La Cour bruisse de mille et une rumeurs, tandis que le Royaume semble être gagné par la fronde, ce qui émeut fort les échotiers de la capitale.
“Make our planet great again”, il disait.
Deux membres éminents du gouvernement de la cinquième puissance mondiale s’y emploient assidûment.
En déplacement aux Antilles, le Duc de Hulot y affronte les sargasses.
Sur le front de mer, en bras de chemise délicatement roulés sur les poignets, cheveux au vent, le Duc y a annoncé au peuple, martial, que “toutes les sargasses seront ramassées en 24 heures”, assortissant son propos d’une promesse de pluie de louis d’or.
Les Sargasses se ramassent à la pelle.
Devant l’Hôtel du Gouverneur, le bon peuple excédé, n’en croyant pas un mot, à raison, s’en était venu déverser des tombereaux d’algues malodorantes. La maréchaussée a de surcroît eu l’indélicatesse, après avoir violenté une manante, de bastonner d’importance un gazetier de la radiotélédiffusion autochtone, ce qui suscita un vif émoi dans les peuplades ultramarines locales.
Du Chlordécone, dont la Gazette royale, quatre jours plus tôt, avait décrit en métropole les effroyables ravages, seulement comparables à ceux de la Grande Peste, pas un mot !
Le Duc, muet, furieux, est depuis lors plus que jamais convaincu qu’à la Cour on intrigue hardiment contre lui et le regarde de travers, et menace donc derechef de se retirer sur ses terres corses. Les condottières de l’île se portant désormais volontaires pour secourir les barbaresques qui empruntent la Mare Nostrum pour se soustraire aux exactions du Grand Bey, le Duc de Hulot songerait dit-on à affréter son imposante flottille pour rejoindre la croisade.
Pendant ce temps, à la Cour, la marquise de Poirson, missionnée des Fermiers Généraux, vient de défrayer la chronique en tançant violemment les adeptes de l’herbe à Nicot.
Elle vient en effet de mander en son Hotel les connétables des grandes compagnies des Indes et des Antilles, leur enjoignant de traquer sans plus attendre les milliards de “mégots” qui défigurent les chaussées de la Ville lumière, comme l’ont relaté des gazettes acheminées des Indes orientales et de Chine par les caravanes de la Route de la Soie.
Piquée au vif, la grand-duchesse d’Hidalgo, héritière en droit lignage des baillis de la capitale, a immédiatement rétorqué par devant l’Académie des sciences morales et de l’hydropathie, qu’il était d’ores et déjà possible aujourd’hui, et ce grâce aux travaux des éminents savants réunis dans l’enceinte de la Sorbonne par l’archiduc de Missika pour « réinventer Lutèce », de « valoriser les mégots, en les transformant en mélasse capable d’accroître le pouvoir calorifique des fours à haute température où sont incinérés les déchets dangereux. »
Et d’appeler de ses vœux la construction d’une grande fabrique dans la plaine de Clichy, où seraient assignés les pensionnaires des maisons de mendicité de la capitale, aux fins de les conduire sur les voies du labeur, ad majorem Dei gloriam.
Au Château, ces enfantillages ont bien distrait la Cour, qui venait d’applaudir la visite que venait d’effectuer la Reine à la Manufacture royale des porcelaines de Sèvres, afin d’y commander un nouveau grand service de table, qui portera très haut la magnificence du royaume de France.
Il se murmure que ce serait le banquier Law qui aurait offert une poignée d’assignats (en réalité un "pognon de dingue"), à nos suzerains aux fins de pourvoir à cette dépense qui ne figurait pas sur la Liste civile de la Maison royale.
Gageons que le grand Duc de Villiers pourrait bientôt glisser à l’oreille jupitérienne, après que notre monarque se sera inquiété de la fronde qui gagne nos provinces :
“Non, Sire, c’est une révolution…”