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SEDIF : le Parti de gauche incite 9 communes de Seine-Saint-Denis à quitter le Syndicat des eaux d’Ile-de-France

19 janvier 2010

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Neuf communes du Nord-Est parisien viennent de créer l’une des plus importante communauté d’agglomération française, « Est-Ensemble », qui va regrouper plus de 400 000 habitants de la Seine-Saint-Denis. Ces collectivités ont transféré leurs compétences eau à la nouvelle communauté d’agglomération à majorité PS-PC. Conformément à son programme, le Parti de Gauche appelle aujourd’hui, par le biais d’une pétition, les collectivités concernées à quitter le SEDIF et à adopter une gestion publique de l’eau. Un nouveau rebondissement dans l’affaire déjà tumultueuse du Sedif, et un nouveau motif de dispute à gauche, puisqu’il n’est pas du tout avéré que la majorité PS-PC de la nouvelle communauté d’agglomération cède aux sirènes du Parti de gauche…



L’affaire est sensible à tous égards, à l’heure où, comme le relatait le quotidien « Le Parisien » du 21 novembre 2009, « La facture d’eau des Franciliens va bondir » :

« Le prix de l’eau n’est pas un long fleuve tranquille. Selon une étude réalisée en interne par l’Agence de l’eau Seine-Normandie, la facture d’eau des Franciliens va augmenter en moyenne de 15 % d’ici à 2015. Le prix médian payé par les 11 millions d’habitants de l’Ile-de-France passera donc de 3,33 € à 3,82 €/m 3 , soit un surcoût annuel d’environ 30 € pour une personne seule, et 60 € pour une famille avec deux enfants.

Dans les centres urbains comme Paris, la hausse avoisinera les 11 %. En zone rurale sud de la Seine-et-Marne et de l’Essonne en tête les habitants pourraient voir leur facture bondir de 20 %.

« Dans certaines communes rurales, les prix pourraient doubler »

Sous la houlette du ministère de l’Ecologie, l’Agence de l’eau Seine-Normandie gère les infrastructures de distribution de l’eau vers un bassin de 18 millions d’habitants qui comprend la Normandie et l’Ile-de-France. La hausse annoncée de la facture des usagers est la conséquence directe de l’adoption d’un plan de 9 milliards d’euros visant à améliorer la qualité des eaux.

Ce projet, voté le 29 octobre par le comité directeur de cet établissement public, permettra notamment de mettre les systèmes d’assainissement en conformité avec les normes européennes, via différents chantiers de rénovation.

« Nous avons pris un retard conséquent en la matière, explique-t-on à l’Agence Seine-Normandie. La France a été plusieurs fois épinglée par la Commission européenne pour la mauvaise qualité de ses eaux.
Il faut vite rattraper le temps perdu. »

Comme souvent pour le prix de l’eau, les communes ne seront pas logées à la même enseigne. En Ile-de-France, les tarifs actuels varient du simple au double, allant de 2,89 €/m 3 pour Paris, à 5,52 €/m 3 pour Auvers-sur-Oise. Et une fois encore, les zones rurales devraient être les moins bien loties.

« En France, ce sont les collectivités qui supportent les investissements en eau, et non pas l’Etat, explique François Mauvais, directeur de l’Astee, une association de spécialistes de la gestion de l’eau. Or, ce sont les communes rurales qui sont souvent les moins bien équipées. Du coup, pour certaines, les prix pourraient carrément doubler. »

Ce nouveau coup dur infligé au portefeuille des Franciliens pourrait en tout cas relancer le débat sur la création d’un droit à l’eau.

« L’idée serait que la CAF verse une aide directe pour les plus démunis, sur le modèle de l’aide au logement », explique Karina Kellner, de l’Obusass, un observatoire spécialisé sur les questions de l’eau. De fait, le « droit d’accéder à l’eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous » est inscrit dans la loi depuis 2006. Un texte qui n’a pour l’instant jamais été traduit en acte concret. »

La gauche francilienne au péril du SEDIF

On se souvient que l’interminable feuilleton du choix du futur mode de gestion du Sedif, à l’expiration de l’actuel contrat imparti à la Générale des eaux (Veolia) depuis 1923, aura durablement fracturé la gauche francilienne.

Dans un premier temps le PS et le PC, minoritaires de peu au sein du syndicat dominé par le droite et présidé par M. André Santini, présentent une candidature alternative à celle du député-maire d’Issy-les-Moulineaux. Qui sera toutefois réélu, grâce à des voix de gauche « dissidentes »…

Puis viendra une campagne acharnée où de nombreuses forces de gauche s’engagent en faveur d’un retour en gestion publique directe du plus important syndicat des eaux français et européen.

A l’heure du vote décisif sur le choix du futur mode de gestion, en décembre 2008, près d’une vingtaine de délégués « de gauche » trahissent leurs engagements et votent avec la droite en faveur d’une nouvelle délégation de service public, dont on n’imagine pas qu’elle puisse échapper à Veolia.

Dont les dirigeants n’ont par ailleurs cessé de faire miroiter dans le même temps à plusieurs grands notables « de gauche » de la Seine-Saint-Denis que la multinationale envisageait d’implanter son futur siège social dans le département qui a longtemps symbolisé la « banlieue rouge »…

Ce contexte délétère aura notamment participé à précipiter le départ du PC de Jacques Perreux, Vice-président du Conseil général du Val-de-Marne, engagé de longue date dans le combat pour une gestion publique de l’eau, qui a récemment annoncé qu’il ralliait Europe-Ecologie…

Lettre de Jacques Perreux aux habitantes et habitants de Vitry

La nouvelle campagne du Parti de Gauche, qui interpelle aujourd’hui les 9 communes à majorité PS-PC qui viennent de se regrouper au sein « d’Est-Ensemble » va donc raviver un débat lancinant à gauche, débat qui vient récemment de connaître des prolongements inattendus au sein même du PS…

L’Appel du Parti de gauche

Aujourd’hui – depuis 1923 – le service public de l’eau potable est délégué à la multinationale Veolia (Compagnie Générale des Eaux) dans les villes de Bagnolet, Bobigny, Bondy, Les Lilas, Montreuil, Noisy-le-Sec, Pantin, Le Pré-Saint-Gervais, Romainville, ainsi que 135 autres communes franciliennes rassemblées au sein du Syndicat des Eaux D’Île-de-France (SEDIF).

Présidé par M. André Santini depuis un quart de siècle, le SEDIF est une institution entièrement « verrouillée » et totalement soumise aux intérêts financiers de l’entreprise monopolistique qui s’est appropriée depuis presque 90 ans ce bien public qu’est l’eau potable.

Avec près de 4 millions d’usagers, le « marché de l’eau » du SEDIF s’élève à un montant de 371 millions d’euros annuels, et M. Santini s’apprête cette année à renouveler le contrat de délégation à Veolia jusqu’à 2023 !

« Marre de payer l’eau trop cher ! »

 4.18 euros TTC le m3 à Bagnolet,

 4.04 euros TTC le m3 à Bobigny,

 4.32 euros TTC le m3 à Bondy,

 3.94 euros TTC le m3 aux Lilas,

 4.18 euros TTC le m3 à Montreuil,

 4.13 euros TTC le m3 à Noisy-le-Sec,

 4.44 euros TTC le m3 à Pantin,

 4.08 euros TTC le m3 au Pré-Saint-Gervais,

 4.02 euros TTC le m3 à Romainville.

Pourquoi l’eau est-elle si chère ? Et pourquoi existe-t-il de telles différences de prix ? Il faut savoir qu’en Île-de-France, le prix de l’eau oscille entre 2,89€ le m3 à Paris (qui est revenu en gestion publique) et 5,52€ à Auvers-sur-Oise (SEDIF-Veolia) !

Marre de la gestion opaque de l’eau !
Depuis plusieurs années, des enquêtes menées par l’association de consommateurs UFC Que Choisir ont révélé une totale opacité de la gestion, générant de considérables bénéfices sur le dos des usagers au moyen de surfacturations stupéfiantes (61,2 % de marge bénéficiaire, soit 90 millions d’euros par an selon UFC Que Choisir).

« Marre des gaspillages ! »

De plus, comme dans tout le pays où la gestion de l’eau potable a été déléguée au privé, le réseau de canalisations du SEDIF vieillit et se délabre, comme l’a montré une enquête nationale réalisée par le JDD au début du mois de novembre 2009, révélant un incroyable gaspillage de l’eau évalué pour la France entière à 2 milliards d’euros.

Les fuites dans un réseau mal entretenu s’élèveraient à plus de 10% de l’eau transportée par les canalisations dans le SEDIF (12% à Saint Denis par exemple d’après le JDD).

« Ca suffit comme çà ! »

Les neuf villes qui se rassemblent dans la communauté d’agglomération « Est-Ensemble » (400 000 habitants) ont décidé de transférer à l’intercommunalité la compétence « eau ».
La loi de 1999 sur l’intercommunalité prévoit que l’eau est une compétence « optionnelle ».

A ce titre, l’adhésion au syndicat de M. Santini n’est pas automatique, l’adhésion de « Est-Ensemble » au SEDIF va devoir être votée, et c’est la séance de février 2010 qui a été annoncée pour ce vote.

Les élus municipaux, nos représentants, ont l’opportunité de lui dire Non. Puisque la totalité des maires de ces neuf villes sont favorables au principe de la régie publique, ils ont l’opportunité de sortir des griffes de Veolia. Qu’attendent-ils ? Pourquoi voter l’adhésion en février 2010 ? Ils ont le temps !

Si les neuf villes de Est-Ensemble votent pour l’adhésion au SEDIF, cela signifie qu’elles se résignent à accepter de se lier au contrat « négocié » par M. Santini avec Veolia jusqu’en 2023, à abandonner sans combattre le bien public aux intérêts financiers, à faire payer l’eau toujours plus cher aux consommateurs, dans une gestion opaque et peu soucieuse de l’intérêt général et de la préservation de cette ressource fragile.

Si elles décident de ne pas organiser le vote, cela permet d’ouvrir une autre voie.

La Loi prévoit qu’en attendant, les communes peuvent être desservies en tant que simple
« cliente », permettant aux neuf villes de préparer dans les prochaines années un retour en gestion publique de l’eau avec d’autres villes de la région parisienne qui souhaiteraient les rejoindre, pour une tarification plus juste et plus égalitaire, une plus grande transparence, une meilleure qualité de service, un plus grand respect de ce bien commun de l’Humanité qu’est l’eau.

Nous proposons aux citoyen-ne-s des neuf villes de la communauté d’agglomération Est-Ensemble de signer la pétition demandant à leurs élus de ne pas voter l’adhésion au SEDIF et de s’engager pour préparer un retour en gestion publique de l’eau, bien commun de l’Humanité.

La pétition du Parti de Gauche

Voir la pétition citoyenne demandant un retour en gestion publique de l’eau proposée à la signature avant le vote du conseil communautaire prévu (pour l’instant) le 2 février 2010, adressée aux élus représentant les villes de Bagnolet, Bobigny, Bondy, Les Lilas, Montreuil, Noisy-le-Sec, Pantin, Le Pré-Saint-Gervais, Romainville, réunies au sein de la communauté d’agglomération « Est-Ensemble » (actuellement membres du SEDIF).

Marc Laimé - eauxglacees.com