Nouvelle étape du chemin de croix de notre très fameuse GEMAPI… Et nouveau témoignage de la malfaçon législative désormais chronique qui affecte la réforme du mille-feuilles territorial… On aurait du en avoir fini puisque la loi MAPTAM avait été votée le 27 janvier 2014. Que nenni, GEMAPI revient dans l’examen du projet de loi NOTRe, qui, après avoir été fusillé en première lecture au Sénat, repassait l’épreuve du feu en première lecture à l’Assemblée de la mi-février au 10 mars dernier. Encore deux lectures au programme, pendant qu’une brochette d’associations d’élus, conduite par l’AMF, réécrit tranquillement la GEMAPI de A à Z, après avoir fait part à Manuel Valls de leur opposition à la GEMAPI-Canal historique, dont les inventeurs continuent à faire feu de tout bois pour en imposer la mise en oeuvre, au bénéfice des EPTB, en s’appuyant sur le bras armé des préfets. A suivre…
Deuxième séance du lundi 5 mars : Article 22 bis B
M. le président. La parole est à M. Jean Launay.
M. Jean Launay. Au sujet de cet article 22 bis B, je tiens à dire que je suis favorable au processus de simplification et de transformation des syndicats existants en établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau – EPAGE – ou en établissements publics territoriaux de bassin – EPTB. J’ai déposé un amendement pour maintenir, dans cette procédure, l’avis conforme du préfet coordonnateur de bassin qui doit, à mon sens, vérifier le respect des critères des périmètres de ces futurs EPAGE ou EPTB, à savoir la cohérence hydrographique du périmètre du syndicat, l’adéquation entre les missions et les périmètres d’intervention du syndicat, la capacité, à la fois technique et financière, du syndicat à exercer les missions définies dans ses statuts, et la non-superposition de deux EPAGE ou de deux EPTB. En revanche, je suis tout à fait hostile aux amendements de suppression des dispositions introduites dans la loi MAPTAM créant la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations –GEMAPI – et pas uniquement parce que je les ai portées. J’ai dit à l’époque que la loi était souvent en retard sur les réalités de terrain. Et si j’ai tenu à inscrire dans la loi MAPTAM cette compétence, c’est parce qu’elle était déjà bien souvent prise en compte et exercée de fait sur le territoire, dans des syndicats ad hoc. À compter du 1er janvier 2016, la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles attribue au bloc communal une compétence exclusive et obligatoire relative à la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations. La création et l’attribution de la compétence GEMAPI aux communes clarifient les responsabilités que les maires assument déjà en la matière et fournissent les outils juridiques et financiers nécessaires pour leur exercice. Je reprendrai la parole, si nécessaire, pour m’opposer aux parlementaires qui demandent la suppression, que je trouve dilatoire, de ces dispositions.
M. le président. La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement no 1388.
M. Michel Piron. Cet amendement est un amendement d’appel, mais de fort appel ! La compétence en matière d’eau, ou GEMAPI, recouvre toutes sortes de choses, depuis la mare aux canards jusqu’au fleuve qui s’appelle la Loire ! Ce n’est pas tout-à fait la même chose ! Permettez-moi de répéter ce que j’ai déjà eu l’occasion de dire en début de semaine. Comment peut-on raisonnablement s’amuser à segmenter et à remettre aux intercommunalités la protection des digues de la Loire ? Imaginons un instant que l’on n’entretienne pas les digues à Tours et qu’on laisse la Loire déborder. Tout le monde s’imagine sans doute que le fleuve retrouvera tout naturellement son lit en aval, à Saumur, par un miracle dû à la coordination administrative ! Fût-ce sous le regard le plus éclairé des préfets, pardonnez-moi, mais cela ne fonctionnera pas ! Ce que j’aurais aimé, c’est que l’on précise ce que recouvre ce vocable d’ « eau », et que l’on fasse preuve d’un peu de bon sens en distinguant les enjeux qui doivent être gérés au niveau communal, ceux qui doivent l’être au niveau intercommunal, départemental ou régional, voire, pour certains, au niveau national. Il y a des SAGE, des SDAGE et des SRAGE : ce n’est pas pour rien ! Des gens ont réfléchi à ces questions avant nous, et il me semble que nous gagnerions à nous inspirer de leurs réflexions, plutôt que de nous lancer dans des abstractions comme celles qu’on nous propose et qui, malheureusement, sont de plus en plus éloignées de la réalité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Dussopt, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. Par ailleurs, nous avons adopté en séance le principe du transfert de l’eau et de l’assainissement aux intercommunalités, avec une date de prise d’effet au 1erjanvier 2018.
Mme Annie Genevard. Hélas !
M. Olivier Dussopt, rapporteur. Je proposerai plus loin le report de la prise de compétence GEMAPI de 2016 à 2018, pour la faire coïncider avec la prise de compétence relative à l’eau et à l’assainissement…
M. Michel Piron. Quelle eau ?
M. Olivier Dussopt, rapporteur. …même si je sais que cette disposition ne fait pas consensus. Avis défavorable, en cohérence avec ces éléments d’explication.
M. Michel Piron. Vous n’avez pas répondu à ma question !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Même avis. S’agissant de GEMAPI, j’ajoute que, à la demande de l’Association des régions de France, un groupe de travail a été créé, dès mardi dernier, avec neuf associations faisant partie de l’instance de Dialogue national des territoires. Même si tous les problèmes n’ont pas été résolus, de nombreuses réponses ont déjà été apportées, et une prochaine réunion doit tirer des conclusions. Nous verrons, à la lumière des conclusions remises par les associations d’élus travaillant avec le Gouvernement, s’il convient, en seconde lecture, d’apporter des précisions. Depuis le temps que nous attendions qu’ait lieu un dialogue national des territoires, avec tous les élus, laissons-lui le temps d’aller jusqu’au bout. Je suis sûre que nous trouverons une réponse à vos questions, et à bien d’autres. Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Piron.
M. Michel Piron. Je veux bien retirer mon amendement, madame la ministre, mais vous ne m’avez absolument pas rassuré. Quand M. le rapporteur me parle de l’eau, j’ai envie de lui demander : quelle eau ? Voilà la vraie question, et il importe que l’on nous donne une réponse d’ici à la seconde lecture – j’y insiste lourdement. Car entre la mare aux canards et les plus grands fleuves, il y a des choses bien différentes !
M. Maurice Leroy. Il y a les rivières ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement no 637.
M. Jean Launay. Comme je l’ai expliqué dans mon intervention sur l’article, des syndicats mixtes se sont déjà créés sur le territoire. Aujourd’hui, il convient d’acter, dans la rédaction de l’article 22 bis B, la possibilité de les voir se transformer, soit en établissements publics territoriaux de bassin, à l’alinéa 2, soit en établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau, à l’alinéa 3. Au lieu d’écrire que le syndicat mixte peut « se transformer », il vous est proposé d’écrire qu’il peut « être transformé ». Cela souligne le rôle du préfet coordonnateur de bassin.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Dussopt, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Avis favorable. Le Gouvernement a déposé un amendement très proche, qui sera retiré en temps et en heure.
M. le président. La parole est à M. Michel Piron.
M. Michel Piron. Je voulais simplement obtenir quelques éclaircissements de notre collègue Jean Launay. La substitution de l’expression « peut être transformé » à celle de « peut se transformer » fait passer la phrase de la forme pronominale à la forme passive. Si l’on traduit ce changement, cela signifie que la transformation résulte plutôt d’une décision extérieure que d’une décision interne, vous souhaitez donc faciliter les choses. Je n’ai aucune objection, s’agissant d’enjeux nationaux, mais j’aimerais savoir si mon interprétation est la bonne.
M. le président. La parole est à M. Jean Launay.
M. Jean Launay. Je vous confirme, monsieur Piron, qu’il s’agit bien d’officialiser le rôle du préfet coordonnateur de bassin concernant l’existence et la transformation des syndicats mixtes en EPTB et EPAGE.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Pour la clarté de nos débats, je précise que l’amendement no 1101 du Gouvernement sera retiré. Il prévoyait que le préfet de département aura le dernier mot, tandis que l’amendement de M. Launay ne le précise pas. Nous réglerons cela par la suite, il n’est pas nécessaire de déposer un nouvel amendement maintenant. Nous ferons en sorte que le préfet de département ait le dernier mot.
(L’amendement no 637 est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement no 666 qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements, nos 2101, 2103 et 2102.
La parole est à
M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement no 666.
M. Jean Launay. La transformation des syndicats mixtes en EPAGE ou en EPTB est proposée par le comité syndical au préfet coordonnateur de bassin concerné. Par cet amendement, il vous est proposé de préciser que l’avis du représentant de l’État doit être officiellement sollicité. C’est-à-dire que le préfet coordonnateur de bassin doit constater que le syndicat mixte répond aux conditions fixées au I et II du présent article ainsi qu’aux critères fixés par le décret en Conseil d’État. Le préfet coordonnateur de bassin soumettra pour avis le projet de transformation au comité de bassin et aux commissions locales de l’eau concernées. Cette proposition ne fait que mettre le texte en cohérence avec ce qui existe déjà dans les territoires.
M. le président. La parole est à M. Olivier Dussopt, rapporteur, pour soutenir les sous-amendements, nos 2101, 2103 et 2102, et donner l’avis de la commission sur l’amendement no 666.
M. Olivier Dussopt, rapporteur. Avis favorable à l’amendement de M. Launay, sous réserve de l’adoption des trois sous-amendements rédactionnels.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Avis favorable à l’amendement sous réserve de l’adoption des sous-amendements présentés par le rapporteur.
(Les sous-amendements nos 2101, 2103 et 2102, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
(L’amendement no 666, sous-amendé, est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 1101.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il est retiré.
(L’amendement no 1101 est retiré.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Dussopt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 2047.
M. Olivier Dussopt, rapporteur. Il s’agit du report de deux ans de la prise de compétence GEMAPI pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. J’ai annoncé précédemment que nous attendions les résultats du groupe de travail qui réunit, entre autres, l’ARF, l’AMF, l’ADF et l’ADCF pour en tirer des conclusions. Je souhaite donc le retrait de cet amendement, faute de quoi je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée. Il faudra que l’on tienne compte de ces travaux, surtout qu’une excellente association comme l’Association des petites villes de France a tenu à ce que ce groupe de travail aille au bout, ainsi que l’AMF, l’ARF, l’ADF et l’ADCF.
M. le président. La parole est à M. Jean Launay.
M. Jean Launay. Je trouve dommage de reculer l’échéance. La loi MAPTAM la prévoyait au 1er janvier 2016, et je ne suis pas sûr que reculer ce soit forcément pour mieux sauter.
M. Jean-Frédéric Poisson. C’est trop court !
Mme Annie Genevard. Ça ne suffira pas !
M. Jean Launay. En abordant cette compétence exclusive et obligatoire relative à la GEMAPI, la loi MAPTAM permet de répondre à des situations qui existent sur le terrain. Nous pouvons avancer vers leur résolution, justement parce que les structures ont déjà été mises en place pour prendre à bras-le-corps ces sujets qui n’étaient pas écrits dans la loi, mais qui existent sur le territoire. Nous sommes au-delà de la mare aux canards de M. Piron, il s’agit bien des questions de débordement des rivières, de gestion des milieux et de tout ce qui concerne le grand cycle de l’eau. Je trouve donc vraiment dommage que l’on recule cette échéance parce qu’il y a des besoins et des demandes sur le terrain, et il est regrettable de ne pas s’y atteler dès maintenant.
(L’amendement no 2047 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Dussopt, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 1809.
M. Olivier Dussopt, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
(L’amendement no 1809, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Du fait de l’adoption de l’amendement no 2047, les amendements nos 337, 585, 1091, 1482, 1463 et 1808 tombent
(L’article 22 bis B, amendé, est adopté.)
Mare aux canards, certes !
Mais il y a aussi un Poisson dans le débat !