La pitoyable mise en scène “d’Assises de l’eau” décrétées par Nicolas Hulot et le gouvernement, aux fins d’entortiller des élus qui s’élèvent, à juste titre, contre la mise à mort programmée des politiques publiques du secteur et de leurs instruments, au premier rang desquels les Agences de l’eau, dissimule, sous couvert d’avènement d’une nouvelle “fiscalité écologique”, la substitution à terme des redevances des Agences par la fiscalité locale, sur le modèle de la taxe Gemapi. Ce que révèle un rapport d’étape confidentiel, élaboré sous l’égide de Bercy, dont Eaux glacées a pu prendre connaissance.
("Vraie news", dont personne ne vous parlera : le 23 juin est la Journée internationale du service public. Eaux glacées vous en informe donc.)
La mise en scène de la mascarade, pilotée par Sébastien Lecornu, le couteau suisse du gouvernement qui supplée assidument les vacances de M. Hulot (un jour la méthanisation pour amadouer la FNSEA qui va perdre gros avec la prochaine PAC, “en même temps” les Assises de l’eau…), et Jean Launay (notre insubmersible “Kappelmeister”), est si grotesque qu’elle préterait à rire, si le sujet n’était si grave.
Ainsi donc petit et grand cycle nécessiteraient qu’un imposant aéropage se penche à leur chevet, sur l’air de “Qui veut gagner des millions ?”
L’imposture est si manifeste qu’elle accable ceux qui font montre d’y adhérer.
“Il n’y a pas d’argent magique…”
Voyons d’abord pour le petit cycle, pour le grand, à cette heure, le second round initialement prévu à la rentrée est mal barré.
Ah que, les tuyaux ils fuient et il va falloir les réparer… Et donc trouver de l’argent. Le tout sous la houlette de Jupiter dont on se souvient professant à une infirmière que “l’argent magique n’existe pas…”. Forte maxime que n’ont semble-t-il pas entendu la FP2E, Canalisateurs, Sophie Auconie et le reste de la bande, qui nous racontent des craques sur de soit-disant trésors cachés de financements européens, dont nous avons déjà établi qu’ils n’existent pas…
http://www.eauxglacees.com/La-mise-a-mort-des-agences-de-l
Sans même évoquer les nouvelles orientations de la politique de cohésion 2021-2027 qui ne vont pas arranger les choses...
Après quoi, sondage bidon à l’appui, rien moins que 2500 soi-disant “réponses d’élus”, les collectivités réclameraient à corps et à cri un soutien de l’Etat en matière d’ingenierie.
Elle est bien bonne. Qui a liquidé les DDE-DDA, les SATESE, les laboratoires publics départementaux d’analyse, flingué l’ATESAT, muselé les Agences techniques départementales, transformé les restes en créant le grand cadavre à la renverse du CEREMA, qui n’en finit plus d’agoniser dans son coin ?
Et d’abord, si les réseaux fuient, que sont donc devenus les milliards d’euros de “provisions pour renouvellement” détournées par Veolia, Suez et Saur depuis des décennies ?
Qui a facilité la mainmise des AMO privés mercenaires sur le marché de “l’audit” des DSP ?
Découvrir, après tout cela que les réseaux fuient ? Enorme.
Encore mieux, c’est aussi seulement maintenant que l’on s’apercevrait qu’une bonne partie des canalisations en PVC posées jusqu’en 1980 relarguent un composant cancérigène dans l’eau potable…
Enfin, le baratin sur les “économies d’échelle” prétendument induites par le transfert des compétences eau et assainissement de la loi Notre, encore du pipeau : dans un premier temps les coûts augmentent avec la remise à niveau des services, les frais de personnels, d’acquisition de matériel, la construction d’un SIG, l’élaboration de schémas directeurs, la mutualisation des reprises d’emprunt, etc.
Oups, et voilà qu’on allait oublier, de surcroît, les deux milliards d’euros du pluvial, bientôt collés par les REMouleurs sur le dos de la facture de l’usager de l’assainissement...
http://www.eauxglacees.com/Exclusif-le-rapport-choc-sur-la
Ce n’est qu’un début, poursuivons le massacre.
Les collectivités locales à la diète
En 2010, les départements investissaient environ 700 millions d’euros chaque année dans le financement d’infrastructures d’eau et d’assainissement.
En 2018, ce sera à peine 150, nul ne le sait exactement, mais la loi NOTRe et la perte de la compétence générale sont passées par là. Les départements se retirent.
Les Agences ? Moins 500 millions d’euros prélevés par Bercy l’an dernier. L’année prochaine avec le “plafond mordant” ce sera pire. Au final, moins 25% à 30% de capacités de financement. Dans le collimateur : les collectivités locales, qui n’auront plus qu’à emprunter… à la CDC ou la BPI, et de préférence des financements “innovants”, genre ceux qu’iront chercher Veolia ou Suez pour faire une SemOp…
Par là dessus rajouter les 13 milliards d’euros de dépenses en moins sur la quinquennat, imposées par le gouvernement au bloc local, ce qui vient de provoquer la rupture des négociations sur le “pacte financier…”
Et ce n’est pas fini, loin s’en faut, avec la suppression annoncée de la taxe d’habitation, qui n’a toujours pas de remplaçante connue, c’est l’Aquataxe Gemapi qui va en prendre un coup…
L’encombrante loi Biodiversité
A force l’inquiétude surgit tout de même, là où on ne l’attendrait pas…
Ainsi du rapport d’information présenté le 20 juin à l’Assemblée nationale, qui présente un suivi précis de la mise en œuvre de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages d’août 2016. Son application est-elle à jour ? Quel avenir pour l’Agence française pour la biodiversité (AFB) ? La séquence "éviter, réduire, compenser" (ERC) gagne-t-elle en maturité ? Pour continuer d’avancer, une quarantaine de pistes et recommandations sont livrées.
Ce rapport s’attache ainsi, surprise, à mettre en évidence le manque de ressources des six agences de l’eau, et propose de réorienter la fiscalité affectée à ces établissements publics, en agissant sur la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau, et sur celle pour pollution de l’eau d’origine domestique.
"Appliquons plus directement à cette fiscalité le principe de pollueur-payeur. Et poursuivons la réflexion sur l’instauration d’une nouvelle redevance pour atteintes à la biodiversité terrestre", suggèrent les deux députées (LR et LREM), auteures du rapport à l’approche des prochains débats sur le budget et le vote de la prochaine loi de finances. La dernière avait acté la baisse du plafond des recettes affectées à ces agences ; les députées proposent de le relever à 2,3 milliards d’euros.
Tiens, tiens, ce n’est pourtant pas ce qui est prévu au programme, car pendant ce temps-là, tout se joue, comme nous le verrons plus loin dans d’autres (discrètes) enceintes.
Le « Nouveau Monde » dans les marécages de la « Vieille politique »
A force ça commence à sentir mauvais pour les municipales. Les vieux de la vieille (Ferrand, Patriat, Castaner, Mme Gourault, même Collomb…), et pour ce qui nous intéresse Jean Launay, n’en peuvent plus de faire remonter les alertes à Jupiter : « Faut calmer les élus ! ».
Du coup, Kolossale finesse, en Loire-Bretagne, l’ami Burlot, talonné par Laurent Géraud, jeune (très) ambitieux Rémouleur qui pense s’être trouvé, sinon un destin, pour le moins un fort désir d’avenir, sort le joker : « On décale d’un an les XIèmes programmes, en 2019 on n’applique pas le plafond mordant, du coup l’année prochaine on va pouvoir arroser les élus et les calmer jusqu’aux municipales. »
Relayé à 3 heures du mat par SMS par notre Kappelmeister à Jupiter, le message n’a reçu qu’une réponse : « Continue. »
Attendons de voir, déjà va falloir affronter Darmanin. C’est pas gagné. En dépit de sa taille menue, sa grosse tête explose déjà tous les plafonds.
Quant au mordant, demandez aux ministres qui défilent avant le PLF et qu’il traite comme d’importuns manants… Le syndrome du petit Chose n’a pas fini de frapper.
La vérité est ailleurs
Dans un rapport d’étape daté du 15 juin dernier, intitulé « Quelle fiscalité environnementale à l’horizon 2022 », les deux hauts fonctionnaires co-auteurs, qui appartiennent au « Comité pour l’économie verte » (CEV) - un clone du défunt CFE du groupe De Perthuis branded Start up nation - , et membres, pour l’un, du secrétariat général du MTES, pour l’autre de la Direction du Trésor, dessinent en effet une trajectoire qui nous conduit tout droit, à l’horizon 2020- 2022, à l’extinction du système des Agences et de leurs redevances, au profit d’une nouvelle fiscalité locale :
« (…) Lancer une réflexion sur un rééquilibrage des redevances des Agences de l’eau afin de respecter le principe « pollueur-payeur »
La France s’est dotée en matière de lutte contre la pollution de l’eau, d’un point de vue fiscal, d’un ensemble de mesures cohérentes sur le plan des principes. La gestion des moyens de lutte contre les pollutions par les Agences de l’eau, financées par des redevances dues par les principaux pollueurs, correspond à une structure appropriée permettant, d’un point de vue théorique, une prise en compte globale du problème des pollutions de l’eau.
Néanmoins, au regard des usages actuels et des sources des pollutions, des évolutions des taux des redevances, et des modalités de gestion de ces taxes souvent par bassins versants individualisées (absence de seuil ou de plafond de redevances fixés au niveau national par exemple, à l’exception de la redevance pour pollution diffuse), une réflexion doit être menée afin d’essayer d’amener plus de cohérence dans le système des redevances des Agences de l’eau, notamment afin de rééquilibrer l’acquittement de celles-ci en fonction des niveaux de pollutions émises par chaque pollueur. En outre, il est à noter que la loi sur la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a confié de nouvelles missions aux Agences de l’eau en matière de protection de la biodiversité ; il pourrait être utile de préciser les modalités de financement permettant de remplir ces missions.
Par conséquent, conformément à la lettre de mission du Comité pour l’économie verte, et suite aux conclusions des Assises de l’eau, il sera nécessaire de lancer au cours du dernier trimestre 2018 un groupe de travail spécifique sur cette question qui rendra ses conclusions avant la fin du premier semestre 2019, pour une mise en œuvre dans le cadre du PLF pour 2020.
Ce groupe de travail pourrait également, toujours en cohérence avec les conclusions des Assises de l’eau, s’interroger de manière plus générale sur la prise en compte générale du cycle de l’eau, notamment sur la manière de financer le système de l’eau de manière globale.
Comme souhaité par certaines collectivités territoriales suite à leur retour d’expérience, une réflexion autour du mécanisme de la taxe Gemapi (taxe locale pour financer la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations), de son mode de fonctionnement et de son dimensionnement semble être opportune, en lien également avec la refonte de la fiscalité locale et du transfert à moyen terme (2026) de la compétence eau et assainissement aux EPCI, »
Lire aussi :
– Protection de l’environnemùent dans la Constitution : "la proposition de Hulot est un aimable baratin"
Marianne, 21 juin 2018.
– L’enjeu n ’est pas que dans les tuyaux
France Eau Publique, 29-06-18.
Toujours très surpris de voir qu’on conseille aux collectivités d’emprunter pour payer le renouvellement, qui, certes, est de l’investissement, mais réalisé tous les ans... ça ressemble quand même furieusement à du déficit ça !
Quelle irresponsabilité !
Et ne peut on assumer que 75% de moyenne est loin d’être un rendement mauvais ?