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Boues d’épuration : déchets ou compost ?

4 juillet 2008

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Eaux glacées vous offre son grand quizz de l’été. Les boues d’épuration sont-elles des déchets, dont l’utilisation est soumise à d’épouvantables contraintes qui conduisent à un engorgement croissant des filières qui en permettaient l’élimination, ou un séduisant compost paré de toutes les vertus d’une époque dont le « green-washing » figure le fier emblème ? Le (ou la) gagnant(e) de notre grand quizz sera nommé(e) conseiller(e) es-boues au Meeddat, près Jean-Louis Houdini.



Il ne vous aura pas échappé que notre fière annonce est grosse d’une entourloupe que votre sagacité conduira à repousser d’un revers de manche. Halte-là, l’affaire mérite que l’on s’y penche de plus près.

C’est en croisant fortuitement hier à l’Assemblée, où l’on dissertait du Siaap et de la refonte de la station d’Achères, l’un de nos plus éminents spécialistes de l’organique que l’empoisonnante question nous est revenue en mémoire.

Voyez plutôt.

Les dix millions de tonnes de boues d’épuration produites chaque année en France, qui donnent chaque année un million de tonnes de « matières sèches », sont réglementairement des déchets, au titre des :

 Décret du 8 décembre 1997 “épandage de boues de stations d’épuration”

 Arrêté du 8 janvier 1998 “épandage des boues de stations d’épuration”

 Circulaire du 14 mars 1999 “épandage de boues de stations d’épuration”

 Circulaire du 18 avril 2005 “épandage de boues de stations d’épuration.”

Traduire ça devient la croix et la bannière de s’en débarrasser puisque les incinérateurs n’ont pas bonne presse, que leur stockage est quasiment devenu impossible, Directive européenne oblige, et que nos agriculteurs se font avoiner par la grande distribution, qui histoire de se refaire une beauté après les catastrophes sanitaires en rafale des années 90 ont édicté des « Chartes » qui clament urbi et orbi qu’elle n’écoule pas dans ses rayons des produits ayant été élevés... aux métaux lourds.

Du coup c’est devenu littéralement infernal de pérenniser la filière de l’épandage et chaque enquête publique se transforme en chemin de croix.

Heureusement, la France, fille aînée de l’Eglise, est terre de miracles.

Depuis 2004, les « composts » issus de boues d’épuration urbaines peuvent faire l’objet d’une commercialisation lorsqu’ils répondent aux critères définis dans la norme d’application obligatoire NFU44095 relative aux composts contenant des matières d’intérêt agronomique,issues du traitement des eaux.

Vous ne suivez plus, moi non plus, d’où notre quizz.

Les boues sont donc des déchets, assujettis à d’épouvantables contraintes, puisque les décrets, arrêtés et circulaires précités n’ont pas été abrogés, et sont dans le même temps du compost, si conforme à la norme précitée.

Qui promulgue les décrets, arrêtés et circulaires : l’Etat.

Qui promeut la norme, une institution privée : l’AFNOR.

Déchet ou compost ?

Comment le déchet peut-il se transformer en compost ?

Le gagnant mérite bien vous le verrez d’être adoubé conseiller es boues de l’ami Houdini.

Soyons juste, là ce n’est pas lui mais ses prédécesseurs qui ont béni le tour de passe-passe.

Pour vous forger une opinion éclairée, voir ci-après :

 Le Guide des boues rédigé pour l’Association des maires de France en 2007.

 L’arrêté « compostage » du 22 avril 2008.

Bon bain...

Le Guide des boues de l’AMF
L’arrêté "compostage" du 22 avril 2008

Voir aussi l’annexe du "Guide des boues" sur le site de l’AMF

Et puisque l’on en parle, voir aussi l’article de l’ami Gérard Borvon sur
la nouvelle taxation des boues de stations d’épuration : le domaine du n’importe quoi.

Marc Laimé - eauxglacees.com