Dans l’Hérault, qui vient d’être frappé par des inondations aussi récurrentes qu’inéluctables, l’association Mosson Coulée Verte, implantée à Montpellier, vient d’écrire au Commissaire enquêteur chargé de l’enquête publique sur le SAGE Lez-Mosson-Etangs Palavasiens revisé, lui annonçant, arguments à l’appui, qu’elle donnait un avis négatif sur ce SAGE revisé. Un courrier à lire impérativement, tant il illustre le dévoiement des procédures officiellement destinées à promouvoir la protection de la ressource, ici réduites à un exercice bureaucratique affligeant. Autre illustration de la faillite des politiques publiques de l’eau qui nous conduisent au désastre.
Un nouvel épisode méditerranéen très violent a eu lieu sur les communes de Grabels et de Juvignac le 6 octobre. Les inondations ont causé des dégats considérables. A Grabels, (fief de René Revol, héraut du Front de Gauche et nouveau Vice-président de l’Agglo dans l’équipe Saurel, qui s’est engagé à mettre en place une régie de l’eau à Montpellier), 10% des habitants sont touchés. Météo France prévoit un 4ème épisode méditerranéen les 11 ou 12 octobre. C’est la panique dans les communes de l’Agglomération de Montpellier qui en sont encore à régler les problèmes causés par les inondations précédentes.
Le département de l’Hérault a subi récemment deux épisodes cévenols particulièrement violents. Les inondations du 1er ont fait 4 morts et les inondations du 2ème ont touché l’agglomération de Montpellier avec le Lez qui a débordé, mais aussi des "flash floods" urbaines liées à l’imperméabilisation des sols.
Ces événements de type Cévenol sont liés au fait qu’en fin de saison, la Méditerranée reste relativement chaude et crée des dépressions riches en vapeur d’eau qui vont buter contre les contreforts du Massif central, dont les Cévennes. Il y a toujours des événements cévenols. Cette année, ils sont vraiment exceptionnels. C’est très difficile de les attribuer au réchauffement climatique. Par contre, sur les précipitations en général, on observe leur intensification en Europe et en Amérique du Nord. C’est-à-dire que la même quantité d’eau tombe en un peu moins de temps. Cela risque de s’accentuer dans un climat plus chaud.
Les mesures de lutte contre les inondations mises en place ces dernières années [recalibrage du Lez, connexion avec les étangs littoraux et bassins d’orage des nouveaux quartiers], se sont révélées largement insuffisantes : les bassins d’orage ont été engorgés en quelques minutes le 29 septembre.
La gestion de ces inondations a été totalement déficiente, de Predict [société filiale de BRL et Méteo France], censée prévenir de l’éminence de pluies violentes et qui n’a rien vu venir, au préfet dont les communiqués et les décisions ont été du grand n’importe quoi.
Quant à l’agglo, elle a eu le culot d’affirmer par la voix de son président que tout c’était bien passé le 29 septembre, alors que les dégats sont considérables et que l’absence de victimes est un petit miracle.
Les surfaces imperméabilisées ont été multipliées par 3 en 20 ans dans l’agglomération de Montpellier. La folie bétonnière rend les inondations plus violentes et le changement climatique va les rendre plus fréquentes comme le note l’agence de l’eau Rhône Méditerrannée Corse.
Mais qu’est-ce que propose Martin "The Voice" Guespéreau ? La mise en place de la compensation pour l’imperméabilisation des sols. Autrement dit, les collectivités locales vont pouvoir continuer à bétonner, dès l’instant où elles "désimperméabilisent" des sols ailleurs.
Les collectivités locales du Languedoc-Roussillon avaient déjà une facheuse tendance à ne pas respecter les SAGE et à accorder des permis de construire sur des zones inondables, la compensation va leur permettre de continuer le même type de développement urbain catastrophique qui sévit depuis plus de 20 ans.
Et que dire de la loi GEMAPI qui va transférer à partir de 1er janvier 2016 la compétence de la prévention des inondations aux collectivités locales qui n’ont ni les moyens techniques ni les moyens financiers pour cela...
Par ailleurs, la révision du SAGE Lez-Mosson-Etangs Palavaisiens vient d’être publiée et mise en enquête publique. Cette révision a été élaborée en considérant que le problème des inondations avait été réglé et en conséquence il n’y a rien sur les inondations dans cette révision.
Les récentes inondations prouvent que cette révision n’est pas acceptable en l’état. Comme c’est quasiment toujours le cas, la consultation du public pendant l’élaboration de la révision du SAGE a été escamotée.
Côté élus locaux, il suffit de dire que le maire de Lattes - commune du littoral ayant fortement bétonné des zones inondables - est président du SAGE Lez-Mosson-Etangs Palavaisiens, président du Syndicat du bassin du Lez et vice-président de l’Agglo de Montpellier en charge de la lutte contre les inondations...
France nature environnement proteste
Par un communiqué en date du 13 octobre, FNE rappelle que "les catastrophes naturelles n’ont parfois rien de naturel" :
"Le Languedoc Roussillon, et Montpellier en tête, connaissent un épisode de fortes pluies, habituelles pour le climat méditerranéen mais qui génère des inondations massives dont les coûts devront être supportés par la collectivité, les acteurs économiques et la population. Si la pluie est naturelle, même lorsqu’elle subit l’influence du réchauffement climatique, le fait qu’elle génère de telles inondations et de tels dégâts est dû pour l’essentiel à notre façon d’aménager le territoire.
Les pluies torrentielles : un épisode méditerranéen « normal »
Un épisode méditerranéen est un phénomène produisant de très fortes pluies sur les plaines intérieures et littorales du pourtour méditerranéen. Des flux d’air chaud, chargés d’humidité et remontant de la Méditerranée, provoquent de violents orages du littoral au relief. Ils se produisent le plus souvent en automne, période où la mer Méditerranée est la plus chaude, bien qu’il ne s’agisse pas véritablement d’un facteur déterminant. Ces orages peuvent stationner sur un même endroit pendant plusieurs heures et déverser des quantités de pluie exceptionnelles, comme ces derniers jours à Montpellier.
L’exposition au risque augmente avec l’artificialisation
Intégrant cette contrainte météorologique, l’aménagement du territoire en région méditerranéenne devrait tout faire pour limiter l’artificialisation du territoire et aboutir à zéro artificialisation nette. A chaque mètre carré imperméabilisé doit correspondre un autre qui ne l’est plus.
Pour tendre vers cet objectif indispensable, les collectivités doivent élaborer et faire respecter un droit qui protège mieux les citoyens. Les plans de prévention des risques d’inondation doivent être réalistes au regard de l’aléa inondation et ne doivent plus être influencés par les intérêts de ceux pour qui construire c’est gagner de l’argent ou de nouveaux contribuables, peu importe le risque.
Le risque augmente quand on artificialise le territoire mais aussi lorsqu’on endigue les cours d’eau, en plus d’imperméabiliser leurs berges. En supprimant les zones d’expansion de crue, en construisant sur des zones naturelles et agricoles, et en augmentant le débit des rivières et fleuves en les endiguant, on empêche leur régulation naturelle et on augmente le niveau des inondations et leurs conséquences.
L’addition est salée…
Selon la caisse centrale de réassurance [1], les dommages matériels causés par les inondations de fin septembre dans la région de Montpellier sont estimés entre 100 et 200 millions d’euros.
Pour Denez L’Hostis, président de FNE : « Les élus ne pourront plus dire qu’ils ne savaient pas. Une gare nouvelle en pleine zone inondable est ainsi envisagée à Montpellier d’ici 2017 Il faut sortir de cette fuite en avant et ne plus construire en zone inondable Rappelons qu’en 2011, 18,5 millions de Français étaient exposés au risque inondation, qui demeure le premier risque naturel en France. Le procès Xynthia, actuellement en cours, démontre une fois de plus la négligence de l’Etat face à ce type de risque ».
Un SAGE inutile
Avant que de détailler longuement et avec une précision irréfutable l’ensemble des manquements justifiant sa position, l’association Mosson Coulée Verte, s’adressant au Commissaire enquêteur, stigmatise, à juste titre, un exercice bureaucratique qui enterre toute concertation véritable :
“ (…) L’information des usagers au travers de la mise en ligne des dossiers techniques a fortement pêché, tout dossier étant à priori “trop technique” pour pouvoir être divulgué. Les membres du collège des usagers se sont donc trouvés très souvent confrontés à une présentation en réunion de dossiers extrêmement lourds, qui auraient nécessité une prise de connaissance anticipée pour émettre des remarques et avis pertinents.
Ainsi, rapidement, la CLE est apparue comme la face émergée de l’iceberg, la quasi totalité de tous les aspects techniques étant gérée en arrière plan entre les techniciens du syndicat et les services de l’Etat. Le poids politique imposant de l’agglomération montpelliéraine a rendu incontournables les négociations avec elle pour rendre possible l’élaboration du SAGE.”
Lire aussi :
- Période à risque élevé d’inondation dans le Sud Est du 10 au 14 octobre.
Keraunos, 9 octobre 2014
Infobassin, 12 octobre 2014
- Les stratégies de l’ignorance dans les organismes et les administrations.
France Stratégie, 2 octobre 2014
- Var : manifestation à Pierrefeu pour la mise en route rapide de travaux
Var Matin, 16 octobre 2014
L’affaire était entendue depuis longtemps ! Que d’inondations n’avons-nous pas eu depuis des décennies ? Et de colloques sur les... inondations. Et de syndicats mixtes ou associations dédiés mais inopérants.
Les maires P"S"-DVG de la ville de Montpellier, Frêche puis Saurel après l’épisode calamiteux Mandroux, ont toujours besoin de l’aval des maires des plus grosses communes de l’Agglo (Lattes, Castelnau...) plutôt de droite pour allotir et bétonner. Clientélisme oblige. Grabels paie l’incurie des maires précédents. Le maire cumulard de Lattes, Cyril Meunier, devra bien s’expliquer un jour sur la paralysie institutionnelle et ses choix controversés. Que les sinistrés attaquent en Justice les responsables de cette catastrophe : l’Etat, l’Agglo, les maires bétonneurs.