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Menaces de sanctions communautaires pour défaut de traitement des eaux usées

31 janvier 2008

par Marc Laimé - eauxglacees.com

A peine quelques heures après avoir été condamnée par la Cour de justice des Communautés européennes pour violation des normes de qualité de l’eau en Vendée, en Charente et dans les Deux Sèvres, la France vient à nouveau de se voir sommée par la Commission de respecter la Directive ERU datant de 1991, relative au traitement des eaux usées, sous peine de se voir infliger de très lourdes amendes par la Cour de justice de l’Union européenne. La Commission est exaspérée par les palinodies françaises, et notamment le fait qu’un certain nombre de zones sensibles ont été « redécoupées » hâtivement en 2006 afin de permettre à des collectivités de se soustraire aux exigences communautaires…



"Les eaux urbaines résiduaires non traitées constituent un risque pour les citoyens européens et nuisent à la qualité environnementale des rivières, des lacs et des eaux côtières d’Europe", a déclaré M. Stavros Dimas, commissaire à l’Environnement.

Ce dernier a donc adressé un "ultime avertissement", écrit, à la France, l’invitant à mettre rapidement ses installations de traitement des eaux résiduaires aux normes, faute de quoi il demandera à la Cour de lui infliger des amendes assorties d’astreintes journalières, pour un montant total astronomique, puisque le rapport sénatorial de Mme Fabienne Keller, l’évaluait l’été dernier à près d’un milliard d’euros !

La Directive ERU (eaux résiduaires urbaines) datant de 1991 oblige les grandes villes à collecter et à traiter leurs eaux usées, qui peuvent être contaminées par des bactéries et des virus dangereux.

Ces eaux contiennent également des nutriments tels que l’azote et le phosphore, susceptibles de nuire aux réserves d’eau douce et au milieu marin en favorisant la prolifération d’algues qui étouffent les autres formes de vie.

La date-butoir pour la mise en service des stations de traitement était fixée au 31 décembre 2000.

Les eaux résiduaires qui sont rejetées dans les cours d’eau après leur passage par ces stations doivent subir un traitement "biologique" et, lorsqu’elles sont rejetées dans les cours d’eau "sensibles", l’azote et le phosphore doivent également faire l’objet d’un traitement.

On en est loin puisque seulement 2400 stations d’épuration françaises, sur un total de plus de 13 000, le mettent en œuvre…

Les tricheries françaises exaspèrent l’Europe

La France avait déjà été condamnée en 2004 par la Cour de justice de l’Union pour non respect de la directive. Onze zones sensibles, dont l’Ile-de-France, n’avaient pas été classées comme telles, et plusieurs installations de traitement de plusieurs localités qui rejettent leurs eaux résiduaires dans ces zones n’étaient pas aux normes.

En outre la CJCE a constaté que 121 localités enfreignaient la directive en rejetant leurs eaux résiduaires dans des zones déclarées comme sensibles.

La France a partiellement corrigé la situation en désignant en 2006 les onze zones sensibles, mais 140 localités, dont Paris, continuent à y déverser leurs eaux résiduaires.

Mais pour contourner l’arrêt de la Cour sur les 121 localités en infraction, les autorités françaises les ont en fait « redécoupées » en 164 localités, ce qui a permis à un certain nombre d’entre elles de se situer désormais en deçà du seuil de 10 000 habitants à partir duquel les règles s’appliquent !

La Commission juge cette réorganisation "inacceptable", de même que le plan transmis par la France pour équiper certaines localités d’installations de traitement en 2011 seulement, soit 7 ans après l’arrêt de la CJCE datant de 2004, et 12 ans après la date-butoir fixée par la directive.

"La Commission juge ce retard déplorable et demande instamment à la France de construire, dans les plus brefs délais, des installations de traitement des eaux résiduaires dans toutes les localités concernées", précisait la communication bruxelloise.

"Si la France ne répond pas de manière satisfaisante à l’avertissement de la Commission, cette dernière peut demander à la Cour de lui infliger des amendes", avertit-elle.

Lire :

Le communiqué de la Commission

Lire aussi :

Le « plan de bataille » Borloo pour traiter les eaux usées

Les eaux glacées du calcul égoïste, 29 octobre 2007.

Menaces de sanctions communautaires pour défaut de traitement des eaux usées

Les eaux glacées du calcul égoïste, 31 janvier 2008.

Jean-Louis Borloo (Houdini) a réparé 57 stations d’épuration françaises en 6 mois !

Les eaux glacées du calcul égoïste, 21 mars 2008.

Marc Laimé - eauxglacees.com