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Quand les seniors ne tournent pas le robinet d’eau, les services sociaux reçoivent un SMS…

15 juin 2007

par Marc Laimé - eauxglacees.com

On savait la France d’après attentive aux seniors. On ignorait qu’à Laval, dans la Mayenne, au coeur du fief de M. Fillon, vient de débuter une expérience unique en France. Les compteurs d’eau des personnes âgées commencent à y être équipés de capteurs qui expédient automatiquement des messages d’alerte quand le robinet ou la chasse d’eau n’ont pas été utilisés depuis cinq heures. Dans la France d’après l’assistance aux seniors va faire des pas de géant, c’est pas les soixante-huitards qu’auraient inventé çà…



Avouons-le, Eaux Glacées avait tout faux ! La France d’après sera formidable. Elle est formidable. Qe nous a-t-on bassinés avec le laboratoire picto-charentais de Sœur Sourire, le chabichou en veux-tu, en voilà, quelle horreur…

Hélas, hélas, nous n’avons pas été assez attentif au nouveau laboratoire des Pays de Loire, là où not’ bon maître M. Fillon a été réélu sans coup férir, et du premier coup, la semaine dernière. C’est un signe tout de même.

Et bien il ne faudrait pas que le jackpot de M. Fillon, triomphalement réélu à Sablé-sur-Sarthe, avec 25 949 voix, nous dissimulât plus longtemps l’admirable initiative que vient de prendre, toujours en Pays-de-Loire, dans le département voisin, en Mayenne, très exactement à Laval, l’incomparable François d’Aubert, tout aussi libéral bon teint, ancien ministre, que ses administrés ont eu la faiblesse de mettre en ballotage au premier tour, le 10 juin, ne lui accordant chichement que 23 080 voix, ce qui devrait tout de même, je vous rassure, lui assurer une élection de maréchal le 17 juin (*)Sinon c’est décidément que quelque chose ne va plus au royaume de France.

Voilà, à Laval, et gageons que l’initiative va très vite gagner la France entière (d’après), on a plongé dans les vagues furieuses de la mondialisation, on a observé les Japonais, et on fait mieux qu’eux. Beaucoup mieux ! Montjoie Saint-Denis. Un bémol toutefois, nous déplorons que Mme Boutin aît tardé, toutes affaires cessantes, à y organiser une procession. Comme le Puy-de-Fou n’est pas si loin, voyez l’admirable week-end.

Bien, j’entends déjà les murmures, cette fois Eaux Glacées disjoncte. Que nenni. Ami(e)s lecteurs (trices), si tel est votre sentiment j’ai bien peur que vous n’ayiez décidément rien compris à la mondialisation furieuse qui assaille nos villes et nos campagnes.

Ici me vient bien un vague scrupule, à mesurer la difficulté de l’évangélisation de la (pas encore) France d’après à la dialectique du battement d’aile de papillon, versus la bouilloire japonaise écrabouillée par les rillettes de la Sarthe et de la Mayenne… Patience, vous allez comprendre.

Il appert qu’à Tokyo en 1996 une dame de 77 ans et son fils handicapé sont découverts morts de faim par des voisins, une vingtaine de jours après leur décès. La vieille dame japonaise n’avait plus d’argent pour se nourrir et refusait le secours des services sociaux. Tout le Japon en est ému aux larmes. Un honorable (japonais) qui a en charge des personnes âgées demande au fabricant d’électroménager Zojirushi d’imaginer une solution permettant que pareil drame ne se renouvelle pas.

Et c’est ainsi qu’est né l’I-pot.

Kèzako ? I-pot pour « pot à information », soit une bouilloire en apparence (en apparence seulement) normale, sauf qu’à chaque utilisation elle envoie un message à un correspondant choisi au préalable, indiquant que la personne est en bonne santé, ou en tout cas, qu’elle utilise sa bouilloire…

Et oui, bien avant la diffusion planétaire de l’épouvantable cochonnerie de M. Steve Jobs, dont les adolescents ne peuvent se passer même pour faire la vaisselle, je sais de quoi je parle, nos amis japonais inventèrent donc l’I-pot !

L’appareil enregistre l’heure à partir de laquelle l’objet est utilisé, et un système de communication sans fil fait parvenir un signal à un serveur. Les abonnés à ce service peuvent ainsi recevoir directement, sur leur mail, un message indiquant que leur parent a utilisé son I-pot tout récemment.

Il est aussi possible de visualiser sur un site internet, www.mimamori.net, qui signifie « voir et protéger », l’ensemble des dernières manipulations de l’I-pot.

Le systême est opérationnel depuis cinq ans. Et si j’en crois les spécialistes du management opérationnel des seniors : « Il s’adapte parfaitement au style de vie japonais, puisque la forte consommation de thé et de soupes entraîne une utilisation des bouilloires plusieurs fois par jour. Sans même s’en apercevoir et d’une manière extrêmement simple, puisque la personne âgée n’a rien à faire d’autre que faire chauffer son eau, il est donc possible de veiller un proche à distance de manière non intrusive. Ce service est bien entendu payant, l’appareil est loué une quarantaine d’euros par mois, et le service mail et internet vingt euros environ. Actuellement plus de 2.000 familles l’utilisent de part le monde. En effet, si l’I-pot n’est accessible qu’au seul territoire japonais, rien n’empêche les familles d’être à l’autre bout du monde lorsqu’elles reçoivent leurs mails d’information. »

(Ainsi vous saurez désormais pourquoi des hordes de japonais(es) vous assaillent avenue de l’Opéra en quête d’un port Wiki).

Rappelons qu’au Japon, dans plus d’un tiers des foyers, un des membres a plus de 65 ans et que les dernières statistiques du ministère de la Santé estiment que 3.4 millions de personnes âgées vivent seules. La forte augmentation de la solitude chez les aînés entraîne fatalement une hausse des morts solitaires. Ainsi, dans la capitale, à Tokyo, le nombre de décès non prévisibles de seniors, à doublé durant les dix dernières années, pour atteindre en 2003 le chiffre de 2000 personnes, selon le Bureau de la surveillance médicale de la capitale nippone.

Laval et les Pays de Loire à la pointe de l’innovation

A ce stade j’ai un souci, impossible de vous dire à ce jour comment Messieurs Fillon, d’Aubert et toute la camarilla de la France d’après ont eu vent de la bouilloire qui envoie des mails.

Ennuyeux, bon je ne sais pas non plus sur quel circuit notre bon M. Fillon, qui adore les voitures de course, a embarqué au volant d’un bolide notre président, lui occasionnant la peur de sa vie. Comme je ne désespère aucunement de percer le mystère (du bolide), c’est vous dire que j’ai bon espoir d’éclaircir tous les tenants et aboutissants de la transmutation de l’I-pot dans le laboratoire de la France d’après.

Mais ce n’est pas là l’essentiel.

Ce qu’il importe de savoir c’est que depuis peu, à Laval, dans la doulce Mayenne, à Laval, qui va élire M. D’Aubert, la municipalité et le centre d’action sociale viennent d’inaugurer un dispositif d’assistance résolument novateur, peu invasif (qu’ils disent), et tenez-vous bien, unique en France à ce jour.

Dans l’optique de « favoriser le maintien à domicile des personnes âgées », la nouvelle « téléassistance », via le compteur d’eau, déclenche une alerte dès qu’une personne âgée cesse de consommer de l’eau dans son logement.

Le minimum d’honnêteté intellectuelle voudrait que l’on apprécie désormais à cette aune les projets de réforme de la santé, de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux (donc d’inévitables fermetures d’hôpitaux), ceci au regard de la fantastique libération des forces de créativité qu’incarne l’expérience lavalloise !

Ceci d’autant plus qu’à rebours des lamentos gauchistes qui reprochent à la France d’après d’assassiner les services publics, notez que notre admirable innovation est le fruit d’un rapprochement (de la ville) avec Edelia, une filiale d’EDF. Et toc !

Comment ça marche ?

Les utilisateurs âgés, ou handicapés, vont bénéficier d’une double protection.

D’une part, un médaillon - ou "bracelet d’alarme" - (non, je n’ai pas encore ouî-dire que Mme Dati s’en occupait), permet d’entrer en contact avec une centrale d’écoute, grâce à un interphone où que l’on soit dans le logement.

D’autre part, le suivi continu de la consommation d’eau à distance permet de déclencher une alerte dès qu’un locataire n’utilise plus l’eau du robinet ou des toilettes.

(Réfléchissez bien à toutes les implications de ceci).

Ensuite, comme l’explique la ville : « le nouveau système "Tranquil’assistance", doublement sécurisant, et d’utilisation très simple, est relié 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 à une équipe de professionnels de la santé. Ils prennent les décisions qui s’imposent selon l’état de santé décrit par le bénéficiaire ou en cas de non-réponse de sa part. Ils joignent un proche (dont les coordonnées ont été fournies par le bénéficiaire du système lors de la souscription), un médecin, ou les secours d’urgence si nécessaire. »

Evidemment il pourrait se produire ceci. qui flanquerait à bas tout le bastringue, j’en passe et des pires.

Mais notez que l’installation du dispositif au domicile des demandeurs ne nécessite qu’une seule intervention (rapide) des services techniques de la ville pour l’installation du matériel (pose d’un capteur sur le compteur individuel permettant le suivi de la consommation d’eau, et branchement des boîtiers de téléalarme, ainsi que de la passerelle Edelia).

Les boîtiers de mesure de la consommation d’eau sont équipés d’une batterie d’une durée de vie de 15 ans.

(Là je me perds en conjectures puisque Laval compterait près de 1500 seniors de plus de 75 ans, je veux bien que les jours s’allongent, m’enfin...)

Ce service expérimental est proposé aux Lavallois âgés ou handicapés sous la forme d’un abonnement mensuel de 20 euros. Autant dire que c’est donné.

Les frais d’installation sont pris en charge par la ville de Laval (encore heureux !) qui souligne que douze personnes ont, d’ores et déjà, adopté le système et s’en disent totalement satisfaites.

Enfin, un petit cocorico pour la ville puisqu’une partie du dispositif (le transmetteur) est fabriqué à Laval même par la société Cofidur

Cette admirable innovation des Pays-de-Loire fera école, n’en doutons pas.

Déjà, à Grenoble, le salon Innovadom présentait lui aussi l’an dernier ce genre de capteurs, installés dans les appartements, ou mieux encore reliés au réseau électrique, et qui permettent de mesurer les baisses d’activité ou la suractivité de façon très précise.

M. Jean-Pierre Pernaut a consacré un émouvant reportage de 2 minutes trente du journal de 13 heures du marchand d’instants de cerveaux disponibles, le mercredi 13 juin dernier à l’admirable innovation lavalloise.

Nous vivons une époque un peu inquiétante parfois.

Mais comme il se pourrait hélas que d’aucun(e)s ne soient pas absolument enthousiastes, je vous invite donc à prendre connaissance toutes affaires cessantes des perspectives vertigineuses qui s’offrent désormais à la France d’après, comme vient tout juste de me l’apprendre la Fondation internet pour une nouvelle génération (FING).

Car, en résonance avec ce qui précède, mesurez bien que désormais, il va falloir « Innover dans l’économie de marché des pauvres – Innover pour travailler plus pour gagner plus ».

Et pour de plus amples informations, tous et toutes au 1er Carrefour des possibles en région Pays-de-La- Loire , qui se tiendra le 10 septembre prochain à Nantes, où vous pourrez découvrir rien moins que 10 projets innovants : « innovations d’usage, de service, techniques ou organisationnelles, présentées par des entrepreneurs, des artistes, des chercheurs, des associations... Un seul critère : la technologie mise au service de la créativité et des nouveaux usages. Une règle : l’ouverture d’esprit, la volonté de découvrir. »

Bon, si après cela Eaux Glacées ne se voit pas proposer un Secrétariat d’Etat à l’innovation sociale aquatique, je rends mon tablier…

(*) M. François d’Aubert n’a pas été réélu dans la circonscriptions de Laval, à rebours de ce qu’annonçait la pochade ci-dessus, dont nous voulons croire (voir les messages ci-après) que tous les Lavallois ne l’auront pas confondue avec une "analyse électorale"...

Marc Laimé - eauxglacees.com