Les collectifs contre le Lyon-Turin et l’association Vivre et Agir en Maurienne dénoncent une menace largement sous estimée par les pouvoirs publics promoteurs du projet.
Le rapport « COWI » de 2006 annonçait que le creusement du tunnel de base mettrait en péril les masses d’eau souterraines par un drainage annuel de 60 à 125 millions de m3. Les conséquences étaient détaillées et notamment : « les alimentations desservant les propriétés privées, villages et
villes, la production d’hydroélectricité, l’agriculture et l’irrigation… » voir la page 47 du rapport :
https://lyonturin.eu/documents/docs/cowi2006_ltf_final_report_fr.pdf
Lyon-Turin Ferroviaire, devenu TELT, pensait pouvoir s’exonérer des interdictions de creusement à l’aplomb des périmètres de protection des captages d’eau potable en passant sous silence ces interdictions. Le BRGM, dans un rapport de novembre 2021, indiquait pour sa part que « les résultats de ces analyses mettent en évidence des problèmes de continuité insuffisante du suivi, d’imprécision des mesures et de non quantification des débits très élevés pour plusieurs points d’eau. Près de 75% des chroniques examinées ont une exploitabilité réduite à cause d’un ou plusieurs de ces problèmes. »
Le Préfet, ayant été averti par différents élus que les creusements du tunnel Lyon-Turin prévus violeraient ses propres arrêtés, a diligenté une enquête simplifiée pour changer la règle et permettre les creusements sous les périmètres de protection des captages.
Le commissaire enquêteur missionné (ancien cadre territorial pour la Maurienne), a donné un avis favorable sans identifier de risque pour l’alimentation en eau potable non seulement de la population mais également pour les stations touristiques. Pourtant les risques de tarissements ou de pollutions par les chantiers de creusement sont parfaitement identifiés.
C’est d’ailleurs la société TELT elle-même qui, dès lundi 23 septembre 2024, a publié un appel d’offres pour la mise à disposition de camions-citernes connectés à des unités de distribution d’eau potable et/ou de pick-up et d’eau en bouteilles sur la zone de creusement prévue de Saint-Jean de Maurienne à la frontière italienne.
Tous les ingrédients de la catastrophe environnementale sont donc réunis avec un commissaire enquêteur très impliqué en Maurienne depuis de longues années (ancien responsable de l’unité territoriale de Maurienne http://www.cauesavoie.org/wp-content/uploads/Territoire_de_Maurienneintegrale.pdf), l’absence de prise en compte des risques documentés et pour finir des bouteilles d’eau et des camions-citerne une fois que les tarissements seront constatés.
Le principe de précaution est encore une fois ignoré par le Préfet et par le commissaire enquêteur comme le sont également les dispositions de la directive européenne de protection de la qualité des masses d’eau qui « a pour objet d’établir un cadre pour la protection des eaux intérieures de surface, des eaux de transition, des eaux côtières et des eaux souterraine ».
Les associations mobilisées contre de projet appellent les élus de Maurienne, et plus généralement de Savoie et de la région AURA, à respecter et faire respecter les dispositions de la Charte de l’environnement et le « devoir de prendre part à la préservation et l’amélioration de l’environnement » et à exiger le respect de l’article 5 de cette même charte à valeur constitutionnelle : « Lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertain en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en œuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. »
Si comme le disent les promoteurs du tunnel, une nouvelle ligne "gommant les Alpes" doit redonner une place concurrentielle au rail, nous devrions trouver sur plus de 70 % du réseau ferré français "de plaine" une activité fret ferroviaire florissante : http://lecercle.lesechos.fr/entreprises-marches/services/transports/221179340/fret-ferroviaire-lyon-turin-cas-emblematique-limit http://lyonturin.eu/index.php
On peut rêver à l’heure où les gouvernements successifs n’ont eu de cesse d’enterrer le transport ferroviaire…