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Ce qui doit surprendre ce n’est pas que les financiers volent, par André Morizet *

29 décembre 2016

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Dans les années 1905 à 1910 une violente bataille politique opposa les élus du conseil municipal de Paris à l’approche de la fin de la régie intéressée qu’avaient du concéder Hausmann et Belgrand, sous le troisième empire, à la Générale des eaux. L’article que publia André Morizet dans l’Humanité (1) du dimanche 26 décembre 1910 est passé à la postérité comme l’attaque publique la plus violente jamais publiée contre la Générale des eaux. Un siècle plus tard il résonne comme jamais.



“ (…) Les hommes de la Compagnie générale des eaux sont des financiers d’envergure. Si c’est pour les Parisiens une consolation d’être rançonnés par des chefs de grandes bandes, ils ont lieu de se consoler. Ils sont du reste logés à la même enseigne que les habitants de Lyon, Nantes, Nice, Rouen, Arcachon, Rennes, Arras, Boulogne, Lisieux, Ancenis, Toulon, Villefranche, Morlaix, sur qui la Compagnie générale prélève sa dime. Ils sont à la même enseigne que les Italiens de Venise, La Spézia, Vérone, Bergame et Naples, que les Portugais de Porto, que les Suisses de Lausanne, et que les Constantinopolitains (sic).sur qui la Compagnie générale des eaux pour l’étranger, filiale de la nôtre, étend sa domination.

Ce qui doit surprendre, ce n’est pas que les financiers volent. Ils font leur métier. Ce n’est pas non plus que les fonctionnaires les servent. Ce qui doit surprendre, c’est que les peuples qui paient consentent à se laisser voler éternellement, c’est qu’ils se laissent gruger par des conseils municipâux comme le nôtre et par des préfets comme de Selves en des flibusteries semblables à l’opération aquatique qui s’accomplit en ce moment.”

(*) Fils d’un notaire, conseiller municipal de Reims, et d’une mère riche héritière de l’industrie du champagne, André Morizet, journaliste socialiste et ancien bibliothécaire au ministère de la justice, se battit bec et ongles, sans succès, pour chasser la Compagnie générale des eaux de Paris en 1910, quand le contrat léonin qu’avaient du lui concéder Hausmann et Belgrand arrivait à expiration.

Quelques élus radicaux et socialistes félons votèrent en effet avec la droite pour proroger le contrat de la Générale à Paris…

Son petit-fils, François Kosciusko-Morizet, ingénieur des Ponts et Chaussées et maire UMP de Sèvres, récemment décédé, et son arrière petite-fille Nathalie Kosciusko-Morizet, n’ont pas, on le sait, poursuivi le même combat…

L’actuel directeur de cabinet de NKM n’est autre que Pascal Berteaud, ancien directeur de l’eau au ministère de l’Ecologie de 2000 à 2008, puis, déjà, dircab de NKM alors secrétaire d’état à l’Ecologie de 2010 à 2012.

(1) Rappelons que l’Humanité de Jaurès était alors l’organe de la SFIO.

Marc Laimé - eauxglacees.com