L’opéra-bouffe enfonce Gargantua
L’AFP nous apprend à l’aurore que la sous-ministre doublement démissionnée, grillant la politesse à la dingo de l’Hôtel de ville, s’est baignée ce matin dans la Seine.
Y a du crépage de chignon dans l’air, d’ici à ce que le jeune Germain défie en duel le sigisbée d’Amélie, y a pas loin.
A dix heures, alors que nous allions quérir de la ciboule et de la sauce aigre douce à Belleville, nouvel orage diluvien qui nous retient captif une demi-heure à l’entrée du China store sur le boulevard.
Même dans nos cauchemars les plus fous nous n’avions pas imaginé pareille occurrence.
Imaginez, hier, le service économie du so call « journal de révérence », nous livrait en début d’après midi un exemple achevé du « journalisme de préfecture ».
Jugez plutôt…
Pcc le grincheux de service.
Les promesses d’un retour à la Seine
Le Monde, 12 juillet 2024
Émeline Cazi (Service Économie)
ANALYSE
« La date du bain inaugural n’a plus vraiment d’importance. Cela devait être un dimanche de la fin du mois de juin. L’été qui n’arrive jamais et le débit trop important du fleuve l’ont repoussée une première fois. La dissolution et les élections l’ont décalée à juillet. Anne Hidalgo, la maire de Paris, doit désormais plonger dans la Seine après le 14 juillet, et idéalement avant vendredi 26, jour de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.
Preuve sera alors donnée que la somme de 1,4 milliard d’euros débloquée par l’Etat et les collectivités depuis 2018 a permis de rendre, un siècle après son interdiction, la Seine à nouveau baignable. Sauf météo capricieuse, les triathlètes et nageurs pourront alors concourir, début août.
Il y aura toujours des esprits grincheux pour réduire la portée de l’événement à une dépense colossale destinée à une simple compétition sportive. Ceux-là oublient la directive-cadre européenne, adoptée en 2000, qui obligeait à retrouver un bon état général des eaux à l’horizon 2015 (avec report possible à 2021, voire 2027). Avoir contraint les collectivités à corriger les mauvais branchements de milliers de logements qui déversaient leurs eaux usées dans le fleuve et à moderniser les stations d’épuration permettra par ailleurs, dès l’été 2025, de se baigner dans toute la métropole.
Trente-deux sites ont été retenus sur la Seine et la Marne. Ces plages seront autant de nouveaux espaces de loisirs que d’îlots de fraîcheur en prévision des canicules à venir. Le mouvement n’est pas limité à Paris. Mi-juin, le plongeon du maire de Charleville-Mézières dans la Meuse s’inscrivait dans cet élan de reconquête du fleuve.
Les Jeux, un accélérateur
Placer la Seine au cœur des JO Paris 2024 – avec des épreuves au pied de la tour Eiffel, un défilé nautique en ouverture, un village construit les pieds dans l’eau – a aussi le mérite de redonner de la place à une infrastructure majeure qui a nourri et chauffé (grâce au transport du bois) Paris, accueilli le monde lors des expositions universelles, mais dont les regards se sont détournés à mesure que le transport routier s’est imposé. Or, si la France ne renonce pas à ses objectifs de décarbonation, la Seine doit permettre d’accélérer la lutte contre le changement climatique, tout en rafraîchissant la métropole. A bien des égards, les jeux auront servi d’accélérateur.
Une barge de 5 000 tonnes, c’est 250 camions évités sur les routes. Sachant que la Seine est « le seul fleuve européen navigable toute l’année », rappelle Stéphane Raison, le directeur des ports Haropa (Paris, Rouen, Le Havre), qu’il « pourrait y passer quatre fois plus de trafic », complète Stéphane Bousquet, l’un des directeurs de Voies navigables de France, le potentiel de développement est gigantesque. Les quatre cinquièmes du terrassement du village olympique (500 000 tonnes, 2 500 camions évités) ont été évacués par voie d’eau. Le pont de l’Ile-Saint-Denis est arrivé par barge, comme les façades, les isolants, les parpaings, mais aussi les barrières de la cérémonie d’ouverture.
Les terres excavées du nouveau métro sont, elles aussi, transportées par barge dès que possible. « Ce sont les gros chantiers qui permettent d’installer les bonnes pratiques et d’éprouver le système », note Patricia Pelloux, la directrice adjointe de l’Apur, l’atelier d’urbanisme de la métropole. Les chantiers d’Ivry-Confluences et des Ardoines, à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), pourraient en profiter.
Le monde de la logistique s’est aussi emparé du sujet. La congestion des métropoles et la nécessaire décarbonation de l’économie poussent les grands groupes à réinventer la façon d’approvisionner les villes. L’Ile-de-France compte 18 millions de mètres carrés d’entrepôts le long des autoroutes ; elle reçoit trois à quatre millions équivalents 20 pieds (la mesure containers) par an.
Depuis dix ans, Franprix fait transiter les produits « secs » (épicerie) sur l’eau plutôt que par la route. Chaque jour, le contenu de quarante containers est chargé au port de Bonneuil (Val-de-Marne) et déchargé quai de la Bourdonnais, dans le 15e arrondissement. « A l’époque, personne n’y croyait », rappelle le directeur d’Haropa.
Ikea, quatrième plus gros chargeur mondial, s’est, lui, lancé en décembre 2022. Les étagères commandées en ligne arrivent par barge de Gennevilliers (Hauts-de-Seine) et terminent leur trajet dans des petits camions. Fin 2023, c’était au tour de France Boissons d’acheminer ses fûts par bateau vers les cafés et les restaurants parisiens. « Notre sujet, maintenant, est de savoir quelle marque va faire basculer les autres », explique Stéphane Raison. Le sujet gagne l’Amérique. Face à la perspective d’un péage routier au sud de Manhattan – reporté, en juin, sine die –, la chambre de commerce de New York a contacté Haropa, en mars, pour réfléchir au moyen d’acheminer autrement les marchandises.
Si l’activité sur le fleuve s’intensifie, que baigneurs et promeneurs affluent sur les berges, une médiation sera nécessaire pour que chacun trouve sa place. L’objectif d’organiser des jeux moins carbonés a aussi encouragé le verdissement de la flotte de bateaux. Le tiers des 94 embarcations sur lesquelles défileront les athlètes sont électriques ou hybrides. Pour le transport, en revanche, on est encore loin des taxis flottants de Rotterdam, aux Pays-Bas.
Paris a beau être le premier port européen de passagers (huit millions par an) et le deuxième au monde, les navettes entre Saint-Ouen-la Défense, dont rêve Karim Bouamrane, le maire socialiste de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), ne sont pas pour demain. Des expériences ont bien été menées il y a quelques années, notamment entre Maisons-Alfort, dans le Val-de-Marne, et le port d’Austerlitz. C’est oublier qu’il existe le RER. La ligne C est vieille, poussive, mais en comptant les 12 km/h imposés sur l’eau intra muros et le temps d’accostage, le train reste encore l’option la plus rapide pour rallier Paris depuis ce département limitrophe. »
Et la nave ne va décidément pas...