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Une nouvelle loi GEMAPI à l’arraché ?

1er novembre 2017

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Dans le cadre d’une niche parlementaire, le député Modem Marc Fesneau et plusieurs de ses collègues, vont tenter, in extremis, "d’aménager" la Gemapi, en fait de repousser les délais de sa mise en oeuvre concrète et de remettre dans la danse les départements qui le souhaiteraient, par le biais d’une proposition de loi déposée à l’Assemblée le 17 octobre, et qui sera examinée le 30 novembre prochain. Nouveau témoignage, si besoin était, de l’accident industriel en cours, que nous n’avons cessé de dénoncer depuis l’origine...



ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 octobre 2017.

PROPOSITION DE LOI, relative à l’exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques
et de la prévention des inondations, (Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Marc FESNEAU

et les membres du groupe Modem et apparentés,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMAPI) est aujourd’hui une compétence partagée : toutes les collectivités territoriales sont légitimes à mener des actions en ce domaine. À compter du 1er janvier 2018, par l’effet de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (loi MAPTAM), l’exercice de cette compétence sera confié à titre exclusif et obligatoire aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (communautés de communes, communautés d’agglomération, communautés urbaines et métropoles).

Afin de faciliter cette transition, la loi MAPTAM permettait aux collectivités exerçant l’une des missions attachées à la compétence GEMAPI à la date du 28 janvier 2014 de poursuivre leurs engagements jusqu’au transfert de la compétence, et au plus tard jusqu’au 1er janvier 2020. Au-delà en revanche, la loi ne donne pas la possibilité aux collectivités qui le souhaiteraient de continuer à mener des actions en ce domaine, réservé aux seuls EPCI.

Ouvrir cette possibilité est une demande forte exprimée par plusieurs collectivités territoriales, en particulier les départements historiquement impliqués dans des actions de prévention des inondations et des risques de submersion marine.

La proposition de loi entend ouvrir cette faculté.

Elle autorise ainsi les départements assurant une ou plusieurs des missions attachées à la compétence GEMAPI de poursuivre leurs engagements en la matière, pour ceux qui le souhaitent, au-delà du 1er janvier 2020 (article 1er). Elle permet aux départements qui auraient commencé à conduire des actions dans le domaine de la GEMAPI après la date de publication de la loi MAPTAM et avant le 1er janvier 2018 de bénéficier, eux aussi, de cette faculté. L’article 1er permet également de réaménager le calendrier de mise en exercice plein de la compétence GEMAPI sans remettre en cause sa trajectoire. À cet égard, la proposition de loi a pour objet de ne permettre l’engagement de la responsabilité de l’EPCI à fiscalité propre compétent qu’au sujet de l’organisation de la compétence entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019. Elle permettra ainsi à chaque territoire de préparer au mieux le transfert de GEMAPI compte tenu de la complexité des organisations à imaginer.

Il est également proposé que le Gouvernement remette un rapport d’évaluation au Parlement concernant les conséquences du transfert de la compétence GEMAPI pour la gestion des fleuves. Ce rapport devra notamment étudier les évolutions institutionnelles et financières possibles de cette gestion (article 2). Il apparaît en effet que tant dans son financement que dans son aspect matériel il n’est pas envisageable que seuls les EPCI et leurs communes soient en charge de la gestion des fleuves. Il s’agit d’un enjeu de nature nationale dont la loi devrait tenir compte.

Par ailleurs, le V de l’article L. 213-12 du code de l’environnement donne la possibilité de transférer ou de déléguer tout ou partie de la compétence GEMAPI à des établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau (EPAGE) et à des établissements publics territoriaux de bassin (EPTB). Il en résulte que les EPCI à fiscalité propre compétents en matière de GEMAPI peuvent transférer ou déléguer la totalité des quatre missions constitutives de la GEMAPI (telles qu’elles sont définies aux 1°, 2°, 5° et 8° du I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement) ou seulement certaines d’entre elles. Il n’est en revanche pas clairement possible d’interpréter le droit en vigueur comme permettant de transférer ou déléguer une partie seulement de l’une de ces quatre missions : chacune d’elles paraît indivisible.

La proposition de loi a pour objet d’autoriser explicitement cette « sécabilité interne », pour toutes les missions attachées à la compétence GEMAPI, afin d’en assouplir les modalités d’exercice. Elle introduit ainsi la possibilité de transférer ou de déléguer à un EPAGE ou à un EPTB une partie seulement des actions relevant de chacune des quatre missions de la GEMAPI. De même, elle étend cette possibilité de « sécabilité interne » en cas de transfert de la compétence GEMAPI à un syndicat mixte de droit commun (articles 3 et 4).

Enfin, la proposition de loi étend à la prévention des inondations les missions d’animation et de concertation prévues au 12° de l’article L. 211-7 du code de l’environnement (article 5), ainsi que l’assistance technique mise à disposition par les départements aux EPCI ne disposant pas des moyens techniques suffisants pour exercer leurs compétences (article 6). Cette extension de l’intervention des départements à l’ensemble des domaines constitutifs de la compétence GEMAPI, notamment la défense contre les inondations et contre la mer, permettrait à ces derniers de continuer à venir en aide aux EPCI, mais également de rester membres de syndicats mixtes ouverts compétents en matière de GEMAPI.

La proposition de loi permet d’associer par voie de consultation les parcs naturels régionaux à l’élaboration ou la révision de documents de planification et d’aménagement en ce qui concerne la gestion des milieux aquatiques et zones humides de leur territoire (article 7).

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

I. – Le I de l’article 59 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles est ainsi modifié :

1° La première phrase est ainsi modifiée :

a) Au début, les mots : « Les conseils généraux, les conseils régionaux, » sont remplacés par les mots : « Les départements, les régions, » ;

b) Les mots : « à la date de publication de la présente loi » sont supprimés.

2° Après la première phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Les départements qui assurent l’une de ces missions à la date du 1er janvier 2018 peuvent, s’ils le souhaitent, en poursuivre l’exercice au-delà du 1er janvier 2020. »

II. – Le premier alinéa du II du même article est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La responsabilité de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre compétent peut être engagée, jusqu’au 31 décembre 2019, uniquement en ce qui concerne l’organisation de la compétence à la suite de son transfert au 1er janvier 2018. »

Article 2

« Dans les six mois suivants l’entrée en vigueur de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport d’évaluation des conséquences pour la gestion des fleuves, du transfert de la gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre en vertu de l’article 56 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles. Ce rapport étudie notamment les évolutions institutionnelles et financières possibles de cette gestion. »

Article 3

L’article L. 5211-61 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, les mots : « de gestion de l’eau et des cours d’eau, » sont supprimés.

2° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou un établissement public territorial peut transférer, à un syndicat de communes ou un syndicat mixte, l’ensemble des missions relevant de cette compétence, telle que définie au I bis de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, ou certaines d’entre-elles, en totalité ou partiellement. Ce transfert total ou partiel peut être réalisé au profit d’un syndicat de communes ou d’un syndicat mixte sur tout ou partie du territoire de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, ou à plusieurs syndicats situés chacun sur des parties distinctes de son territoire ».

Article 4

Après le mot : « respectifs », la fin du V de l’article L. 213-12 du code de l’environnement est ainsi rédigée : « l’ensemble des missions relevant de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, définie au I bis de l’article L. 211-7 du présent code, ou certaines d’entre-elles, en totalité ou partiellement ».

Article 5

Au 12° du I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement les mots : « le domaine » sont remplacés par les mots : « les domaines de la prévention du risque d’inondation, ».

Article 6

Au premier alinéa de l’article L. 3232-1-1 du code général des collectivités territoriales, après le mot : « aquatiques » sont insérés les mots : « de la prévention du risque d’inondation, ».

Article 7

« Au VI de l’article L. 333-1 du code de l’environnement, après le mot : « eau » sont insérés les mots : « aux milieux aquatiques et zones humides, ».

Marc Laimé - eauxglacees.com