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SIAAP : Winter is coming

11 juillet 2019

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Le nouvel incendie d’Achères c’était l’accident de trop. Le jour même de l’audition de deux responsables du syndicat par Emmanuelle Wargon, l’association Robin des Bois révélait de nouveaux dysfonctionnements. On apprenait ainsi que le SIAAP avait fait l’objet depuis 2018 de quatre mises en demeure du Préfet des Yvelines qui, n’ayant pas été suivies d’effet, ont été assorties d’astreintes financières depuis janvier 2019. Sur le front environnemental enfin, alerte rouge en prévision des pluies d’automne, qui provoqueront inévitablement de nouveaux rejets massifs d’eaux polluées non traitées dans le milieu naturel.



C’est Jean-Didier Berthault, l’un des vice-présidents (LR) du SIAAP, qui accompagnait son DG Jacques Olivier (PCF) chez Emmanuelle Wargon.

Jean Didier Berthault, conseiller municpal du 17ème arrondissement de Paris, conseiller de Paris, Conseiller communautaire (Métropole du Grand Paris), préside la commission d’appel d’offres (CAO) du SIAAP, qui a porté sur les fonts baptismaux la SemOp qui vient d’être réattribuée à Veolia à Valenton.

Un signe ? Le SIAAP que nous avons connu depuis les années 70 agonise. Les têtes vont tomber. Le grand partage historique RPR-PC est dead comme le dirait Sibeth Ndiaye.

La macronie vient de comprendre que les errements du SIAAP menacent gravement, non pas l’environnement, dont elle n’a que faire, mais le Grand Paris et les JO… Sauf que “reconstruire” la gouvernance comme vient, enfin, de la recommander la CRC Ile-de-France, est plus facile à dire qu’à faire.

En attendant les révélations pleuvent. Non seulement, comme nous l’avons déjà évoqué, les pompiers en arrivant à Achères pour y combattre le sinistre ont découvert que les bornes d’incendie ne fonctionnaient pas, mais le communiqué diffusé par l’association Robin des Bois au moment même où les représentants du SIAAP étaient reçus par Emmanuelle Wargon, fait froid dans le dos.

Nature morte aux poissons -.

Nature morte aux poissons

« L’incendie survenu le 3 juillet 2019 dans la STEP (Station d’épuration des eaux usées) d’Achères au niveau des cuves de stockage de chlorure de fer est le 11ème accident sur site depuis le 10 avril 2017.

Achères est la plus grande station d’épuration d’Europe et aussi la plus accidentogène. Les incendies, fuites et rejets de méthane se succèdent.

En 2018, la station d’épuration d’Achères a subi 4 mises en demeure du Préfet pour non conformités à la réglementation, notamment pour le manque de contrôle des tuyauteries et soudures du site.

Ces mises en demeure ne sont pas toujours suivies d’effets comme en témoigne l’astreinte pécuniaire qui a été prononcée par le Préfet des Yvelines fin janvier 2019. »

L’actuel préfet des Yvelines s’appelle Jean-Jacques Brot.

The right man in the right place.

Au début de sa carrière il a connu l’affaire des nitrates en Bretagne. Puis ce seront les Deux-Sèvres et, déjà, les tensions avec les irrigants. A Chartres, après avoir fait classer le bureau de Jean Moulin, il organise des Assises de l’eau pour tenter de contenir la crise des pesticides dans la Beauce. Ensuite c’est toujours lui qui affronte la tempête Xynthia en Vendée. Après un rapide intermède en Nouvelle-Calédonie, il s’est enfin pleinement investi dans l’accueil et la relocalisation des réfugiés dans toute la France durant plus de deux ans. Une mission qui lui a valu le respect unanime de tous les acteurs rencontrés à l’occasion.

Et maintenant le SIAAP, courage Monsieur Brot.

Le gouvernement patauge

"Quatre incidents en 18 mois, c’est beaucoup", s’alarmait mardi la secrétaire d’Etat au ministère de la Transition écologique Emmanuelle Wargon lors d’un point presse, après avoir rencontré Jean-Didier Berthault et Jacques Olivier.

"L’Etat est garant de la qualité de l’eau (...), on ne peut pas continuer à constater des incidents", tançait-elle.

"Le Siaap est en train de travailler sur les causes (...), sur comment on fait pour passer l’été", ajoutait-elle, alors que ce site classé Seveso "seuil haut" en raison de risques toxiques a déjà connu depuis février 2018 trois incendies et un dégagement de fumées dû à un mélange de produits chimiques.

Cet incident arrive "au plus mauvais moment", affirmait l’association de protection de l’environnement Robin des Bois dans un communiqué. "La Seine est en période d’étiage et les égouts de l’ouest parisien reçoivent cet été de lourdes charges de poussières de plomb consécutives à l’incendie de Notre-Dame de Paris", assurait l’association.

Mme Wargon a ensuite indiqué que la qualité de l’eau rejetée dans la Seine par le site d’Achères était revenue à son niveau "habituel", alors que cinq tonnes de poissons morts ont déjà été repêchées en aval de la station depuis mercredi.

Le retour d’un taux d’oxygène "propice au développement" des poissons remonte au "vendredi 5 juillet, 16H00", avait annoncé le Siaap dans un communiqué, soit 48 heures après le départ de l’incendie.

L’analyse des impacts sur la biodiversité peut prendre "plusieurs semaines", précisait la ministre. "Nous n’avons pas encore connaissance du préjudice, mais s’il y a préjudice direct ou indirect à indemniser, on indemnisera", assurait-elle.

Le préfet des Yvelines Jean-Jacques Brot indiquait en outre qu’en vertu "du principe pollueur/payeur, le Siaap (allait) reconstituer les frayères et réempoissonner".

Enfin, le Siaap va proposer des scénarios pouvant aller jusqu’au 31 décembre et adaptés "aux situations de fortes précipitations (...) potentielles à l’automne et au début de l’hiver prochain", pour son usine d’Achères qui fonctionne désormais au ralenti.

Une enquête judiciaire a été ouverte, confiée au commissariat de Saint-Germain-en-Laye pour déterminer les causes du sinistre. Une enquête interne est également en cours.

Un audit de sécurité va avoir lieu sur l’ensemble des sites gérés par le Siaap.
La station d’épuration, créée en 1940 et qui s’étend sur 250 hectares, est la plus grande d’Europe et traite en temps normal 60% des eaux usées de l’agglomération parisienne. Elle n’en traite plus que 40% environ depuis l’incident.

Le communiqué de l’association Robin des Bois

EAUX USÉES : PARIS LAVE PLUS SALE
9 juil. 2019

« L’incendie survenu le 3 juillet 2019 dans la STEP (Station d’Epuration des eaux usées) d’Achères au niveau des cuves de stockage de chlorure de fer est le 11ème accident sur site depuis le 10 avril 2017.

Achères est la plus grande station d’épuration d’Europe et aussi la plus accidentogène. Les incendies, fuites et rejets de méthane se succèdent.

En 2018, la station d’épuration d’Achères a subi 4 mises en demeure du Préfet pour non conformités à la réglementation, notamment pour le manque de contrôle des tuyauteries et soudures du site.

Ces mises en demeure ne sont pas toujours suivies d’effets comme en témoigne l’astreinte pécuniaire qui a été prononcée par le Préfet des Yvelines fin janvier 2019.

En fonctionnement normal, les eaux partiellement assainies sont rejetées dans la Seine. L’indisponibilité transitoire de la STEP arrive au plus mauvais moment.

La Seine est en période d’étiage et les égouts de l’ouest parisien reçoivent cet été de lourdes charges de poussières de plomb consécutives à l’incendie de Notre-Dame de Paris. Achères en est le réceptacle principal. Le fonctionnement dégradé d’Achères entraîne le rejet d’eaux brutes dans la Seine. Des milliers de poissons flottent aujourd’hui les nageoires en l’air.
La STEP d’Achères est à 20 km en aval de Paris.

Elle est exploitée par le SIAAP (Syndicat Interdépartemental pour l’Assainissement de l’Agglomération Parisienne). Elle traite 1,5 million de m3 d’eaux usées par jour provenant de 5 millions d’habitants de Paris, de Seine-Saint-Denis, des Yvelines, des Hauts-de-Seine et du Val-d’Oise (300 litres par jour par habitant).

Le siège du SIAAP est établi à Paris dans le 12ème arrondissement. Le conseil d’administration du SIAAP est composé de 33 conseillers départementaux, 12 issus de la ville de Paris, 7 de chaque département adhérent (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne).
La station d’épuration d’Achères est une usine Seveso seuil haut.

43 ans après l’accident technologique survenu dans une filiale d’Hoffmann-Laroche à Seveso dans le nord de l’Italie (12 juillet 1976), ce nouvel incendie chloré démontre une fois de plus qu’en Île-de-France et en France les MMR (Mesures de Maîtrise des Risques) sont insuffisantes ou anéanties par les négligences dans les usines ou entrepôts qui mettent en œuvre ou stockent des matières dangereuses. »

Lire aussi :

 La Région Île-de-France aux côtés des collectivités pour
restaurer la biodiversité

http://www.datapressepremium.com/rmdiff/2005659/diff_2024569100719182411.pdf

 Le SIAAP essaime son modèle : une usine de fabrication d’alarmes incendie prend feu à Crolles :

https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/une-usine-de-fabrication-d-alarmes-incendie-prend-feu-a-crolles-1562791350

Marc Laimé - eauxglacees.com