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Veolia en difficulté à Paris et en banlieue parisienne : la bourse s’inquiète...

21 mai 2008

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Voilà qui va mettre du baume au cœur des élus et des usagers qui se mobilisent à Paris et en banlieue parisienne en faveur d’une remunicipalisation de l’eau dans la capitale et en banlieue. Les analystes de Cheuvreux, filiale du Crédit Agricole, s’inquiètent de l’éventualité de voir Veolia perdre les contrats de Paris et du Sedif en 2009 et 2010, et chiffrent le manque à gagner qui en découlerait pour l’entreprise. Cerise sur le gâteau, les deux analystes auteurs de la note en date du 20 mai 2008, qualifient M. André Santini, président du Sedif, de « politicien favorable aux entreprises privées... » Après « la terre qui ne ment pas », « la bourse qui ne ment pas ! ». Nous vivons une époque formidable.



Datée du 20 mai 2008, la note rédigée par Benoit Trochu et Damien de Saint-Germain, de Cheuvreux, dont on peut augurer qu’ils vont se faire sonner les cloches, est titrée :

« Bataille pour les contrats de l’eau parisiens : premier round. »

« Veolia vient juste de remporter deux contrats de construction d’usines de traitement d’eaux usées en région parisienne (214 millions d’euros de chiffre d’affaires pour Veolia Environnement de 2008 à 2012).

Paris semble perdu, la région Ile-de-France en péril.

Deux contrats doivent être renégociés dans les deux prochaines années.

 La distribution de l’eau à Paris à la fin de 2009 : selon nos estimations, (ce contrat) représente 20 millions d’euros d’Ebitda * pour Veolia (et 10 millions d’euros pour Suez Environnement). Le maire de Paris a annoncé durant la campagne électorale que la distribution de l’eau sera remunicipalisée à la fin du contrat. Quoique la municipalité parisienne souhaite recourir à l’expertise de Veolia et Suez environnement, il semble clair que les deux entreprises ont très peu de chances de conserver leurs contrats.

L’impact serait de EURO.5 par action pour Veolia.

 La distribution de l’eau et la potabilisation pour l’Ile-de-France (banlieue parisienne) à la fin de 2010 : le président du syndicat en charge de cette activité (M. André Santini, président du Sedif, note Eaux glacées), est un politicien favorable aux entreprises privées. Toutefois, le contrat, qui représente un Ebitda* de 100 à 150 millions d’euros pour Veolia, selon nos estimations, doit faire l’objet d’un appel d’offres. Nous pensons que Veolia a de bonnes chances de le conserver, mais en acceptant de réduire ses tarifs, comme c’est généralement le cas actuellement lors de la renégociation des contrats en France.

Si le contrat était perdu, l’impact représenterait EUR3 par action pour Veolia.

Quoiqu’il en soit, quoique l’impact de ces deux contrats ne soit pas significatif en termes de valorisation, le « bruit » entourant ces renégociations n’est pas favorable à Veolia et Suez Environnement. »

* Ebitda : Earnings Before Interest, Taxes, Depreciation and Amortization.

La note de Cheuvreux du 20 mai 2008.

Dans leur univers exotique les « analystes » sont réputés être gens bien informés. Nonobstant, nous le rappelons pour mémoire, les errements coupables de leur lointain cousin, M. Jérôme Kerviel, dont les gazettes nous narraient il y a peu les fredaines.

Du coup nous sommes conduits à nous interroger. Comment nos deux jeunes brillants talents peuvent-ils s’aventurer à supputer que Veolia conserverait le contrat du Sedif, quand le président d’icelui, M. Santini, et son bureau, annonçant leur réélection dans un communiqué en date du 15 mai 2008, assurent, en le soulignant, qu’en matière de choix du futur mode de gestion du Sedif, « Rien n’est décidé ».

Les mystères de la communication institutionnelle et financière nous demeurent décidément insondables...

Par ailleurs, accordant un entretien au quotidien gratuit 20 minutes en date du 21 mai 2008, le président du Sedif n’hésite pas à y confier que : "la gestion directe autonome, ce n’est pas raisonnable. (...) C’est quand même plus facile quand on a un concessionnaire."

On voit donc que nos deux analystes ne se trompent guère sur la dilection de M. André "Rien n’est décidé" Santini pour la gestion privée, dilection qu’il affiche donc ouvertement. Les délégués du Sedif apprécieront...

L’analyse que nous livrions ici même il y a peu semble se confirmer...

Voir ci-après l’ITW de M. André Santini, Président du Sedif (et maire d’Issy-les-Moulineaux), accordée à 20 minutes :

20 minutes : Pour la première fois, un candidat en faveur d’une gestion publique s’est présenté contre vous. C’est le début d’une opposition ?

A.S. : Ça a été une erreur. Les perdants se sont pris une déculottée méritée, car la règle pour les syndicats communaux veut qu’une liste commune dépassant les clivages politiques soit présentée. Ils ont tout perdu.

20 minutes : L’enjeu du Sedif pour les prochaines années est important. Dans deux ans, le contrat avec Veolia touchera à sa fin. Quels sont vos projets ?

A.S. : Depuis janvier 2007, nous avons lancé des audits pour savoir quel scenario serait le plus approprié pour gérer l’eau. Il existe quatre modèles, deux en gestion directe et deux en gestion déléguée. Les résultats seront connus à la fin du premier semestre 2008 et devront être validés à l’automne par le comité syndical.

20 minutes : La gestion publique n’est-elle pas la seule façon de réduire le prix de l’eau qui est l’un des plus élevés de France ?

A.S. : C’est une des solutions, mais pas la seule. Je crois beaucoup en la concurrence qui va devoir jouer avec le renouvellement de contrat. Le Sedif représente le plus gros contrat d’Europe, alors il y aura forcément des sociétés d’Italie ou encore d’Allemagne qui se positionneront.

20 minutes : Vous parlez comme si le scénario était déjà choisi...

A.S. : Mais non ! Le choix n’est pas prédécidé. Mais une gestion directe autonome, ce n’est pas raisonnable. Bertrand Delanoë ne va d’ailleurs pas totalement dans ce sens. C’est quand même plus facile quand on a un concessionnaire."

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Marc Laimé - eauxglacees.com