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Provisions pour renouvellement : l’éternel retour

19 avril 2019

par Marc Laimé - eauxglacees.com

La question lancinante des provisions non consommées en fin de contrat resurgit sans cesse au fil de l’actualité, comme en témoigne, entre mille et un exemples, le rapprochement ci-après entre un avis du Rapport public thématique de la Cour des comptes en 2003, et un extrait d’un récent rapport de la CRC Ile-de-France dédié à la gestion haute en couleurs de la Compagnie parisienne de chauffage urbain (CPCU). Ce dernier rapport souligne l’importance cruciale des normes comptables internationales mobilisées par les entreprises concessionnaires.



« Dans son rapport public thématique de 2003 sur la gestion des services publics d’eau et d’assainissement, la Cour des comptes évoquait « la notion introduite par les délégataires de garantie de renouvellement qui ne correspondait à aucune disposition fiscale ou comptable expresse, à la différence de la provision pour renouvellement.

Introduite unilatéralement par les grands distributeurs d’eau, sans avenant au contrat de délégation, elle se présentait comme une prime d’assurance en contrepartie de laquelle le délégataire s’engageait à réaliser les travaux nécessaires à la continuité et au bon fonctionnement du service public. Elle visait à prémunir contre les conséquences des aléas, non à les prévenir.

Par rapport à la provision, destinée à couvrir une charge prévisible, la garantie visait à couvrir un risque de travaux qui ne se réaliserait pas nécessairement. Le montant non utilisé en fin de contrat avait vocation à revenir au délégataire, sauf stipulations contractuelles contraires. »

La provision pour risques ainsi constituée n’apparaît pas très différente d’une provision pour garantie de réparation, préfinancée, non par une prime versée par le concédant, mais par le tarif facturé à l’abonné.

Dans un arrêt de 2014 (*), il a été jugé qu’en l’absence de disposition dans le contrat prévoyant la rétrocession à l’autorité délégante des sommes constituées au titre de provisions, le délégataire peut en conserver le bénéfice.

Dès lors, une stipulation contractuelle quant au devenir du reliquat de la provision pour risques de réparation permettrait de sécuriser les intérêts des abonnés, financeurs dudit reliquat. »

(*) CAA Nantes 31 oct. 2014, Société CEP A Port Guillaume.

6.3 Un retraitement complexe de la provision pour renouvellement des retours d’eau

« (…) L’interprétation IFRIC 12 dédiée aux accords de concessions de services distingue, pour les biens de retour concédés comptabilisés selon les normes IFRS, les dépenses de renouvellement améliorant, comptabilisées en actif incorporel, et les dépenses de renouvellement à l’identique, qui doivent être comptabilisées en charges.

Dans ce cadre, le renouvellement améliorant est défini comme des travaux qui ne relèvent pas de la simple maintenance mais qui donnent lieu à une rémunération contractuellement reconnue se traduisant soit par une augmentation de volumes, soit par une augmentation de tarif, soit par une augmentation de la durée initiale du contrat.

A l’inverse, le renouvellement à l’identique (non améliorant) ne fait que maintenir l’infrastructure dans son ensemble en état normal de fonctionnement entre le début et la fin du contrat. Il s’agit ainsi de renouvellement à fonction identique.

Un renouvellement des canalisations de retour d’eau peut être considéré comme non améliorant au sens de l’interprétation IFRS 12 et être considéré comme un investissement de modernisation au sens du traité de concession, éligible à une indemnité de fin de concession.

Il en est ainsi des travaux de renouvellement des retours d’eau, qui utilisent un standard considéré comme nouveau (recours au polypropylène et à une couverture du caniveau par une dalle coulée.).

L’instruction (smart policy) n° 7 du groupe Engie précise ainsi : « Dans certains contrats de concession il existe une clause contractuelle garantissant le paiement au concessionnaire par la collectivité d’une indemnité lors du retour au concédant en fin de contrat des biens de la concession, même si le renouvellement de ces biens a été considéré comme du renouvellement à l’identique en normes IFRS. Cette indemnité peut correspondre à une valeur nette comptable de fin de contrat en normes locales ou à une valeur résiduelle calculée selon des règles fixées contractuellement. Il convient, dans ce cas, s’il est probable que cette clause joue effectivement, de considérer le montant de l’indemnité de fin de contrat comme une subvention venant minorer le cout prévisionnel des dépenses de renouvellement de l’infrastructure. »

Par conséquent, les travaux de renouvellement des canalisations de retour d’eau sont comptabilisés en charge dans les comptes consolidés pour la part non indemnisable des travaux, et en créance sur concédant pour la part indemnisable, soit encore pour le montant de l’indemnité de fin de concession.

Dans les comptes sociaux, ces travaux sont comptabilisés en immobilisations amorties sur 30 ans.

La description du traitement comptable des dépenses de renouvellement attachées à la concession dans les comptes consolidés, qui distingue implicitement les dépenses d’amélioration modernisantes et non modernisantes demeure perfectible. »

Source : Rapport d’observations définitives et ses réponses. Compagnie parisienne de chauffage urbain (CPCU). Cahier n° 2 Vérification des comptes. Exercices 2012 et suivants. CRC Ile-de-France, 18 octobre 2018.

Marc Laimé - eauxglacees.com