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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
REMOUS
Jean Launay et Barbara Pompili ré-enterrent les “amendements Batho”
par Marc Laimé, 11 mars 2016

Le lundi 7 mars 2016, les députés examinaient à la Commission du développement durable de l’Assemblée nationale le projet de loi sur la Biodiversité, qui fera l’objet d’un débat en seconde lecture au Palais Bourbon à partir du 15 mars prochain. Ce nouvel épisode d’une saga que nous avons longuement chroniquée aura vu, sans surprise, Jean « Kappelmeister » Launay, qui sera élu par ses pairs le lendemain à la présidence du Partenariat Français pour l’eau (PFE), la grande amicale des oligarques, et Barbara Pompili, sous ministresse à la biodiversité, enterrer de concert les « amendements Batho », qui tentaient courageusement de rééquilibrer la représentation des usagers domestiques (principaux contributeurs - plus de 85% - au financement des redevances perçues par les Agences de l’eau, plus de deux milliards d’euros, une paille…) au sein des Comités de bassin. Comme on s’en doutait, il était évidemment urgent d’attendre jusqu’en… 2020, et en attendant de jeter une nouvelle pelletée de terre sur le cercueil d’un véritable engagement pour une politique de l’eau enfin soutenable et équitable…

« Séance de 20 heures 30.

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

Article 17 quater (article L. 213-8-1 du code de l’environnement) :

Représentation des usagers non économiques dans les conseils d’administration des agences de l’eau.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD874 de M. Jean Launay, CD520 de Mme Laurence Abeille, et CD632 de Mme Delphine Batho.

Les amendements CD520 et CD632 sont identiques.

M. Jean Launay. Depuis que ce projet de loi a commencé son cheminement, les instances de bassin qui gèrent la politique de l’eau ont eu le temps de se renouveler en 2014. En première lecture, nous avions déjà évoqué la question de la représentation dans le collège des usagers où l’on retrouve les trois contributeurs aux redevances : les usagers domestiques et les deux usagers dits « professionnels », agriculteurs et industriels. De nombreux débats traversent ces instances ainsi que le Comité national de l’eau que j’ai l’honneur de présider à l’instigation de l’ancienne ministre de l’écologie, Mme Delphine Batho.

Ces débats portent sur la gouvernance et la représentation. Certains soutiennent que les usagers domestiques, qui supportent l’essentiel des redevances, que ce soit au titre du prélèvement sur la ressource ou de la pollution, n’ont pas le poids qui leur correspond dans le collège des usagers. Au moment où nous mettons en place l’Agence française de la biodiversité, alors que les redevances de l’eau seront très probablement appelées à payer pour la biodiversité – et pas seulement pour la diversité aquatique ou marine –, cette situation risque de créer un déséquilibre au sein des instances telles qu’elles existent actuellement et telles qu’elles seront amenées à évoluer.

Même si je comprends leur motivation, les amendements qui viseraient à porter la seule voix des usagers domestiques risqueraient de fragiliser le système des agences de l’eau alors qu’il est déjà difficile de faire accepter le principe de l’extension des interventions en faveur de la biodiversité au milieu marin. Je ne voudrais pas que la diminution du poids des acteurs économiques – que ce soit les agriculteurs, les industriels, ou les pêcheurs professionnels – remette en cause leur consentement à payer.

Mon amendement CD874 vise à garantir une représentation suffisante du sous-collège des usagers non professionnels au sein des conseils d’administration des agences de l’eau, tout en permettant une représentation des sous-collèges des usagers professionnels adaptée au territoire : c’est la raison pour laquelle nous avons prévu que l’équilibre entre les représentants des agriculteurs et assimilés et des industriels et assimilés pourra varier en fonction du caractère plus ou moins rural ou industriel du bassin. La désignation de personnalités qualifiées ou de représentants socioprofessionnels reste également possible.

(Absolument scandaleux ! Selon les bassins c’est ou la FNSEA (Adour-Garonne ou Loire Bretagne), ou le MEDEF (Seine Normandie) qui fera la loi ! Et si leurs représentants "légaux" n’y parviennent pas, on les complétera par des "personnalités qualifiées ou des représentants socio-professionnels"... NOTE Eaux glacées).

Mme Laurence Abeille. J’entends qu’il est difficile de revenir dès aujourd’hui sur les évolutions qu’ont connues les agences de l’eau il y a relativement peu de temps. Cela étant, nous sommes réunis pour trouver un équilibre afin que les usagers puissent s’y sentir réellement représentés, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Je comprends la complexité de la situation, mais je maintiens mon amendement CD520 tout en étant prête à accepter que la représentation des usagers n’évolue que lors du prochain renouvellement des conseils d’administration des agences. À la veille d’un nouveau bouleversement, nous donnerions aux acteurs un signe de notre volonté politique en précisant les choses dès aujourd’hui dans le texte de la loi.

Mme Delphine Batho. Monsieur le président, je vous présente mes excuses pour n’avoir pu assister à la fin des débats de la commission, mercredi dernier : je pensais naïvement que la séance serait levée à vingt heures… (Sourires).

Mon amendement CD632 est de cohérence avec les amendements CD630 et CD631 à l’article 17 ter qui ont été retirés mercredi.

Le rapport accablant de la Cour des comptes impose au législateur de prendre ses responsabilités.

Il n’est pas proposé de fixer une représentation proportionnelle à la redevance versée : la part des usagers économiques est donc pleinement respectée.

J’ajoute que, pour ma part, je refuse complètement la notion de « sous-collège » introduite au Sénat : les usagers non professionnels ne sont pas des sous-usagers. Il faut en revenir à des choses simples, c’est-à-dire à un principe d’égalité entre les professionnels et les autres.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. La semaine dernière, nous avons décidé que, dans la mesure où des bouleversements ont déjà eu lieu en 2014 et où le nouveau système commence à fonctionner, les prochaines modifications ne seraient effectives que lors des prochains renouvellements des instances. Je suis donc plutôt favorable à l’amendement CD874 qui propose une solution d’attente dans la perspective de la réforme que nous appelons de nos vœux.

Les choses sont plus compliquées s’agissant des amendements CD520 et CD632, même si nous abondons dans le sens de Mme Batho : il n’y a pas de sous-usagers.

Je rappelle que le projet de loi élargit les missions des agences de l’eau. Je signale aussi que je soutiendrai en séance publique un amendement que M. Jean Launay n’a pas pu présenter la semaine dernière, et qui vise à alléger les redevances dues par les usagers. Ajoutons que le programme d’intervention des agences de l’eau se met en place pour 2018 : il me paraît en conséquence judicieux d’attendre que ces trois éléments trouvent une traduction dans la réalité pour avancer. Je suggère le retrait des amendements identiques.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État chargée de la biodiversité. Je suis favorable à l’amendement CD874 de M. Jean Launay, qui améliore le texte adopté au Sénat en autorisant une représentation des usagers professionnels adaptée aux caractéristiques du bassin.

Nous avons la volonté de ne pas déstabiliser dès aujourd’hui une réforme engagée il y a très peu de temps, en concertation avec les différents acteurs. Les conseils d’administration se mettent actuellement en place et les usagers ont obtenu une vice-présidence ; les acteurs commencent à peine à s’y retrouver dans une nouvelle organisation qui suscite plutôt des retours positifs.

Certaines attentes s’expriment cependant ; je les entends. Mais il faut aussi prendre garde à certains écueils. Le fameux rapport de la Cour des comptes, cité par Mme Delphine Batho, notait également la nécessité de renforcer la position de l’État dans les conseils d’administration, que les amendements CD520 et CD632 conduiraient pourtant à l’affaiblir – l’État ne détiendrait plus que 25 % des sièges contre 33 % actuellement –, en même temps qu’ils renforceraient la représentation des usagers économiques, qui passerait de moins de 20 % à 25 %.

Nous sommes parvenus à un compromis auquel il me semble que nous devons nous tenir. La réforme que les amendements de Mme Laurence Abeille et Mme Delphine Batho proposent sera envisagée, mais pour le prochain renouvellement, en 2020. En attendant qu’un autre amendement soit préparé en ce sens, je suggère leur retrait.

Mme Delphine Batho. Nous ne faisons que proposer de revenir à ce que l’Assemblée nationale avait adopté en première lecture et que le Sénat a modifié. Les amendements que nous avions alors défendus ne touchaient pas à l’équilibre entre l’État et les collectivités territoriales, et cela était délibéré car, sur ce sujet, nous ne partageons pas le point de vue de la Cour des comptes. Nos amendements visaient l’égalité entre les usagers économiques et non économiques.

Je ne comprends pas bien la position qui consiste à accepter l’amendement de M. Jean Launay modifiant la composition du conseil d’administration des agences et entérinant de fait la notion de sous-collège, tout en refusant des amendements qui ne font que rétablir le texte adopté par l’Assemblée qui modifiait également la composition de ce conseil.

D’ici à la séance, je travaillerai, quoi qu’il en soit, à un ajustement pour le prochain renouvellement des conseils d’administration puisque la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », soulève un certain nombre de problèmes en matière de désignation des représentants des collectivités territoriales, en particulier pour ce qui concerne les communautés de communes. À mon sens, cela pose la question d’un renouvellement général des conseils d’administration des agences pour 2017 ou 2018.

Pour toutes ces raisons, je ne souhaite pas retirer mon amendement CD632.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. La situation me paraît un peu complexe… (Sourires) Je crois qu’un échange de vues s’impose et je propose une suspension de séance.

La réunion, suspendue à vingt heures cinquante-cinq, est reprise à vingt et une heures.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je constate que les trois amendements en discussion commune sont maintenus. Je rappelle que notre rapporteure et le Gouvernement ont émis un avis favorable à l’amendement CD874.

La Commission adopte l’amendement CD874.

En conséquence, les amendements CD520 et CD632 tombent.

La Commission adopte ensuite l’article 17 quater ainsi modifié.

Article 17 quinquies (articles L. 213-8-3 et L. 213-8-4 [nouveau] du code de l’environnement) : Création d’une commission des aides au sein des agences de l’eau et d’un régime d’incompatibilités de fonctions pour les membres des conseils d’administration

La Commission est saisie de l’amendement CD633 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. L’Assemblée nationale avait adopté en première lecture un amendement identique, avec l’avis favorable du Gouvernement, afin de mettre en place un régime de prévention des conflits d’intérêts dans la gouvernance des agences de l’eau. Nous proposons de revenir à ce texte que le Sénat a modifié.

Mme la rapporteure. Je suis favorable à cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Il s’agit de prévoir des cas d’incompatibilité de la fonction de membre du conseil d’administration d’une agence de l’eau avec certaines fonctions définies par décret ainsi qu’une règle de fonctionnement visant à prévenir les conflits d’intérêts.

Il me paraît dommage de ne pas adopter la version du Sénat qui a amélioré la lisibilité du texte en supprimant les dispositions qui n’étaient pas de nature législative ou celles qui étaient inopérantes. Le Gouvernement avait de surcroît proposé par amendement de ne pas recourir à un décret, ce qui n’était pas indispensable. Aucune fonction ne paraît justifier une incompatibilité avec celle d’administrateur d’une agence de l’eau, à l’exception de celles qu’exercent les agents en exercice dans cette dernière, représentants du personnel exclus. Par ailleurs, à la demande de Mme Ségolène Royal, tous les conseils d’administration des agences ont adopté ou adoptent actuellement des chartes de déontologie homogènes et beaucoup plus complètes que ce que prévoit la loi, afin de prévenir tout conflit d’intérêts.

Toutefois, s’agissant de cet amendement, je m’en remets à la sagesse de votre commission.

Mme Delphine Batho. Le texte que nous avions adopté en première lecture était meilleur que le condensé qu’en a fait le Sénat : il prévoyait la mise en place d’une commission des aides dans chaque conseil d’administration, et il ne se contentait pas de poser des règles de déontologie : il mettait bel et bien en place un régime d’incompatibilités.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 17 quinquies est ainsi rédigé. »

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commentaires

1 Jean Launay et Barbara Pompili ré-enterrent les “amendements Batho”

Un débat a été mise en ligne sur arretsurimages concernant les communs/biens communs [au début on peut être surpris d’entendre Daniel Schneidermann avouer qu’il découvrait aujourd’hui seulement cette problématique des communs... (ce qui dit quelquechose de l’état du débat en France).

A la fin de l’émission ( accessible seulement aux abonnés) Benjamin Coriat rappelle le grand mouvement qui anima l’Italie berlusconienne autour du statut de l’eau, bien commun : http://www.arretsurimages.net/emissions/2016-03-11/Les-communs-ce-n-est-pas-le-monde-des-bisounours-id8547

poste par encoreuneptitegoutte - 2016-03-12@16:59 - repondre message
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