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Protection des captages : bientôt une nouvelle compétence obligatoire des communes ?

22 août 2014

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Le ministère de l’Agriculture vient de rendre public le 19 août 2014, le résumé (seulement le résumé) d’un rapport qui préconise de créer une nouvelle compétence (obligatoire !) des communes, qui devront endosser la responsabilité juridique de la protection des captages d’eau potable. C’est l’acte 2 de la GEMAPI, ourdi clandestinement par les mêmes (le lobby de l’eau), et qui, au vu de ses implications colossales, ne va évidemment faire l’objet d’aucun débat démocratique. Le démantèlement programmé des politiques publiques de l’eau continue à avancer à grands pas.

ACTUALISATION 26 août : le rapport a été mis en ligne le 25 août sur le site du MINAGRI, voir fin d’article.



Le Ministère de l’Agriculture a mis en ligne le 19 août 2014, au plein cœur de l’été, dans la rubrique « Publications » de son site internet, sous-rubrique « Rapports », un texte explosif, dont le Minagri n’offre toutefois à lire qu’un résumé, qui en dit déjà (trop ?) long, ceci expliquant sans doute cela, et qui dévoile l’Acte 2 de la saga GEMAPI, dont nous tenons la chronique haletante depuis près d’un an…

(Ou l’on vérifie à nouveau que la politique de l’eau en France se décide au ministère de l’Agriculture, ce que l’on ne soulignera jamais assez...)

Nous nous souvenons des cris d’orfraie de Laurent Roy, directeur de l’eau à la DEB, affirmant ne pas comprendre, au CNE, pourquoi d’aucuns (nous autres…) soupçonnions que dame GEMAPI celait d’épouvantables forfaits à venir.

Nous y sommes !

Après les inondations et les digues, cette fois c’est la protection des captages d’eau potable qui va être refourguée, en douce, aux communes, qui en porteront la responsabilité juridique !

L’intérêt majeur de cette annonce, enfin la publication du (jésuitique) résumé de l’étude sur le site du Minagri, c’est que cette fois le roi est nu !

Sept ans après le Grenelle 1, neuf ans après le Grenelle 2 et les grandes envolées lyriques sur les « captages prioritaires », la vérité s’impose : nada, que dalle, rien, le néant !

Du coup alerte rouge sur la DCE : on est sous l’eau, out of nowhere, et la domination de la FNSEA nous conduit dans le mur à vitesse grand V. Bon, on le savait, mais ce qui est savoureux, avec le « résumé » du Minagri, ce sont les « éléments de langage » de nos amis des CGAAER-CGEDD-IGAS, qui rament désespérément pour botter en touche.

Et pour botter en touche, là ça relève du Tournoi des Cinq nations ! On va refiler le bébé aux communes !

La moitié des presque 37 000 communes françaises, dans l’espace rural, sont dirigées par les agriculteurs, c’est sûr que M. le maire, agriculteur élu par des agriculteurs, il va faire mieux que l’Agence de l’eau pour protéger les captages !

Bon, les préfets et un futur « délégué interministériel » veilleront à voir ce qu’il y a moyen de moyenner ☺

Le « Rapport de mission interministérielle d’étude n° 13017 CGAAER, CGEDD, IGAS, « Pour une meilleure efficacité du dispositif de protection des aires de captages d’eau potable » a été bouclé en 6 mois, d’octobre 2013 à mars 2014, par un quarteron de hauts fonctionnaires ("Je vous ai compris"...), qui ont « relu toute la littérature mondiale » sur le sujet, avant que d’auditionner « une cinquantaine d’acteurs », éminents bien sur, surtout la FNSEA, l’APCA et la FP2E, qui a signé depuis belle lurette une « Convention » avec l’APCA, afin que les « opérateurs du service public de l’eau » (Veolia et Suez), puissent témoigner de leur incomparable talent pour « protéger les captages », entendre signer de nouvelles DSP avec les communes à qui on entend refiler le bébé, et qui n’ont, ni les moyens, ni les compétences, ne parlons pas de l’envie, de… « protéger les captages ».

Et voilà la nouvelle « croissance verte », non punitive et non délocalisable, bien sur, qui nous attend.

Après avoir payé depuis des décennies, via les redevances prélevées sur leur facture d’eau, d’innombrables plans bidons de « protection de la ressource » (PMPOA 1 et 2, Bretagne eau pure, MAET et leurs innombrables descendances), les usagers domestiques français vont se voir assigner une autre double peine : financer à nouveau, toujours via les redevances prélevées sur leurs factures, d’innombrables nouveaux plans, tout aussi bidons, que les collectivités vont gentiment sous-traiter à Veolia et Suez !

Après, quand cette pantalonnade aura achevé de faire péter les plombs à la DG Environnement, mesures récursoires obligent, ce sont les communes, et donc les usagers qui paieront les amendes (colossales...).

Silence radio abyssal du côté des partis, des syndicats, des ONG, des "écolos", seulement préoccupés dans la période par leur présence (sur la photo de l’opération de com) au "Sommet mondial sur le climat" qui se tiendra à Paris en décembre 2015, dont on sait au demeurant qu’il n’accouchera de rien...

Elle est pas belle la vie ? Bonne rentrée à toutes et à tous !

ACTUALISATION le 26 août 2014 :

Voir le Rapport mis en ligne le 25 août sur le site du MINAGRI.

Marc Laimé - eauxglacees.com