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Agences de l’eau et « emplois aidés »…

10 octobre 2017

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Alors que les Agences de l’eau et les Comités de bassin sont à feu et à sang, les prélèvements financiers décidés par le gouvernement dans le cadre du PLF 2018, qui vont les priver de près de 420 millions d’euros, soit 20 à 25% de leurs capacités d’intervention, menacent de mettre à bas tout un écosystème qui contribue, quelles que soient ses imperfections, à la poursuite des objectifs de reconquête de la qualité de toutes les masses d’eau, fixés par la Directive européenne sur l’eau (DCE) d’Octobre 2000.



Au-delà des apparences, au-delà d’un obscur débat technique et fiscal, au delà de l’affrontement entre Bercy et les Agences de l’eau, au delà des critiques légitimes, et elles sont nombreuses, qui peuvent être portées contre la « gouvernance » française de l’eau, c’est aujourd’hui tout un écosystème qui vacille.

Ainsi des Schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE), instruments de programmation créés par la loi sur l’eau de 1992, à l’échelle d’un sous-bassin versant, et qui sont censés adopter, au terme d’un travail de plusieurs années, des dispositions, opposables, de nature à permettre le retour à un « bon état » de toutes les masses d’eau, comme nous y engage et contraint la Directive-cadre européenne sur l’eau (DCE), d’octobre 2000. Nous en sommes très loin. L’objectif de reconquête, initialement fixé à 2015, a depuis lors été repoussé à 2021, puis 2027, et l’on sait que, même à cette date, il ne sera pas atteint, ce qui remet gravement en cause les politiques publiques conduites en la matière…

Analyse d’un observateur averti.

« Le jeu est devenu totalement pervers. Les Agences de l’eau poussent les SAGE à n’être qu’un outil d’application de la DCE, ce qui éloigne les autres acteurs.

Un très grand nombre de postes d’animation de contrats territoriaux ne tiennent que par la subvention de l’agence. Mais celle-ci doit justifier son activité, et rendre des comptes. Elle édicte dès lors des conditions d’attribution de subventions de plus en plus restrictives. Du coup les structures porteuses, par exemple les syndicats de rivière, se transforment peu ou prou en service externe de l’agence, à qui elles doivent obéir.

Mais comme l’agence a quand même besoin de dépenser son argent et de pouvoir valoriser des actions sur le terrain, elle finit par lâcher du lest, sur le tard, en abandonnant de fait ses exigences. Si la structure porteuse est intégrée à un syndicat fort, ça va, sinon, c’est la dépendance, comme le junkie est accro à son dealer autant qu’à la dope… »

Aucune statistique officielle n’est disponible. Mais l’on évoque jusqu’à 4000 postes de ce type, au total, subventionnés par le système des Agences de l’eau. Un véritable maquis correspondant de fait à de l’emploi dissimulé des Agences, dont le total finit par représenter plus du double des fonctionnaires et contractuels qu’elles emploient !

Ici, dès lors, le PLF 2018 va se traduire par un autre carnage « d’emplois aidés », dont la disparition programmée va sévèrement mettre à mal les politiques publiques de l’eau, dont l’efficience est déjà remise en cause par un grand nombre d’observateurs.

Dans un contexte où Les Echos de ce jour accusent la Gemapi d’attiser le ras-le-bol fiscal, la politique de l’eau va décidément être à la peine :

https://www.lesechos.fr/politique-societe/regions/030671491932-inondations-de-nombreux-contribuables-vont-devoir-sacquitter-de-la-taxe-gemapi-2121064.php#xtor=EPR-8-%5B18_heures%5D-20171010-%5BProv_popup_unknown_art1%5D-2047381

Marc Laimé - eauxglacees.com