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Protection des captages et ventes d’eau en gros : le camouflet du CGEDD aux élus

7 janvier 2013

par Marc Laimé - eauxglacees.com

L’oligarchie de l’eau n’en finit pas de mépriser les élus. Cette fois l’affaire est aussi exemplaire que caricaturale. Une sénatrice (UMP), du Sud Ouest avait saisi, relayant une inquiétude croissante des élus, Mme Nathalie Kozsiuzko-Morizet, alors ministre de l’Ecologie, du problème délicat de l’indemnisation que seraient fondées à réclamer des communes rurales dans lesquelles des agglomérations urbaines viennent puiser l’eau qui les alimente, soulevant au passage la question, brûlante, et donc jamais évoquée, et surtout pas au Parlement, des « ventes d’eau en gros », soit les ventes d’eau effectuées par une collectivité ou un syndicat au bénéfice d’une autre collectivité qui manque d’eau. La ministre avait demandé un rapport au CGEDD. Le résultat est aussi consternant que scandaleux. Toutes les questions qui fâchent ont bien évidemment été cachées sous le tapis, mais surtout la démarche, systématique, s’agissant de la DEB ou du CGEDD du ministère de l’Ecologie, témoigne d’un mépris insupportable de la représentation nationale.



Daté d’août 2012, notre rapport a été mis en ligne sur le site du ministère de l’Ecologie… le 31 décembre 2012, date éminemment propice à sa diffusion. Et, contrairement aux habitudes nul communiqué de presse ne l’aura annoncé.

On comprend pourquoi à sa lecture.

Rejetant en bloc les demandes des élus, relayées par la sénatrice UMP du Sud Ouest, les deux signataires du rapport, qui survolent de manière désinvolte la réglementation afférent à la protection des captages, et aux difficultés, déjà pointées en 2010 par le rapport du Conseil d’état « L’Eau et son droit », qui découlent de la superposition de deux dispositifs depuis l’adoption du plan de protection des aires de captage prioritaires, hérité du Grenelle de l’environnement, s’opposent fermement à toute législation qui déterminerait les éventuelles modalités d’indemnisation d’une collectivité qui voit une autre collectivité lui imposer des servitudes au motif qu’elle y protège un captage d’eau…

Les auteurs consentent toutefois, merci not’ bon maître, à préconiser, aux fins de réduire les tensions, qui vont croissant, entre grandes collectivités « prédatrices » et petites communes rurales « spoliées », selon leurs dires, l’adoption de « dispositions contractuelles », dont ils ne disent mot !

Mais il y a mieux. Les fermetures croissantes de captages multiplient, et ne vont cesser de multiplier, les « ventes d’eau en gros » (VEG), d’une collectivité qui possède de l’eau, à une autre qui n’en possède pas.

Ici tour de magie, l’affaire est enterrée en une page, il n’y a pas lieu de légiférer, circulez il n’y a rien à voir !

On comprend mieux en découvrant que les deux auteurs ont auditionné rien moins que trois représentants de la FP2E (Veolia, Suez et SAUR), sur la vingtaine de personnes auditées.

Veolia, Suez et SAUR « gèrent » en effet dans des conditions scandaleuses des centaines de contrats de vente d’eau en gros en France, en lieu et place des collectivités ou syndicats concernés.

Déjà une très abondante jurisprudence permet de prendre la mesure de ces excès, qui n’ont jamais été examinés par le Parlement.

Il y a pourtant urgence, et ce « Rapport » du CGEDD en témoigne jusqu’à la caricature, tant l’oligarchie de l’eau y exprime, à nouveau, sans fard le mépris dans lequel elle tient les élus.

Marc Laimé - eauxglacees.com