A l’issue de chaque inondation la question resurgit. Peut-on, faut-il, et comment, modifier le dispositif d’indemnisation des sinistrés ? En réponse à une parlementaire, le ministère de l’Environnement vient de repréciser ce qu’est, et surtout ce que n’est pas, le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « Fonds Barnier », créé en 1995 par le ministre éponyme. Utiles précisions à l’heure où les capacités financières du système touchent à leurs limites.
La question écrite n° 19213 de Mme Dominique Estrosi Sassone (Alpes-Maritimes - Les Républicains), publiée dans le JO Sénat du 10/12/2015 - page 3318 :
« Mme Dominique Estrosi Sassone interroge Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie sur l’évolution et la modernisation du fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds « Barnier ».
Ce fonds de prévention des risques naturels majeurs a été créé par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement et a pour but de financer l’expropriation de biens exposés à certains risques naturels menaçant gravement des vies humaines.
Il est principalement alimenté par une part des primes pour la couverture du risque de catastrophes naturelles figurant dans les contrats d’assurances.
Le décret n° 2005-29 du 12 janvier 2005 modifiant le décret n° 95-1115 du 17 octobre 1995 relatif à l’expropriation des biens exposés à certains risques naturels majeurs menaçant gravement des vies humaines ainsi qu’au fonds de prévention des risques naturels majeurs a élargi les conditions d’utilisation de ce fonds, puisqu’il couvre désormais la sinistralité d’une commune ou d’un groupement de communes.
Néanmoins, ce fonds dont le montant global s’élève à 190 millions d’euros par an soulève deux problémes.
Le premier est que son montant est largement insuffisant en raison du nombre de sinistres occasionnés ces dernières années par les calamités naturelles de plus en plus fréquentes et violentes.
De plus, certaines années, il est destiné à financer des actions de prévention ou des campagnes de sensibilisation. Son montant est donc réduit pour une collectivité frappée la même année par une catastrophe naturelle.
La seconde est qu’il existe d’autres fonds fixés par le code général des collectivités territoriales, à partir desquels les élus peuvent s’appuyer pour engager les réparations faisant suite à des intempéries (fonds de solidarité en cas de catastrophe naturelle et fonds pour la réparation et dommages pour les calamités publiques) mais qui sont également très inférieurs aux besoins des territoires.
Le montant total des catastrophes naturelles sur la période de 1990 à 2012 a été évalué à plus de vingt-et-un milliards d’euros, sans tenir compte des dernières intempéries, dont celles qui ont frappé les Alpes-Maritimes le 3 octobre 2015 et dont le coût définitif serait de l’ordre de 800 millions à un milliard d’euros.
Elle lui demande si elle compte harmoniser les fonds d’indemnisation auxquels peuvent avoir recours les collectivités pour créer un fonds de dédommagement conséquent pour les équipements et infrastructures des collectivités qui ne peuvent pas être assurés.
Elle voudrait également savoir si elle souhaite faire évoluer le fonds « Barnier » en le consacrant exclusivement à l’indemnisation des collectivités, compte tenu du coût des dernières catastrophes naturelles. »
La réponse du Ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat, publiée dans le JO Sénat du 07/07/2016 - page 3062 :
« Les ressources du fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) sont constituées d’un prélèvement sur la prime d’assurances contre les catastrophes naturelles et destinées, conformément à la loi et dans la limite des plafonds prévus par celle-ci, à financer une quinzaine de mesures de prévention de différentes natures et bien définies, comme par exemple :
– l’élaboration des plans de prévention des risques naturels,
– l’information préventive,
– la réalisation d’études et de travaux ou d’équipements de prévention des collectivités territoriales,
– des études ou travaux concernant les cavités souterraines.
Ces mesures de financement contribuent entre-autres à la réalisation des programmes d’actions de prévention des inondations et du plan séisme des Antilles mis en place au niveau national par le Gouvernement.
Le FPRNM n’est pas par essence un fonds d’indemnisation visant à réparer les sinistres des biens appartenant à des personnes privées ou à des personnes publiques.
Ce fonds de prévention est mis en œuvre dans des conditions prévues par les articles L. 561-1 et L. 561-3 du code de l’environnement.
Il finance notamment des mesures d’acquisitions amiables ou d’expropriations qui ont pour objet de soustraire les occupants de biens exposés à des menaces graves pour la vie humaine, lorsque les moyens de sauvegarde et de protection s’avèrent plus coûteux que le prix d’acquisition.
Dans ce cas seulement le propriétaire peut bénéficier à titre préventif d’une indemnisation afin de pouvoir retrouver un logement dans une zone non exposée à des risques. Le bien revient alors à une collectivité publique qui en assure la mise et le maintien en sécurité.
Ce n’est que très marginalement, lorsque des biens assurés sont sinistrés à plus de 50 %, que le FPRNM peut financer, sous conditions, l’acquisition du bien par une collectivité publique en prenant en charge l’écart entre la valeur du bien et l’indemnisation versée par l’assureur.
D’une façon générale, les indemnisations sont réservées à des biens assurés.
Compte tenu de sa vocation préventive, les évolutions du FPRNM ne peuvent être envisagées que dans le sens d’un renforcement des actions de prévention pour diminuer à terme les dommages que peuvent engendrer les phénomènes naturels.
Le FPRNM n’a pas vocation à financer les indemnisations des dommages aux collectivités pour lesquels des fonds spéciaux du ministère de l’intérieur existent.
Ces derniers fonds, contribuant aux réparations de biens non assurables des collectivités, ont fait l’objet d’une première mesure d’harmonisation qui s’est traduite par de nouvelles dispositions réglementaires publiées par décret n° 2015-693 en date du 18 juin 2015. »