Bruno de Carmantrand a longtemps exercé d’éminentes fonctions dans le domaine de la gestion de l’eau en France. Observateur attentif de ses évolutions, il signait le 19 novembre 2004 une longue analyse titrée « Méandres et divagations de la loi sur l’eau. Les évolutions dans la rédaction de la future loi sur l’eau ». Une passionnante synthèse critique, qui retrace toutes les avancées, comme les reculs, enregistrés de 1964 à 2006, avec l’adoption de la LEMA le 30 décembre de cette même année. Un précieux fil rouge pour qui veut comprendre les enjeux et les conflits qui ont émaillé la construction progressive d’un dispositif dont la complexité croissante ne facilite pas la lisibilité.
La construction d’une politique moderne de gestion de l’eau en France
Les années d’après guerre ont vu une transformation rapide de la société française marquée par une croissance rapide, un développement industriel intense, une modernisation agricole avec réduction du nombre d’agriculteurs et un exode urbain.
Ceci s’est traduit par une pression très forte sur les ressources en eau : prélèvements élevés et rejets non traités mettant en péril les usages futurs nécessitant des volumes d’eau toujours plus importants.
Le Commissariat Général au Plan dans les années 1955-58 est sensibilisé à cette question de ressources, et le Premier Ministre Michel Debré demande que ce problème de société soit étudié.
La Commission de l’eau est alors créée, et un peu plus tard en 1961, le Secrétariat permanent pour l’étude des problèmes de l’eau, auprès du Premier Ministre, est à son tour mis en place.
Ces structures ont mis en lumière la grande dispersion des services et administrations ayant en charge les questions d’eau, et les besoins urgents de prise en compte du développement des ressources en eau dans les régions du Nord et de l’Est de la France soumises à un essor du secteur industriel.
Les débats techniques ont abouti à la préparation d’un texte qui a été soumis au débat parlementaire : Assemblée Nationale et surtout Sénat où le débat fut long, détaillé et constructif, conduit par la Commission spéciale dirigée par le Président Marcilhacy et le rapporteur Maurice Lalloy.
Le texte de la Loi du 16 Décembre 1964 est issu du travail de cette Commission et des longs mois de rédactions successives et de négociations.
Deux aspects essentiels ont fait l’objet de discussions : la nécessité de traiter les problèmes d’eau au niveau du bassin versant qui est le réceptacle physique de la ressource en eau et le besoin de donner à l’eau une valeur financière que chacun devrait payer pour l’usage qu’il souhaite en faire (on s’inspire alors du principe de la tarification au coût marginal mais fortement amendée pour rendre le système applicable à la ressource en eau).
Les économistes, notamment Pigou, ont qualifié cela d’internalisation des coûts externes et ils proposent de jouer sur le niveau des charges pour peser sur la demande en eau ; cependant la théorie est limitée par la notion d’élasticité de la demande.
Les étapes de la mise en œuvre de la gestion par bassin
Après la sortie de la loi du 16 Décembre 1964, le Secrétariat permanent s’est employé à la rédaction des documents d’application de la loi, et la tâche était lourde car près de 25 ou 30 textes furent nécessaires.
Ce furent les décrets de création du Comité National de l’eau (3 sept 1965), des Comités de bassin (14 septembre 1966), des Agences financières de bassin (14 septembre 1966), puis de la coordination interministérielle dans le domaine de l’eau (5 avril 1968), pour ne citer que les plus importants, car il y eu en outre de nombreux arrêtés et circulaires pour articuler la nouvelle politique de l’eau avec les pratiques antérieures.
Le décret du 21 Octobre 1965 a mis en place les Missions techniques de l’eau dans chaque bassin dont les missions ont été :
– D’assurer la liaison entre les diverses autorités et les services au niveau du bassin ;
– Rassembler pour le compte des administrations centrales, les éléments devant permettre l’établissement des plans d’aménagement général des bassins ;
– De préparer la mise en place des Agences.
Après la prise des décrets du 14 septembre 1966, créant les Agences, une circulaire du 8 mai 1968 précise que le travail de la mission technique est terminé et que les personnels qui la composaient constituent le noyau de la nouvelle agence. Ils auront à poursuivre l’activité d’établissement du programme annuel et pluriannuel de bassin, destiné à asseoir selon les termes de la loi le montant des redevances.
La coordination administrative est alors assurée par un groupe de travail permanent : la Mission déléguée de bassin dont la circulaire citée fixe la composition et les attributions.
Toute cette procédure relativement longue, mais conduite avec une volonté politique fermement affirmée, a permis en une huitaine d’années la mise en place de cette nouvelle politique de gestion de l’eau. Les Agences ayant perçu les premières redevances dans le courant de l’année 1969 sur la base d’un programme transitoire.
Ce programme, dès son origine et aussi dans l’esprit du législateur, portait essentiellement sur les problèmes de pollution dont la loi et le décret du 14 septembre 1966 fixent les règles de définition des assiettes de redevances et des primes. Pour ce qui concerne les redevances de prélèvements, le décret délègue au Conseil de l’Agence le pouvoir de fixer ses propres règles, et d’obtenir l’avis conforme du Comité de Bassin pour les rendre applicables.
Les premières difficultés
Dès l’origine, l’Association des maires de France s’est insurgée contre ces nouvelles structures qui n’étaient pas composées exclusivement d’élus ou de représentants de l’Etat, et qui avaient le pouvoir de faire payer des redevances à des communes gérées par des élus et de plus qui ne polluaient pas, se chargeant simplement de collecter la pollution de leurs habitants.
Cette fronde des communes a donné lieu à de multiples débats et discussions devant les tribunaux sur la nature juridique des redevances et sur le bien fondé de la perception.
A l’issue de ces procédures il est apparu pour le Conseil d’Etat que les redevances des Agences étaient « sui generis » et qu’elles n’avaient pas d’équivalent dans notre système juridique ; pour la redevabilité des communes l’arrêt de Villers les Pots en 1974 a conclu que les communes ne polluaient pas, et que c’étaient bien les habitants qui se trouvaient à l’origine de la pollution rejetée par les ouvrages communaux.
En conséquence, un nouveau mécanisme de calcul de la redevance de pollution pour les communes a été créé : la contre valeur qui vise à reporter sur le prix du M3 d’eau payé par l’habitant le montant de la redevance de pollution qui est intégré dans la partie « assainissement » de la facture d’eau.
C’est la commune ou son délégataire qui assure le recouvrement de ces sommes pour le compte de l’Agence.
Ce système relativement transparent, amène le particulier à payer en totalité la charge de la pollution, alors que la commune qui assure la collecte et le traitement perçoit les primes pour épuration.
Les paramètres pris en compte
Dès l’origine, les redevances de pollution ont été calculées sur la base de quatre paramètres principaux que sont :
– les matières en suspension (MES)
– les matières oxydables comportant elles mêmes deux éléments : demande chimique en oxygène (DCO) et demande biologique en oxygène à 5 jours (DBO5) et calculées par la formule (DCO+2DBO5)/3
– les sels solubles.
Par la suite un paramètre global concernant les toxiques a été ajouté :
– les matières inhibitrices (MI)
Puis ce furent :
– les composés de l’Azote réduit (NR) et
– oxydé (NO),
– le phosphore (P),
tous trois agents de l’eutrophisation dont on a vu le développement à partir des années 1980 et peut être amplifié par la politique de lutte contre les matières en suspension.
Puis plus récemment, pour mieux cerner les pollutions toxiques à long terme et à court terme on a introduit :
– les composés organohalogénés adsorbables sur charbon actif (AOX)
– les métaux et métalloïdes (METOX)
Cette évolution montre l’intégration progressive et de plus en plus détaillée de l’approche des phénomènes de pollution et des besoins de ciblage plus précis des actions à entreprendre pour améliorer la qualité des eaux.
Inévitablement, ceci introduit une grande complexité dans le calcul des redevances et des aides, et justifie des moyens de suivis et de laboratoires de plus en plus pointus pour l’agence comme pour les maîtres d’ouvrage.
La redevance ressource
Ainsi que nous l’avons indiqué plus haut, cette redevance est beaucoup moins définie par les textes et l’article 18 du décret du 14 septembre 1966 N° 66-700 indique « des redevances peuvent être réclamées aux personnes publiques ou privées qui rendent l’intervention de l’agence nécessaire ou utile :
– soit qu’elles contribuent à la détérioration de la qualité de l’eau,
– soit qu’elles effectuent des prélèvements sur la ressource en eau,
– soit qu’elles modifient le régime des eaux dans tout ou partie du bassin…
Pour la détermination de l’assiette des redevances établies au titre des prélèvements, le Conseil d’administration de l’agence établit des barèmes répartissant les prélèvements par classes suivant les quantités et la qualité de l’eau prélevée, ainsi que les circonstances de temps et de lieu de nature à influer sur la valeur de la ressource. Le conseil peut établir des barèmes particuliers à certaines catégories de redevables, comportant des règles simplifiées pour l’assiette des redevances.
Sur ces bases, la redevance ressource a été mise en place dans les années 1970 pour les prélèvements destinés à l’alimentation publique et sur le bassin Rhône Méditerranée Corse pour l’irrigation. Ce fut une redevance d’études à hauteur de 1,25 frs par hectare irrigué qui a été demandée aux canaux d’irrigation. A la même période les aides apportées par l’Agence concernaient la protection de la qualité de l’eau potable et les études de modernisation des irrigations gravitaires avec économies d’eau.
Plus tard, dans les années 1980, après que les études générales de modernisation aient été conduites par l’administration de l’Agriculture avec un cofinancement de l’Agence, une redevance plus classique, dont l’assiette était le volume d’eau prélevé, a été émise sur les canaux agricoles et son produit fut affecté au financement de travaux, dont la finalité visait la réduction des prélèvements et les économies d’eau.
Cette approche ne fut pas partagée par tous les irrigants, et plusieurs s’opposèrent au paiement de leur redevance en demandant l’avis du Tribunal Administratif et du Conseil d’Etat. Ils furent tous déboutés et progressivement, au fur et à mesure de la conclusion des procédures suspensives, ils durent rentrer dans le système. Pour certains ce fut après 15 ans d’âpres discussions et la mise en place d’un moratoire pour régler les arriérés.
Toutefois, devant ces interventions multiples, le 26 mai 1982 le Premier Ministre a saisi le Conseil Constitutionnel pour statuer sur la conformité de la loi de 1964 avec la Constitution de la République.
Son jugement fut rendu le 23 juin 1982 et les conclusions sont contenues dans l’ article 1er : « Les dispositions de l’article 13, premier alinéa, et de l’article 14, deuxième alinéa, de la loi du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution ont le caractère législatif. » (cf. texte complet de la décision du 23 juin 1982 en annexe)
Cette décision portant sur une loi déjà ancienne, et entrée en application, ne la remet pas directement en cause mais indique cependant que les décisions financières du Comité de bassin et de l’Agence doivent être soumises à l’avis du Parlement.
Depuis cet arrêt, et chaque fois qu’une nouvelle rédaction ou qu’une nouvelle loi sur l’eau est envisagée, on se penche sur cette question de constitutionnalité, mais pour le moment sans concrétisation, car faire voter des redevances par le Parlement sans enlever les prérogatives du Comité de bassin, ce n’est pas chose facile.
(Ce sera chose faite avec la LEMA du 30 décembre 2006. Note Eaux glacées).
La loi du 3 Janvier 1992
Dans les années 1990, la vision de l’Environnement a pris une dimension plus large et ce qui pendant 25 ans relevait de politiques sectorielles comme l’eau est devenu un objectif bien plus vaste et plus global.
Le texte de la loi sur l’eau avec la montée en puissance des redevances et l’impact des directives européennes a montré ses limites et a justifié d’être remis sur le métier. C’est ce qui fut fait entre 1990 et 1992.
Plusieurs versions de loi furent rédigées comportant un volet planification, un volet police des eaux et sanctions et un volet relatif aux agences de l’eau prenant en compte la fameuse question de constitutionnalité ; cependant dans le contexte de la situation de l’époque, avec une forte pression sur les questions d’augmentation du prix de l’eau, de besoin aigu de financement des stations d’épuration des eaux (sortie de la directive européenne Eaux Résiduaires Urbaines en 1991), la crainte de voir déstabilisé voire remis en cause un système vieux de 30 ans et qui alimentait financièrement tout le secteur de l’eau a poussé à la prudence .
Ainsi le texte approuvé par l’Assemblée Nationale le 21 Décembre 1991, et qui est finalement sorti le 3 Janvier 1992 ne comportait plus de volet Agence.
Quels ont été les apports de cette nouvelle loi ?
Les points essentiels qui sont restés concernent :
– La prise en compte patrimoniale des ressources en eau de toutes natures y compris les milieux humides ;
– Le passage d’une politique tournée vers la réalisation d’ouvrages vers une politique plus globale de prise en compte des milieux et une gestion équilibrée ;
– Une relance forte de la planification au travers des Schémas Directeurs d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) au niveau des grands bassins et des Schémas d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE) au niveau des sous bassins ;
– Un renforcement de la police de l’eau avec autorisations, déclarations plus codifiées et un durcissement des sanctions ;
– Une facturation impérative des ventes d’eau au mètre cube et non plus forfaitaire pour favoriser les économies d’eau ;
– Un élargissement des compétences des régions et des départements pour les problèmes d’eau ;
– Une confirmation de la gestion communale de l’eau et de l’assainissement ;
– Une confirmation aussi du rôle des départements dans le suivi des ouvrages d’épuration.
La dynamique des SDAGE
A la lumière des dix années qui se sont écoulées depuis cette loi et faute d’avoir du reprendre le système de redevances, on retiendra surtout pour les Agences que ce fut l’engagement d’un très gros chantier concernant la planification, qui a vu le jour et qui a rapproché l’Administration de l’Environnement (Diren de bassin) et les Agences, réunis pour animer la cellule technique de bassin.
De 1992 à 1996, ce fut pour le Comité de Bassin, l’établissement du SDAGE avec ses diverses phases : état des lieux, objectifs, orientations, préconisations, consultations des collectivités locales, consultation et débat public, approbation par le Préfet coordonnateur de bassin, après avis de la Mission Interministérielle de l’Eau.
Après 1996, le travail est descendu au niveau des sous bassins avec la mise en place d’un certain nombre de SAGE et le suivi de l’évolution des milieux selon les objectifs et préconisations du SDAGE (tableau de bord et panoramique de suivi pour le bassin RMC sur la base de plus de 15 indicateurs de qualité et quantité).
Les subdivisions de bassin en Commissions Géographiques mises en place à partir de 1984 en RMC, et même avant en Seine Normandie, ont facilité cette approche informelle de niveau local, et ont permis une information, d’abord, et une consultation du public ensuite, ayant comme issue une remontée des problèmes de terrain au niveau du bassin principal.
Dans le même temps, l’administration chargée de la police des eaux se lançait dans une vaste opération de remise à jour des autorisations de prélèvement comme de rejet.
Cette nouvelle dynamique de planification a confirmé les grands problèmes de milieu et de développement durable :
– Pollution chronique domestique
– Pollution toxique des industriels
– Protection des aquifères souterrains
– Alimentation en eau potable,
mais a aussi mis en lumière de nouveaux enjeux comme les inondations, la pollution issue des pratiques agricoles qu’elle soit diffuse ou ponctuelle,les zones humides.
Les nouvelles tendances en matière de redevances
Toutes les réflexions conduites autour de la dynamique SDAGE ont développé une connaissance plus fine des milieux et des atteintes qu’ils supportent, notamment l’eutrophisation.
Pour répondre à la question de la pollution d’origine agricole, et spécialement pour la pollution ponctuelle, le Ministère de l’Agriculture et les Agences ont mis au point un dispositif particulier le Programme de Maîtrise des Pollutions d’Origine Agricole (PMPOA) dont l’objectif était de réduire dans un délai de 5 ans les rejets agricoles issus des élevages afin de faire en sorte qu’à l’issue de cette période ne restent redevables au titre de la pollution que les rejets les plus importants ou les agriculteurs n’ayant pas accepté de se mettre en règle vis-à-vis de la législation au travers de ce dispositif.
Le schéma financier était grossièrement le suivant : l’agriculteur petit ou moyen devait réaliser des travaux lui permettant d’éliminer la pollution de ses élevages de manière naturelle et raisonnée et dans ce cas, l’Etat apportait 1/3 du financement, l’Agence apportait 1/3 et l’agriculteur le dernier tiers. En fait l’Etat progressivement s’est retiré, et a été remplacé par les départements ou/et les régions. De cette manière le nombre d’agriculteurs redevables potentiels devait diminuer très rapidement et au début du 8ème programme les redevables réels devaient n’être qu’une poignée !
En fait le PMPOA, engagé autour de 1994, s’est étalé sur une durée plus longue que prévue initialement mais doit cependant permettre une entrée progressive des agriculteurs dans le dispositif agence.(cf. rapport d’évaluation en annexe)
La pratique, habilement négociée par la profession agricole, de recevoir des aides avant d’avoir payé la moindre redevance et en promettant à terme de régler une redevance hypothétique, n’a pas manqué de poser question dans les agences. Mais le système utilisé pour les industriels lors de la mise en place des agences dans les années 1960 avec les contrats de branches était de même nature aussi ils l’ont accepté.
Même interrogation au sein du ministère de l’Environnement qui a proposé, lui, une nouvelle approche de la fiscalité environnementale incluant l’eau, en intégrant les engrais et les pesticides ainsi que les extractions de matériaux dans la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Un compte d’affectation spécial devant permettre d’individualiser les financements correspondant.
Cette nouvelle vision et ce goût pour une prochaine reforme est en grande partie lié au rapport sévère dressé par le Commissariat au Plan sur la mauvaise application du principe pollueur payeur, la trop faible participation des agriculteurs et le déficit démocratique des organismes de bassin, s’est traduite par une présentation au conseil des Ministres le 20 mai 1998 d’une communication de Madame Voynet Ministre de l’Environnement sur « la réforme des instruments d’intervention publique dans le domaine de l’eau ».
La presse de l’époque, beaucoup plus directe, avait baptisé cela « le scandale des agriculteurs », visant là le développement de l’eutrophisation des cours d’eau par les excès d’azote issus des élevages, mais aussi de la pollution diffuse trouvant son origine dans les engrais azotés et phosphorés répandus sur les grandes cultures, et la non réaction ni des agences ni de l’Etat.
Un autre sujet, à la même période, a fait l’objet de réflexions approfondies c’est la lutte contre les inondations.
En effet la montée en puissance des préoccupations d’aménagement de rivières et l’intervention souhaitée des agences se sont heurtées au plan juridique à une impossibilité d’implication financière conséquente au fait que le produit des redevances devait retourner au phénomène qui les avait généré, et que, par conséquence, sans redevance inondation ou modification du régime des eaux, il ne pouvait y avoir de véritable politique de lutte contre les crues et d’intervention en aménagement de cours d’eau autre que ce qui pourrait être considéré comme un complément de l’action de dépollution.
Ainsi partant de ce constat, des projets de redevances ont vu le jour selon diverses approches : les unes assises sur la réduction des surfaces de zones inondables provoquée par la construction de digues, les autres par l’augmentation des coefficients de ruissellement des sols liée à l’urbanisation, d’autres encore par un assemblage complexe et savants des deux formules .
A partir de là et jusqu’à aujourd’hui une foule de projets de rédaction de textes a été préparée au sein du Ministère par les ministres successifs Madame Voynet, puis Madame Bachelot et maintenant Monsieur Lepeltier.
Les différents projets
Pour ne pas donner des insomnies aux lecteurs, et pour ne pas entrer dans un débat de puristes en décrivant la trentaine de version de cette future loi sur l’eau, nous nous en tiendrons à trois versions, correspondant en gros aux trois ministres de l’Environnement que nous avons eu entre 1999 et 2004.
La loi présentée par Dominique Voynet au Conseil des Ministres du 27 juin 2001
Ce texte très complet couvre l’ensemble des problèmes abordés plus haut et intègre les obligations vis-à-vis de l’Europe découlant de la sortie le 23 octobre 2000 de la Directive cadre pour une politique de l’eau commune, entrée en vigueur le 22 décembre 2000.
Dans une première partie, il traite de la planification et de la décentralisation en matière d’aménagement et de gestion des eaux et par là il transpose en droit français les bases de la directive européenne. Il introduit notamment les nouvelles notions de masses d’eau et de bon état physique et chimique pour ces masses d’eau qu’il y aura lieu de définir sur le terrain !
Les échéances régulières d’évaluation de la qualité de ces masses d’eau sont aussi fixées en tenant compte de la Directive, les nouvelles missions du Comité de bassin y sont définies, une place particulière est donnée aux phases successives et aux procédures de consultation du public, les conditions d’établissement et de fonctionnement des SAGE et leur Commission Locale de l’Eau y sont précisées.
Une deuxième partie (articles 9 à 28) traite de questions diverses concernant l’Assainissement, la gestion des cours d’eau et les transferts de compétence vers les collectivités locales, les servitudes d’inondations en vue de permettre l’inondation de zones dites de « rétention des crues » et de donner un « espace de respiration ou de mobilité »au lit des cours d’eau.
Une troisième partie (articles 29 à 33) traite des services publics de l’eau et de l’assainissement, et du rôle que les communes sont appelées à y jouer : prise en compte de l’assainissement non collectif, caractère social de la fourniture d’eau, tarification du service, facturation au volume, information du public, limitation à 12 ET 20 ans des délégations de service public pour les collectivités locales.
Enfin l’article 34 crée un Haut Conseil des services publics de l’eau et de l’assainissement, chargé de la régulation des services publics, de l’analyse des prix et de la qualité, ayant une mission de veille et d’alerte des autorités compétentes .
Une dernière partie (articles 38 à 63) est consacrée à la réforme des agences de l’eau que nous détaillerons un peu.
– Le conseil d’administration de l’agence est redéfini avec une participation égale d’élus, d’usagers de l’eau, de représentants de l’Etat, un président nommé par décret, un représentant du personnel. Il est prévu que les agences peuvent intervenir dans la coopération internationale et notamment dans le domaine humanitaire.
– Les agences adoptent leurs programmes pluriannuels après avis des comités de bassin et un bilan annuel est présenté par le gouvernement au Parlement
– L’agence attribue des aides aux maîtres d’ouvrage qui ne sont définitivement acquises que si les actions réalisées sont conformes à la police des eaux définie par l’administration.
– L’agence contribue financièrement aux actions de police des eaux assurées par l’Etat et qui correspondent au Fonds de Solidarité Eau (FNSE).
– Les redevances sont fixées pour :
– Pollution de l’eau
– Réseau de collecte
– Excédents d’azote
– Consommation d’eau
– Modification du régime des eaux en application du principe pollueur payeur.
– Ces redevances sont calculées sur une assiette annuelle, et des seuils en dessous desquels la redevance n’est pas appelée sont fixés par la loi, il est précisé que ce sont les collectivités responsables de la collecte qui sont redevables (disparition du calcul de la contre valeur), l’assiette de pollution est celle rejetée dans le milieu (soit différence entre pollution produite et pollution supprimée par les dispositifs d’épuration)
– Pour lever la question de non constitutionalité de la loi de 64 abordée plus haut, le projet prévoit de fixer par la loi un taux de référence pour chaque redevance ou paramètre de redevance, et de donner latitude aux agences de fixer leur taux de base en fonction de leur priorité de bassin et leur besoin de financement dans une fourchette de 20% autour de cette valeur de référence. De même pour les coefficients de modulation par zones géographiques, la loi fixe des limites à ces coefficients .Et ainsi pour chaque redevance des valeurs de référence et des écarts en pourcentage sont fixés par la loi, chaque agence fixant ensuite son propre taux dans cette fourchette.
– La redevance pour excédents d’azote fait l’objet d’un long développement qui vise au premier chef l’agriculture. Elle concerne les personnes imposées sur les bénéfices agricoles réels ; l’assiette est constituée par le solde du bilan annuel d’azote de l’exploitation, différence entre les quantités entrant dans l’exploitation et les quantités en sortant durant un exercice comptable en tenant compte des variations de stocks ! (Les agences n’ont pas peur des usines à gaz), car après cette description simple il y a deux pages d’explication dans le texte de loi pour préciser les modalités du calcul.
– Pour la redevance consommation d’eau, peu de grands changements, sinon la création de trois catégories de ressources : catégorie 1, sans impact notable sur le régime des eaux ou la qualité – catégorie 2, lorsque la consommation induit des altérations du milieu ou dépasse la ressource disponible – catégorie 3, lorsque outre les problèmes de la catégorie 2 s’ajoutent des dommages potentiels pour la production actuelle ou future d’eau potable.
– Pour la redevance modification du régime des eaux, le projet comporte beaucoup de nouveautés :
– Une redevance de dérivation
– Une redevance pour obstacle joignant les deux rives d’un cours d’eau
– Une redevance pour stockage
– Une redevance pour éclusées
– Une redevance pour imperméabilisation des sols
– Une redevance pour réduction des champs d’inondation…
Ces six redevances comportent plus de trois pages de conditions particulières d’application.
– Le VIIIème programme est détaillé et des orientations générales sont données sur les actions prioritaires à promouvoir et il est prévu des mesures d’évaluation de l’efficacité des mesures financées par les agences.
– Les derniers articles du projet fixent un certain nombre de points destinés à compléter le code de l’Environnement en matière de protection de la qualité des eaux, et des offices de l’eau de départements d’outre mer.
– Enfin l’article 63 et dernier abroge divers articles du code de l’Environnement et surtout l’article 14 de la loi de 1964, base de la gestion par bassin.
Ce projet en pratique n’a jamais été suivi d’effets car le Gouvernement Jospin a cessé ses fonctions en 2002, et la loi a été mise au placard en attendant d’être reprise par le nouveau Gouvernement.
Les projets de Mme Roselyne Bachelot
Le nouveau ministère mis en place en mai 2002 a abandonné le projet précédent, notamment du fait de la réaction des agriculteurs et de la complexité de calcul des redevances sur l’azote qui conduisait à un coût d’établissement prohibitif de cette redevance.
Il a donc été décidé de lancer une vaste concertation et un débat national sur la politique de l’eau, de manière à déterminer avec le public et les acteurs de l’eau quels aménagements devaient être apportés à la politique française.
Quatre phases d’élaboration et de concertation ont été conduites par la Ministre durant l’année 2003 et le début de l’année 2004 comportant :
– L’établissement au niveau national de contacts bilatéraux avec les acteurs de l’eau ;
– Un débat local conduit par les agences de l’eau et les directions régionales de l’environnement des bassins ;
– Une consultation du grand public achevée en décembre 2003 par la Conférence de synthèse du débat sur la politique de l’eau ;
– Enfin une quatrième phase lancée en février 2004 avait pour objet de recueillir l’avis du public sur les premières propositions de réforme formulées par le Ministère.
Ce travail étant conduit dans la ligne de la Directive-cadre européenne qui fixe des objectifs aux Etats membres pour retrouver un bon état écologique des eaux avant 2015.
C’est le successeur de Madame Bachelot qui a présenté le 2 juin 2004 au Conseil National de l’Eau cet avant projet de loi sur l’eau.
Les projets de M. Serge Lepeltier
Le document présenté en juin 2004 dès son article premier indique que « la loi a pour objet l’amélioration de la qualité des milieux aquatiques afin d’atteindre les objectifs fixés par les directives européennes » ; un véritable acte de foi vis-à-vis de Bruxelles.
Ce texte hérité des travaux engagés par la Ministre précédente, comporte un certain nombre de variantes par rapport au projet Voynet.
La première partie des articles 2 à 19 traite de la préservation des ressources en eau et des milieux aquatiques. Puis avec les articles 20 à 23 aborde la qualité des eaux et des milieux aquatiques, la définition des zones de protection des captages et les risques liés aux produits phytosanitaires et les dispositions à prendre pour contrôler le bon fonctionnement des pulvérisateurs.
Le titre II concerne l’alimentation en eau potable et l’assainissement et crée notamment un fonds de garantie des boues d’épuration (article 25) destiné à financer les dommages pouvant intervenir sur des cultures suite à l’épandage de boues de mauvaise qualité, ce fonds serait alimenté par une contribution additionnelle sur les conventions d’assurance des producteurs de boues et une contribution de l’agence nationale de l’eau et des milieux aquatiques. La gestion comptable de ce fonds serait assuré par cette même agence dans un compte distinct.
L’assainissement pluvial est assuré par les communes ou des groupements intercommunaux (article 32) qui peuvent instituer une redevance pour service rendu et recouvrée sur les usagers par la commune ou l’établissement considéré ou son délégataire.
(Ce projet, repris dans la LEMA du 30 décembre 2006, n’a toujours pas été conduit à bien en 2009, après que le Conseil d’Etat en ait retoqué le décret d’application le 3 mars 2009. Note Eaux glacées.)
Le titre III traite de planification et de gouvernance, et il précise dans son article 37 que les départements, outre le service d’assistance à l’exploitation des stations d’épuration, peuvent aussi intervenir pour l’eau potable et les eaux pluviales ; à l’article 37, c’est la suppression du FNDAE qui est proposée et par l’article 38, c’est la création de fonds départementaux pour l’eau et l’assainissement qui est présentée. Ce fond serait alimenté par une redevance prélevée sur les consommations d’eau des communes. Ce serait pour les communes rurales une sorte de compensation de la suppression du FNDAE dont le produit allait aux départements pour soutenir les investissements des petites communes. Le taux maximal proposé est de 0,15€/m3 prélevé par an.
(Ce projet sera abandonné lors de la discussionb parlementaire de la LEMA en 2006. Note Eaux glacées).
Les articles 39 à 45 fixent certaines règles de planification relatives aux SDAGE et aux SAGE et présentent le rôle que peuvent jouer les établissements publics territoriaux de bassin.
Les articles 49 à 51 visent la politique de bassin et les institutions ; le terme d’agence de l’eau ou de bassin disparaît et il est remplacé par « Institutions de bassin » et son Conseil d’administration est baptisé « Comité exécutif », mais au-delà de ces appellations les règles restent celles des agences de l’eau avec redevances et programme pluriannuel dont les orientations prioritaires correspondent à la Directive cadre, notamment l’atteinte du bon état écologique des masses d’eau pour 2015 ; mention est aussi faite d’améliorer la gestion des crues par accroissement des zones d’expansion et meilleur entretien du lit des cours d’eau.
Au plan financier, il est précisé que les institutions de bassin contribuent au financement de l’Agence nationale de l’eau et des milieux aquatiques, et que le montant global des autorisations de programme des institutions pour la période 2007/2012 sera limité à 11 milliards d’euros.
L’article 49 détaille les redevances des institutions de bassin, redevance de pollution calée sur la pollution annuelle rejetée dans le milieu naturel, et un tableau fixe les taux plafond de redevance par paramètres ; on notera que les rejets en eau souterraine sont taxés plus fortement et qu’une nouvelle redevance pour rejet de chaleur a été créée.
La redevance pour collecte, comme dans le projet précèdent, est maintenue au taux de 0,30 €/m3.
Par contre la redevance pour pollutions diffuses est proposée avec deux alternatives : soit une extension de la TGAP à l’azote des engrais et des aliments du bétail, soit une transformation de la TGAP en redevance.
Les autres redevances sont peu modifiées. Seule la redevance pour imperméabilisation semble avoir disparue. La redevance pour protection et gestion du milieu aquatique est imputée aux fédérations de pêche et aux associations de pécheurs professionnels.
L’article 50 précise que des parlementaires seront intégrés au Comité National de l’Eau, et l’article 51 qu’il est créé une Agence Nationale de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA), ayant le statut d’établissement public administratif pour soutenir au niveau national la gestion globale de l’eau et des milieux aquatiques. Cette agence dispose de moyens financiers apportés par une contribution des différentes institutions de bassin, et reprend les activités du Conseil Supérieur de la pêche qui disparaît et est intégré à cette nouvelle structure.
Les articles 52 à 61 concernent l’organisation de la pêche et les dispositions transitoires en vue d’une entrée en vigueur au 1er Janvier 2007 et une abrogation des articles 14, 14-1, 14-2, 14-3 de la loi de 64 .
Les conséquences de la remise en cause du projet Voynet
Le retrait du projet déposé en 2001, et son remplacement par un projet applicable en janvier 2007 a eu des retombées directes sur d’autres textes liés à la politique de l’eau.
Tout d’abord le texte sur les risques technologiques, dont certains points devaient être repris dans la loi sur l’eau a été étudié par le Sénat et le Parlement en 2002-2003, et a été adopté le 30 juillet 2003.
Certains points relatifs à la prévision des crues, schéma par bassin, rôle du maire dans la lutte et l’information, place des établissements publics territoriaux de bassin pour faciliter l’action des SAGE, définition des zones de rétention ou d’érosion par les préfets qui étaient dans le projet Voynet ont été retirés du projet de juin 2004, puisque définis par le texte sur les risques.
De plus le délai de 2007 était incompatible avec la nécessité de transcrire la Directive cadre en droit français dans le délai de trois ans après sa parution dans le journal officiel des Communautés Européennes. C’est pourquoi, dès avril 2003, un projet de transcription a été présenté à l’Assemblée nationale, puis est passé au Sénat en janvier 2004 pour revenir à l’Assemblée et y être adoptée le 6 avril avant d’être promulguée le 21 avril 2004.
Cette loi de 9 articles intègre en droit français les prescriptions essentielles de la directive qui étaient présentes dans le projet Voynet et qui ont été retirées dans la proposition de Juin de Serge Lepeltier.
Quant à la Loi sur l’eau proprement dite, la procédure se poursuit et une version qui porte quelque chose comme le numéro 6 est sortie du Ministère de l’Environnement en septembre 2004. En attendant une nouvelle version, nous allons voir rapidement ce qui diffère de la version de juin.
Le projet de la future loi sur l’eau en novembre 2004
Ce texte découle directement du précédent et ne comporte que des variations mineures. Tout d’abord, dès l’article 1 il est rappelé que « le bassin versant constitue le périmètre privilégié pour la définition des objectifs de gestion durable de l’eau et des milieux aquatiques et la mise en œuvre des mesures destinées à les atteindre. Ces objectifs et ces mesures s’appliquent aux eaux de surface, aux eaux de transition, aux eaux souterraines et aux eaux marines intérieures et territoriales. Ils visent une préservation et le cas échéant une amélioration de la qualité des eaux et de la disponibilité de ressource utilisable en vue d’assurer une conciliation durable des différents usages de l’eau et de la préservation des milieux aquatiques. «
« Les usagers de l’eau ou leurs représentants participent à la définition et au suivi de la politique de l’eau. Ils contribuent financièrement à la mise en œuvre de cette politique par le biais de redevance ».
Ce sont les bases de la gestion par bassin qui sont ici rappelées.
Ensuite diverses notions relatives aux milieux aquatiques sont précisées ou complétées, curage des cours d’eau, corridors écologiques et débits réservés, impact des concessions énergétiques, sanctions applicables…
La gestion quantitative est ensuite abordée par les articles 15 (comptage) et 16 (répartition des eaux), et il est ouvert la possibilité aux associations d’irrigation de jouer ce rôle de répartition et de récupération des coûts .
Au chapitre 3, au titre de la lutte contre les pollutions diffuses plusieurs notions nouvelles sont définies :
– Les zones d’alimentation des captages d’eau potable pour l’immédiat et le futur ;
– Les zones humides d’intérêt environnemental particulier ;
– Les zones d’érosion.
Dans ce même chapitre, l’article 21 et suivants visent à définir la traçabilité des produits phytosanitaires et biocides à usage agricole, leur contrôle et le bon fonctionnement des pulvérisateurs.
L’article 26, dans le cadre de l’épandage des boues crée un fonds destiné à couvrir les risques liés à des boues de mauvaise qualité pour les sols ou les cultures. La gestion de ce fonds est confiée à l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques .
L’article 30 précise les compétences des communes en matière d’assainissement collectif et non collectif, et leur ouvre la possibilité d’intervenir pour des travaux non collectifs à la demande des intéressés.
De même pour l’assainissement pluvial, les communes peuvent instituer une redevance pour service rendu, et notamment pour les volumes d’eau collectés sur des surfaces imperméabilisées.
Les articles 37 et 38 traitent de l’assistance technique à l’exploitation des ouvrages d’assainissement, et de l’appui que peuvent apporter les départements dans les domaines de l’eau potable, des eaux usées, des eaux de ruissellement et de l’entretien des rivières, mais aussi de la suppression du FNDAE, dont les recettes allaient aux départements pour aider à l’équipement des communes rurales.
Les articles 40 à 45 décrivent en détail les SAGE, leur élaboration, la commission locale de l’eau, la portée juridique du SAGE, le rôle des établissement publics de bassin territoriaux, l’approbation du SAGE, sa modification et les révisions successives.
La politique de l’eau à partir des agences, de la participation des usagers et des incitations financières est développée dans les articles 46 et suivants :
– Les agences retrouvent le nom d’agences de l’eau et non plus d’institutions de bassin, et leur mission est de faciliter la mise en œuvre des SDAGE, de réaliser les SAGE et de favoriser par ses actions la gestion durable et équilibrée des ressources en eau et des milieux aquatiques, à assurer l’alimentation en eau potable et la gestion des crues en permettant le développement d’activités économiques durables.
– Au sein de chaque agence, un ou des Comités de bassin définissent les orientations de la politique de l’établissement.
– L’administration des agences et des comités est définie mais des décrets restent nécessaires pour préciser ces divers points.
– L’exécution du programme pluriannuel fait l’objet d’un compte rendu annuel au Parlement et d’une évaluation au moins tous les trois ans par l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques.
– L’agence appuie financièrement les EPTB qui interviennent sur des SAGE et collecte pour eux les redevances qu’ils peuvent émettre.
– L’agence peut mener des actions de coopération internationale dans le domaine de l’eau à concurrence de 1% de ses ressources .
– Le programme d’intervention doit créer les conditions pour atteindre en 2015 le bon état écologique des masses d’eau selon les termes de la directive européenne.
– L’amélioration de la gestion des crues par augmentation des capacités des zones de rétention et meilleur entretien des cours d’eau est décrite parmi les différents objectifs donnés aux actions de l’agence.
– Il est en outre demandé aux agences, dont les autorisations de programme sont plafonnées à 12 milliards d’euros pour la période 2007-2012, d’apporter un financement de 108 millions d’euros par an à l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques.
– L’article 49 est consacré à la définition des différentes redevances que peuvent percevoir les agences ainsi que les règles de perception. Les changements principaux par rapport à la situation actuelle sont les suivants :
– L’assiette de la redevance pollution domestique est le volume annuel d’eau facturé à l’abonné et le taux peut être modulé mais est plafonné à 0,5 €/m3
– Pour la pollution non domestique, l’assiette est la pollution rejetée dans le milieu naturel et ceci peut être déterminé par mesure ou par estimation forfaitaire. Les taux sont plafonnés par la loi, mais peuvent être modulés suivant la nocivité des rejets, l’état des masses d’eau et leur sensibilité, des risques de pollution des eaux souterraines.
– Une redevance pour réseau de collecte est créée et assise sur les volumes d’eau annuels avec un taux plafond de 0,30€/m3.
– Une redevance pour pollutions diffuses est mise en place pour les produits antiparasitaires et biocides. Elle est assise sur les quantités de produits toxiques achetés, le taux est fixé à 1,2€/kg de matière active comprise dans les produits. La pollution par les engrais azotés et phosphorés semble avoir totalement disparu des préoccupations actuelles !
– Une redevance de prélèvement et de consommation est assise sur le volume annuel prélevé. Le taux est variable selon l’usage et la zone de prélèvement. Les eaux d’irrigation font l’objet d’un régime particulier de même que les prélèvements pour hydroélectricité.
– Une redevance pour stockage d’eau est aussi établie et assise sur les volumes stockés durant la période d’étiage, son taux doit être inférieur à 1 centime d’euro par m3.
– Une redevance obstacle est créée pour toute personne possédant un ouvrage constituant un obstacle continu entre les deux rives.
– Une redevance protection du milieu aquatique est due par les associations de pêche, les comités départementaux de pêche professionnelle, les gestionnaires de ports maritimes et fluviaux, ainsi que les gestionnaires de mouillages légers, y compris sur le domaine public fluvial. Les taux sont nombreux selon les activités.
Les modalités pratiques de perception sont définies dans la section 8 de cet article.
Les articles 51 et 52 complètent le Comité national de l’eau par des représentants du Parlement, et créent un Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques ( ONEMA) qui est chargé au niveau national « de mener ou soutenir au niveau national des actions destinées à favoriser une gestion globale, durable et équilibrée de la ressource en eau, des milieux aquatiques, de la pêche et du patrimoine piscicole, des sports et des loisirs nautiques en préservant les intérêts mentionnés à l’article L. 211-1 du code de l’environnement et de contribuer à la prévention des inondations.
« A cette fin :
« 1° Il assure la coordination et il contribue à la construction du système d’information visé à l’article L.213-23 ;
« 2°Il contribue à la protection et à la surveillance de l’eau et des milieux aquatiques, de leur faune et de leur flore ;
« 3° Il apporte une expertise et un appui aux services de l’Etat, aux agences de l’eau et aux offices de l’eau des départements d’outre mer dans le domaine de l’eau, de la pêche, de la protection des milieux aquatiques et du patrimoine piscicole, des sports et des loisirs nautiques ;
« 4° Il exécute et soutient des programmes de recherche et d’étude d’intérêt général ou commun à plusieurs bassins ou groupements de bassins dans le domaine de l’eau, de la pêche, de la protection des milieux aquatiques et du patrimoine piscicole, et des sports et des loisirs nautiques ;
« 5° Il organise en tant que de besoin une solidarité financière entre les bassins, notamment en faveur des bassins d’outre-mer ;
« 6° Il soutient la coopération internationale dans le domaine de l’eau et de la pêche ;
« 7° Il mène et soutient des actions nationales de communication, de formation et d’information et de sensibilisation du public dans le domaine de l’eau, de la pêche, de la protection des milieux aquatiques et du patrimoine piscicole, des sports et des loisirs nautiques ;
« 8° Il contribue à la gestion du fonds de garantie mentionné à l’article L. 214-14-1 ; »
Cette structure nouvelle reprend en outre les activités du Conseil Supérieur de la Pêche qui est supprimé par ce même article et dont les biens et moyens sont affectés à l’ONEMA.
Enfin les articles 54 à 60 mettent en place l’organisation de la pêche et l’article 64 abroge l’article 14 de la loi de 1964 à compter du 1er Janvier 2007 et fixe à la même date l’entrée en vigueur des articles 46 à 49 , 50 et 52 .
Conclusion
Ce texte poursuit actuellement son cheminement administratif et se trouve progressivement réduit (Risques Naturels, Transcription de la Directive européenne, suppression de la redevance sur les engrais, etc.).
Il sera certainement amendé lors de son passage au Conseil des Ministres, puis au Sénat, et à l’Assemblée Nationale, et peut être soumis à l’avis du Conseil Constitutionnel.
Nous pourrons alors voir quels sont les points que le Parlement souhaite voir modifier, car il ne faut pas perdre de vue que l’un des aspects majeurs de ce nouveau texte est de rendre le système de bassin, et particulièrement la redevance, conforme à la Constitution de la République Française.
A moins que, une fois encore, la crainte de voir remis en cause un système qui fonctionne et qui a fait ses preuves n’amène le législateur à faire un texte à minima, et de ne pas intégrer les articles 46 à 49 .
Toutefois les évolutions intervenues dans le domaine de l’eau depuis les dix dernières années ne devraient pas permettre une nouvelle fois d’escamoter la question, et dans cette hypothèse l’échéance prévue de janvier 2007 risque de se trouver très proche des échéances d’élections présidentielles, ce qui ne devrait pas clarifier le débat.
Il importe donc d’accélérer la procédure, si l’on souhaite la voir aboutir en fin d’année 2005 comme prévu initialement par Mme Roselyne Bachelot.
A SONG :