Dans l’attente de la décision de la Cour de justice des communautés européennes, saisie par la Commission des graves manquements de la France, qui pourrait écoper avant cet été d’une amende de 28 millions d’euros, assortie d’astreintes journalières de 117 882 euros, sanctionnant la présence de nitrates dans onze captages d’eau, dont le gouvernement a décidé d’en fermer quatre en février dernier, ce qui a provoqué l’indignation des écologistes et des opérations de représailles de commandos d’agriculteurs qui ont dévasté les locaux d’Eau et Rivières, la frange extrémiste du lobby agricole redouble de menaces. En témoigne le discours du président de la FDSEA du Finistère, Thierry Merret, prononcé lors de l’assemblée générale de son organisation le 23 mars dernier. Un signal inquiétant qui appellerait une ferme réponse de l’Etat, avant que l’irrémédiable ne soit accompli.
« Cher(e)s ami(e)s,
Permettez-moi de revenir un instant sur la personne d’Alexis Gourvennec. En effet, c’est quand même lui, qui a été, certes avec d’autres, la locomotive, l’instigateur, le catalyseur, le visionnaire qui a permis à la Bretagne de sortir de son "sous-développement". Nul doute qu’aujourd’hui, sans Alexis, il n’y aurait pas eu d’assemblée générale avec autant de monde,
car bon nombre d’entre nous n’auraient jamais eu l’occasion d’exercer le métier de paysan.
Alexis, dès son installation à Taulé en 1957, s’investit activement dans le syndicalisme paysan, dont il devient en 1958, à l’âge de 22 ans, le leader pour la zone légumière. Profitant de la réforme des statuts de la FDSEA de 1958, exigeant le vote à bulletin secret aux élections locales, il se retrouve administrateur de notre structure en avril 1959. Il devient Vice-président en avril 1961, puis Secrétaire-adjoint aux productions végétales en juin 1963. Il arrête ses responsabilités syndicales en mai 1965.
Le syndicalisme a été à l’origine de la création de beaucoup d’organisations professionnelles : la SICA de St Pol de Léon n’est pas la moindre de ses réussites et en outre, contrairement à d’autres, les responsables actuels de la SICA savent encore d’où ils viennent.
Au cours de mon propos, je ne vais pas vous faire un catalogue de tout ce que la FDSEA a sur le gril.
Il n’empêche, il en est un que je ne peux passer sous silence. Je veux bien sûr parler des bassins versants dits "en contentieux".
Rappel des faits :
Alors que jusqu’à la mi-décembre 2006, toutes les informations provenant de Bruxelles tendaient à dire que l’on se dirigeait vers un classement de l’affaire, en janvier 2007, on nous annonce que la Commission s’apprête à saisir la Cour de Justice des Communautés Européennes, afin qu’elle condamne lourdement la France à des amendes et à des astreintes financières pour non respect de la Directives eaux brutes, étant entendu que la France avait déjà été condamnée en 2001 par la Cour, suite à une plainte déposée en 1992 par Eau et Rivières.
Le 15 janvier dernier, nous réagissions par communiqué de presse pour dénoncer ce qui se passait. Nous mettions en évidence que les menaces de la Commission pourraient conduire à un "plan de dépollution sévère" ou à des "restrictions draconiennes supplémentaires à imposer en toute hâte à l’agriculture bretonne".
A l’époque on ne croyait pas si bien dire, tant et si bien que nous avons écrit : « Si notre administration est décidée à prendre des mesures dénuées de bon sens alors que tous les experts savent que, même avec un arrêt total de l’activité agricole autour de ces prises d’eau, nous n’atteindrons pas le résultat escompté,
Si nos responsables politiques ne sont pas capables d’arrêter cette machine infernale, Eh bien, tant qu’à faire dans la bêtise, la FDSEA demanderait la fermeture de ces prises d’eau plutôt que d’infliger de nouvelles contraintes supplémentaires aux paysans ».
Là non plus, on ne croyait pas si bien écrire.
En effet, le 12 et 13 février dernier, le préfet de Région Daubigny, vient nous annoncer des nouvelles mesures, complètement déconnantes, pardonnez-moi l’expression, et, cerise sur le gâteau, décide de fermer, ou plutôt, suspendre 4 prises d’eau tout en mettant des mesures drastiques notamment de réduction de cheptel. Et ceci, en utilisant, et on s’en est aperçu les semaines suivantes, tous les moyens liés aux schémas des structures ainsi qu’à la politique d’installation.
L’éradication de l’agriculture dans ces bassins était en marche. Il a fallu mettre en œuvre le rôle fédérateur du syndicalisme afin d’organiser la mobilisation, j’ai envie de dire la rébellion et ce, au niveau régional.
Avec notamment les Côtes d’Armor, et l’appui de l’ensemble des organisations économiques, nous avons sans relâche mobilisé afin de mettre en avant les efforts accomplis par les paysans.
2 points d’orgue :
Le premier a été le rassemblement à Paris en acheminant 2 rames de TGV de plus de 1000 personnes qui ont soutenu la délégation sur le stand du Ministère de l’Agriculture notamment en chantant « La Bretagne » chanson remaniée par Pierre Adam, Président du Syndicat d’eau du Bas-Léon et maire de Kernilis, sur l’air de « La Montagne » de Jean Ferrat. En clôture de notre Assemblée Générale, nous la chanterons à nouveau.
Le deuxième a été la rencontre à Bruxelles mardi dernier d’une délégation bretonne, je devrais dire, d’acteurs de terrain, qui sont venu expliquer, avec leurs tripes, à la Commission tout le travail que nous faisons au quotidien et qui faisait que tout allait dans le bon sens et que donc, ce serait un comble de sanctionner les bons élèves de la classe Europe !
Sachez tout de même une chose : mardi matin, la décision était prise de condamner la France !
Grâce à l’intervention de la délégation, nous avons obtenu un délai, un sursis à exécution.
A nous de le mettre à profit, notamment en organisant sans délai, un déplacement en Bretagne des Commissaires européens, afin qu’ils voient « in situ », l’ensemble des actions et réalisations faites par le monde agricole.
Et là, il me revient de remercier très sincèrement l’équipe de Breiz-Europe au travers de son Président Jean-Pierre Le Verge. Breiz-Europe, avec la force de ses 20 ans en septembre prochain, est une structure sur laquelle nous devons nous appuyer plus que jamais.
Pour ceux qui ne le sauraient pas, je vous précise tout de même que c’est Alexis Gourvennec qui, en 1987, avait créé cette association, et que, 20 ans plus tard, nous sommes toujours la seule association régionale agroalimentaire, sur le plan européen, à faire du lobbying au quotidien à Bruxelles.
Je le dis à dessein.
En effet, le dossier Bassins versants en contentieux me rappelle trop le dossier Echalotes sur lequel on a essayé de sauver ce qui pouvait l’être. Il n’empêche que si nous avions eu dès le début le soutien sans faille de l’administration française, nous n’en saurions peut-être pas là, et que donc, nous aurions eu gain de cause.
Il n’est plus possible, Mesdames, Messieurs les politiques, que des fonctionnaires français passent leur temps à nous savonner la planche : des fonctionnaires basés à Paris, à Rennes ou à Quimper.
Et en règle générale, quand on creuse un peu, ils font plus de politique ou devrais-je dire du militantisme écolo, altermondialiste, antiagricole que la mission ou le mandat que le politique leur a donné.
Sachez quand même que, mardi dernier, la délégation menée par Jacques Jaouen a été reçue partout où elle l’a souhaitée exceptée par les fonctionnaires en charge de l’environnement à l’Ambassade française à Bruxelles !
C’est quand même un comble que des fonctionnaires français chargés, missionnés pour défendre, promouvoir les intérêts de la France et donc des français n’aient pas souhaité rencontrer leurs compatriotes, fussent-ils des paysans de surcroît bretons ! Il faut que tout celà cesse !
A moins d’un mois du premier tour des présidentielles, à l’avant-veille du cinquantième anniversaire du traité de Rome, je demande de la façon la plus solennelle qui soit, que, élus et profession agricole, travaillons dans la concertation et la transparence afin de gagner ce conflit avec Bruxelles. Si nous le faisons, nous parviendrons à classer l’affaire. Si on baisse la garde, et nous pouvons en être sûr, les contraintes s’appliqueront à l’ensemble de la Bretagne, demain.
Toujours est-il et je le dis devant nos représentants nationaux : si nous sommes condamnés, la FDSEA exigera l’équité, à savoir que le prélèvement en eaux souterraines soit aussi à 50mg par litre et non à 100mg par litre comme actuellement, et tant pis si Paris n’a plus d’eau dans son robinet !
Un dernier mot sur cette plainte.
Je souhaiterais m’exprimer sur les propos à peine voilés d’Eau et Rivières accusant ni plus ni moins la FDSEA d’avoir organisé le saccage de leurs locaux à Brest. Je voudrai ici leur dire que nous n’y sommes pour rien.
Maintenant, à la vue des photos qu’il m’a été donné de voir, je suis quasi sûr que ceux ne sont pas des paysans qui ont fait les dégâts car, en colère comme ils le sont après cette association, rien ne serait resté.
Par contre, subversifs comme ils le sont, bon nombre d’entr’eux ayant été formé à l’école de Trotski ou de Bakounine, il ne serait pas étonnant qu’à des fins de publicité, ils aient en fait eux-mêmes tout organisé.
Autre scandale : les propos quasi-diffamatoires de notre presse régionale. Dernier élément en date, l’éditorial de Ouest-France du 22 mars, que vous avez pu lire dans le hall. Comment peut-on écrire de telles insanités, s’il n’y avait pas une réelle intention de nuire contre toute une profession.
Ras le bol ! La coupe est pleine !
Nous ne resterons pas sans réagir. Sachez que nous envisageons d’attaquer en justice pour diffamation.
A l’occasion de mes vœux 2006, je disais que le temps de la mobilisation avait sonné. Vous nous l’avez prouvé en élisant très largement la liste Finistère d’Avenir. C’est d’ailleurs pour cela qu’il ne faut pas baisser les bras. Aujourd’hui, avec Jacques à la tête de la Chambre Régionale d’Agriculture, nous avons un formidable challenge à relever. Dans les années 60, Alexis aimait à répéter qu’il n’y aurait pas d’agriculture prospère dans une économie régionale en décadence.
Aujourd’hui ça va être à nous de convaincre qu’il n’y aura pas d’économie régionale prospère avec une agriculture en décadence.
Jacques, sache que nous serons à tes côtés pour t’accompagner, te soutenir, dans la lourde tâche qui t’attend.
A toi de fédérer l’ensemble des forces vives de la Bretagne : l’histoire nous a prouvé que soudés et unis, la Bretagne pouvait soulever des montagnes.
Construire plutôt que partir était la devise d’Alexis.
Sache, Alexis, que tes successeurs continueront dans le droit fil de ce que tu nous as inculqué, avec la même détermination et la même énergie, pour faire de nos paysans, des paysans fiers, des paysans debout.
Je vous remercie. »