En présentant le 5 février à Lyon les 144 engagements de son projet présidentiel, la candidate du Front national détaillait 6 points, rassemblés dans le chapitre VII “Une France durable” concernant directement l’agriculture, sujet sur lequel elle est revenue depuis lors, notamment lors d’une visite au Salon de l’agriculture.
Elle proposait d’ « appliquer le patriotisme économique aux produits agricoles français » ; de « transformer la PAC en Politique agricole française » ; de « refuser les traités de libre-échange (TAFTA, CETA, Australie, Nouvelle-Zélande, etc.) » et de « développer les circuits courts » ; de stopper « l’explosion des normes administratives » et d’ « encourager l’installation des jeunes agriculteurs » ; de « défendre la qualité : afin de lutter contre la concurrence déloyale, interdire l’importation des produits agricoles et alimentaires qui ne respectent pas les normes de production françaises » ; de « promouvoir les exportations agricoles, notamment en soutenant les labels de qualité ».
La candidate entendait aussi interdire les OGM en appliquant le principe de précaution, et souhaitait faire de la protection animale une « priorité nationale ».
Elle proposait ainsi de « défendre le bien-être des animaux en interdisant l’abattage sans étourdissement préalable et en remplaçant le plus possible les expérimentations animales » et de « refuser le modèle des fermes-usines, du type ferme des 1 000 vaches ».
Par ailleurs, Marine Le Pen proposait de « créer un grand ministère de l’Outre-mer et de la Mer afin de valoriser la dimension maritime de la France ».
Elle s’engage aussi à « rééquilibrer la politique de la ville vers les zones désertifiées et rurales ».
Elle affirmera ensuitte que l’Union européenne avait "décidé dans ses plans de la disparition de l’agriculture française".
"L’UE a décidé dans ses plans la disparition de l’agriculture française, et la disparition plus spécifiquement du modèle agricole français fondé sur le modèle des exploitations familiales", accusait la présidente du FN lors de l’émission Questions de méthode (LCP - France Bleu).
Alors qu’une productrice de lait des Côtes d’Armor avait été retrouvée pendue le 24 février dans sa salle de traite, Mme Le Pen a évoqué une "détresse (qui) arrache le ventre à tous les Français. Mille suicides en cinq ans, c’est absolument considérable."
Face à cela, elle proposait "trois mesures immédiates".
Tout d’abord, le "patriotisme économique : nos collectivités territoriales doivent à tout prix commander des produits français".
Ensuite, "un revenu décent" pour les agriculteurs, via de nouvelles "relations commerciales revues de manière tripartite : producteurs, transformateurs, distribution, avec une garantie de transparence par l’Etat". "Il faut que la grande distribution arrête de capter des marges de plus en plus importantes quand les producteurs acceptent presque de vendre à perte", martelait-elle.
Avant de répéter enfin son souhait, déjà exprimé lors de sa visite au salon de l’Agriculture, de "franciser les aides."
"Nous versons 20 milliards, presque 21, à l’Union européenne, on nous en rend 13, Politique agricole commune comprise. Eh bien, on récupère ces 20 milliards, et on maintient nos aides, quitte à les augmenter un peu", a demandé la patronne du FN, qui pourrait réunir jusqu’à 35 % du vote des agriculteurs exploitants au premier tour de la présidentielle selon une étude du Cevipof.
Au Salon de l’agriculture, ensuite,elle appelait à "franciser les aides" aux agriculteurs, fustigeant l’"échec absolu" de la Politique agricole commune (PAC) de l’Union européenne.
"Il faut revoir totalement le système des aides. Il faut franciser les aides, évidemment pas les baisser mais les distribuer différemment", plaidait la candidate dont le parti a effectué ces dernières années des percées électorales dans la France rurale.
"Il faut faire l’inverse de ce que fait l’UE. Il ne faut pas financer par des aides l’hectare, mais il faut financer les bonshommes",s oulignait-elle, qualifiant d’"échec absolu" la Politique agricole commune menée par l’Union européenne. "On veut maintenir le système des aides via une politique agricole nationale afin de définir nous-mêmes où vont ces aides", a expliqué aux journalistes la députée FN du Vaucluse Marion Maréchal-Le Pen, présente elle aussi au salon.
La candidate appelait à ce que "l’argent des Français" et "des collectivités serve à acheter des produits agricoles français", et à mettre un terme à "la concurrence déloyale, et (aux) accords de libre-échange". "On s’aperçoit que la grande distribution aujourd’hui contribue à l’effondrement de la situation des exploitants. Les exploitants doivent avoir un revenu décent, être payés, il faut leur rendre une part de leur plus-value", lancait-elle.
La visite suscitait quelques actes de protestation, en marge du cortège. A une trentaine de mètres d’elle, Philippe Nolot, patron d’une maison d’édition, frappe sur une casserole, référence aux affaires judiciaires autour de Mme Le Pen et du candidat de la droite : "qu’elle et Fillon arrêtent !".
Le service d’ordre FN évacuait deux jeunes membres d’une association féministe qui voulaient lui remettre "le prix de l’imposture pour sa soi-disant défense des femmes", avant la Journée des femmes le 8 mars.
Du côté des éleveurs, certains se disaient séduits par "le changement" proposé par Mme Le Pen ou jugaient qu’"elle pose les bonnes questions", quand d’autres estimaient que "ses idées en matière de politique européenne seraient une catastrophe pour les agriculteurs. On dépend des aides européennes". De nombreux éleveurs interrogés par l’AFP se déclaraient indécis sur leur vote.
Ainsi, selon l’AFP, l’Aisne, troisième département le plus aidé en France en 2014, avec 180 M€ reçus de la PAC, a ainsi voté à 43,5 % pour le FN au premier tour des régionales en 2015 — le parti avait pour ce scrutin recueilli 27,7 % des voix au niveau national.
Même chose dans la commune de Saint-Gilles (Gard), où 52 % des électeurs ont voté pour le FN en 2015 et qui recevait 4,7 M€ d’aides directes de la PAC en 2014. A Rahling (Moselle), la liste frontiste a enregistré un score de 63,3 % à la même élection. Les aides de la PAC — près de 500 000 € — y sont quatre fois supérieures à la moyenne des communes françaises.
Le FN a pourtant critiqué ouvertement, et à plusieurs reprises, la politique agricole commune. Un discours qui séduit : lors de la présidentielle de 2012, 21 % des agriculteurs avaient voté pour le Front national.
Arrivée vers 09H00 au Salon, la candidate protégée par un service d’ordre étoffé, repartait vers 19H30 après la fermeture.