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FNE et le WWF s’écharpent sur l’hydroélectricité

21 mai 2013

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Seule la France est capable de mettre en scène sous forme de conflit de basse intensité pareilles querelles pichrocholines, publiques-privées, qui voient s’affronter à grandes rafales d’Exocets, seulement déchiffrables par les « professionnels de la profession » du petit monde de l’eau, d’augustes « figures » de ce tout petit univers, néanmoins porteuses d’intérêts considérables, ceux des grands marionnettistes qui jouent à loisir des rancoeurs inexpiables nées au fil d’une « militance », accouchée, au cas d’espèce, de la grande saga de la Loire, épopée fondatrice de la « militance de l’eau » en France.



Le WWF-France est partie prenante (très prenante), enfin sous l’espèce de l’un de ses représentants, Martin Arnould, d’une opération de lobbying organisée le 22 mai, par l’Union française de l’électricité, dans le cadre du « grand débat » sur la transition énergétique initié par le gouvernement, opération qui vise à promouvoir, au nom de la lutte contre l’effet de serre et la sacralisation des engagements du « Grenelle » une « hydroélectricité durable », dont les tenants s’efforcent depuis des années, Charte à l’appui, d’assurer une promotion qui ne recule devant rien, la preuve…

Etonnant du reste pour une ONG qui affirme désormais se désintéresser du champ clos des petits intérêts politiciens français…

Mais cela aura suffi à FNE, « opérateur » du ministère de l’Ecologie, seul interlocuteur à vrai dire du gouvernement en matière environnementale depuis sa consécration es qualité en janvier 2012 lors de la campagne de François Hollande, pour communiquer publiquement, par voie d’un communiqué de presse en date du 21 mai 2013 reproduit ci-après, tout le mal qu’il pense de « l’hydroélectricité durable » fomentée par le WWF, France Hydroélectricité, EDF, et surtout la Compagnie nationale du Rhône (CNR), filiale de Suez-Environnement, et tous autres suppôts du diable qui mettent gravement à mal la sacro-sainte « continuité écologique », dont les atteintes qu’elle subit, à elles seules, interdiront très bientôt à la France (si l’on en croît FNE duplice), de « remplir les objectifs de reconquête de la qualité des eaux » assignée par la sacro-sainte DCE !

Le communiqué de presse (assassin) du FNE, 21 mai 2013

On croit rêver !

Les deux figures de notre tragédie shakespearienne, bien connues de nos services, Bernard Rousseau, pilote du Pôle Eau de FNE, et Martin Arnould, grand spécialiste des fleuves et des rivières du WWF, se connaissent intimement depuis la grande bataille fondatrice de la Loire, qui aura durablement marqué la politique de l’eau française depuis le début des années 90.

Notation à l’intention de la génération 2.0. :

Le maréchal Bernard Rousseau, on l’imagine dans « Les Borgia », matinés de Guy Mollet : « à la réflexion, toutes choses bien considérées par ailleurs, peut-être faudrait-il imaginer de mettre sur place un groupe d’étude transitoire qui produirait un rapport d’étape qui permettrait au comité de pilotage de décider, après consultation des parties intéressées, de mettre sur pied un dispositif de concertation élargi qui aura pour mission… ». Et néanmoins assassin s’il le faut. Et de fait, parfois, souvent, il faut...

Sur ce terrain là, imbattable.

Sur les autres aussi, puisque notre homme siège dans toutes les instances de gestion de l’eau que la France a bien voulu créer (voir le Bottin…)

Martin Arnould, ce serait bien plutôt la Horde sauvage, « Take the money and run », matiné d’Attila (là où la horde est passée, l’herbe ne repousse plus…).

L’amusant étant que nos deux bretteurs siègent de concert dans de respectables enceintes du type Onema, Comité national de l’eau et tutti frutti, y défendant, âprement, les parts de marchés de leurs sponsors réciproques.

L’hilarant, au cas d’espèce, étant que dans cette affaire nos deux hommes ont le même sponsor, dont deux filiales n’ont manifestement pas la même vision…

Bernard Rousseau œuvre en effet, très consciencieusement, avec un talent inégalé, à reconduire, avec succès, la Convention au terme de laquelle Lyonnaise des eaux, filiale de Suez-Environnement, octroie chaque année 230 000 euros au FNE, afin que nos deux larrons promeuvent ensemble la « protection des captages », après que les mêmes aient fait financer sur fonds publics par l’Onema la reconversion expresse de Lyonnaise sur l’ingénierie environnementale du grand cycle.

La conférence de presse FNE-Lyonnaise du 23-05-13

Martin Arnould, héraut de « l’hydroélectricité durable », réussit quant à lui le miracle de réconcilier les ennemis mortels d’EDF et de la CNR, autre filiale de Suez-GDF, au plus grand profit des intérêts bien compris de ladite hydroélectricité, horizon indépassable de notre temps…

Or il appert que l’organisme de rattachement de notre héraut (le WWF), s’est distingué ces dernières années en pointant le fait que la non atteinte des objectifs de la DCE pourrait bien trouver sa source dans les graves défaillances françaises dans le registre du « bon état » chimique des ressources en eau.

Comme nos deux hommes siègent à l’identique, tant à l’Onema qu’au CNE, cette divergence d’analyse (FNE tout schuss sur la continuité écologique), n’est pas sans surprendre.

A moins, à moins, ce qui n’est guère à exclure, que la passion l’emportant sur la raison, cette passion, rageuse, n’aboutisse donc à cette issue fâcheuse qui voit l’ONG française de référence tâcler salement son homologue, certes d’essence anglo-saxonne (horresco referens), lors même que nos deux hérauts font à l’identique les yeux doux à Suez, ce qui en soi est déjà proprement ahurissant, et peut contribuer à expliquer cette obscure bataille de chiffonniers, qui éclaire hélas d’un jour cru la « gouvernance de l’eau » en France et les palinodies des représentants auto proclamés de la société civile qui nous en livrent là bien triste farce.

Marc Laimé - eauxglacees.com