La performance scientifique et les retombées économiques attendues de l’avènement du Poichon sont si impressionnantes que l’entourage présidentiel n’hésite pas à laisser filtrer que l’exécutif en attend un « choc de confiance », dont on espère qu’il se traduira immédiatement par une révision de la cotation française par les agences de notation.

L’événement est en effet considérable. Face à la catastrophe environnementale que représente la présence en Bretagne de 18 millions de porcs, et au phénomène dévastateur des algues vertes, un programme de recherche ultra secret a été conduit depuis cinq ans en France.

Il a mobilisé 43 milliards d’euros, gagés sur la réforme à venir des retraites, et a consisté à effectuer une véritable rupture épistémologique dans l’approche de la question agricole et écologique.

Grâce à un effort sans précédent depuis la conquête de la Lune, les chercheurs français, à qui M. Arnaud Montebourg va remettre l’Ordre du mérite dans la Cour des Invalides le week-end prochain, ont réussi l’impossible : cloner un cochon et un poisson !

Et donner naissance au Poichon !

Le ministre de l’Agriculture, dans une conférence retransmise en direct par CNN, a dévoilé la stratégie de reconquête de la qualité des eaux, et le grand bond en avant de l’agriculture française qu’allait permettre le Poichon :

« Progressivement, la population de 18 millions de porcins présents en Bretagne vont disparaître, grâce à l’accord conclu au plus haut niveau avec le gouvernement chinois, qui s’est engagé, grâce à un prêt du fonds d’état souverain Qatari, à acquérir le cheptel porcin breton.

Les facultés exceptionnelles du Poichon, grâce à un extraordinaire travail conduit par les équipes de pointe du CNRS et de l’INRA, vont lui permettre de synthétiser les nitrates présents dans les eaux bretonnes et de les transformer en protéines animales de première qualité.

Les porcheries vont donc être transformées en gigantesques fermes aquacoles, qui vont faire l’objet d’un contrat de partenariat public privé, dont l’appel d’offres a été remporté par un consortium constitué par Suez Lyonnaise des eaux et Terrena.

Le suivi des indicateurs protéiques du Poichon a été confié à l’Onema, qui a élaboré en moins de trois jours une base de données dont le suivi, agrémenté d’éléments de géolocalisation, a été confié par décret à l’IGN. (Grâce au rachat d’urgence par le biais d’un marché de gré à gré, autorisé à titre dérogatoire par sa nouvelle direction générale, d’un Atari 64 au Marché aux puces de Saint-Ouen - Note Eaux glacées).

Le Président de la République a obtenu qu’une réunion exceptionnelle du Conseil européen soit organisée la semaine prochaine afin que la révolution du Poichon figure au cœur de la réforme de la PAC. »

Il nous est impossible, compte tenu de l’ampleur planétaire de l’événement, de rendre compte de la multitude de réactions suscitées cette annonce.

Mais nous avons reçu un tweet enthousiaste de Mme Duflot, ministresse du Logement :

« Trop cool, Poichon à tous les menus au Ministère ! »

M. Le Drian, ancien président de la Région Bretagne, a fait savoir, dans un sobre communiqué, que les qualités nutritives exceptionnelles du Poichon le destinaient tout particulièrement à l’alimentation des troupes françaises actuellement déployées en Afrique de l’Ouest.

Tout en saluant les performances exceptionnelles de la filière agro-alimentaire française qui s’illustre par un progrès sans précédent, le président de la FNSEA a exigé que le gouvernement mette en place un plan d’accompagnement exceptionnel de la filière porcine qui va devoir fournir des efforts sans précédent pour accompagner cette mutation historique.

Le nouveau directeur de l’eau, M. Laurent Roy, a déclaré au JDLE que l’avènement du Poichon allait entraîner une remise à jour complète du Xème Programme d’intervention des agences de l’eau.

FNE a par ailleurs exigé qu’un plan exceptionnel de renforcement de la continuité écologique soit mis à l’ordre du jour de CA exceptionnels des Agences de l’eau, afin de garantir qu’aucun obstacle ou moulin ne s’oppose à la remontée victorieuse du Poichon au cœur de nos territoires.

L’UIPP, dans un communiqué aux accents catastrophiques a exigé un rendez-vous immédiat auprès du ministre du redressement productif afin que soit immédiatement déployé un plan de sauvegarde du secteur de l’industrie phyto-sanitaire, dont il est rappelé que la CA annuel dépasse celui du montant des redevances des Agences de l’eau.

Mme Frigide Bargeot et l’Institut Civitas ont vivement interpellé Mme Taubira et annoncé qu’ils saisiraient le Conseil constitutionnel si le gouvernement s’avisait d’autoriser l’adoption de Poichon, dans la suite de la loi sur le mariage pour tous.

Les Chiennes de garde ont interpellé M. Moscovici et Mme Najat Vallaud Belkacem en exigeant que lors de la demande d’AOC qui va être effectuée par le ministère de l’Agriculture, Poichonne et Poichon soient placés sur un pied d’égalité.

M. François Copé, président de l’UMP a dénoncé la scandaleuse opération de récupération du gouvernement socialo-communiste, s’arrogeant le bénéfice d’un projet lancé dans le plus grand secret par le gouvernement de Nicolas Sarkozy.

Les avocats de M. Dominique Strauss Kahn ont fait savoir qu’ils engageraient immédiatement des poursuites si le nom de leur client venait à être cité dans cette affaire, dont l’ancien président du FMI a par ailleurs salué dans un communiqué toute l’importance qu’elle revêtait pour l’économie française.

Au terme d’intenses tractations téléphoniques qui se sont poursuivies jusqu’à la moitié de l’après-midi, et qui associaient des représentant de Veolia, Suez, la FPEE, le Cercle Français de l’eau, l’APCA et la FNSEA, l’ASTEE, le PFE, la Fenarive, l’Académie de l’eau, l’Agence de l’eau Seine Normandie, l’Onema et le Medef, le Comité national de l’eau a annoncé par un communiqué adressé à l’AFP à 15h00, après s’être auto-saisi, la constitution d’un Groupe d’évaluation de l’impact du Poichon sur le 10ème Programme des Agences de l’eau.

Ce comité piloté par Messieurs Oudin et Lécussan (président de “l’association” FENARIVE, membre du Cercle Français de l’Eau, vice président de l’ONEMA, vice président du Comité National de l’Eau, président du comité des usagers du SIE, président de la commission environnement du MEDEF d’Ile de France, vice président du Comité de Bassin de l’agence de l’eau Seine Normandie), recevra, comme l’a confirmé la DEB, le soutien de 15 haut fonctionnaires du CGDD qui vont élaborer les contours d’une TGA-Poichon qui sera prélevée sur la facture d’eau des usagers, et permettra de compenser le manque à gagner du secteur de l’agro-alimentaire, durement impacté par la révolution du Poichon.

Le groupe d’évaluation se réunira tous les jours de 11h45 à 12h15 à la cantine du Sénat pendant toute la durée des vacances scolaires.

Seul véritable bémol, dans une note de blog de 47 feuillets et demi, intitulée « Du reniement social-démocrate analysé sous l’angle de l’assomption de la bidoche industrielle », notre ami Fabrice Nicolino remet en perspective, en remontant à Godefroy de Bouillon, l’archéologie de ce qu’il dénonce comme un « fatal Bad Godesberg viandard » qui va précipiter l’humanité dans la géhenne. Note fulgurante que nous prenons sur nous de transmettre au comité d’évaluation du CNE, évoqué ci-dessus, qui va tenir sa première réunion plénière à la cantine du Sénat, demain à 11h45.

A suivre…

Note à l’attention des lecteurs d’Eaux glacées : nous avons reçu dans la nuit l’ultime bulle papale signée par Benoît XVI (en latin), nous autorisant exceptionnellement, à substituer le 1er mars au 1er avril.

NOTE 2 :

Hélas, hélas, la dure réalité nous rattrapait au lendemain de notre uchronie…

Lire aussi :

Algues vertes : vers la reconnaissance juridique de la responsabilité de l’état ?

La Gazette des communes, 5 avril 2013