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Charente-Maritime : 400 irrigants s’en prennent au Préfet et à des associations de défense de l’environnement

27 avril 2010

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Nous évoquions il y a quelques jours la véritable « guerre de l’eau » qui menace dans les campagnes françaises. Selon un communiqué de trois associations de défense de l’environnement charentaises, en date du 25 avril 2010 (NE17, SOS Rivières et Environnement et AIE17), une réunion d’information sur les volumes prélevables, organisée par le Préfet de Charente-Maritime, à laquelle 400 irrigants de la région se sont invités a mal tourné. Les irrigants ayant violemment invectivé les représentants des APNE présents.



« Lors d’une réunion à Bussac sur Charente, organisée par le Préfet de Charente-Maritime, dans laquelle devaient être présentées les dernières propositions des volumes prélevables pour le bassin Charente-Aval, environ 400 irrigants de la région se sont invités.

Ils ont confisqué la parole au représentant de l’état.

Dès le début de la réunion, ils ont insulté le Préfet et s’en sont pris violemment aux représentants des associations de protection de la nature.

Tout au long des deux heures de réunion ces associations ont été désignées comme boucs émissaires, de graves menaces ont été proférées à l’encontre de certains de leurs représentants, l’intervention d’un officier de la SDIG et de la gendarmerie a été nécessaire pour que les représentants des associations puissent quitter la réunion et le parking.

Le président de la Chambre d’Agriculture, M. Servant, a fait part des revendications de la profession :

 une suspension immédiate du processus de définition des volumes prélevables dans l’attente d’études environnementales et socio-économiques fiables et partagées ;

 une remise à plat des discussions sur les organismes uniques pour les sécuriser ;

 une baisse des taux de redevance "prélèvement" des agences de l’eau dès cette année pour les irrigants engagés dans des démarches collectives de gestion de l’eau ;

 une politique de stockage de la ressource visant à sécuriser la production et à assurer une diversité de biens en quantité et en qualités répondant aux attentes des consommateurs, et une intégration de cette problématique du stockage dans le cadre des discussions de le loi de modernisation agricole.

Les irrigants ne demandent rien de moins que :

 l’annulation des décrets de la loi sur l’eau, issus de la transposition de la Directive Cadre sur l’eau Européenne, qui impose le bon état des rivières et des nappes en 2015

 la gratuité de l’eau.

Ils refusent les réductions de volumes d’irrigations.

Ils demandent la construction des réserves d’eau pour l’irrigation du maïs et leur financement par de l’argent public.

Les associations de protection de la nature ne partagent pas ce point de vue.

En fait les irrigants ne reconnaissent pas la légitimité des associations de protection de l’environnement quand elles s’opposent à leurs projets, alors que ces projets ne sont que des outils supplémentaires pour continuer, dans la majorité des cas, une agriculture intensive chimique qui a montré depuis longtemps ses limites.

Ce type d’agriculture ne permet pas de maintenir les exploitations en place, de garantir un revenu à ceux qui la pratiquent, pollue les nappes et les rivières, met en danger les ressources en eaux potable, détourne une partie importante des aides et des subventions sans résultats et n’est pas en mesure de produire des aliments sains et de proximité comme le demandent les consommateurs

Les moyens utilisés pour faire entendre notre point de vue sont totalement légaux et démocratiques.

Notre pays possède un système juridique qui permet de faire entendre notre opinion et nous nous en servons en toute bonne foi et dans la transparence.

Les décisions des juges sont prises en toute indépendance et dans le respect des lois.

Ces actions ne sont pas dirigées contre les agriculteurs mais contre un système d’agriculture qui n’est plus soutenable tant économiquement qu’écologiquement. »

Contact :

Jean-Louis Demarcq

Tel : 09 77 78 25 31 ou 06 72 95 15 77

"La guerre de l’eau risque bien d’avoir lieu en Charentes-Maritimes, Sud-Ouest 28 avril 2010

Rectificatifs et précisions

Après la publication de l’article ci-dessus dans le quotidien régional Sud-Ouest au sujet d’incidents survenus lors d’une réunion d’information sur les volumes prélevables en Charente Maritime, le président de SOS Rivières et Environnement a fait suite à cette parution par le biais du communiqué ci-après adressé à Sud-Ouest :

 1. Ce sont les APNE (trois Associations départementales de protection de la nature et de l’environnement) qui ont attiré l’attention de la presse sur cette actualité et vous ont informé des incidents survenus lors d’une réunion organisée par l’administration sur la gestion et la répartition de la ressource en eau.

 2. Sur les objectifs et le sens des actions des APNE :

* Votre journal titre en page 1 : " La gestion de l’eau oppose les irrigants aux écologistes". Les associations précisent que leurs actions dans le domaine de l’eau visent à ce que les rivières coulent toute l’année, que la biodiversité y soit sauvegardée, et que cesse la pollution des nappes souterraines (nitrates et pesticides). Ces objectifs, qui constituent, hélas, un véritable "combat", ne sont pas réservés aux APNE, ils concernent tous les citoyens car l’eau est un bien public. Les APNE représentent en la circonstance l’ensemble de la population qui partage ces objectifs ; les "groupes écologistes" dont vous parlez ont la prétention de représenter la majorité de l’opinion publique.

* En page intérieure, votre titre indique que : " les agriculteurs refusent de céder aux pressions écologistes" ; puis vous écrivez : "un combat de longue haleine s’est engagé entre les défenseurs de l’environnement et le monde agricole".

Nous tenons à rectifier et préciser ces deux assertions :

 d’une part, si pression il y a, celle-ci n’est pas du ressort des défenseurs de l’environnement. Ceux-ci demandent simplement l’application de la loi et de la réglementation nationale et européenne, qui doivent conduire à une gestion équilibrée de la ressource en eau, au plus tard en 2015. La formulation inverse, c’est-à-dire " les écologistes et l’administration refusent de céder aux pressions des irrigants", aurait été plus appropriée et plus objective ;

 d’autre part, "les défenseurs de l’environnement" ne combattent pas "le monde agricole". Ils s’opposent seulement à une minorité d’agriculteurs qui prélèvent beaucoup d’eau souterraine afin de poursuivre une agriculture intensive responsable principale de la pollution des eaux et de la dégradation de la biodiversité. Leur combat est d’ailleurs partagé par de nombreux agriculteurs.

 3. Sur les projets de retenues d’eau et les recours judiciaires. Les APNE et bien d’autres usagers de l’eau s’opposent à ces retenues, d’une part en raison de leur remplissage à partir des nappes souterraines (nappes dont on aura besoin en été / cf les études du BRGM) et non "durant les crues d’hiver", d’autre part parce qu’elles sont toutes et uniquement destinées à pérenniser l’agriculture intensive des céréales ; les méfaits de ce type d’agriculture étant hélas soutenus par d’importantes subventions publiques.

Si des jugements condamnent certains projets (8 retenues seulement ont été attaquées, et non 70 comme indiqué dans votre article !), ce n’est pas la faute aux écologistes, mais c’est parce que les projets ne respectent pas la légalité.

 4. Nous observons que votre article ne fait pas état des violences (propos tenus lors de la réunion à l’égard du préfet et des représentants des APNE, menaces et débuts de violences physiques à la sortie de la salle,...) qui ont nécessité l’intervention des forces de l’ordre. Ces incidents sont pourtant la raison principale pour laquelle nous vous avons adressé un communiqué. Nous regrettons fortement cette lacune concernant un point essentiel du communiqué que nous vous avons adressé. »

Marc Laimé - eauxglacees.com