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Mont Saint-Michel : les calèches de Veolia, les moules de la colère, le périmètre de trop et les ascenseurs à poisson de Ségolène Royal (avant les feux de cheminée)

8 décembre 2014

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Un instantané de l’époque. Comme un exercice à blanc du pool d’agences de com internationales qui vont gaspiller des milliasses d’euros pour la « COP 21 », horizon indépassable de l’année 2015. Vous avez aimé les portiques, les bonnets, l’écologie non punitive de la croissance verte des territoires ? Accrochez-vous à la rambarde, on fonce force 10 vers le pire du pire et voilà à quoi ça va ressembler toute l’année 2015, le grand dessin animé du millénaire qui vient, storytellisé par l’armée des "show runners", idiots utiles de l’instrumentalisation du « Change » à toutes les sauces politiciennes…



D’abord les calèches… Là, Veolia s’est surpassé. Le 1er juillet dernier l’avocat de l’honorable Norbert Coulon, éleveur de son état à Saint-Malo-de-la-Lande annonçait, ravi, que la justice venait de condamner une filiale de Veolia à verser 1 million cent mille euros à son client.

Montjoie Saint Denis ! Notre monsieur Coulon refusait depuis un an de prêter ses chevaux au transport des visiteurs à destination du site, accusant Transdev, filiale de Veolia et de la Caisse des Dépôts, d’employer des cochers incompétents, et de mettre ainsi en péril la santé de ses animaux.

On veut bien le croire. Mais qu’est-ce que Veolia et la Caisse des Dépôts ont été se fourrer dans une affaire de diligence ?

En fait tout avait commencé bien longtemps avant avec la construction d’une digue, interdite aux voitures, digue qui allait permettre, en faisant disparaître l’épouvantable parking sur lequel se vautraient des millions de diesels à décalcomanies à deux pas de l’Archange, de remettre le Mont Saint-Michel à l’eau (quand la marée monte au galop comme cela s’apprend désormais en Chine, même si cela ne leur sera d’aucun secours quand les Trois Gorges vont s’effondrer), et donc de créer un service de calèches, qui acheminerait les touristes depuis le parking et l’arrêt de bus renvoyés loin dans les terres, jusqu’au pied du divin édifice et de l’omelette de la Mère Poulard.

On ne peut depuis lors accéder au Mont qu’à pied ou en navette auto ou hippomobile. Le pont-passerelle destiné à remplacer la digue-route menant au Mont-Saint-Michel étant devenu accessible aux piétons à partir du 22 juillet, avant d’être ouvert aux véhicules en septembre.

Evidemment l’édile local (UMP), et ci-devant hôtelier, accroché comme une moule (on y reviendra) à la tête du syndicat mixte en charge de la grandiose opération n’avait rien trouvé de mieux que de céder aux accords envoûtants des cornes de brume de Veolia et de la CDC, illustrant ici une nouvelle facette de l’exception française que tout le monde nous envie, surtout les Chinois, qui ont colonisé par milliards de milliers les escaliers revêches de notre abbaye, et prison de Blanqui, faudrait pas l’oublier non plus.

Ce qui devait arriver arriva. Veolia et la CDC poursuivaient l’éleveur pour rupture de contrat.

Mais le tribunal de commerce de Paris donnait raison à l’éleveur, indiquait son avocat, Patrick de Fontbressin. Transdev était condamné à lui verser 1 million d’euros au titre de la résiliation du contrat, 86.000 euros au titre des factures impayées et 10.000 euros pour procédure abusive, précisait l’avocat.

Les trois juges ont multiplié le montant annuel du contrat par le nombre d’années qui restaient à courir pour calculer l’amende, expliquait-il. « Mon client est ravi, il était complètement étranglé par Veolia qui ne le payait plus depuis octobre », ajoutait-il enfin.

A l’époque, dans un SMS adressé à l’AFP, Transdev se refusait à tout commentaire sur ces informations, annonçant simplement son intention de faire appel.

Le service d’accès au Mont-Saint-Michel en calèches n’avait repris progressivement que peu avant, en avril, après plus de quatre mois d’interruption. Transdev avait décidé d’acheter ses propres chevaux et d’embaucher un soigneur chargé de remettre en place le service.

Mais en août, le Syndicat National des Cochers, dont on espère qu’il a échappé à l’oeil inquisiteur de M. Macron, avait mis en doute la sûreté des calèches car un seul des 23 cochers de Transdev avait réussi des tests officiels, selon le syndicat.

(Car il appert que le Mont est considéré comme Zone touristique internationale par ledit projet de loi Macron...)

Il est vrai que tout ceci se déroulait avant le lancement de « l’encapsulage » de Messieurs Frérot et surtout Franqui, qui vont sous-louer les personnels surnuméraires de Veolia Eau à des marchands de kebabs, pourvu qu’ils soient qataris, et tous autres capitaines d’industrie qui n’auraient pas encore été étranglés par les charges honnies de Monsieur Gattaz, lumineuse avancée sociale contre laquelle se mobilise à raison une improbable intersyndicale de la Générale des eaux (et des calèches hippomobiles ce qui rappellera le bon temps de la rue d’Anjou, et du baron Haussmann).

Moutons de pré-salé

Les moules de la colère

Et ce n’est pas tout. Loin s’en faut ! Comme nous l’apprenait notre excellente consoeur Martine Valo dans le Monde le 29 novembre dernier, « à l’ombre du Mont-Saint-Michel, il n’y a pas que des touristes, il y a aussi des huîtres et des quantités de moules. A marée basse, les pas crissent sur des milliers de tonnes de coquilles trop petites pour être commercialisées que les mytiliculteurs indélicats épandent régulièrement sur l’estran. La baie frôle l’asphyxie. Ses eaux ne charrient pas assez de nourriture pour permettre d’installer la moindre concession supplémentaire.

Par ailleurs, ses paysages – inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1979 –, doivent être prochainement régis par des règles de protection renforcées. Le 24 novembre, craignant des contraintes supplémentaires, 70 élus municipaux ont manifesté leur mécontentement, ceints de leur écharpe. Y a-t-il un rapport entre ces deux éléments apparemment dissociès ? ».

A l’évidence oui, comme l’établira sans conteste l’enquête, iodée, de notre vaillante consoeur…

Le périmètre de trop

Il appert donc que près de 70 élus d’Ille-et-Vilaine et de la Manche étaient rassemblés au Mont-Saint-Michel le lundi 24 novembre dernier pour protester contre le projet d’élargissement du périmètre de protection autour de la Merveille.

Maires et parlementaires bretons et normands manifestaient leur opposition à de nouvelles mesures par trop contraignantes, car leurs « territoires » sont concernés par l’extension des périmètres de protection du Mont-Saint-Michel et de sa baie, classés depuis 1979 au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Or, en 2011, l’organisation a déjà a dénoncé en particulier l’implantation d’éoliennes terrestres dans les champs visuels depuis et vers le Mont.

L’Etat français a dès lors été incité à mettre en place une zone d’exclusion et continue aujourd’hui l’effort de protection.

Au titre du site classé, et au titre des abords du monument historique qu’est le Mont Saint-Michel, la préfète de la Manche Mme Danièle Polvé-Montmasson coordonne ce projet de protection renforcée, dans un rayon de 12 kilomètres.

Ce nouveau périmètre englobe 115 communes de l’Ille-et-Vilaine et de la Manche. L’enquête publique est prévue avant l’été 2015.
Sans attendre, Guénhaël Huet, député (UMP) de la Manche (Avranches), affirme à propos des nouveaux périmètres : « Avec leurs contraintes en matière d’urbanisme, ils vont geler tout développement de la région. Ces périmètres vont jusqu’à Mortain, cela n’a aucun sens, autant vitrifier la région. Je remarque que RTE et ses pylônes de ligne très haute tension n’ont pas été soumis aux mêmes contraintes. Il faut que les élus soient vigilants, offensifs”.

Fort heureusement, avant que les bagadous UMPéistes ne virent aux zadistes djihadistes, ils allaient avoir l’occasion d’exposer leur point de vue à la ministre de l’écologie (non punitive), dont la venue était annoncée le jeudi 4 décembre au Mont-Saint-Michel (et à BFM TV).

Un autre barrage est possible

Un mois après le drame de Sivens, la ministre annonçait du coup le 4 décembre qu’il était possible "d’étudier des solutions alternatives" au projet de destruction de deux barrages hydroélectriques sur la Sélune, près du Mont-Saint-Michel, s’inquiétant du "rapport qualité-prix" de ce projet.

Suscitant immédiatement un... tir de barrage des partisans de l’arasement.

« Il y a de quoi se poser des questions sur des solutions alternatives », soulignait-elle lors d’un point de presse en rappelant que le projet d’arasement des barrages de Vezins (36 mètres de haut pour 278 de long) et de La Roche-qui-Boit (16 mètres de haut pour 125 de long), situés à une trentaine de kilomètres du Mont-Saint-Michel, site classé par l’Unesco, avait deux objectifs : améliorer la qualité de l’eau de la Sélune et permettre le passage des poissons migrateurs.

Mme Royal s’exprimait à l’issue d’une réunion avec les élus des villes concernées, sur le site du centre de loisirs d’Isigny-le-Buat, qui pourrait disparaître, son activité économique étant liée au lac formé par le barrage. Une centaine d’opposants à l’arasement, que Mme Royal a salués, étaient présents.

La ministre, s’interrogeant sur le « paradoxe » « de supprimer des ouvrages qui produisent de « l’énergie renouvelable » , décidait illico de demander « des expertises sur le potentiel de production d’hydroélectricité » de ces barrages.

Ils datent de 1916 et 1926, et assuraient, en 2012, 0,04% de la production électrique française.

Le projet de destruction fait l’objet d’un « avis favorable » de la commission d’enquête publique mais il est contesté par plusieurs parlementaires UMP locaux.

L’opération est par ailleurs rendue délicate en raison des 1,8 million de m3 de sédiments cumulés (en 2004), les barrages jouant le rôle de barrière à métaux lourds.

Mme Royal veut faire étudier les possibilités d’améliorer la qualité de l’eau sans détruire les ouvrages et des solutions pour permettre le passage des poissons, citant sur ce point les « pelles à poissons » ou les « ascenseurs à poissons ».

« Il faut que le rapport qualité-prix soit raisonnable. On ne met pas 53 millions d’euros pour faire passer les poissons », poursuivait la Ministre, soulignant que le coût du projet d’arasement était de 38 millions d’euros auxquels il faut rajouter 15 millions d’euros pour renaturaliser le site.

Sans compter le risque que les sédiments toxiques libérés par la destruction des barrages n’aillent polluer la baie du Mont-Saint-Michel. Et de pointer pour faire bonne mesure le risque d’inondations pour les communes limitrophes.

Un ministère embarrassé

Eaux glacées, constatant que l’un des deux experts expédiés à Sivens par Mme Royal avait, aussitôt rendu son rapport Tarnais, immédiatement été parachuté « sur zone » en Bretagne pour y produire, en trois semaines, le 87ème rapport d’analyse sur les algues vertes, a interrogé le ministère de l’Ecologie, lui demandant si, en application de la nouvelle « Loi-cadre sur l’écologie non punitive et la mobilisation des territoires pour la croissance verte apaisée et collaborative », qui doit achever d’être rédigée demain matin (en trois minutes et demi) au Comité national de l’eau, il était exact, comme nous l’ont rapporté plusieurs sources, qu’afin d’apporter une réponse apaisée à l’inquiétude des territoires, la ministre envisageait de mobiliser les calèches de Veolia afin de transporter à Sivens (en passant par le Poitou Charente), une partie du barrage de la Sélune, ce qui permettrait d’implanter, en prévision de l’impact du changement climatique dans le Sud-Ouest, la culture des moules perlières dans la vallée du Tescou. Ceci grâce une audacieuse intercession de M. Manuel Valls par devant la Commission européenne, après qu’il en ait conféré avec M. Xavier Beulin, et obtenu de haute lutte un dégrèvement de TVA pour l’achat de 300 tonnes d’avoine OGM au Turkmenistan.

Une audacieuse innovation qui permettra à la France de tenir son rang (même sans chapka), au Bourget en décembre 2015.

Comme le dirait BFM-TV nous ne manquerons pas de vous informer des suites quand le ministère aura « retourné notre appel »

NOTE :

Moins de deux heures après la parution de cet article, les services de M. Philippe Martin, président du Conseil général du Gers, nous ont informé qu’ils souhaitaient nous associer à un comité de pilotage d’un projet de création d’un Atelier national de réinsertion des ZAD, dans lesquels une première promotion de zadistes repentis, après avoir été sélectionnés par la DCRI, se verraient offrir, dans le cadre d’un programme financé par la BPI, d’être associés à la création de la Coopérative du chanvre et de la moule perlière, premier projet retenu par le Comité d’investissement du Fonds d’intervention français, présidé par M. Arnaud Montebourg. Il s’agirait, d’après des informations que nous avons pu recueillir en dépit de l’heure tardive auprès de la fille de M. Bernard Arnault, d’un ambitieux partenariat en cours de finalisation avec le Fonds souverain qatari, qui doit recevoir la semaine prochaine la visite d’un pool d’investisseurs conduits par M. Macron. Nous nous efforcerons de suivre cette actualité en dépit du forcing effréné du quotidien l’Opinion de M. Beytout, qui semble avoir fait pression sur nos sources, les menaçant de ne pas les inviter à Arachon l’été prochain, où M. Beytout possède une résidence, à l’égal de M. Antoine Seillère, résidences dans lesquelles ces deux personnalités s’honorent de recevoir l’ancien président de la République, depuis peu candidat à une (improbable) réélection.

Marc Laimé - eauxglacees.com