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(6) Présidentielles 2017 : omniprésente agriculture

19 mars 2017

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Affichant un soutien unanime à la filière bio, à l’occasion de la présentation d’un Pacte le 8 février 2017, les candidats à la présidentielle partagent aussi le diagnostic d’évolutions nécessaires du modèle agricole, mais ne s’entendent guère sur les options à privilégier.



Certains considèrent que l’ensemble du monde agricole doit faire sa transition écologique, d’autres pensent qu’il ne faut pas opposer les différentes agricultures.

"Les agriculteurs français peuvent évoluer massivement vers le bio", martelait Philippe Murer, représentant de Marine Le Pen (FN), rappelant que l’agriculture biologique protège la terre, les hommes et la biodiversité.

Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) défend lui aussi le projet d’une transition de l’ensemble de l’agriculture et des systèmes alimentaires vers une agriculture paysanne et bio. "Le modèle agricole dominant ne contribue pas à l’intérêt général en creusant le déficit de la balance commerciale, en concentrant les aides publiques vers l’agriculture industrielle…", expliquait son représentant Laurent Levard.

Un diagnostic partagé par Corinne Lepage, représentant Emmanuel Macron (En marche) : "L’agriculture conventionnelle va assez mal et les importants soutiens publics n’ont résolu aucun problème, analysait-t-elle. Il faut replacer la question agricole au cœur des enjeux alimentaires et de santé. (…) Ceux qui n’auront pas pris le train de la nouvelle économie en marche sont condamnés à terme dans leur marché".

Yannick Jadot (EELV) soulignait qu’il était essentiel "d’aller vers une agriculture paysanne et écologique".

Face à ce diagnostic partagé, le syndicaliste agricole Guy Vasseur, représentant le candidat Les Républicains (LR), était bien seul à défendre le modèle agricole actuel : "Pour François Fillon, il n’est pas question d’opposer les différents types d’agriculture. Il faut de la diversité : des circuits longs, des exportations et des circuits courts, du local".

Haro sur les OGM et les pesticides

Le candidat PS défendait l’interdiction immédiate des pesticides dangereux, des perturbateurs endocriniens et de l’importation des produits en contenant, afin d’appliquer le principe de précaution. Il est opposé à l’expérimentation des OGM en plein champ. Pour Yannick Jadot, "passer au zéro pesticide doit être notre objectif". Le candidat EELV est également opposé aux OGM. De son côté, Jean-Luc Mélenchon souhaite l’exclusion des OGM tandis que le Front national les juge "sans intérêts et dangereux", les assimilant à des plantes "Round up ready".

Divergences

Les intervenants divergeaient sur la cause du mal. Tandis que les représentants du Front national, de la France insoumise et des Républicains pointaient du doigt la politique européenne, d’autres dénoncaient au contraire le modèle agricole français : "Si l’Europe était plus productiviste que la France, ça se saurait ! C’est le modèle français qu’on a développé en Europe", soulignait Yannick Jadot.

Pour Philippe Martin, représentant Benoît Hamon (PS), "il ne faut pas réécrire l’histoire ! C’est la politique des chambres d’agriculture, des organisations professionnelles qui a conduit à la situation actuelle". Et d’interpeller Guy Vasseur sur les pratiques de certains agriculteurs qui plantent de la luzerne sans jamais la récolter pour "pomper les aides à la conversion bio".

Quel avenir ?

Les représentants des candidats livraient aussi leur vision de l’avenir, notamment pour l’agriculture biologique. Philippe Martin défendait une PAC plus verte et l’idée d’un débat national sur la transition vers une agriculture et une alimentation durable, sur le modèle du débat national de transition énergétique. Le représentant du candidat socialiste estimait qu’il faut "maintenir les fondamentaux du bio" dans le cadre du règlement européen et faire attention "aux grands ensembles économiques qui s’accaparent le marché dans une logique de productivisme et de consumérisme".

La France insoumise projette une loi pour accompagner la transition du monde agricole et tendre vers l’autonomie des exploitations en termes d’énergie, de protéines… L’objectif est de créer 300 000 emplois. Cela passe par la garantie de prix stables et rémunérateurs, le rejet de l’alignement sur les cours mondiaux, la mise en place de plateformes logistiques et le développement de projets collectifs d’acquisition du foncier portés par les collectivités et les citoyens.

Si Guy Vasseur affirmait que le premier combat de François Fillon sera de maintenir le budget de la PAC, voire de le renforcer, Yannick Jadot proposait d’allouer la moitié des fonds de la PAC à l’agriculture biologique (conversion et structuration des filières).

Le Front national prônait lui des aides à la conversion, la baisse des charges pour les exploitations bio et l’instauration d’une TVA à 0% pour donner un signal prix aux consommateurs.

Tous entendaient s’appuyer sur la restauration collective pour accompagner le développement de l’agriculture biologique et permettre l’accessibilité des produits bio au plus grand nombre.

Pas d’aides spécifiques à la bio pour Emmanuel Macron, mais des paiements pour services écologiques à hauteur de 200 M€ (PSE) afin de récompenser les bonnes pratiques agricoles et "accompagner les agriculteurs en conversion". Selon Corinne Lepage, les mesures en faveur des entreprises (allègements de charge, droit au chômage pour tous, contrats cycliques) promises par le candidat "En marche" devraient également bénéficier aux agriculteurs en transition.

Marc Laimé - eauxglacees.com