Le président du réseau France Nature Environnement a rendu publique le 1er octobre 2013 une lettre ouverte au Président de la République, dans laquelle FNE, qui vient avec cinq autres ONG et la CGT, de dénoncer l’inconsistance de la « feuille de route » gouvernementale rendue publique après la 2ème Conférence environnementale, demande une véritable réforme du droit de l’environnement, dénonçant la dérive du processus engagé depuis plusieurs mois, dans la mesure où de nombreuses mesures préjudiciables à l’environnement ne cessent d’être adoptées par le gouvernement.
« Monsieur le Président de la République,
Conformément à l’engagement pris lors de la Conférence environnementale 2012, votre gouvernement s’est engagé de façon volontariste dans les Etats Généraux de Modernisation du Droit de l’Environnement (EGMDE).
Illustrant le fait que la qualité du dialogue environnemental est désormais un acquis, une très large consultation des parties prenantes a été menée pendant plusieurs mois.
Huit cents contributions ont été recueillies, de nombreuses réunions de travail ont été organisées, le groupe de préfiguration du futur Conseil National de la Transition Ecologique a été associé. Une journée nationale de débat, organisée à partir de l’analyse des contributions, a réuni le 25 juin 2013 deux cent cinquante participants, représentant toutes les catégories de personnes consultées, en présence du ministre chargé de l’environnement.
« Cette concertation a fait ressortir un large consensus sur la modernisation souhaitée du droit de l’environnement : elle doit le rendre plus clair, plus compréhensible, plus stable, et permettre d’assurer une plus grande sécurité juridique pour tous. » : tels sont les termes du bilan d’étape de la démarche faite au conseil des Ministres du 17 juillet, termes que FNE partage.
Bien que consciente de la difficulté de l’exercice, FNE s’est engagée de façon constructive dans ce processus car il était expressément fondé sur « un principe de progrès, excluant toute régression du niveau d’exigence de la protection de l’environnement ».
Nous sommes en effet sincèrement persuadés que le droit de l’environnement mérite une réforme qui le rendrait plus lisible, plus compréhensible et donc mieux appliqué, au service de la nécessaire transition écologique de notre pays et d’une meilleure qualité de vie de nos concitoyens.
Alors que nous étions fortement investis dans ce travail complexe, nous avons été particulièrement choqués de découvrir que se préparaient, de façon parallèle au processus engagé, des décisions importantes relatives au code de l’environnement.
Des décisions ont été annoncées, notamment en matière d’élevages industriels mais également en matière d’articulation des procédures de protection de la biodiversité et d’urbanisme, de manière unilatérale, sans que les participants aux EGMDE en soient seulement informés, et sans que le calendrier fixé par le gouvernement lui-même ne soit respecté.
Cette façon de faire est décourageante et irrespectueuse pour toutes les personnes qui se sont engagées de bonne foi et avec bonne volonté dans ce processus. Le gouvernement doit respecter ses engagements.
Par ailleurs, les décisions annoncées en matière d’encadrement de l’élevage ne se font nullement à niveau de protection de l’environnement constant.
Elles vont à l’encontre des principes constitutionnels de prévention et de participation du public édictés par la Charte de l’environnement et contribueront à la prochaine condamnation de la France au niveau communautaire pour non-respect de la directive Nitrate de 1991.
Ces violations des engagements pris sont graves et nous semblent inacceptables.
Monsieur le Président, nous vous demandons donc de revenir sur toutes les décisions de « simplification » impactant l’environnement, prises en dehors de la concertation organisée au sein des Etats Généraux de la Modernisation du Droit de l’Environnement.
Nous vous demandons une vraie réforme du droit de l’environnement, qui réponde véritablement aux objectifs annoncés en conseil des ministres le 17 juillet dernier.
Une telle réforme pourrait aboutir à une véritable refonte du code de l’environnement, comme FNE l’a déjà proposé, afin d’en faire un outil de politiques publiques efficaces car partagées, au service d’une économie circulaire, plus respectueuse du caractère limité des ressources naturelles.
Cette réforme ne pourra pas se faire sans une concertation digne de ce nom et ne peut être contredite par des prises de décisions disparates.
Il en va aussi de la protection de la biodiversité, des réponses à apporter au défi climatique, du cadre de vie des Français, de leur santé, et de celle des finances publiques.
Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de ma plus haute considération. »
Bruno Genty, président de France Nature Environnement