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Aperçus sur l’histoire de l’Hydraulique Grenobloise au XXème siècle, par Charles Obled

22 septembre 2016

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Un universitaire spécialiste de l’hydraulique, présentera le 26 septembre prochain à Grenoble une communication qui retracera plus d’un siècle de développement d’une science trop méconnue dans un contexte regional très particulier qui a favorisé son émergence.



« On va tenter dans cette communication de « balayer » l’histoire de Grenoble et de la communauté hydraulique à travers ses différents acteurs : les industriels, l’université et la recherche, les bureaux d’études publics ou privés, et les organismes professionnels ou scientifiques qui les relient (comme la Sté Hydrotechnique de France), en se focalisant sur les activités et contributions plus spécifiquement grenobloises.

On passera rapidement sur l’époque des pionniers pour aborder le XXème siècle et la belle époque (1900-1914), avec le boom des aménagements au fil de l’eau, la spécialisation des industriels et l’avènement de l’Université. La guerre 1914-18 verra l’hydraulique tourner à plein et contribuer à l’effort de guerre.

Cette prise de conscience nationale se traduira par la législation de 1919 (portée notamment par le sénateur de l’Isère Léon Perrier), et la construction de grands barrages réservoirs (Sautet, Chambon).

La SHF crée en 1922 un laboratoire, à Beauvert aux portes de Grenoble pour des études sur les machines hydrauliques, l’écoulement dans les canaux, les pertes de charge, les mesures de débit. (station de tarage des moulinets hydrométriques). Il sera complété en 1927, par un service d’essais et de contrôle permanent des installations hydrauliques.

Le 3ème congrès de la Houille Blanche en 1925, est une sorte d’apothéose pour la ville. Il conduira notamment à la création en 1929 de l’Ecole des Ingénieurs Hydrauliciens . On verra aussi la création par l’ingénieur Garembois du Laboratoire Dauphinois d’Hydraulique, au sein des établissements Neyrpic et à côté du laboratoire de la SHF.

La crise de 1929 va ralentir cette croissance, même si la période voit, encore sous l’impulsion de L. Périer, la création de la CNR (Compagnie nationale du Rhône ).

Durant la seconde guerre, la France est cette fois occupée et tout le monde fait profil bas. Le doyen de l’Institut Polytechnique de Grenoble, qui avait soutenu la création de l’EIH, sera assassiné par la Gestapo en 1943 pour son activité de résistant.

Il faudra attendre 1944 pour que l’Hydraulique relève la tête : l’armée américaine, inquiète des conditions de franchissement du Rhin, commandite une étude sur modèle réduit à ses services, qui réclament un an pour la faire ! En récupérant un modèle conçu pour les crues de l’Isère, le Laboratoire Dauphinois d’Hydraulique la réalise en 4 mois… avec les félicitations des américains … !

La Libération voit la nationalisation de la production électrique et du transport. Cela induit une forte relance des aménagements hydroélectriques et une réorganisation de leur exploitation.

C’est ainsi que l’on voit s’installer à Grenoble la Division Technique Générale de la Production Hydraulique qui comptera bientôt une centaine de personnes pour l’appui technique et scientifique aux groupes de production hydraulique (GRPH).

La perspective d’utiliser l’énergie marémotrice suscitera la construction de la plaque de Coriolis et du Laboratoire d’études des Marées, conjointement entre l’Université, EdF, et Neyrpic, en vue d’étudier l’aménagement de la Rance et plus largement de la baie du Mont St Michel et des îles Chausey.

C’est à ce moment que l’on voit se créer, d’abord au sein de Neyrpic, la SOGREAH, en partie dans la ligne du LDH pour ce qui concerne les aménagements.

Au début des années 60, la fin des grands aménagements se profile, l’hydraulique grenobloise marque le pas, et nécessite de grandes et douloureuses réorganisations.

Depuis la Libération, les politiques et la recherche grenobloise misent plutôt sur l’électronique et le nucléaire. Avec la crise pétrolière de 1973, ce sera évidemment un boom pour cette dernière. Mais on va voir quand même se développer une forte demande à l’export (depuis le Brésil jusqu’à la Chine avec les 3 Gorges) ainsi qu’une demande nouvelle sur les STEP (Stations de Transfert d’Energie par Pompage, à Revin, La Coche, le Cheylas, Grandmaison).

Quand en 1962 Alsthom absorbe Neyrpic et Sogreah elle crée un département de recherche en Techniques des fluides qui deviendra Neyrtec puis le CERG (Centre d’essai et de Recherche Grenoblois), qui devient lui-même indépendant en 2007.

La Sogreah est elle indépendante depuis 1998.

Aujourd’hui la communauté Hydraulique grenobloise dispose de grands équipements, tant publics que privés, comme la nouvelle plateforme de Coriolis ou le bassin à houle, les installations du CERG ou du Cremhyg pour les machines, les plates-formes de modèles physiques de SOGREAH ou de l’IRSTEA (torrentiel).

Autour d’elles, des équipes techniques mais aussi les laboratoires de recherche (LEGI, LTHE, IRSTEA), et bien sûr la formation, avec l’ENSE3 (Energie, Eau Environnement, issue de la fusion de l’ENSIEG et de l’ENSHMG), font que la communauté hydraulique est bien vivante et poursuit son rayonnement… »

par Charles Obled, professeur honoraire à Grenoble INP- ENSEE3- LTHE

Lundi 26 septembre 2016 à 13h00 : séminaire de Charles OBLED (Grenoble INP- ENSEE3- LTHE), salle de réunion du 1er étage, OSUG-B

Marc Laimé - eauxglacees.com