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Nicolas et Pimprenelle de l’Environnement

8 juin 2007

par Marc Laimé - eauxglacees.com

Dominique Guillet, animateur de l’association Kokopelli qui diffuse des semences de plus de mille variétés potagères dites anciennes, la plupart issues de sélections paysannes, permettant de semer à nouveau le grain récolté, fait face depuis plusieurs mois à des poursuites judiciaires, qui ont déjà valu à l’association une très forte amende. Avec d’autres associations, des petites entreprises et des milliers de bénévoles, ses adhérents contribuent pourtant à la sauvegarde de la biodiversité disparue des catalogues commerciaux des grands semenciers. La préparation du futur « Grenelle de l’Environnement » et les premières déclarations de la ministre de l’Agriculture, Mme Christine Lagarde, l’ont incité à écrire à Eaux Glacées. En annexe une pétition pour l’agriculture biologique, et un éclairage sur les menées obscures du lobby agro-alimentaire français.



« Suite aux dernières déclarations de la ministre de l’Agriculture, le Grenelle de l’Environnement nous apparaît de plus en plus comme une gigantesque mascarade (qui porte les masques ?) ou un pathétique théâtre de marionnettes (qui tire les ficelles ?) qui n’est pas sans nous rappeler un somnifère télévisé qui fut lancé quelques années avant mai 68 (et les accords de Grenelle) et qui faisait la joie des petits et grands enfants : Nicolas, Pimprenelle et Gros Nounours.

« Gros Nounours descend raconter de belles histoires aux enfants et remonte ensuite sur son nuage conduit par le marchand de sable qui lance une poignée de sable doré dans les yeux des enfants pour les endormir et s’éloigne en jouant au pipeau la musique de “Que ne suis-je la fougère” “Que ne puis-je par un songe, Tenir son coeur enchanté ! Que ne puis-je du mensonge, Passer à la vérité !”

"Qui sont le gros Nounours et le marchand de sable au pipeau ? Dormez, dormez, la petite France d’en-bas. Un peu de grenelle au sable doré et vous serez bientôt narcosé et dupé.

« Si l’on en croit le dernier communiqué de Mme Lagarde, ministre de l’Agriculture, nous sommes loin de passer du mensonge à la vérité ! Alors que l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) vient de déclarer, au début du mois de mai 2007, que l’Agriculture Biologique peut nourrir toute la planète sans impact négatif sur l’environnement, madame la Ministre nous ressert la grande farce de l’agriculture raisonnée comme étant l’agriculture écologique du futur.

« Non, Madame Lagarde, l’agriculture raisonnée n’est pas une agriculture durable respectueuse de l’environnement. L’agriculture raisonnée n’est qu’une des variantes de l’agriculture “irraisonnée” et toxique qui sévit depuis 60 années, qui a été mise en place et soutenue par tous les gouvernements (quelle que soit leur coloration politique), et qui a fait de la France une poubelle agricole génératrice de cancers. La seule agriculture durable est une agriculture sans pesticides, sans intrants de synthèse et sans chimères génétiques, et qui met en oeuvre des pratiques culturales issues tout autant des traditions paysannes que des recherches de l’agro-écologie.

« Non, Madame Lagarde, la croissance agricole et la durabilité ne sont pas conciliables. Les nappes phréatiques s’assèchent, les sols sont morts, les cours d’eau sont pollués, les pollinisateurs ont été éradiqués, l’atmosphère de la capitale est viciée par les pesticides et l’agriculture toxique est en partie responsable du réchauffement climatique puisqu’elle libère du CO2.

« Nous comprenons fort bien votre souhait “de restaurer le prestige des agriculteurs” car il a, en effet, beaucoup souffert de par les terribles dégâts provoqués par l’agriculture toxique depuis un demi-siècle. Nous comprenons beaucoup moins votre souhait pour l’agriculture “d’achever de se réconcilier avec la société”. Pensez-vous sincèrement qu’elle ait déjà commencé à se réconcilier ? Et qu’a-t-elle donc, d’ailleurs, à se faire pardonner ?

« L’Agriculture Biologique ne représente qu’à peine 2 % de la surface agricole tandis que l’agriculture toxique continue d’imposer ses chimères génétiques (refusées par le peuple Français) dont un maïs de Monsanto strictement interdit par les experts de sept pays Européens en raison du danger qu’il représente pour la santé humaine.

« Non, Madame Lagarde, vous ne pouvez pas parler de sécurité alimentaire alors que le scandale des pesticides est en train d’éclater au grand jour. L’agriculture toxique produit des aliments-poisons générateurs d’allergies, de cancers et autres maladies de dégénérescence.

« Nous dénonçons, tout d’abord, le scandale des nécro-carburants qui vont générer une insécurité alimentaire sur toute la planète tout en intensifiant les pollutions environnementales dues à l’agriculture productiviste.

« Nous dénonçons la campagne d’intoxication de l’association Farre qui, en partenariat avec le GNIS, et autres entreprises du secteur, vient d’adopter le slogan trompeur “Avec l’agriculture raisonnée, semons la biodiversité”. L’association Farre, avec moins de mille adhérents, dont une partie seulement sont des agriculteurs, doit représenter à peine 0,1% des agriculteurs Français ! Elle a été créée en 1993 par l’UIPP, l’Union des Industriels de la Protection des Plantes (en fait, les promoteurs de pesticides). L’agriculture raisonnée dissémine des pesticides et non de la biodiversité.

« Soit dit en passant, c’est Kokopelli qui sème de la biodiversité en France et c’est pour cela que nous sommes conviés devant les tribunaux de la République !

« L’association Farre n’est qu’une farce et façade de l’UIPP dont le directeur, Jean-Charles Bocquet, vient de déclarer dans un éditorial récent qu’il ne pouvait pas imaginer un monde sans pesticides. On se l’imagine bien puisque l’UIPP regroupe tous les grands noms de l’agro-chimie : Monsanto, Syngenta, Bayer, BASF, Du Pont de Nemours, Dow Agrosciences , Cheminova, etc. Selon M. Bocquet, grâce aux pesticides, le 20ème siècle a été un siècle sans famines. Vraiment ? 36 000 personnes qui meurent de faim tous les jours, cela finit par faire des centaines de millions de citoyens planétaires qui trépassent avant l’âge. M. Bocquet faisait-il sans doute référence à des famines “occidentales”.

« Si nous faisons le bilan de l’agriculture Française, nous avons 1,5 % d’agriculture biologique, 0,1% d’agriculture “raisonnée” et 98% d’agriculture “irraisonnée”. Et l’agriculture irraisonnée semble bien stable, quant à ses pratiques, puisque les derniers chiffres de ventes de pesticides dont nous disposons (pour l’année 2005) témoignent d’une augmentation d’environ 5%.

« Nous avons donc d’une part l’UIPP qui ne peut pas imaginer un monde sans pesticides et d’autre part la FAO qui affirme que l’agriculture biologique peut nourrir toute la planète sans détruire l’intégrité des écosystèmes. Qui croire ? Les vendeurs de poisons ou les experts agricoles des Nations Unies ?

« Il n’y a qu’une “rupture” écologique possible, c’est la promotion de l’Agriculture Biologique. Mais la vraie, pas celle que la Commission Européenne est en train de nous proposer sous la pression des lobbies avec des cahiers de charge qui seraient plutôt des cahiers de “décharge” : une pincée de pesticides par-ci, un peu de contamination génétique par-là, et une poignée d’intrants issus de cultures transgéniques...

« Quant au Grenelle de l’Environnement, s’il est à la hauteur des ambitions actuelles du ministère de l’Agriculture, en matière de protection de l’environnement et des citoyens, mieux vaut sans doute rester chez soi et cultiver son jardin. Il ne serait, d’ailleurs, pas étonnant de voir les multinationales de l’agro-chimie s’inviter à la table. Ne prétendent-elles pas travailler avec “les sciences de la vie” ? On peut déjà s’imaginer de beaux slogans durables “Pour lutter contre le réchauffement climatique, semez des chimères génétiques”.

« Et si nous proposions un contre-forum ? Nous pourrions l’appeler “Négrelle de l’Environnement” et nous pourrions y inviter tous les opprimés de la mondialisation : les esclaves des plantations de canne à sucre au Brésil qui font de l’éthanol pour les automobiles de France, les esclaves immigrés dans les serres de légumes du sud de l’Espagne, les paysans Colombiens pourchassés par les milices qui implantent des palmiers à huile pour le diesel végétal des voitures des nantis, les paysans Mexicains pour lesquels le prix de la tortilla a augmenté de 160 % suite au boom de l’éthanol aux USA, les paysans Indonésiens torturés auxquels on vole les terres et les forêts pour implanter des monocultures, les paysans Argentins chassés de leurs terres par la folie du soja pour engraisser les vaches des occidentaux, les paysans Africains ruinés par le dumping des cultures subventionnées par l’Europe, les paysans Paraguayens brûlés par le paraquat de Syngenta épandu par avion avant le semis direct de soja transgénique, les paysans Français atteints de la maladie de Parkinson suite à l’exposition aux pesticides, les paysans Indiens qui se suicident par dizaines de milliers ruinés par le coton transgénique de Monsanto, les paysans d’Amérique centrale qui meurent, dans les bananeraies, du Nemagon de Dow Agrosciences et les petits garçons Argentins de 10 ans qui courent avec des drapeaux rouges sous les avions qui épandent le RoundUp de Monsanto sur les champs de soja transgénique pour que le précieux glyphosate ne manque pas sa cible...

« Tout cela, non pas pour se complaire dans la douleur. Mais pour répéter et prouver que l’agriculture moderne occidentale tue et pour affirmer que demain, tout est possible.

Même un monde sans pesticides. »

Dominique Guillet. Le 7 juin 2007.

dominique@kokopelli.asso.fr

Annexe 1 : une pétition pour le maintien de l’agriculture biologique !

« La France doit soutenir une position ferme »

« Le 11 ou 12 juin prochain, le Conseil européen votera sur un nouveau règlement de l’agriculture biologique.

La position de la France est particulièrement importante pour maintenir une production biologique de qualité qui contribue directement à la préservation de l’environnement et des ressources naturelles.

Le nouveau règlement sur l’Agriculture Biologique en cours de négociation au sein de l’Union Européenne pourrait représenter un danger majeur pour l’agriculture biologique :

 Des dérogations permettant potentiellement d’utiliser des substances chimiques, dont certains pesticides de synthèse, et des intrants issus d’OGM y seraient prévues ;

 La pollution des produits bio par des OGM y serait tolérée jusqu’au seuil de 0,9%, comme pour les produits de l’agriculture conventionnelle.

 Le système d’étiquetage introduirait une nouvelle catégorie permettant de faire référence à la bio sur un produit majoritairement conventionnel, par exemple pour un yaourt contenant uniquement des fraises bio mais fabriqué avec du lait conventionnel.

 Le contrôle des « points à risque », en référence au système HACCP, se substituerait à l’actuelle obligation de moyens et contraindrait les producteurs à multiplier les analyses et l’achat d’intrants, de matières premières et autres matériels officiellement « sécurisés », pour un coût financier pénalisant en particulier les plus petits opérateurs, excluant les substances naturelles, les semences traditionnelles et les animaux de renouvellement bio non homologables dans le cadre juridique actuel, et favorisant ainsi les dérogations, voire les obligations d’utilisation de produits chimiques de synthèse.

 Le développement de cahiers des charges bio, notamment nationaux (comme celui qui régit le label AB), plus stricts et plus adaptés aux régions que le nouveau cahier des charges européen, n’y serait pas autorisé.
Une telle banalisation du cahier des charges de l’agriculture biologique la détournerait de sa nature, de ses spécificités et de ses enjeux.

Par conséquent, nous demandons à Madame Lagarde, Ministre de l’agriculture et de la pêche, de ne pas voter pour un règlement européen qui inclurait l’ensemble de ces conditions, ou seulement l’une d’entre elles.

Le Parlement européen, et notamment le rapport de Marie-Hélène Aubert sur la production et l’étiquetage des produits biologiques, adopté par une grande majorité des parlementaires européens le 22 mai 2007, préconise un encadrement strict des productions biologiques.

Nous demandons au gouvernement français de tenir compte de cet avis du Parlement européen et du souhait des consommateurs (de plus en plus nombreux à consommer des produits de l’agriculture biologique, à la fois pour leur santé et pour l’environnement), en refusant de voter pour de telles conditions. Il faut en particulier rejeter l’autorisation, même par dérogation exceptionnelle, des additifs et des traitements vétérinaires issus d’OGM ainsi que de certaines substances chimiques, notamment les pesticides.

Le vote de la France doit être cohérent avec le souci exprimé par le Président Nicolas Sarkozy pour la biodiversité et son souhait de reconsidérer notre rapport à la nature.

Nous soutenons la manifestation organisée par Nature & Progrès (Belgique, France, Espagne, Portugal) à Bruxelles* le 11 juin 2007 pour la défense de l’agriculture biologique et invitons tous les Français à manifester leur opinion auprès du gouvernement français en participant à la cyberaction organisée en partenariat avec Cyber@cteurs

* à 12h au Rond Point Schuman, face au Conseil de l’Union européenne

Action proposée par :

ACAP (Action citoyenne pour les alternatives aux pesticides) – Acecomed - Action Consommation – Adéquations - Agir pour l’environnement - Association 4D - Bio Consom’acteurs – Cheminements - Europe des consciences - Fédération Nature & Progrès - Greenpeace France – Kokopelli - L’Age de faire - Les Amis de la Terre - MDRGF (Mouvement pour les droits et le respect des générations futures) – Objectifbio - Planète Urgence - WWF France, en partenariat avec l’association Cyber@cteurs.

Contacts :

Action Consommation - Véronique Gallais : vgallais@actionconsommation.org 
Bio Consom’acteurs – Hugues Toussaint : h.toussaint@bioconsomacteurs.org
Fédération Nature et Progrès – Guy Kastler : guy.kastler@wanadoo.fr
MDRGF / ACAP – François Veillerette : mdrgf@wanadoo.fr

Annexe 2 : MOMA, le nouveau lobby pro-OGM , et la ministre de l’Agriculture…

Madame Christine Lagarde vient d’être investie de la fonction de ministre de l’Agriculture dans le gouvernement Fillon.

Connue pour sa brillante carrière dans les milieux d’affaires américains (Baker§Mc Kenzie), puis européens (ING Group), membre du CSIS (Center for Strategic§International Studies), un think tank, dans lequel elle défendait les intérêts US et a participé à la Commission pour l’élargissement de la communauté euro-atlantique, cette avocate à la Cour d’Appel de Paris était devenue ministre déléguée au Commerce extérieur le 2 Juin 2005.

Pour situer la ligne politique de Christine Lagarde, il suffit de la citer : « La lutte contre le chômage passe par la réforme du droit du travail », qui « constitue souvent un frein à l’embauche et à un certain nombre de décisions d’entreprendre » (4 juin 2005).

En ce qui concerne l’agriculture, lors du 6e sommet de l’OMC à Hong Kong, elle déclarait le 30 novembre 2005 dans son discours : « … nous pouvons compter sur la passion des paysans qui sont à l’origine d’initiatives audacieuses. Je pense notamment à l’initiative toute récente du Mouvement pour une Organisation Mondiale de l’Agriculture (MOMA), dont je me félicite. »

On a déjà pu apprécier les conséquences de l’offensive des lobbies agroalimentaires des USA à travers la création d’une instance internationale non élue et dotée d’un pouvoir exorbitant, l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Cet instrument de dérégulation a été mis en place essentiellement par les grandes firmes agroalimentaires états-uniennes à seule fin de conquérir des marchés et d’imposer partout leur production, au détriment des économies et des agricultures locales.

Des industriels français de l’agroalimentaire, échaudés par les cycles de négociations sans fin sans aucune concession des Etats-Unis, ont compris tout le parti qu’ils ne pourraient pas -comme ils l’avaient escompté- tirer de l’OMC.

En toute discrétion, ils ont donc créé le Mouvement pour une Organisation Mondiale de l’Agriculture (MOMA), déclaré officiellement le 8 décembre 2005.

Quel est donc ce lobby qui ne dit pas son nom et tente de s’imposer de façon totalement anti-démocratique comme interlocuteur privilégié sur les questions agricoles et environnementales ?

Initié et présidé par Pierre Pagesse, président du leader français des OGM, Limagrain (Biogemma, Meristem Therapeutics), le MOMA (initialement baptisé Nouvel Ordre Mondial de l’Agriculture...), rassemble la fine fleur de l’agroalimentaire français, à l’intar de Christian Pèes, Président d’EURALIS, Vice Président de Coop de France, Trésorier de l’AGPM ; Henri de Benoist, Président d’UNIGRAINS, Président de l’AGPB (l’Association Générale des Producteurs de Blé et autres céréales), Président d’INTERCEREALES, Président d’AGRICEREALES, Président de la Compagnie Financière du Nord-Est, Président d’UNIFIPAR, Président du Groupe Céréaliers de France, Président du Crédit Agricole du Nord-Est, Président d’honneur d’ARVALIS, Président de la section des problèmes économiques généraux et de la conjoncture du Conseil Economique et Social (CES), Premier Vice-Président de la FNSEA, Représentant du CES à la délégation française auprès de la FAO, Président de l’Association Pluriagri, Maire de Bouconville-Vauclair ; Bernard Delsuc, Président de la Fédération nationale de la production de semences de maïs et de sorgho (FNPSMS), membre du Comité Directeur de l’Unité Economique et Sociale Maiz’Europe, aux côtés de Christian Pèes (Euralis) ; Pierre Fabre, Président-directeur général des Laboratoires Pierre Fabre, entreprise nationale et multinationale implantée également aux USA, Luc Guyau, Président de l’Assemblée permanente des Chambres d’Agriculture (APCA), vice-président du Conseil économique et social (CES), Président de la Chambre d’Agriculture de la Vendée ; Bernard Layre, Président des Jeunes Agriculteurs de Juin 2004 à Juin 2006 (JA) ; Emmanuel Coste, Président-directeur général de Sica de Grillon, Ingénieur et membre du CA d’ISARA-Lyon (Institut supérieur d’agriculture et d’agroalimentaire Rhône-Alpes), représentant FNSEA/FNO (Fédération Nationale Ovine) ; Jacques Hubert, Directeur général de Coop de France ; Denis Manach, Président de Coopagri Bretagne, Président de la holding Socopa SA, également président adjoint de la Confédération des coopératives de l’Ouest (CCAOF) ; Gilbert Herpe, Président d’AGRIAL ; Pierre Mille, Président de NORIAP ; Michel Fosseprez, Président d’INVIVO, Président de 110 Bourgogne, Membre du Groupe de la Coopération, Vice-Président de la Section des Relations extérieures du Conseil Economique et Social.

René Carron, Président Directeur Général. du Crédit Agricole SA est également membre du MOMA, et dans la sphère politique on trouve : Pascal Chaigneau, Administrateur général du Centre d’études diplomatiques et stratégiques (CEDS) ; Jacques Carles, Associé gérant du cabinet Carles Rheims. (Le Groupe de prospective du Sénat a confié au cabinet Carles-Rheims la mission de concevoir et d’organiser ses différentes activités) ; Jean Bizet, Sénateur de la Manche, responsable de la mission parlementaire sur les OGM et co-auteur du RAPPORT D’INFORMATION 440 (97-98) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES, truffé d’inexactitudes et de partis pris en faveur de l’industrie biotech, et qui a servi de référence aux députés pour se forger une opinion sur l’utilisation des organismes génétiquement modifiés en agriculture ; François Leblond, Président de la Confédération française pour l’habitation, l’urbanisme, l’aménagement du territoire et l’environnement (CFHUAT), ancien Préfet de Région ; Georges Fenech, Député UMP du Rhône, (Monsieur « Tolérance Zéro ») ; Jacques Godfrain, Député maire UMP de Millau, ancien Ministre de la Coopération…

Une concentration de pouvoir des agro-industriels, alliée au tout puissant Crédit Agricole, à la FNSEA, aux Chambres d’agriculture, avec une entrée de plein pied dans le Conseil Economique et Social et le CEDS qui modèle les stratégies politiques, un cabinet de communication qui « gère » le Sénat, des députés UMP droite dure, et un pied dans l’aménagement du territoire : un lobby en bonne et due forme. Pour faire quoi ?

Promouvoir un « modèle agricole », celui tant prisé par Pierre Pagesse, qui insiste sur « la nécessité de promouvoir des ruptures techniques et soutenues, en particulier, l’utilisation judicieuse des plantes génétiquement modifiées. »

Le dernier communique du MOMA sur son site montre que sa pugnacité n’est pas à mettre en doute et qu’il progresse dangereusement.

Une délégation du MOMA, emmenée par Alain Catala (vice président du MOMA et de Limagrain) et Jacques Carles (délégué général) s’est rendue à Washington D.C. du 10 au 14 Avril 2007, afin de « prendre contact avec des think tanks, des responsables du monde agricole, des journalistes, des économistes et des « staffers » du Congrès, dans la perspective de tenir prochainement une conférence de presse présentant le MOMA à la communauté internationale. »

Un partenariat étroit Europe/USA se dessine : « Lors de nos entretiens, il est apparu que l’idée de cette coopération internationale pourrait reposer sur une association entre les Etats-Unis et l’Europe pour la promouvoir ».

Le MOMA affirme se situer « dans la perspective d’une régulation destinée à améliorer le fonctionnement des marchés plutôt qu’à les encadrer. Cette régulation doit être comprise comme une régulation économico - stratégique par le pouvoir de l’information, et non par la réglementation juridique ou la contrainte ». C’est-à-dire dans la perspective d’une économie néo-libérale et selon les procédés chers aux multinationales.

Les instigateurs du MOMA ont parfaitement bien compris comment on prend le pouvoir aujourd’hui : en maîtrisant la communication sur les sujets sur lesquels on désire que les politiques modifient la législation, en leur assénant des contre-vérités jusqu’à ce qu’ils y croient suffisamment pour faire ce que l’on attend d’eux. L’idée est donc de s’instituer comme interlocuteur unique sur les questions agricoles et de protection de l’environnement, afin de contrôler et orienter les messages qui devront circuler sur ces enjeux.

Une délégation, qui sera cette fois emmenée par Pierre Pagesse (président du MOMA), accompagné de plusieurs fondateurs, se rendra à nouveau à Washington D.C. du 21 au 28 Juin 2007.

La conférence de presse du MOMA devrait se tenir au Carnegie Endowment for International Peace le 25 Juin après midi, et des partenariats avec certains think tanks devraient être noués à l’occasion de ce second voyage.

Plusieurs économistes américains de grand renom sont susceptibles de devenir des correspondants du MOMA. Enfin, des entretiens sont prévus avec des élus qui, au Congrès, occupent des fonctions de responsables en matière de Commerce International et d’Agriculture. »

Si cet espace institutionnel est laissé au MOMA sans contestation immédiate de sa légitimité, la voix des syndicats, organisations et institutions agricoles européennes qui défendent une autre conception de l’agriculture risque fort d’être étouffée comme furent étouffées les conceptions de l’échange et du commerce autres que celles promues par l’OMC.

Par ailleurs, les liens ténus qui unissent la nouvelle ministre de l’Agriculture avec les intérêts US, sa déclaration de soutien au MOMA, laissent présager d’une politique très favorable aux OGM. La meilleure défense étant l’attaque, il semble nécessaire de préparer la contre-offensive au plus vite.

Marc Laimé - eauxglacees.com