page 807.
« La redevance d’assainissement prélevée par le service public d’assainissement collectif, en application de l’article R. 2224-19 du code général des collectivités territoriales (CGCT), est une redevance pour service rendu.
Les différenciations tarifaires applicables aux usagers d’un même service d’assainissement se fondent sur la détermination des conditions de dérogation au principe d’égalité des usagers du service public formulée par le Conseil d’État dans l’arrêt relatif au prix de la traversée du pont de l’île de Ré (CE 10 mai 1974 n° 88032, 88148).
Ainsi, la fixation de tarifs différents applicables à diverses catégories d’usagers implique, à moins qu’elle ne soit la conséquence d’une loi, qu’il existe entre les usagers des différences de situation appréciables ou que cette mesure soit justifiée par une nécessité d’intérêt général, en rapport avec les conditions d’exploitation du service.
Des arrêts du Conseil d’État (CE 26 juillet 1996 n° 130363 et 130450 ; association Narbonne liberté 89 et Bonnes et CE 8 avril 1998 n° 127205 association pour la promotion et le rayonnement des Orres) ont admis une discrimination tarifaire entre les usagers de deux parties d’une même commune en raison des spécificités de l’exploitation du service et des investissements particuliers nécessaires dans une zone touristique du service.
Dans le cas d’un groupement de communes, quel que soit son statut juridique, une différenciation tarifaire est possible s’il existe des spécificités dans l’exploitation du service ou des investissements particuliers sur une zone donnée.
Cette modification du montant de la redevance pour service rendu doit être approuvée par l’organe délibérant de l’établissement public compétent.
L’article L. 2224-2 du CGCT interdit aux communes de prendre en charge dans leur budget général des dépenses au titre des services publics à caractère industriel et commercial.
Le conseil municipal peut toutefois décider une telle prise en charge lorsque celle-ci est justifiée par la réalisation d’investissements qui, en raison de leur importance et eu égard au nombre d’usagers, ne peuvent être financés sans augmentation excessive des tarifs.
La décision du conseil municipal doit alors faire l’objet d’une délibération motivée.
Ces possibilités sont à examiner par les assemblées délibérantes concernées, en tenant compte de la solidarité entre les usagers de l’eau au sein de bassin de vie desservi par le syndicat. »