Impact du changement climatique et assainissement défaillant, voire totalement inexistant, les Antilles sont en danger.
La Martinique perd ses plages
Reportage tout autour de la Martinique pour un état des lieux des conséquences du changement climatique sur l’érosion des littoraux. Quand la carte postale est rongée par la mer, certains s’activent déjà pour ne pas finir les genoux dans l’eau.
Il y a quelque chose qui cloche dans la carte postale de cocotiers et de sable blanc (ou noir) : quand on y regarde de plus près, certaines plages semblent étrangement étroites, avec des arbres à terre, et d’autres qui voient leurs racines lentement mises à nu par le ressac. Ici, comme en Guadeloupe et ailleurs dans la Caraïbe, le sable est emporté par la mer.
3,5mm/an : vitesse à laquelle l’eau des tropiques monte avec la fonte des glaces des régions polaires
Un phénomène annoncé depuis longtemps par le GIEC, mais là, c’est en train d’arriver de plus en plus vite : chaque année aux Antilles, l’océan gagne en moyenne un mètre de plage. Trois fois plus vite qu’il y a 40 ans, et toute une partie du littoral risque de devenir inhabitable d’ici 2040. Autant dire, demain donc
Ce qui est en train de se passer n’aura donc pas que des conséquences pour les touristes et le peu de place restant où poser leur serviette de plage, mais a déjà commencé à affecter toute une partie de l’activité économique.
D’autant que ce phénomène global est aussi aggravé par les actions locales, qui vont des cocotiers importés pour la photo (et qui contribuent à accélérer l’érosion des plages), à l’extraction immodérée du sable pour les constructions, en passant par l’artificialisation des sols qui accentue le ruissellement.
Face à la mer qui monte, des sommes considérables sont engagées pour tenter de ralentir le phénomène, avec de profonds changements urbanistiques et donc sociaux en termes de stratégie d’occupation du territoire. Car on ne pourra plus faire comme avant.
De Tartane à Sainte Luce, des Salines aux Prêcheur, état des lieux de l’île (qui a reçu en 2021 le label de Réserve mondiale de Biosphère), des plages du sud jusqu’aux pentes du volcan -la Montagne de pelée, elle aussi récemment inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Guadeloupe : défaillances de l’assainissement
Systèmes d’assainissement défectueux, mauvaise gestion des déchets... Alors que huit sites de Guadeloupe (en mer et en rivière) font l’objet d’une interdiction de baignade, les questions de l’assainissement et des autres sources de pollution de l’eau rejaillissent. Des enjeux à la fois sanitaires et écologiques qui poussent à réfléchir sur les différents moyens de préserver la qualité de l’eau dans l’archipel.
Avec un recul de 4 points par rapport à l’année 2021, la qualité des eaux de baignade de l’archipel guadeloupéen s’est nettement dégradée. C’est du moins le triste constat dressé par l’Agence régionale de santé (ARS) avec son rapport publié le 9 juillet 2024.
Face à cette situation préoccupante, plusieurs solutions peuvent être toutefois envisagées.
Améliorer le traitement des eaux usées
Il s’agirait notamment de respecter l’interdiction concernant le déversement des eaux usées en milieu naturel. Ce principe, pourtant rappelé par le Règlement sanitaire départemental de la Guadeloupe, n’est en partie pas respecté par les communes.
"Il est interdit : De déverser dans la mer, les cours d’eau, lacs, étangs, canaux, sur leurs rives et dans les nappes alluviales, toutes matières usées, tous résidus fermentescibles d’origine végétale ou animale, toutes substances solides ou liquides toxiques ou inflammables, susceptibles de constituer un danger ou une cause d’insalubrité, de communiquer à l’eau un mauvais goût ou une mauvaise odeur, de provoquer un incendie ou une explosion."
(Article 89 du règlement départemental).
Certaines stations d’épuration défectueuses, comme à Capesterre-Belle-Eau, à Saint-François, à Deshaies, ou encore au Gosier, continuent de déverser leurs eaux polluées dans la mer. De tels dysfonctionnements ont entraîné l’émission de 13 arrêtés préfectoraux à l’encontre des élus locaux, entre 2019 et 2020, selon le site de la Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DEAL).
Pour pallier ce problème, l’Etat, la Région et le Conseil départemental et le Syndicat mixte de gestion de l’eau et de l’assainissement de la Guadeloupe (SMGEAG) ont prévu un programme de 317 millions d’euros, entre 2024 et 2027. Un projet qui inclut la réhabilitation de sept stations d’épuration, ainsi que la création de deux nouvelles infrastructures, à Bouillante et à Vieux Fort.
Sensibiliser à la pollution
Autre mesure qui incombe, cette fois, aux particuliers et aux professionnels : veiller à ce que les animaux domestiques ou d’élevage ne soient pas à proximité des lieux de baignade. Cela, pour éviter tout risque de contamination due aux matières fécales, pouvant causer dans certains cas des troubles respiratoires, voire des intoxications alimentaires en cas d’ingestion des eaux contaminées.
Pour prévenir la pollution des eaux, l’ARS recommande également de ne pas jeter ses déchets dans la nature. Les polluants plastiques altèrent la qualité de l’eau ; ce qui présente de graves conséquences pour les animaux marins. Et pour cause ! Au moins 90% des espèces marines sont impactées, selon l’association The SeaCleaners. Un phénomène qui se répercute chez les êtres humains, lorsqu’ils consomment les produits de la mer.