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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
REMOUS
Vers un nouveau délai de prescription de la facture d’eau ?
par Marc Laimé, 4 août 2019

Un récent arrêt de la Cour de Cassation, en date du 4 juillet 2019, relatif au délai de prescription s’appliquant à la Redevance d’enlèvement des ordures ménagères (REOM), a fixé ce délai de prescription à quatre ans. Cette jurisprudence va-t-elle, ou non, valoir également pour la facture d’eau ?

Sur la base d’une réponse ministérielle à un parlementaire, en date du 26 mai 2016, nous avions établi ici même que s’agissant d’une facture d’eau le délai de prescription s’établissait à deux ans :

http://www.eauxglacees.com/spip.php?page=imprimer&id_article=1759

(Ce billet est depuis lors l’un des plus consulté d’Eaux Glacées - plus de 42000 lectures en trois ans -, témoignant qu’en dépit des innombrables simagrées autour de la loi Brottes, du « Droit à l’eau » et autres « interdictions des coupures », d’innombrables usagers en difficulté sont toujours en butte à des contentieux qui n’ont cessé de s’aggraver, avec des recours systématiques à des officines de recouvrement aux méthodes scandaleuses, depuis qu’une cohorte de crétins et d’escrocs patentés nous bassinent avec le so call "Droit à l’eau", qui n’a jamais existé et n’existera jamais).

Nonobstant, la récente décision de la Cour de cassation relative aux services d’enlèvement des ordures ménagères financés par la REOM (redevance d’enlèvement des ordures ménagères) ne va pas manquer de relancer, par similitude des formes, la question du délai de prescription d’une facture d’eau, puisqu’il s’agit dans les deux cas de figure, de factures émises par un Service public industriel et commercial (SPIC) créé par une collectivité locale.

S’agissant de la REOM, certains usagers, plus ou moins de bonne foi, tentaient régulièrement de rejeter les paiements de factures impayées au nom de la prescription de deux ans. Prévue par l’article L. 137-2, devenu L. 218-2 du code de la consommation.

Il stipule en effet que l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.

Sauf que ladite prescription est applicable uniquement à l’action des professionnels pour les biens et services qu’ils fournissent contractuellement aux consommateurs (1re Civ., 9 juin 2017, pourvoi n° 16-21.247, Bull. 2017, I, n° 140).

Est-ce bien le cas en matière de déchets ménagers financés en REOM, qui sont, donc, à ce titre, des services publics industriels et commerciaux ?
Sources sur ce dernier point : CE, 10 avril 1992, SARL Hofmiller, req. n°132539 ; CAA Bordeaux, 6 mai 1993, Cne de Corneilla de Conflent, req. n° 92BX00214 ; CE, 28 juin 1996, SARL d’exploitation des Ets Bailly, n° 141561 ; CE, 8 janvier 1997, Sté Verrerie-Cristallerie d’Arques req. n°151795 ; Tribunal des conflits, 7 octobre 1996, Mme Breton c/ Commune de Gennes, n° 2976

La Cour de cassation vient de répondre non, arguant que :

 « l’usager, bénéficiaire du service public de l’enlèvement des ordures ménagères, n’est pas lié à ce service par un contrat »

 « de sorte que le délai dont dispose une collectivité publique pour émettre un titre exécutoire, aux fins d’obtenir paiement de la redevance qu’elle a instituée, n’est pas soumis aux dispositions dérogatoires prévues à l’article L. 137-2, devenu L. 218-2 du code de la consommation »

Renvoyant dès lors aux autres prescriptions applicables, et par défaut à la prescription quadriennale (4 ans), voir en ce sens Cour de cassation, Chambre civile 2, 25 Mars 2010 - n° 09-10.122.

Au cas d’espèce de la facture d’eau va dès lors se reposer la question de savoir si l’usager du service est lié par un contrat, ce qui promet de nouveaux contentieux, eu égard, notamment, d’une part à la disparition de feue la « facture contrat », et d’autre part à la loi Hamon…

A suivre.

L’arrêt :

Arrêt n°751 du 4 juillet 2019 (19-13.494) - Cour de cassation - Première chambre civile
- ECLI:FR:CCASS:2019:C100751

Cassation partielle

Demandeur(s) : communauté de communes Arc Sud Bretagne

Défendeur(s) : Mme A... X...

Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable comme étant de pur droit :

Vu l’article L. 137-2, devenu L. 218-2 du code de la consommation, ensemble l’article L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales ;
Attendu qu’aux termes du premier de ces textes, l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; qu’une telle prescription est applicable uniquement à l’action des professionnels pour les biens et services qu’ils fournissent contractuellement aux consommateurs (1re Civ., 9 juin 2017, pourvoi n° 16-21.247, Bull. 2017, I, n° 140) ; Que, selon le second, les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes qui bénéficient de la compétence prévue à l’article L. 2224-13 peuvent instituer une redevance d’enlèvement des ordures ménagères calculée en fonction du service rendu dès lors qu’ils assurent au moins la collecte des déchets des ménages ;

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que, suivant délibération du 8 octobre 2013, la communauté de communes Arc Sud Bretagne (la communauté de communes) a institué, à compter du 1er janvier 2014, une redevance d’enlèvement des ordures ménagères, dont le tarif a été fixé par une délibération du 17 décembre 2013 ; que, par jugement du 9 septembre 2015, la juridiction de proximité de Vannes a annulé le titre de perception émis à l’encontre de Mme X... pour l’exercice 2014 ; que, par arrêt du 6 octobre 2017, devenu définitif, la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté la requête, présentée par plusieurs usagers, tendant à l’annulation de la délibération du 17 décembre 2013 ; que la communauté de communes a établi, le 26 février 2018, une nouvelle facture correspondant à la redevance d’enlèvement des ordures ménagères due pour l’exercice 2014, puis a émis, le 8 mars suivant, aux fins de recouvrement de cette facture, un titre exécutoire à l’encontre de Mme X... ; que celle-ci a saisi le tribunal d’instance pour en voir prononcer l’annulation ;

Attendu que, pour accueillir sa demande, après avoir énoncé que, lorsqu’elle assure l’enlèvement des ordures ménagères, la communauté de communes exerce une activité industrielle et commerciale, dont le service est facturé à l’usager proportionnellement à son usage, le jugement retient que celle-ci doit être regardée comme un professionnel qui s’adresse à des consommateurs et que, dès lors, son action en paiement est soumise au délai biennal de prescription prévu à l’article L. 218-2 du code de la consommation ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’usager, bénéficiaire du service public de l’enlèvement des ordures ménagères, n’est pas lié à ce service par un contrat, de sorte que le délai dont dispose une collectivité publique pour émettre un titre exécutoire, aux fins d’obtenir paiement de la redevance qu’elle a instituée, n’est pas soumis aux dispositions dérogatoires prévues à l’article L. 137-2, devenu L. 218-2 du code de la consommation, le tribunal d’instance a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il rejette la fin de non-recevoir tirée de l’absence de recours préalable à la conciliation, le jugement rendu le 13 février 2019, entre les parties, par le tribunal d’instance de Vannes ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d’instance de Vannes, autrement composé ;

Président : Mme Batut
Rapporteur : Mme Canas, conseiller référendaire
Avocat général : M. Chaumont
Avocat : SCP Didier et Pinet - SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

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