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LES EAUX GLACÉES DU CALCUL ÉGOÏSTE
VAGUES
L’eau, l’agriculture bio, et l’élection présidentielle
par Marc Laimé, 3 janvier 2012

A l’occasion d’un colloque « Osons la bio », organisé à la bibliothèque François Mitterrand à Paris le 24 novembre 2012 par la Fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab), on pouvait percevoir comment de nouvelles problématiques et de nouveaux acteurs renouvellent les questions de l’eau et des pratiques agricoles, comme en témoignait par ailleurs la présence en fin d’après-midi, devant une salle comble, de représentants de 5 candidats à la présidentielle, qui exprimaient les positions de leurs partis respectifs sur l’ensemble de ces questions.

Le colloque, auquel assistaient plus de 500 personnes venues de toute la France, en majorité jeunes, signe qui ne trompe pas quant à la réalité politique et sociale d’un véritable phénomène de société, avait d’abord mis l’accent sur plusieurs projets d’agriculture biologique dans des aires d’alimentation de captage (AAC).

En Poitou-Charentes, l’une des initiatives présentées s’inscrivait dans le dispositif régional Re-Sources, qui vise à protéger 7 captages alimentant plus de 100 000 habitants dans les plaines et vallées de Niort.

Il s’agit d’un programme spécifique « eau et bio » et d’un projet de Mesures agro-environnementales territorialisées (MAET), ayant pour objectif de faire progresser la surface agricole utile de la bio de 1 à 7% en trois ans sur ce territoire.

Un contrat passé entre l’Etat et les agriculteurs permet le versement d’aides, notamment si les intrants azotés et les herbicides sont limités, si une conversion bio est engagée, et s’il y a une remise en herbe…

Au-delà de ces mesures, un partenariat avec la ville de Niort a permis d’offrir des débouchés viables à l’alimentation bio. Un marché annuel d’un montant de 900 000 euros permet ainsi à la ville de servir de la bio dans toutes les cantines scolaires. Et la collectivité étudie plusieurs formules pour financer la structuration logistique des filières bio sur le territoire, principal frein actuel à leur développement.

Alors que la France fait l’objet de deux contentieux européens pour mauvaise application de la directive Nitrates, la question de la pollution des eaux en France, plus que jamais d’actualité, renvoie directement aux pratiques agricoles puisque, comme le rappelait le chercheur du CNRS Gilles Billen, responsable notamment du programme PIREN-Seine de 1997 à 2007, « ce sont les apports agricoles qui sont les premiers à polluer les nappes souterraines et de surface ».

Dans la région Poitou-Charentes, cette tendance s’est traduite par la fermeture de 150 points de captage d’eau potable au cours des 10 dernières années à cause des nitrates et des herbicides, selon le bilan tiré par Benoît Biteau, vice-président de la région et administrateur de l’Agence de l’eau Adour-Garonne. « Il est urgent d’identifier les pratiques agricoles vertueuses. Comment va-t-on nourrir 9 milliards de personnes en 2050 si on efface la capacité de la terre à produire des aliments ? » demandait-il.

L’Association des régions de France (ARF) planche également sur le sujet. « Des budgets faramineux sont consacrés à la dépollution alors que le service public de l’eau n’est pas toujours de qualité. On réfléchit actuellement à une rémunération des bonnes pratiques pour une véritable prise de conscience des agriculteurs », soulignait Lionel Roucan, représentant de l’ARF et vice-président du conseil régional d’Auvergne. Ajoutant qu’une législation nationale permettrait de définir les rôles et les objectifs de chacun.

France Nature Environnement (FNE) demandait pour sa part une réforme de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques (Lema) du 30 décembre 2006.

« Non seulement, il faut inscrire et financer le développement de l’agriculture bio dans les zones de captage, mais il faut aussi faire évoluer la notion de représentation dans les comités de bassin », déclarait Bernard Rousseau, pilote du pôle Ressources en eau de FNE. Selon lui, les associatifs (environnementalistes, industriels et agriculteurs) n’ont qu’une parole limitée car ils sont noyés dans un collège « usagers », dominé par les socio-professionnels (industrie, agriculture, énergie…).

Si l’agriculture biologique fait baisser les teneurs en produits phytosanitaires et en nitrates présents dans les eaux, les expérimentations actuelles se déploient toutefois sur le seul mode du volontariat...

Le ministère de l’écologie affirmait pour sa part qu’il s’agissait d’un chantier prioritaire. Pour l’heure, la loi Grenelle I prévoit, à l’horizon 2012, la protection de l’aire d’alimentation de 500 captages les plus menacés par les pollutions diffuses. « Bien sûr, ce n’est pas suffisant mais on va déjà avoir du mal à tenir cet objectif », reconnaissait Mme Claire Grisez, de la Direction de l’eau au ministère.

Agriculture biologique et qualité de l’eau, un enjeu d’intérêt général, FNAB, 8 décembre 2011

L’enjeu de l’élection présidentielle

Etonnament non annoncé dans le programme officiel diffusé avant le colloque, la bio allait ensuite… battre campagne, dans la perspective de la prochaine élection présidentielle de mai 2012.

Les représentants de 5 candidats ou futurs candidats (*) débattaient en effet ensemble, et répondaient aux premières propositions de la FNAB, Terre de Liens et Bio Consom’acteurs, présentées dans un cahier de 20 mesures.

« Nous demandons aux candidats à l’élection présidentielle de 2012 de s’engager à soutenir avec force le développement de la bio par des mesures financières, fiscales et d’accompagnements techniques.

Alors que le Grenelle de l’environnement a clairement fixé un objectif de 6% de la surface agricole utile (SAU) en bio pour 2012, et 20% en 2020, la FNAB déplorait que ces objectifs ne soient pas atteints.
Seules 3% des terres agricoles sont en effet actuellement exploitées en bio. Si le développement de l’agriculture est bien réel, il reste éloigné des conversions nécessaires pour atteindre ces 20%, réaffirmait la FNAB.

Cet objectif faisait manifestement l’objet d’un "consensus républicain" entre les représentants des différents candidats, mais le débat n’en faisait pas moins apparaître de fortes divergences sur les moyens d’atteindre cet objectif : politique agricole commune, foncier, fiscalité, gouvernance agricole...

Antoine Herth, secrétaire national de l’agriculture à l’UMP, considèrait ainsi que les 6% doivent rester un objectif pour 2012, mais admettait que « si l’agriculture bio est l’une des orientations générales du Grenelle, on peine dans sa mise en œuvre ».

De son côté Pascal Durand, porte-parole d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) estimait que seule la volonté politique permettra d’appliquer le Grenelle de l’environnement.

Invités à s’exprimer sur l’importance du thème dans le programme électoral de leur parti, les intervenants s’accordaient sur le constat. « Le bio est important au sein de l’agriculture », affirmait Marc Fesneau, responsable de l’agriculture au sein du Modem. Pour le maire de Marnechoir (Loir-et-Cher), « il faut aller plus loin que les 20% et pour cela l’agriculture biologique a besoin d’être soutenue, elle a besoin d’un dispositif national d’accompagnement ». Mais le secrétaire général du Mouvement démocrate regrettait par ailleurs que le secteur bio ne communique pas assez sur ses avancées en matière de R&D, et sur le fait qu’il s’agisse « d’une agriculture de haute technologie ». Par ailleurs ce secteur possède les plus fortes potentialités d’installation des jeunes. « Les outils d’installation doivent donc être allégés », soulignait-il.

Si Laurent Levard, chargé des questions agricoles auprès de Jean-Luc Mélenchon, se « retrouvait dans l’essentiel des propositions faites par la FNAB », il considérait cependant que l’agriculture bio s’en sort parce que c’est une niche. Selon le représentant du Front de gauche, il ne faut pas écarter la question des prix et du revenu des paysans. Il prônait ainsi un strict encadrement des marges de la grande distribution, une relocalisation de la production et la révision du Code des marchés publics, avec obligation (pour les collectivités) de faire appel à des produits locaux.

Le problème du foncier était également débattu. Beaucoup d’agriculteurs disparaissent et leurs terres sont rachetées par les grosses exploitations existantes. Les fermes sont donc de plus en plus grandes, et les agriculteurs de moins en moins nombreux. Stéphane Le Foll, chargé de l’organisation de la campagne de François Hollande, abordait le problème de la reconversion, et Marc Fesneau insistait sur les manquements des Safer (en charge du foncier agricole) en matière de reconversion. « Elles n’agissent qu’en tant que marchands de bien. Il faut insuffler un projet politique pour favoriser l’installation en bio. »

Pascal Durand estimait lui aussi que la reprise du foncier est essentielle. « Il faut aider les jeunes et les agriculteurs bio, arrêter d’aider toujours les mêmes. » La réforme du statut des Safer s’avère nécessaire, selon lui.

Stéphane Le Foll soulignait ensuite l’importance de la réforme de la PAC (politique agricole commune) prévue pour 2014. Surtout, « si les aides baissent, elles baisseront pour tout le monde ».

Tous les représentants des candidats défendaient une réforme du Code des marchés publics et l’introduction d’une obligation de faire appel à des produits relocalisés.

Unanimes, ils proposaient la mise en place d’un circuit court pour le bio. « Nous allons devoir créer et développer de nouveaux circuits et assurer la reconversion », soutenait Stéphane Le Foll.

En matière de gouvernance agricole, Pascal Durand, estimait qu’« il faut changer la représentativité, changer le rapport à l’expertise ».

Pour le président de la Fnab, le constat était clair : « Aujourd’hui et depuis 50 ans, tout est verrouillé par une poignée de gens. Ce sont deux générations de paysans qui font fonctionner un système tel qu’il leur convient ».

Dominique Marion estimait en conclusion que, dans ce débat, les porte-parole des candidats n’étaient pas encore "à la hauteur" des attentes des paysans bio et des consommateurs par rapport aux enjeux d’intérêt général portés par l’agriculture biologique (environnement, santé, territoire, alimentation etc.).

Avant de rebondir en proposant un « compagnonnage » dans la rédaction de mesures favorisant l’agriculture bio, en appelant les candidats à rediscuter en mars 2012, juste avant l’échéance présidentielle.

Avant cela, fin janvier, il sera à nouveau question d’environnement et de présidentielle lors du grand colloque qu’organise FNE, ensuite ce sera le Salon de l’Agriculture…

L’agriculture, le bio, et l’eau, seront donc bien au menu de la présidentielle. A suivre.

(*) Antoine Herth, secrétaire national à l’agriculture de l’UMP. Stéphane Le Foll, organisateur de la campagne de François Hollande (PS). Marc Fesneau, représentant de François Bayrou (Modem). Laurent Levard, représentant de Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche), et Pascal Durand, représentant d’Eva Joly (EELV).

Voir sur le site internet de la FNAB les vidéos des principales interventions.

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commentaires

1 L’eau, l’agriculture bio, et l’élection présidentielle

Je ne sais plus qui a dit "L’environnement, ça commence à bien faire...!"... mais alors vraiment plus...

poste par Luigi34 - 2012-01-3@14:53 - repondre message
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