La revue "Santé et travail" de la Mutualité française a publié dans sa livraison de juillet 2007 une enquête sur des cancers de la vessie développés par deux agents des services des eaux à Rouen, qui ont été reconnus comme maladies professionnelles. Selon le service prévention de la Caisse régionale d’assurance maladie de Normandie, ces affections résultent d’une exposition à un produit toxique lors de travaux de maintenance de canalisations. Le risque, lié à un vernis anticorrosion largement répandu, pourrait toucher plusieurs milliers d’agents des services des eaux en France.
Le produit toxique est dégagé par un vernis protégeant les canalisations de la corrosion. Lorsqu’il est chauffé, le vernis dégage des fumées riches en benzo[a]pyrène, un hydrocarbure aromatique polycyclique (HAP) très toxique connu pour entraîner des cancers de la vessie.
Or, ces travaux ont généralement lieu dans des espaces confinés et non ventilés, qui ne permettent pas un renouvellement satisfaisant de l’air.
Des mesures effectuées pendant des interventions sur le réseau d’eau potable de Rouen ont montré des dépassements plus de 1000 fois supérieurs aux seuils maximum recommandés…
Le vernis incriminé est le "Carbolac 12.100", utilisé à Rouen jusqu’en 2000.
Les mesures de protection figurent bien sur les fiches de données de sécurité (FDS) du produit, mais elles ne concernent que les conditions de pose.
Aucune mention ne faisait état des risques encourus pendant les travaux de maintenance.
Après que le laboratoire de la Caisse régionale d’assurance maladie (Cram) de Normandie ait communiqué ses constatations, les salariés concernés ont été dotés de masques à ventilation assistée. Ces derniers permettent de ne pas dépasser la valeur limite recommandée par les autorités sanitaires.
Certaines parties du réseau ont également été équipées de ventilations mécaniques. Enfin, un suivi médical des agents du service des eaux a été mis en place.
Reste désormais à évaluer les risques de cette exposition à plus grande échelle.
"On a traité pendant des années des tuyaux par des vernis protecteurs du même type, expliquait à "Santé et travail" M. Michel Héry, responsable du projet "cancers professionnels" à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS). Il est impératif aujourd’hui de tout faire pour protéger les opérateurs qui assurent la maintenance de ces réseaux. Ce qui est inattendu c’est que ces cancers sont survenus chez des personnes qui ne manipulent pas ce produit 8 heures par jour. Des centaines voire des milliers d’opérateurs pourraient être concernés par ce risque en France, poursuit-il, d’autant plus que le vernis pourrait recouvrir d’autres types de canalisations, de gaz par exemple. »
"Nous avons averti les autorités publiques, les médias et les mutuelles qui couvrent les agents des collectivités territoriales", indiquait M. François Desriaux, rédacteur en chef de
"Santé et travail", magazine de la prévention des risques professionnels, publié par la Mutualité française.
NOTE :
L’Office International de l’Eau (Centre National de Formation aux Métiers de l’Eau) organise (très opportunément) le 2 octobre 2007 à Paris une « Journée de l’OIEau », sur le thème de « L’hygiène et de la sécurité dans le secteur de l’assainissement » :
« Exploitant de système d’assainissement : un métier à risques. Depuis toujours, le secteur de l’assainissement est confronté à des accidents graves et marquants. Dans ce cadre, les responsabilités financières et pénales des acteurs sont de plus en plus engagées. La jurisprudence le confirme. Le management des risques hygiène et sécurité constitue un enjeu prioritaire pour les services d’assainissement. »
Cette "Journée de l’OIEau" vous permettra de faire le point face à ces enjeux et de découvrir des retours d’expériences réussis.
– Accidentologie dans le secteur de l’assainissement urbain
– Pathologies rencontrées chez les exploitants
– Compétences et comportements des acteurs face aux risque
– Responsabilités des entreprises et de leurs dirigeants
– Retours d’expérience en réseau d’assainissement, en station d’épuration, dans les entreprises de service et les entreprises sous-traitantes